Pourquoi y a-t-il du chômage ? (3)

Les syndicats sont-ils favorables à la croissance et à l’emploi

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Pourquoi y a-t-il du chômage ? (3)

Publié le 23 novembre 2010
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Pourquoi y a-t-il du chômage ? (1)
Pourquoi y a-t-il du chômage ? (2)

Est-ce que les syndicats contribuent au chômage ?

Le syndicalisme est une chose tout à fait légitime. Selon Michel Kelly-Gagnon, de l’Institut Économique de Montréal [1] :

« Les syndicats peuvent rendre des services utiles à leurs membres, en plus de jouer leur rôle fondamental de protection et de représentation des intérêts des syndiqués auprès des patrons. D’un point de vue sociopolitique, les syndicats constituent une barrière entre l’État et les personnes et, en général, contribuent au pluralisme de la société. »

Des groupes de travailleurs devraient être libres de s’unir pour négocier ensemble leurs contrats de travail. Il est cependant dommage que, dans la plupart des pays, les travailleurs soient forcés à joindre un syndicat et à payer les cotisations qui vont avec, parfois contre leur gré. Le droit à la libre-association est effectivement disparu au Canada. Cette règle liberticide a conféré un pouvoir démesuré aux immenses centrales syndicales qui sont administrées comme de grosses corporations. Ils sont d’ailleurs d’importants contributeurs aux campagnes électorales et un groupe de pression très menaçant.

Ceci étant dit, le but principal des syndicats est d’utiliser leur pouvoir pour contraindre les employeurs à augmenter les salaires et les avantages sociaux plus qu’ils ne l’auraient fait autrement. Les études empiriques confirment généralement que les travailleurs syndiqués obtiennent des salaires plus élevés que les non syndiqués. Pour le Canada, elles estiment cet écart à 15 % en moyenne avec des variations selon les entreprises, les industries, les occupations et les caractéristiques des travailleurs. Pour les États-Unis, l’écart est estimé à 17 % en moyenne. [2]

À part les salaires plus élevés, les syndiqués obtiennent également plus d’avantages sociaux. Aux États-Unis, ces avantages sont évalués à $12,41 par heure travaillée pour les travailleurs syndiqués contre $6,38 pour les employés non syndiqués. Au Canada, 89% des travailleurs syndiqués ont des avantages sociaux sous une forme ou une autre alors que 64% seulement des travailleurs non syndiqués jouissent de tels avantages. [3]

Plus le coût de la main d’oeuvre est élevé, moins les employeurs en utilisent. Les augmentations salariales des travailleurs syndiqués s’obtiennent donc parfois en contrepartie d’une réduction de l’emploi et donc d’une augmentation du chômage. Lorsque les demandes des syndicats sont excessives, elles font augmenter les coûts de production de l’employeur et peuvent éventuellement l’amener en difficultés financières. Le cas de General Motors est un bon exemple de ce phénomène. En 2007-2008, le salaire horaire moyen des employés de GM/Ford/Chrysler était de $73 comparativement à $48 pour Toyota. [4] Après que l’entreprise eut fermé son usine d’Oklahoma City, elle fut forcée en vertu du contrat avec le syndicat de verser leur plein salaire à 2.300 employés alors que ceux-ci ne travaillent plus pour à l’usine ayant été licenciés ; un véritable boulet pour la compétitivité de l’entreprise. En 2005, le contrat de GM avec le syndicat United Auto Workers (UAW) lui coûtait $2.500 par voiture. À cette époque, GM réalisait une perte de $1.200 par véhicule alors que Toyota réalisait un profit de $2.000 par voiture. [5] Au fil des ans, GM a constamment perdu des parts de marché au profit de ses compétiteurs étrangers. La part de marché de GM est passée de 46% en 1980 à 35% en 1991 à 22% en 2008. La baisse de production qui s’en est suivie a été accompagnée de milliers de mises à pied. En 2008, GM a été sauvée de la faillite par le gouvernement américain qui l’a carrément nationalisée.

Selon l’Institut Économique de Montréal, plusieurs études confirment que le syndicalisme nuit à l’emploi. [6] Par exemple, au Canada, sur la période 1980-1985, la croissance de l’emploi dans les entreprises syndiquées a été inférieure de 3,9% à celle des entreprises non syndiquées. Aux États-Unis, les 10 États ayant eu le taux de syndicalisme le plus élevé ont généré une croissance de l’emploi et du PIB nettement inférieure aux 10 États où le taux de syndicalisme est le plus faible. [7]

Le Québec est un bon exemple de ce phénomène. Parmi les dix provinces canadiennes et les 50 États américains, le Québec est la région qui affiche le plus haut taux de syndicalisation, soit 40% comparativement à 32% pour le Canada et 14% pour les États-Unis. Par ailleurs, les syndicats y jouissent de privilèges légaux plus étendus que dans les autres régions. Le Québec est l’une des cinq provinces canadiennes où un syndicat peut être accrédité sans la tenue d’un vote secret (si le syndicat recueille la signature de plus de 50% des employés). De plus, au Québec l’employeur n’a pas le droit d’intervenir pour contester la représentativité du syndicat, ce qui n’est pas le cas dans la majorité des autres provinces ni aux États-Unis. Le gouvernement du Québec est également l’un des six gouvernements provinciaux à imposer l’arbitrage obligatoire quand les négociations d’une première convention collective sont rompues. Le Code du travail du Québec interdit à l’employeur de remplacer les salariés en grève par du personnel temporaire, alors que les grévistes peuvent librement travailler ailleurs. Le Québec et la Colombie-Britannique sont les deux seules provinces canadiennes où la loi impose une telle prohibition, qui n’existe dans aucun des États américains. Pour déclencher une grève au Québec, le syndicat doit obtenir l’autorisation par un vote secret de la majorité de ses membres présents lors du scrutin. Si le syndicat ne respecte pas les formalités requises, il s’expose à des amendes, mais la grève est tout de même jugée légale. Dans la majorité des autres provinces, le déclenchement de la grève se fait suite à un vote secret de la majorité des employés présents au vote et non seulement des membres du syndicat. [8]

Comme le démontre le graphique suivant, le Québec a constamment eu un taux de chômage plus élevé que celui du reste du Canada, sauf durant 9 mois (octobre 2009 à juin 2010). Les syndicats y sont certainement pour quelque chose.

Source : Antagoniste.net, Institut de la Statistique du Québec.

Si les syndicats ont mené une entreprise General Motors au bord du gouffre, les choses peuvent être encore pires lorsque l’on est en présence de syndicats de la fonction publique. Les fonctionnaires du gouvernement fédéral américain font un salaire deux fois plus élevés que le salaire moyen du secteur privé si on tient compte des avantages sociaux ($119.982 pour les fonctionnaires fédéraux versus $59.909 pour le secteur privé). [9] Selon l’Institut de la Statistique du Québec, les 807.000 employés de la fonction publique du Québec sont syndiqués à 81% et gagnent un salaire horaire moyen de $25,30 comparativement à $18,15 pour le secteur privé. En janvier 2010, nous apprenions que le taux horaire des caissiers de la SAQ passerait à $24,81, alors qu’au sein d’une entreprise privée, ce genre d’emploi mériterait à peine plus que le salaire minimum de $9,50.

Le cas de Californie est fort intéressant à cet égard (voir ce billet antérieur).

Avez-vous déjà songé à l’impact économique des excès des syndicats de la fonction publique ? Les salaires des fonctionnaires sont payés par les impôts, taxes et tarifs perçus des contribuables et des entreprises. Pour payer ces sommes, les contribuables doivent réduire leur consommation, ce qui nuit à l’emploi dans l’économie. De plus, ils doivent aussi réduire leur épargne, ce qui nuit à l’investissement et, par le fait même, à la création d’emplois. Les gains salariaux excessifs réalisés par les fonctionnaires grâce à leurs syndicats se font donc sur le dos des travailleurs du secteur privé. Ils engendrent du chômage et nuisent à l’activité économique.

(À suivre)

Notes :

[1] « Les unions, qu’ossa donne? », Michel Kelly-Gagnon, Les Affaires, 31 juillet 2004.
[2] « Labour Market Economics », Dwayne Benjamin Morley Gunderson et Craig Riddell, McGraw-Hill Ryerson, 2002.
“What Effect do Unions Have on Wages Now and Would ‘What Do Unions Do?’ Be Surprised?”, David G. Blanchflower et Alex Bryson, NBER Working Paper no w9973, septembre 2003.
[3] “Employer Costs for Employee Compensation”, Bureau of Labor Statistics.
« Enquête sur le milieu de travail et les employés », Statistique Canada.
[4] “Should We Really Bail Out $73.20 Per Hour Labor?”, Mark J. Perry, 9 novembre 2008.
[5] “Where Would General Motors Be Without the United Automobile Workers Union?”, George Reisman, Mises Institute, 19 avril 2006.
[6] Un résumé des résultats est présenté dans Blanchflower et Bryson, op. cit. Voir aussi pour le Canada, Richard Long, « The Effects of Unionization on Employment Growth of Canadian Companies », Industrial and Labor Relations Review, vol. 46, no 4, juillet 1993, p. 691-703; pour l’Australie, Mark Wooden et Anne Hawke, « Unions and the Employment Growth: Panel Data Evidence », Industrial Relations, vol. 39, no 1, janvier 2000, p. 88-107.
[7] « Right to Work and Productivity : the Numbers », Americans for Prosperity, 19 février 2009.
[8] « Les effets de la forte présence syndicale au Québec », Norma Kozhaya, IEDM, Septembre 2005.
[9] « Federal Pay Continues Rapid Ascent », Chris Edwards, CATO Institute, 24 août 2009.

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  • Pas mal.

    Bon je chipote mais "le chômage nuit à l'activité économie", on entend ça un peu partout sans nuance… le chômage c'est aussi un moyen efficace de pression, sur les rémunérations par exemple, sans avoir à faire de pédagogie.

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