C’est avec joie que nous apprenons que l’écrivain péruvien Mario Vargas Llosa vient d’obtenir le Prix Nobel de littérature. Ce prix lui est attribué « pour sa cartographie des structures du pouvoir et ses images aiguisées de la résistance de l’individu, de sa révolte et de son échec« , précise l’Académie.
Ouvertement libéral, né à Arequipa le 28 mars 1936, Vargas Llosa est une des figures de proue de la littérature sud-américaine. Déjà lauréat, entre autres récompenses, du prix Cervantès, la plus importante distinction littéraire en espagnol, il est l’auteur d’une trentaine de livres (essais, romans, nouvelles, théâtre) traduits dans le monde entier.
Issu d’une famille de la classe moyenne, il passe une partie de son enfance en Bolivie avant de retourner au Pérou et d’entrer à 14 ans dans une académie militaire de Lima. Cette expérience au Colegio Militar Leoncio Prado lui fournira plus tard l’inspiration de La ciudad y los perros.
En 1953, il entre à l’Université Nationale San Marcos où il étudie la littérature. Pendant ses études, il travaille comme journaliste et s’engage au parti communiste. Grâce à une bourse, il a la possibilité de partir étudier à l’Université Complutense de Madrid. Il y obtiendra un doctorat en 1959.
À la suite de la révolution cubaine, il s’éloigne de la gauche et s’affirme comme libéral. Son œuvre romanesque est traversée par le combat de l’individu pour recouvrer sa liberté et se débarrasser de l’oppression. Sa vie privée aussi. Alors qu’il vit en Europe, il dénonce la dictature populiste et militaire qui prend le contrôle du Pérou en 1968. En 1980, après 12 ans de dictature, le président nouvellement élu Frenando Belaunde Terry propose à Vargas Llosa de revenir à Lima pour devenir premier ministre. Il refuse, mais retourne dans son pays de plus en plus fréquemment, et s’intéresse à la politique à un tel point qu’il se lance dans l’arène suite à la nationalisation de plusieurs banques privées péruviennes en 1987. Il fonde le mouvement de droite démocratique et en est le candidat aux élections présidentielles de 1990. Il arrive en tête au premier tour, mais se fait battre par Alberto Fujimori au deuxième.
Admirateur de Margaret Thatcher et de Ronald Reagan, ami de José Maria Aznar, libre-échangiste dans l’âme, Mario Vargas Llosa s’est vu attribué le Irving Kristol Award 2005 par le think tank conservateur American Enterprise Institute. À cette occasion, il prononce un discours remarqué intitulé Confessions d’un libéral.
Son prochain ouvrage, El Sueno del celta [Le rêve du Celte], doit paraître début novembre dans le monde hispanophone. Il y évoque la personnalité de Roger Casement (1864-1916), nationaliste irlandais qui fit la guerre aux côtés des Allemands en 14-18 et qui critiqua le système colonial en Afrique et au Pérou.
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Citations
- « Ni Kafka, ni Joyce, ni Proust n’ont eu besoin de l’appui de l’État pour écrire ce qu’ils ont écrit, ni l’Å“uvre d’un Wajda, d’un Tadeusz Kantor ou d’un Grotowski n’a résulté des subventions culturelles du socialisme. Et ces six créateurs, bien qu’ils ne soient pas faciles et qu’ils exigent de leurs lecteurs ou spectateurs un effort intellectuel, ont trouvé un public qui pour les six est allé en s’élargissant, comme les cercles concentriques. Une société doit avoir l’art et la littérature qu’elle mérite : ceux qu’elle est capable de produire et ceux qu’elle est prête à payer. Et il est bon que les citoyens assument aussi dans ce domaine leurs propres responsabilités sans y renoncer devant les fonctionnaires, pour éclairés qu’ils soient.[..] Cela ne signigie évidemment pas que l’État n’ait aucune responsabilité culturelle. Il en a une, l’éducation.[..] Mais en matière d’éducation non plus l’État ne doit pas seul avoir voix au chapitre »
- Les enjeux de la liberté
- « Ni la liberté ni la concurrence ne fonctionnent comme les baguettes magiques des contes de fées. Il faut les faire fonctionner, sans baisser la garde et en faisant face résolument contre ceux qui les dénaturalisent ou les violentent. En restant avertis des entraves, menaces et conjurations qui toujours, et de la façon la plus subtile et variée, surgiront en leur sein. »
- Les enjeux de la liberté
Un Nobel amplement mérité pour un grand auteur. Certes libéral, mais surtout un grand auteur.
Absolument, on ne saurait mieux dire. S'il peut, au passage, donner un peu de visibilité à la cause libérale, et bien ce n'est qu'une externalité positive, dont on ne se privera pas.