L’école libérale française

Une tradition politique et économique fixée par le théoricien Jean-Baptiste Say

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L’école libérale française

Publié le 5 novembre 2010
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Source : The History of economic thought. The New School for General Studies, New York.

Traduction et adapation Mathieu Chauliac, Institut Coppet

L’école française libérale est un courant de pensée économique qui regroupe les économistes français du 19e siècle d’une tradition politique et économique fixée par le théoricien Jean-Baptiste Say. En économie, cette pensée adhère aux bases de l’école classique (…). D’autre part elle réfute la plupart des principes classiques pessimistes comme la loi d’airain des salaires, la hausse inexorable des loyers, la mécanisation comme cause de chômage, préférant mettre l’accent (…) sur le principe d’autorégulation des marchés. Politiquement, l’école française libérale prône le respect le plus strict de la libre entreprise.

Le courant libéral français plonge ses racines dans la philosophie des Lumières et chez les économistes de cette époque à savoir les physiocrates, ainsi que Turgot et Condillac. Après la Révolution française de 1789, un groupe de philosophes et d’économistes tentent de redonner un souffle à l’esprit libéral des Lumières dans une France jacobine très méfiante des idées qui pourraient rappeler l’Ancien Régime. Ce groupe, connu sous le nom des Idéologues a comme chefs de file Destutt de Tracy et Jean-Baptiste Say. Le journal philosophique La Décade était leur principal support de diffusion.

L’avènement du régime impérial de Napoléon Bonaparte, qui travaillait à créer une « économie de guerre » s’appuyant sur du protectionnisme et de la réglementation, plaça les Idéologues sur la touche. Toutefois, après 1815, la Restauration combla d’honneurs les libéraux ouvrant ainsi une longue tradition d’intimité profonde entre les idées libérales et le pouvoir en place. De nombreux libéraux (comme Charles Dunoyer et Charles Comte) sont mécontents des tendances absolutistes des Bourbons et soutiennent en 1830 la Révolution de Juillet. Les concurrents les plus sérieux des libéraux sont alors Sismondi et les socialistes français. Les doctrines déjà désuètes de Saint-Simon, quant à elles, oscillent entre les deux camps.

Vers le milieu du 19e siècle, les idées libérales en France sont portées par un groupe d’universitaires et d’écrivains que nous appellerons les Journalistes (ils sont également connus sous le nom des « Ultras du laissez-faire » ou « Groupe de Paris »). Les figures centrales de ce mouvement sont alors Michel Chevalier, Jean-Gustave Courcelle-Seneuil et Gustave de Molinari. Ils plaident pour une politique de laissez-faire économique encore plus extrême que ne le font leurs homologues anglo-saxons, aussi leur influence sur la politique du gouvernement est à ce jour inégalée. Ce n’est que dans la bataille pour les cÅ“urs et les esprits de la population française que leurs rivaux socialistes enregistrent un maigre succès, mais même celui-ci décline rapidement après les troubles de 1848 et la formation du Second Empire de Napoléon III. C’est à cette époque que Frédéric Bastiat, avec ses pamphlets défenseurs du libre-échange, remporte ses plus grands succès populaires.

(…) Les libéraux orthodoxes exercent une forte influence sur la profession d’économiste. En 1842, ils fondent la Société d’Économie Politique et le très influent Journal des économistes. Ils prennent également contrôle de la maison d’édition Guillaumin, qui produit le célèbre Dictionnaire Coquelin d’économie politique (1852), donnant ainsi une inclinaison libérale aux débats économiques.

Tout au long du Second Empire, la plupart des postes dans les universités françaises sont occupés par des libéraux orthodoxes. La chaire de recherche du prestigieux Collège de France est restée entre leurs mains depuis sa création en 1831 jusqu’au siècle suivant – passant de JB Say à Rossi à Chevalier et à Leroy-Beaulieu. Ils prennent également le contrôle de la section économie du renommé Institut de France, l’académie des sciences qui domine une grande partie de la vie intellectuelle française.

Il faut aussi noter que, dès les années 1830 (…) l’attention de la plupart des journalistes se fixe seulement sur la politique économique, et ils ne gardent que la logique de l’offre et de la demande pour guider leurs réflexions (…). La théorisation économique de type mathématique est poursuivie par des savants isolés tels qu’Augustin Cournot et Auguste Walras, et des ingénieurs comme Jules Dupuit. Mais l’école libérale jugea ces théories irrecevables pour des raisons méthodologiques. (…)

La chute des libéraux arrive après 1878, lorsque des chaires d’économie politique sont créées dans les facultés de droit en France. Ces chaires sont alors remplies principalement par des membres de l’école française historique. Par la suite, la France adopte majoritairement une vision empirique en ce qui concerne l’économie et une vision corporatiste en ce qui concerne ses propositions politiques.

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