Le chèque scolaire

Il y a 55 ans, Milton Friedman proposait la solution

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Milton Friedman (Crédits : The Friedman Foundation for Educational Choice, licence Creative Commons)

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Le chèque scolaire

Publié le 15 novembre 2010
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Les enquêtes d’opinion indiquent que les parents sont davantage satisfaits de l’éducation de leurs enfants avec le système des chèques scolaires qu’avec le système d’éducation publique où ils n’avaient pas le choix. De plus, l’intégration des enfants des communautés étrangères est rendue plus facile. Enfin, dans ce nouveau système, on constate également une amélioration du sens civique des étudiants.

Milton Friedman (Crédits : The Friedman Foundation for Educational Choice, licence Creative Commons)
Milton Friedman (Crédits : The Friedman Foundation for Educational Choice, licence Creative Commons)

Tout au long de l’histoire, l’éducation fut toujours majoritairement privée. C’est spontanément que les sociétés produisirent l’institution qui leur servait à transmettre la richesse de la culture et à former les citoyens dans le sens le plus large et le plus profond du terme.

La Révolution industrielle augmenta la richesse des familles et modifia la structure du travail. Délaissant la servitude de la terre, l’homme s’incorpora progressivement à l’industrie et aux services, domaines nécessitant une capacité intellectuelle supérieure et moins d’énergie physique. C’est ainsi que la demande d’éducation devint plus intense et les sociétés les plus avancées arrivèrent peu à peu à l’étendre pratiquement à toute la société. Avant la fin du XIXe siècle, l’initiative privée avait permis d’atteindre la scolarisation universelle en Grande-Bretagne et aux États-Unis.

Hélas, la foi en l’initiative privée chuta avec le XXe siècle, et la main morte de l’État s’abattit sur un secteur supplémentaire de la vie des individus.

Pour justifier le nouveau monopole intrusif de l’État fut avancé l’argument selon lequel les plus pauvres ne pourraient accéder à aucun type d’éducation. Il s’agit là d’une assertion parfaitement fausse. On a déjà vu comment les pauvres avaient parfaitement accès à l’enseignement dans un système privée dans la Grande-Bretagne et les États-Unis du XIXe siècle. Mais aujourd’hui encore, les plus pauvres des pays pauvres peuvent accéder à l’éducation grâce à l’initiative privée, plus que le service public. Expert en éducation dans le tiers monde, James Tooley a montré dans plusieurs articles comment l’initiative privée surgit pour suppléer aux carences là où l’éducation publique n’y parvient pas, ou est déficiente.

Ainsi, dans un article publié intitulé « Private Schools in the Poorest Countries », il raconte comment il découvrit le phénomène des écoles privées pour les pauvres alors qu’il réalisait, pendant l’année 2000, un travail pour la Banque mondiale à Hyderabad, en Inde. Depuis, il a pu observer ce même phénomène en Somalie, au Sierra Leone, au Nigeria, au Kenya, au Ghana, en Chine, etc.

Une partie importante de l’article est celle qui signale les sept caractéristiques des écoles privées pour les pauvres :

  1. Dans chacune des zones étudiées, une grande majorité des écoles qui reçoivent les pauvres sont privées.
  2. La majorité de ces écoles sont administrées comme des négoces, non pas comme des œuvres philanthropiques.
  3. Les professeurs reçoivent un salaire inférieur à ceux des écoles publiques, mais ne manquent jamais de professeurs, qui se consacrent davantage à leur travail.
  4. La proportion d’élèves par professeur y est plus faible. Des commodités comme des bibliothèques, des toilettes et de l’eau potable sont généralement meilleures.
  5. Dans les pays où l’éducation étatique est « gratuite » comme en Inde, elles coûtent plus cher aux parents. Dans ceux où l’on perçoit une petite mensualité, comme en Chine ou au Ghana, il arrive qu’elles soient meilleur marché, et les parents peuvent payer la mensualité au jour le jour.
  6. Leurs propriétaires connaissent les problèmes des plus pauvres parmi les pauvres, et offrent des bourses ou subventionnent certains élèvent.-
  7. Les élèves sont, de loin, meilleurs que ceux des écoles publiques dans les épreuves de mathématiques et d’anglais, et pour un coût par étudiant inférieur.

 

À la suite, dans une section intéressante, Tooley discute de ses accords et désaccords avec certains experts en développement, et cite le Oxfam Report et le Probe Report. Enfin, l’étude conclut par une réflexion d’un parent kenyan qui contient plus de sagesse que nombre de volumes réunis : « Quand vous allez au marché et que l’on vous offre des fruits et des légumes, c’est qu’ils sont pourris. Si vous voulez des fruits et légumes frais, vous devez payer. »

Arrivé à ce point, il convient de se pencher sur une distinction fondamentale : que l’État paie pour un service ne signifie nullement qu’il doive le fournir. Telle fut la grande contribution de Milton Friedman à l’économie politique en 1955 dans son article « The Role of Government in Education » en proposant le système de chèques scolaires (vouchers) que l’État fournirait aux familles pauvres.

Ces chèques seraient ensuite utilisés par ces familles pour inscrire leurs enfants dans l’école de leur choix. Ensuite, l’État récupère ces chèques auprès des écoles contre monnaie sonnante et trébuchante, garantissant ainsi l’accès à l’éducation des plus pauvres, et préservant également le libre choix de l’école par les parents. Par ailleurs, les centres scolaires, mis en compétition, s’efforceraient de proposer la meilleure offre éducative en allouant de meilleure façon l’argent perçu. Quand l’éducation publique commença à s’imposer dans le pays, les dépenses liées à la bureaucratie ne cessèrent de prendre une part croissante du budget de l’éducation. Exactement le contraire de ce qui se produit avec le système de chèques scolaires où les écoles sont contraintes de limiter au maximum les frais de gestion afin de consacrer le plus de moyens possibles l’enseignement lui-même.

Malgré les obstacles, malgré les embûches en tout genre, la riche variété institutionnelle des États-Unis a permis que soient mis en route différents projets de chèque scolaire, l’expérience la plus avancée étant celle de Milwaukee. Les résultats sont généralement les mêmes partout : les parents s’impliquent davantage dans le suivi de l’éducation reçue à l’école, car maintenant qu’ils peuvent choisir, ils tiennent à vérifier qu’ils ont bien fait le bon choix. L’attitude des élèves s’améliorent, et les bons résultats scolaires ne tardent pas. Les écoles, de leur côté, se rendent compte que ce n’est plus comme avant, quand elles vivaient de l’argent des contribuables : si elles ne s’améliorent pas, elles ne recevront plus d’argent. La puissante force de la concurrence réveille l’intérêt des écoles pour améliorer l’enseignement qu’elles proposent aux enfants. Et maintenant que les parents peuvent choisir qui ils vont payer, ils ne sont plus disposés à accepter n’importe quoi. Les enquêtes d’opinion indiquent ainsi que les parents sont plus satisfaits de l’éducation de leurs enfants avec le système des chèques scolaires qu’avec le système d’éducation publique où ils n’avaient pas le choix. De plus, l’intégration des enfants des communautés étrangères est rendue plus facile dans les écoles de Milwaukee et dans les autres zones où fonctionnent les chèques scolaires, comme Cleveland, le Maine, le Vermont, etc. Enfin, dans ce nouveau système, on constate également une amélioration du sens civique des étudiants.

Ailleurs qu’aux États-Unis, le système des chèques scolaires est appliqué dans plusieurs pays à travers le monde. Ainsi, il y a 25 ans, la Nouvelle-Zélande, confrontée à une crise économique, lança un programme de réformes libérales qui furent à la base de sa prospérité économique actuelle. L’élan réformateur toucha également le secteur de l’enseignement, et les chèques scolaires furent introduits en 1985. À cette époque, les frais administratifs représentaient 70 % du budget des écoles, aujourd’hui, seulement un tiers.

Des systèmes similaires ont également été développés au Danemark et en Suède, bien qu’avec plus de rigidité dans le premier pays. En Suède, après la faillite du modèle socialiste, les parents ont pu reprendre leur liberté de choisir, et 60 % d’entre eux constatent que les professeurs s’occupent mieux de leurs enfants.

En Colombie, ce système fut introduit pour pallier les déficiences de l’éducation publique incapable de couvrir tout le territoire – chose que put réaliser l’initiative privée. Pas très loin de là, l’expérience à Porto Rico, entre autres caractéristiques, est intéressante car elle a montré comment même les écoles du réseau publics qui ne font pas partie du système de chèques scolaires ont été obligées de prendre des mesures et d’améliorer leur enseignement. Toujours en Amérique latine, le Chili, qui avait déjà étonné le monde avec une réforme audacieuse et réussie de son système de pension – aujourd’hui imitée à travers le monde entier –, a également adopté un programme de chèques scolaires qui, avec le temps et au vu du succès, s’est élargi. Il existe également des systèmes du même genre en Australie et dans cinq régions italiennes.

Reste donc maintenant la question de savoir quand nos politiciens trouveront assez de bon sens pour étudier sérieusement cette solution simple, efficace et morale aux problèmes de l’éducation.

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