Le Premier Ministre grec Georges Papandréou a été contraint d’abandonner son projet de référendum, sous la pression de l’autorité allemande. Mais Angela Merkel pourrait bien être confrontée à d’autres amateurs de référendum, cette fois-ci plus près de chez elle.
Par Open Europe
Au début de ce qui restera une folle semaine, le Premier Ministre grec Georges Papandréou a surpris en annonçant qu’il souhaitait la tenue d’un référendum à propos du second plan de sauvetage de la zone euro pour la Grèce. Ses arguments étaient les suivants: « Nous faisons confiance aux citoyens, nous croyons en leur jugement, nous croyons en leur décision. »
Une immense consternation a gagné les politiciens européens et les décideurs, que nous avons couvert ici. Le sens général des commentaires était que la décision était irrationnelle et irresponsable, et que plutôt que de rechigner à accepter le cadeau, les Grecs auraient dû exprimer leur reconnaissance d’obtenir ce renflouement. Toutefois, la frustration résulte aussi du fait qu’une bonne partie de l’opinion publique – en particulier en Allemagne – était envieuse à l’égard des Grecs qui obtenaient l’occasion d’exprimer leur point de vue concernant le plan de sauvetage. Si, dans certains cas, cela a été exprimé de façon subtile, à la une du quotidien Bild la demande était explicite: « Mme Merkel, nous voulons aussi un référendum ».
C’est vrai, il est difficile de ne pas mesurer la gêne des dirigeants politiques européens qui se sont efforcés de surmonter la crise de la dette, certes de manière inadéquate. Mais de trop nombreux commentaires semblaient dénigrer – ou même délégitimer – le principe d’autoriser la population grecque à exprimer son point de vue sur un sujet d’importance cruciale tel que l’avenir de son pays. Par exemple, Rainer Brüder, le chef du groupe parlementaire du FDP a déclaré qu’il était « irrité » par ce projet de référendum; rappelons que le FDP a mis un point d’honneur à défendre les intérêts des contribuables allemands durant la crise, mais il semble croire que les contribuables grecs (certes, certains Grecs ne règlent pas leurs impôts) ne devraient pas bénéficier d’un droit de regard sur les mesures qui leur sont imposées suite aux décisions irresponsables prises par leurs élites politiques.
Même si, pour les Grecs, le choix était illusoire étant donnée la solution alternative, à savoir un défaut désordonné, qui pouvait s’avérer encore plus mauvais, l’idée d’avoir son mot à dire n’en est pas moins une importante tradition démocratique, comme l’ont reconnu certains commentateurs allemands, tel que Frank Schirrmacher du FAZ.
Avant la panique et la terreur bientôt hors de contrôle, il est bon de prendre du recul pour voir clairement ce qui se passe ici sous nos yeux. C’est le spectacle d’une dégénérescence des valeurs et des croyances [démocratiques] qui étaient autrefois au cœur même de l’idée d’Europe.
Au terme de quelques journées très agitées, Papandréou a finalement été contraint d’abandonner ses plans de référendum, sous la pression d’une double opposition, interne et externe. Mais il a toutefois réussi à obtenir le soutien du principal parti d’opposition, Nouvelle Démocratie, pour les mesures d’austérité – certains ont soutenu que c’était là son principal objectif. Il en est résulté un petit triomphalisme de la part de certains dirigeants européens, comme Nicolas Sarkozy, qui, un peu désinvolte, a déclaré: « Je suis content qu’il y ait eu suffisamment de personnes responsables en Grèce pour comprendre notre message. » Retournant sa veste, Bild a salué la chancelière allemande Angela Merkel pour son rôle dans la mort du référendum grecque avec un article euphorique:
La chancelière Angela Merkel a ramené… les Grecs à la raison. Un exploit de force majeur à la hauteur de l’un des 12 travaux d’Hercule! La chancelière Angela est désormais véritablement Merkule!
Qui a dit double standard ?
Toutefois, Mme Merkel (sur la photo dans une pose herculéenne) pourrait bien être confrontée à d’autres amateurs de référendum, cette fois-ci plus près de chez elle. Süddeutsche a annoncé il y a deux jours que, inspirés par les Grecs, Thomas Silberhorn et Alexander Dobrindt, des cadres du CSU (le parti frère bavarois du CDU de Merkel), ont tous deux déclaré qu’ils soutenaient le principe de la tenue de référendums sur les questions européennes, Silberhorn affirmant qu’il n’était pas opposé à l’idée d’un référendum sur l’avenir des modifications du traité de l’UE concernant un mécanisme de stabilité permanente. Cependant, M. Peter Altmaier du CDU qui s’est dit «agacé» par les deux compères, a riposté:
Je trouve cela extrêmement problématique de compliquer la situation difficile qui a émergé avec l’annonce du référendum grec en multipliant les demandes pour davantage de référendums.
L’idée d’un référendum allemand a également été critiquée par Jürgen Trittin du parti des Verts allemands (Die Grünen), qui a dit que « réclamer des référendums quand on est contre l’Europe n’est pas démocratique, c’est du populisme de droite. »
Euh, ok.
Comme nous l’avons déjà fait valoir auparavant, la crise la zone euro a multiplié d’un facteur 17 le difficile équilibre entre la gestion efficace de la crise et la responsabilité démocratique. Bien que les projets de référendum de Papandréou soient tombés en ruines, une chose est claire: la bataille des référendums n’est pas encore terminée…
—-
Sur le web
Laisser un commentaire
Créer un compte