La politique du logement

Quand le gouvernement veut favoriser quelque chose, DANGER

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La politique du logement

Publié le 20 janvier 2011
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Certaines déclarations récentes de Benoît Apparu auraient pu nous laisser croire que le gouvernement commençait à se poser les bonnes questions quant aux raisons qui poussent une part croissante des ménages modestes à être logés dans des conditions médiocres, voire calamiteuses.

 

Quand le gouvernement veut favoriser quelque chose, DANGER

Hélas, François Fillon, pourtant le moins médiocre de l’équipe gouvernementale actuelle, et de très loin, vient de nous prouver qu’il n’y avait rien à attendre de positif de cette classe politique. Les propositions des gouvernements successifs en matière de logement naviguent entre le consternant et le désastreux.

Dans un grand élan d’innovation politique, François Fillon vient de présenter un dispositif qui ressemble furieusement au prêt à taux zéro, d’ailleurs appelé PTZ+, destiné, selon lui, à « faire passer le taux de propriétaires de 58 à 70 % », soit « au dessus de la moyenne européenne ». Coût estimé pour le contribuable, ou plutôt le débiteur : 2,5 milliards d’euros. Par an, bien sûr.

Je vais être direct : ON SE FICHE DU TAUX DE PROPRIETAIRES.

Les Suisses vivent très bien avec 36 % de propriétaires. Les Allemands, en dessous de 50 %, ne sont pas un peuple de clochards. Les Luxembourgeois se portent certes très bien avec 70 % d’heureux propriétaires occupants mais avec des taux supérieurs à 80 %, les Irlandais et les Espagnols se disent souvent qu’ils auraient mieux fait de ne pas s’endetter en pleine période de bulle pour « être propriétaires » à n’importe quel prix. (en 2003 : Suisse 36 %, Allemagne 42 %, France et Pays Bas 55%, Suède 60 %, USA 66 % , Luxembourg 70 %, Royaume-Uni 71 %, Belgique 75 %, Irlande 81 %, Espagne 85 %).

Il n’y a aucune corrélation claire entre taux de propriétaires et niveau de vie, de bonheur, de développement humain, etc. Pas plus qu’il n’y a de corrélation entre taux de propriété et intensité de la crise immobilière.

 

Loi des conséquences inattendues… et dramatiques

Aux USA, en 1992, il y avait 63 % de propriétaires. Les gouvernements successifs ont voulu aider les ménages pauvres à accéder à la propriété et ont subventionné par divers moyens leur accès au crédit. Tout ça pour atteindre 70 % de propriétaires au sommet d’une bulle immobilière et financière dont l’éclatement a dévasté leur économie. Quel beau résultat !

Notre gouvernement ne trouve rien de mieux que reproduire presque à l’identique ce schéma de pensée, comme le fait justement remarquer Philippe Herlin.

Entendons-nous bien, je n’ai rien contre la propriété. Propriété et location sont deux manières de consommer du logement qui ont chacune leurs avantages et inconvénients, et le gouvernement ne devrait rien faire pour favoriser l’une ou l’autre, chaque agent économique doit pouvoir se décider en fonction de ses propres critères. Vouloir fortement inciter les gens à être propriétaires lorsque le rapport prix sur loyer rend la location plus intéressante est une stupidité anti-économique sans nom.

Mais non, notre gouvernement veut favoriser l’accès à la propriété. Et quand le gouvernement veut favoriser quelque chose, il est bon de se demander comment il va s’y prendre.

 

Freins et subventions

Si le gouvernement voulait « lever les freins à l’accession à la propriété », comme par exemple la pénurie de foncier constructible ou la limitation des possibilités de surélévation dans les zones aux prix les plus bullaires, j’applaudirais des deux mains. Mais malgré quelques déclarations encourageantes de M. Apparu à ce sujet l’an passé, il ne semble pas que l’on se dirige vers une telle libéralisation. Pas plus que le niveau des droits de mutation ou l’inflation réglementaire pré et post Grenelle, qui place nos coûts de transaction parmi les plus élevés d’Europe, ne semble faire l’objet de projets de diminution.

En effet, Christine Lagarde, citée par Ouest France, a présenté les pistes gouvernementales de la façon suivante :

Selon elle, « il ne s’agit pas seulement de droit d’urbanisme, il ne s’agit pas seulement de fluidifier les transactions, il s’agit aussi de réfléchir aux outils financiers, aux outils fiscaux ». Elle a cité la très grande avancée représentée à ses yeux par le nouveau prêt à taux zéro (PTZ+).
On ne saurait mieux dire que le gouvernement ne souhaite finalement pas ouvrir de chantiers trop brûlants pour les politiciens locaux (pouvoirs d’urbanisme et recettes fiscales…), et préfère s’en tenir à ses marottes habituelles, subventions et niches fiscales. Cette fois-ci, c’est le PTZ+ qui nous est servi pour un coût estimé de 2,5 milliards d’euros qui ne feront que bénéficier aux groupes sociaux vendeurs nets de logements (ceux qui en ont au moins deux et peuvent en vendre un) ou aux bénéficiaires de l’étranglement foncier (en général ceux dont le terrain devient miraculeusement constructible, encore que les miracles soient parfois très prosaïques…), la subvention aux primo-accédants ne servant qu’à accroître la richesse de ceux qui peuvent vendre dans un contexte de pénurie d’offre à un prix forçant les ménages à payer le maximum de ce qu’ils peuvent (dé)raisonnablement envisager.

Et lorsque notre madame Lagaffe de Bercy nous parle de « réfléchir aux outils fiscaux », je tremble en imaginant, après les Robien, Borloo et Scellier, quel nouveau piège à cons, pardon, « dispositif de défiscalisation », nos premiers de la classe des finances nous préparent.

 

Ah, mais c’est politique, vous comprenez ?

De nombreux analystes signalent que les néo-propriétaires issus en majorité de la moyenne bourgeoisie, verraient d’un bon Å“il un tel dispositif, ce qui en ferait de bons électeurs pour le parti au pouvoir. Eh oui, le gouvernement va les aider à payer des logements trop chers et ils seront contents.

Ceci dit, la gauche qui critique le projet de la droite n’est intellectuellement pas mieux lotie puisqu’elle ne jure que par une socialisation accrue du logement avec de l’argent que l’État n’a pas et un renforcement des pénalités dans le cadre de la loi SRU. Tout cela alors que la multiplication des scandales montre que le logement social ne remplit en aucun cas sa mission sociale. Et des associations sans doute sincères mais totalement à côté de la plaque économiquement leur emboîtent le pas…

Dans un tel océan d’incurie économique, les ménages modestes ne sont pas prêts d’être correctement logés dans ce pays…

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