L’anatomie de l’État (3)

L’État doit sans cesse essayer d’impressionner le public avec sa « légitimité », pour distinguer ses activités de celles de simples brigands

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L’anatomie de l’État (3)

Publié le 14 octobre 2010
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 Traduction de l’opuscule de Murray Rothard, Anatomy of the State.

Anatomie de l’État (1) – Ce que l’État n’est pas
Anatomie de l’État (2) – Ce qu’est l’État

Comment l’État se maintient

Une fois qu’un État a été établi, le problème de la caste dirigeante est de savoir comment maintenir son joug [1]. Tandis que la force est le mode de fonctionnement de l’État, son problème fondamental et de longue haleine est d’ordre idéologique. Afin de perdurer, n’importe quel gouvernement (pas simplement un gouvernement « démocratique ») doit avoir l’appui de la majorité de ses sujets. Cet appui, il faut le souligner, n’a pas besoin d’être un enthousiasme actif ; il peut être une résignation passive, comme s’il s’agissait d’une loi de la nature inévitable. Mais ceci reste un appui, dans la mesure où il s’agit de l’acceptation d’une certaine façon d’être ; car autrement la résistance active de la majorité du public pourrait l’emporter sur la minorité constituée par les hommes de l’État. Puisque la prédation doit être maintenue au-delà de l’excédent de la production, il est nécessairement vrai que la classe constituant l’État – la bureaucratie et la noblesse – doit être une minorité plutôt petite dans le pays, bien qu’elle puisse, naturellement, acheter des alliés parmi des groupes importants de la population. Par conséquent, la principale tâche des législateurs doit toujours être de s’assurer l’acceptation active ou résignée de la majorité des citoyens [2] [3].

Naturellement, une méthode pour s’assurer l’appui est celle qui consiste à créer des droits acquis. En effet, le Roi seul ne peut pas régner ; il doit avoir un groupe considérable de sectateurs qui apprécient les à-côtés et les petits bénéfices des règles établies, par exemple les membres de l’appareil d’État, tels que la bureaucratie à plein temps ou la noblesse établie [4]. Mais ceci n’assure toutefois qu’une minorité de défenseurs zélés, et même l’achat essentiel des appuis par des subventions et d’autres concessions de privilèges ne permet pas toujours d’obtenir le consentement de la majorité. Pour obtenir cette acceptation pourtant essentielle, la majorité doit être persuadée par l’idéologie que leur gouvernement est bon, sage et, au moins, inévitable, et certainement meilleur que d’autres solutions de rechange imaginables. Promouvoir cette idéologie parmi le peuple est la tâche sociale vitale dont se chargent les « intellectuels ». La plupart des gens ne créent pas leurs propres idées, ou, lorsqu’ils en ont, les pensent indépendamment les unes des autres ; ils suivent passivement les idées adoptées et disséminées par le corps des intellectuels. Les intellectuels sont, donc, des « créateurs d’opinion » dans la société. Et puisque c’est précisément d’un moule d’opinion dont l’Etat a besoin le plus désespérément, la base de l’alliance historique entre l’État et les intellectuels devient claire.

Il est évident que l’État a besoin des intellectuels ; il n’est pas aussi évident de comprendre pourquoi les intellectuels ont besoin de l’État. Pour dire les choses simplement, nous pouvons dire que la vie de l’intellectuel sur le marché libre n’est jamais assez assurée ; car l’intellectuel doit dépendre des valeurs et des choix de l’ensemble de ses contemporains, et c’est précisément la caractéristique des masses que d’être généralement indifférentes aux sujets intellectuels. L’État, quant à lui, est disposé à offrir aux intellectuels un gîte assuré et permanent dans l’appareillage d’État, et donc un revenu garanti, ainsi que sa panoplie de prestige. Ainsi les intellectuels sont récompensés prodigalement de la fonction importante qu’ils exécutent pour le compte de l’État, duquel ils font désormais partie [5].

L’alliance entre l’État et les intellectuels a été symbolisée par l’envie désireuse des professeurs de l’Université de Berlin au dix-neuvième siècle de former « la Garde du corps intellectuel de la Chambre de Hohenzollern ». De nos jours, notons le commentaire révélateur d’un universitaire marxiste éminent au sujet de l’étude critique que le professeur Wittfogel a consacré au despotisme oriental antique : « la civilisation que le professeur Wittfogel attaque si amèrement était une de celle qui aurait pu transformer des poètes et des savants en fonctionnaires » [6]. Parmi d’innombrables exemples, nous pouvons citer le développement récent de la « science » de la stratégie, au service du principal bras armé du gouvernement, le militaire [7]. En outre, une institution notable, est celle de l’historien fonctionnaire ou « de cour », qui se consacre à fournir aux législateurs leur légitimité sur leurs propres actions et sur celles de leurs prédécesseurs [8].

Nombreux et variés ont été les arguments par lesquels l’État et ses intellectuels ont persuadé leurs sujets de soutenir leurs règles. Fondamentalement, le fil de l’argument peut se résumer comme suit : (a) les hommes de l’État sont de grands et sages hommes (ils « règnent grâce au droit divin », ils sont l’ « aristocratie » des hommes, ils sont « les experts scientifiques »), beaucoup plus grand et plus sage que les gentils mais simplets sujets, et (b) l’extension de la règle gouvernementale est inévitable, absolument nécessaire, et est largement préférable aux maux indescriptibles qui s’ensuivraient si le gouvernement chutait. L’union de l’Église et de l’État était un de ces dispositifs idéologiques les plus vieux et les plus réussis. La Roi était oint par Dieu ou, dans le cas des régimes absolus de beaucoup de despotismes orientaux, était lui-même Dieu ; par conséquent, n’importe quelle résistance à sa règle était blasphème. La ruse que les prêtes de l’État ont exécuté a été la fonction intellectuelle de base qui a consisté à obtenir le soutien et même le culte populaires des règles [9].

Un autre dispositif réussi devait instiller la crainte de tous les systèmes alternatifs de règle ou de non-règle. Les règles actuelles, on l’a montré, fournissent aux citoyens un service essentiel pour lequel ils devraient être les plus reconnaissants : la protection contre les criminels sporadiques et les maraudeurs. L’État, afin de préserver son propre monopole de la prédation, s’est toujours assuré que le crime privé et non systématique a été réduit au minimum ; l’État a toujours été jaloux de sa propre conservation. L’État a particulièrement réussi ce stratagème, durant les siècles récents, en inculquant la crainte d’autres règles d’État. Puisque la surface de la Terre a été partagée entre les États particuliers, une des doctrines de base de l’État était de s’identifier avec le territoire qu’il régissait. Puisque la plupart des hommes tendent à aimer leur terre natale, l’identification de cette terre et de ses personnes à l’État était un moyen de faire tourner le patriotisme naturel à l’avantage de l’État. Si la Syldavie était attaqué par la Bordurie, la première tâche de l’État et de ses intellectuels devaient être de convaincre les Syldaves que l’attaque était vraiment dirigée contre eux et pas simplement contre la caste régnante. De cette façon, une guerre entre souverains a été convertie en guerre entre les peuples, et chaque individu est venu en défense de ses souverains, dans la croyance fausse que ces derniers le protégeaient. Toutefois, ce dispositif du « nationalisme » a réussi, dans la civilisation occidentale, lors des siècles récents ; cela ne fait pas si longtemps, les sujets considéraient que les guerres étaient des batailles non pertinentes entre nobles.

Nombreuses et subtiles sont les armes idéologiques que l’État a utilisées au fil des siècles. Une excellente arme a été tradition. Plus la règle d’un État fut capable de perdurer longtemps, plus puissante cette arme devint-elle ; ainsi, la dynastie X ou l’État Y ont aujourd’hui un poids semblable à des siècles de tradition derrière eux [10]. Le culte des ancêtres devint alors, par un moyen juste assez subtil, le culte des anciens souverains. Le plus grand danger auquel l’État est confronté est la critique intellectuelle indépendante ; il n’y a aucune meilleure manière d’étouffer cette critique que d’attaquer n’importe quelle voix prise isolément, n’importe quel créateur de nouveaux doutes, en tant que violateur impie de la sagesse de ses ancêtres. Une autre force idéologique efficace consiste à désapprouver l’individu et à exalter la collectivité de la société. Puisque n’importe quelle règle donnée implique l’acceptation de la majorité, tout danger idéologique pour cette règle ne peut provenir que d’un ou de quelques individus dispersés. La nouvelle idée, tout particulièrement la nouvelle idée critique, a besoin de naître dans l’opinion d’une petite minorité ; donc, l’État doit tuer dans l’œuf ceci en ridiculisant n’importe quelle opinion qui défie les avis de la masse. « Écoutez seulement vos frères » ou « ajustez à la société » les armes idéologiques destinées ainsi à écraser le dissident individuel [11]. Par de telles mesures, les masses n’apprennent jamais la non-existence des habits de l’Empereur [12].

Il est également important pour l’État de faire en sorte que sa règle semble inévitable ; même si son règne est détesté, il rencontrera alors une résignation passive, comme en témoigne le couple familier de « l’impôt d’argent et de l’impôt de sang ». Une méthode efficace consiste à introduire le déterminisme historiographique, par opposition à la liberté individuelle de la volonté. Si la dynastie X règne sur nous, c’est parce que les lois inexorables de l’histoire (ou la volonté divine, ou l’absolu, ou les forces productives matérialistes) ont ainsi décrétées, et rien de ce que tous les faibles individus peuvent faire, ne peut changer ce décret inéluctable. L’État doit également inculquer à ses sujets une aversion pour toute théorie historique qui repose sur une « conspiration ». La recherche de la « conspiration » est en effet une recherche des motifs et des responsabilités de tel ou tel événement historique. Si un acte de tyrannie étatique, de corruption ou encore une guerre d’agression ne sont pas le fait des hommes de l’État, mais au contraire de mystérieuses et ésotériques « forces sociales », ou de l’imperfection du monde, ou encore que, d’une manière ou d’une autre, chacun est responsable (un slogan affirme que « nous sommes tous des meurtriers »), alors le peuple n’a plus aucune raison de s’indigner ou de se révolter contre ces usurpations. D’ailleurs, attaquer les « théories de la conspiration » augmente la crédulité des sujets de l’État, notamment lorsqu’ils évaluent les motifs « d’intérêt général » qu’il avance chaque fois qu’il commet un acte despotique. Une « théorie de la conspiration » peut déstabiliser le système en faisant douter le public de la propagande idéologique de l’État.

Une autre méthode tentée et efficace pour plier les sujets à la volonté de l’État consiste à provoquer la culpabilité. N’importe quelle amélioration du bien-être privé peut être accusée d’être de « l’avarice injuste », du « matérialisme », ou de « l’opulence excessive », le profit peut être assimilé à de « l’exploitation » et de « l’usure », les échanges mutuellement salutaires peuvent être dénoncés comme de l’« égoïsme », et aboutir d’une façon ou d’une autre à la conclusion identique que plus de ressources devraient être prélevées sur le privé au profit du « secteur public ». La culpabilité provoquée prépare le public à faire précisément cela. Tandis que la plupart des gens tendent à se livrer à « l’avarice égoïste », la pusillanimité des hommes de l’État à s’engager dans les échanges est censée signifier leur dévotion à une prédation parasitaire d’apparence morale et esthétique plus élevée et plus noble, comparé au travail paisible et productif.

Dans des périodes plus proches de nous, le droit divin de l’État a été complété par l’invocation d’un nouveau dieu, la Science. La règle d’État est désormais proclamée comme étant ultra-scientifique, comme une constitution planifiée par des experts. Mais, tandis que la « raison » est invoquée plus encore qu’aux siècles précédents, il ne s’agit pas de la vraie raison de l’individu et de son exercice de volonté libre ; c’est encore le collectivisme et le déterminisme, qui impliquent toujours des agrégats holistiques et la manipulation coercitive des sujets passifs par leurs souverains.

L’utilisation croissante du jargon scientifique a permis aux intellectuels de l’État de tisser l’apologie obscurantiste de la règle d’État, ce qui aurait seulement rencontré la dérision des peuples d’un âge précédent. Un voleur qui justifierait son vol en disant qu’il a vraiment aidé ses victimes, par sa dépense, en donnant un coup d’accélérateur au commerce, trouverait peu de convertis ; mais quand cette théorie est vêtue des équations keynésiennes et des références impressionnantes à l’ « effet multiplicateur », il emporte malheureusement plus de convictions. Et ainsi l’assaut contre le bon sens poursuit son chemin, chaque époque exécutant sa tâche de sa propre manière.

Ainsi, l’appui idéologique étant essentiel à l’État, il doit sans cesse essayer d’impressionner le public avec sa « légitimité », pour distinguer ses activités de celles de simples brigands. La détermination ininterrompue de ses assauts contre le bon sens ne connaît jamais de pause, comme Mencken l’a vivement dénoncé :

« L’homme moyen, quelles que soient les erreurs qu’il commet par ailleurs, voit au moins clairement que le gouvernement est quelque chose qui se trouve en dehors de lui et qui est extérieur à tous ses contemporains car c’est une puissance séparée, indépendante et hostile, en partie seulement sous son contrôle, et capable de créer de grands maux. Est-ce un fait sans signification que voler l’État est considéré partout comme un crime de moindre gravité que le vol d’un individu, ou même d’une entreprise ? […] Ce qui réside derrière tout ceci, je crois, est un sens profond de l’antagonisme fondamental entre le gouvernement et le peuple qu’il régit. Celui-là est appréhendé, non pas en tant que comité des citoyens choisis pour porter les affaires communes de la population entière, mais comme une société séparée et autonome, principalement consacrée à exploiter la population au profit de ses propres membres. […] Quand un citoyen privé est volé, un homme digne est privé des fruits de son industrie et de son épargne ; quand le gouvernement est volé, le pire qui se produit est que certains escrocs et oisifs ont moins d’argent à jouer qu’ils en avaient auparavant. Le fait qu’ils aient pu gagner cet argent n’est jamais admis ; ceci ferait rire des gens plus sensibles. [13] »

Notes :

[1] Sur la distinction cruciale entre la « caste », un groupe ayant des privilèges et dont les fardeaux sont imposés ou garantis par l’État, et le concept marxiste de « classe sociale », voir Ludwig von Mises, Theory and History (New Haven, Yale University press, 1957), p. 112 et suivantes.

[2] Une telle acceptation, naturellement, n’implique pas que la règle d’État est elle-même « volontaire » ; même si l’appui de la majorité est actif et désireux, cet appui n’est pas unanime pour chaque individu.

[3] Que chaque gouvernement, peu importe son caractère « dictatorial » sur les individus, doive s’assurer d’un tel appui a été démontré par des théoriciens politiques pénétrants tels que Étienne de la Boétie, David Hume, et Ludwig von Mises. Ainsi, cf. David Hume, « des premiers principes du gouvernement », dans les Essais littéraires, moraux et politiques (Londres, Warde, Locke, et Taylor, e.d.), p. 23 ; Étienne de la Boétie, Anti-Dictateur (New York, Columbia University Press, 1942), p. 8-9 ; Von Mises, L’Action Humaine (Auburn, Alabama, Institut von Mises, 1998), p. 188 et suivantes. Pour plus d’éléments sur la contribution à l’analyse de l’État par la La Boétie, voir Oscar Jaszi et John D. Lewis, Against the Tyran (Glencoe, Illinois : The Free Press, 1957), p. 55-57.

[4] « Toutes les fois qu’une législateur se fait dictateur […] tous ceux qui sont corrompus par l’ambition brûlante ou l’avarice extraordinaire, ceux-ci se réunissent autour de lui et le soutiennent afin d’avoir une part dans le butin et de devenir les petits chefs sous le grand tyran. », Etienne de la Boétie, Anti-dictateur, p. 43-44.

[5] Ceci implique nullement que tous les intellectuels s’allient avec l’État. Sur des aspects de l’alliance des intellectuels et de l’État, cf. Bertrand de Jouvenel, « The Attitude of the Intellectuals to the Market Society, » The Owl (janvier 1951) p. 19-27 ; idem, « The Treatment of Capitalism by Continental Intellectuals » in F.A. Hayek, Capitalism and the Historians (Chicago, University of Chicago Press, 1954), p. 93-123 ; réimprimé dans George B. de Huszar, The Intellectuals (Glencoe, Illinois, The Free Press, 1960), p. 385-99 ; et Schumpeter, Imperialism and Social Classes (New York, Meridian Books, 1975), p. 143-55.

[6] Joseph Needham, « Review of Karl Wittfogel, Oriental Despotism », Science and Society (1958), a écrit que « les empereurs chinois successifs ont été servis de tout temps par un grand nombre des savants profondément humains et désintéressés », ibid, p. 61. Wittfogel note dans la doctrine confucéenne que la gloire de la classe régnante a reposé sur ses fonctionnaires et universitaires-bureaucrates, destinés à être des législateurs professionnels dictant aux masses la bonne parole. Karl A. Wittfogel, Oriental Despotism, New Haven, Yale University Press, 1957, p. 320-321. Pour une position contrastant celle de Needham, cf. John Lukacs, « Intellectual Class or Intellectual Profession ? », in de Huzzar, The Intellectuals, p. 521-522.

[7] « Les stratèges insistent sur le fait que leur métier mérite une dignité telle qu’elle soit la contrepartie académique de la profession militaire », Jeanne Riha, « The War Plotters », Liberation, août 1961, p.13. Voir aussi Marcus Raskin, « The Megadeath Intellectuals », New York Review of Books, 14 novembre 1963, p. 6-7.

[8] Ainsi, l’historien Conyers Read, dans sa lettre au président, a préconisé la suppression du fait historique pour le service des valeurs nationales et « démocratiques ». Read a proclamé que la « guerre totale, qu’elle soit chaude ou froide, enrôle chacun et appelle chacun à y participer. L’historien n’est pas plus libre de cet engagement que le physicien… » Read, « The Social Responsibilities of the Historian », American Historical Review, 1951, p. 283 et s. Pour une critique de Read et d’autres aspects de l’Histoire de cour, voir Howard K. Beale, « The Professional Historian. His Theory and Practice », The Pacific Historical Review, août 1953, p. 227-55. Ou encore cf. Herbert Butterfield, “Official History : its Pitfalls and Criteria”, in History and Human Relations, New York, MacMillan, 1952, p. 182-224 ; et Harry Elmer Barnes, The Court Historians Versus Revisionism, p. 2 et suivantes.

[9] Cf. Wittfogel, Oriental Despotism, p. 87–100. Sur les rôles contrastés de la religion vis-à-vis de l’État en Chine ancienne et au Japon, voir Norman Jacobs, The Origin of Modern Capitalism and Eastern Asia, Hong Kong, Hong Kong University Press, 1958, p. 161–94.

[10] « La raison essentielle de l’obéissance est qu’elle est devenu une habitude. […] La puissance est pour nous un fait de nature. Dès les débuts de l’histoire connue elle a toujours présidé aux destinées humaines […] Les autorités qui ont dirigé (les sociétés) dans les temps anciens n’ont pas disparu sans léguer à leurs successeurs leurs privilèges ni sans laisser dans les esprits des hommes des empreintes qui sont cumulatives dans leurs effets. La succession des gouvernements qui, au cours des siècles, règnent sur la même société peut être regardée comme un pouvoir fondamental qui assume une progression continue. », Bertrand de Jouvenel, Du Pouvoir, p. 22.

[11] Sur de tels usages dans la religion chinoise, voir Norman Jacobs, op. cité.

[12] « Tous [les gouvernements] peuvent voir dans une idée originale un changement potentiel, et par conséquent une invasion sur ses prérogatives. L’homme le plus dangereux, pour n’importe quel gouvernement, est l’homme qui peut penser des choses de lui-même, sans se soucier des superstitions et des tabous régnants. Presque inévitablement il arrive à la conclusion qui le gouvernement dont il dépend est malhonnête, insensé et intolérable, et ainsi, s’il est romantique, il tente de le changer. Et même s’il n’est pas romantique, il est très susceptible de propager le mécontentement parmi ceux qui sont. », H. L. Mencken, A Mencken Chrestomathy, New York, Knopf, 1949, p. 145.

[13] Ibid, p. 42-43.

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