David Cameron ne peut plus accepter le fait que les mécanismes et procédures de l’UE soient utilisés sans l’accord explicite de tous les membres, ce qui serait une première.
Par Daniel Hannan, depuis Oxford, Royaume-Uni
Vingt-six leaders de l’Union Européenne viendraient de s’accorder sur un nouveau projet pour le traité d’union fiscale. Bien que le texte ne soit pas encore disponible, il fait apparemment toujours référence aux institutions européennes. Sur quelles bases légales est-ce possible cependant ? Ce texte est supposé être un accord entre 26 États (et il est quasi certain qu’ils seront moins au final) qui sont aussi membres de l’UE. Ils ne peuvent pas plus décréter de réunions avec le Parlement Européen que les Majlis d’Oman ; ni fixer que la Cour de Justice européenne doit arbitrer leurs débats plutôt que la Cour Suprême de l’Idaho.
S’ils veulent utiliser les institutions de l’UE, ils ont besoin de la permission des 27 membres. Toutefois, ils ont bien fait comprendre qu’ils refusent d’accepter ne serait-ce que le prix symbolique que David Cameron leur demande en échange, à savoir une garantie que les futures régulations dans le domaine des services financiers ne puissent être imposées sans l’accord de la Grande-Bretagne. Le Premier Ministre ne peut envisager de faire des concessions sur ce point : cela reviendrait à annuler son veto – l’action la plus populaire de son mandat. Il ne peut pas non plus accepter le fait que les mécanismes et procédures de l’UE soient utilisés sans l’accord explicite de tous les membres, ce qui serait une première. Cela reviendrait en pratique à enterrer le droit de veto – pour toujours. Tout groupe de pays souhaitant adopter de nouvelles mesures intégrationnistes aurait simplement à signer un traité entre ces pays, avant de l’étendre via les institutions de Bruxelles.
Que doit donc faire la Grande-Bretagne ? Une possibilité est d’essayer de sauver l’accord initial : l’éventuel amalgame des traités de l’UE et de l’Union Fiscale, en échange de la fin des votes à la majorité simple en ce qui concerne les services financiers. Vous pouvez être sûrs que c’est la position que Sir Humphrey à Bruxelles, terrifié à l’idée d’être exclu des cocktails les plus importants, essaye désespérément de sécuriser. Cependant, un tel résultat impliquera un changement de traité et il sera impossible aux ministres d’affirmer qu’il est trop mineur pour ne pas nécessiter de référendum, après avoir autant tergiversé à son propos.
Une deuxième option est d’essayer d’obtenir le même résultat par infiltration. L’idée est d’avoir deux traités parallèles en théorie, mais pas en pratique – en d’autres termes, permettre aux pays fédéralistes d’utiliser les institutions de l’UE sans protestation. Cela ne déclenchera peut-être pas la tenue d’un référendum, mais ce serait la pire solution : la Grande-Bretagne s’attirerait tout l’opprobre d’avoir utilisé son veto, sans l’avoir utilisé en réalité.
Une troisième alternative serait de ne pas chercher à circonscrire le traité d’union fiscale, mais au contraire à étendre son champ d’action. En d’autres termes, encourager l’union fiscale, plutôt que l’UE comme principal vecteur d’intégration. Après tout, si 26 (ou 22 ou 20 ou peu importe leur nombre) États s’accordent sur une gouvernance économique commune, n’est-il pas logique que l’harmonisation des taxes en fasse partie ? Pourquoi ne pas, par exemple, appliquer la taxe Tobin au travers de l’union fiscale, dont les membres semblent la vouloir ?
Plutôt que d’obliger les États de l’union fiscale à établir une toute nouvelle structure institutionnelle à partir de rien, pourquoi ne pas simplement transférer des départements des institutions existantes de l’UE vers l’union fiscale ? Laissez l’union fiscale gérer Eurojust ; laissez la gérer le Service Européen pour l’action extérieure ; laissez la gérer les politiques communes de l’agriculture et de la pêche à la Commission Européenne ; laissez la récupérer, petit à petit, toutes les responsabilités de l’UE, qui concernent l’union politique. Et ensuite, laissez la prendre le contrôle du Parlement Européen et de la Cour de Justice européenne, laissant les États non participants dans un arrangement plus souple, similaire à l’Espace économique européen actuel.
Cela peut arriver. Cela peut vraiment arriver. Il n’y aurait pas besoin de dispute. En réalité, il n’y aurait aucune crise au moment où la Grande Bretagne se désengagera. Vous n’auriez même pas besoin de l’appeler une sortie de l’Union Européenne. L’UE survivra peut-être, tel une coquille vide, sa fonction réduite à la maintenance d’un marché libre et d’une meilleure coopération intergouvernementale. À ce moment, il pourrait être judicieux de lui donner un nouveau nom. Pourquoi pas Association européenne de libre-échange ?
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