Par Gisèle Dutheuil, analyste d’Audace Institut Afrique
Alors que la Côte d’Ivoire vit un drame sans précédent à l’issue totalement incertaine, il convient urgemment de rechercher des voies nouvelles pour gérer l’après crise. Il est coutumier de penser que quand tout s’effondre, il faut d’abord remettre sur pied. Certes il faut déjà trouver la porte de sortie à cette violence culminante et reconstruire mais il ne faut absolument pas négliger dès maintenant la réflexion sur les politiques qui éviteront qu’à la prochaine échéance électorale le pays puisse revivre un tel enfer. L’épisode actuel prouve grandeur nature que ce n’est pas un luxe car c’est l’enchainement de mauvaises politiques, de négligences, d’irresponsabilités de la part de dirigeants trop puissants dans un État fort trop centralisé qui ont conduit à la situation actuelle.
On constate partout dans le monde que l’augmentation de la liberté économique dans un pays est synonyme de croissance, de paix et de stabilité. Pourquoi l’Afrique se prive-t-elle d’emprunter cette voie ?
Généralement le marché libre effraie. La mondialisation serait source d’inégalités et ne serait pas défendable moralement. Pourtant, à l’analyse, on constate qu’elle conduit plus à la création et à la répartition de la richesse qu’à un monstre égoïste comme certains intellectuels la décrivent.
Le marché libre peut certes entrainer des inégalités mais si l’on observe ses bienfaits en termes de progrès, ces inégalités sont vite balayées puisque le libre échange tire vers le haut l’ensemble des couches sociales d’un pays. Même s’ils demeurent des riches et des pauvres avec des contrastes choquants, le niveau de pauvreté est moindre et c’est déjà un progrès.
Soulignons que l’indice de philanthropie que publie chaque année le Hudson Institut, célèbre think tank américain, montre que ce sont les pays les plus libres et les plus riches qui sont les plus forts donateurs dans le monde, les États-Unis restant largement en tête. La critique du libre marché ne résiste donc pas à l’analyse même en ce qui concerne la moralité.
Lorsque l’on décortique les classements de la liberté économique publiés annuellement par l’institut Fraser et la fondation Heritage, on constate clairement que les pays les plus libres sont non seulement les plus riches et les plus heureux. Les pays d’Afrique qui commencent à emprunter la voie de la liberté progressent d’ailleurs plus rapidement et la pauvreté y est en recul.
Alors que l’Afrique s’enlise dans la pauvreté, la violence et les conflits, pourquoi ne pas oser cette voie de l’ouverture et des libertés ? Selon Mamadou Koulibaly, économiste et président d’Audace Institut Afrique, les pays du continent, en général, n’ont pas la culture du marché et cela pour différentes raisons. D’abord, c’est, selon les croyances locales, une création de l’Occident, étrangère à la culture africaine. Par exemple il n’y aurait pas concurrence mais communauté dans le cadre de l’économie tribale. Ensuite, le marché aurait échoué même en Occident, pourquoi les Africains adopteraient-ils quelque chose qui ne marche pas ? On relèvera encore que l’influence des idées de Marx et de Keynes est toujours très grande dans cette région, et que par comparaison l’esprit d’entreprise y est peu développé. Enfin, le droit de propriété individuelle, institution cardinale du marché, n’existe pas, puisqu’il demeure mal défini ou mal protégé. Il s’agit évidemment d’autant d’idées reçues contre lesquelles il est nécessaire de lutter.
Notons cependant que le principal frein au marché en Afrique demeure le jeu politique fait de pouvoir absolu des États et de corruption généralisée. Ceux qui vivent des fonds apportés par l’aide internationale n’ont aucun intérêt à voir se développer la libre entreprise et le libre échange. L’aide publique va dans les comptes secrets des petits et grands chefs, et une partie fait son retour en France sous forme de subventions aux partis et officines politiques. Aux indépendances, la France a orienté ses anciennes colonies vers la planification, le protectionnisme et la monoculture de rente. Tous les vices de l’étatisme ont été exportés vers le continent africain, ce qui explique la stagnation économique et les conflits à répétition. En effet, l’histoire nous enseigne que le protectionnisme éloigne de la paix et conduit aux affrontements.
Le blocage africain est un blocage politique. Les dictateurs et leurs clientèles inventent de toutes pièces une « culture africaine » qui légitimerait le rejet du marché. Il est tant de renverser la manière de penser des nouvelles générations car d’évidence, les pays qui progressent le plus dans le monde sont ceux qui ont libéré leur marché. Les libertés semblent d’ailleurs l’ultime voie qui puisse sortir le continent des excès meurtriers des États dit « forts » qui étouffent totalement les populations, l’initiative privée et donc la création de richesse. Après 50 ans d’indépendance, fort du constat d’échec et d’inertie des dirigeants, il faut s’engager dans un combat acharné pour la liberté et que les intellectuels et la société civile dans son ensemble défendent ce modèle pour avancer enfin.
Article publié par Audace Institut Afrique.
Tiens tiens cela me rapelle un pays dont le nom commence par un F…