Les enfants de Fourier

Charles Fourier n’était pas un gars modeste : le monde se divisait en deux grandes ères, celle antérieure et celle postérieure à Charles Fourier

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Les enfants de Fourier

Publié le 28 janvier 2012
- A +

Fourier était sans doute utopique. Mais – disons-le clairement – il n’était pas un gars modeste. Il était convaincu que le monde se divisait en deux grandes ères : celle antérieure et celle postérieure à Charles Fourier.

Par Francisco Cabrillo, de Madrid, Espagne

Beaucoup des idées défendues par les socialistes pré-marxistes nous semblent aujourd’hui assez absurdes. Karl Marx, qui était un type intelligent mais peu affable et plutôt malintentionné, nomma « utopistes » les socialistes antérieurs à lui ; parce que, selon son opinion, ils n’avaient pas réussi à démontrer « scientifiquement » le processus historique qui conduirait à l’effondrement du système capitaliste et ouvrirait les portes au communisme. C’est-à-dire, à cette société où – ce sont ses propres paroles – n’importe qui le désirerait aurait la possibilité « de chasser le matin, de pêcher l’après-midi, de pratiquer l’élevage le soir, de faire de la critique après le repas, selon son bon plaisir, sans jamais devenir chasseur, pêcheur ou critique ». Il n’est pas difficile de se rendre compte, en lisant ce texte, du fait que, bien que Marx méprisât les socialistes utopiques, son œuvre était imprégnée de leurs idées à un degré bien plus élevé qu’il ne le reconnaissait lui-même.

Charles Fourier – à ne pas confondre avec le grand mathématicien Jean-Baptiste-Joseph Fourier, strictement contemporain, mais bien plus sensé que notre personnage – naquit en 1772 à Besançon. Critique de la société et de la morale traditionnelle, de la religion chrétienne et de l’économie de marché, il défendit une organisation sociale basée sur des coopératives et des communes auto-suffisantes. Il appela « phalange » ou « phalanstères » ces groupements, qui seraient composées de quelques 1.600 ou 1.800 personnes chacune ; et seraient les centres de production et de consommation, dans lesquels ces personnes vivraient. Les gens y entreraient volontairement. Et dedans, pourraient développer de manière heureuse leur personnalité, donnant libre champ à leurs passions, qui se coordonneraient de manière harmonieuse dans un monde sans impositions, basé sur la coopération des individus, les uns avec les autres.

Fourier était sans doute utopique. Mais – disons-le clairement – il n’était pas un gars modeste. Il était convaincu que le monde se divisait en deux grandes ères : celle antérieure et celle postérieure à Charles Fourier. Dans son livre Théorie des quatre mouvements, il écrivait :

Moi seul, j’aurai confondu vingt siècles d’imbécillité politique et c’est à moi seul que les générations présentes et futures devront l’initiative de leur immense bonheur. Avant moi, l’Humanité a perdu plusieurs mille ans à lutter follement contre la Nature. Moi, le premier, j’ai fléchi devant elle en étudiant l’attraction, organe de ses décrets ; elle a daigné sourire au seul mortel qui l’eût encensée ; elle m’a livré tous ses trésors. Possesseur du livre des Destins, je viens dissiper les ténèbres politiques et morales, et sur les ruines des sciences incertaines, j’élève la théorie de l’Harmonie universelle.

Grand homme, sans doute ! Mais nous savons que les génies aussi ont des ennemis qui, par des observations malveillantes et des réflexions inconvenantes, tentent d’occulter la gloire des plus grands bienfaiteurs du genre humain. Et c’est ce qui arriva à Fourier. Déjà à son époque, en étudiant ses idées, il passa par la tête de plus d’un que les choses n’étaient pas aussi faciles que notre réformateur pensait. Dans la vie – argumentaient-ils –, il y a des travaux agréables ; mais d’autres sont très ennuyeux. Et le plus probable – concluaient-ils – est qu’on ne trouverait jamais de personnes pour s’en charger. Y aura-t-il, par exemple, des volontaires pour se consacrer avec liberté, joie et lâchant la bride à leurs passions au travail d’éboueurs ?

Il semblait difficile de réponde à la critique. Mais Fourier avait également une réponse pour cette objection ! Qui s’occuperait sans se plaindre des détritus et des déchets de toute sorte ? Les enfants ! Répondait notre personnage. Nous connaissons tous – expliquait-il – de nombreux cas d’enfants qui se sentent spécialement attirés par la saleté. Nous pourrions les réunir et former des groupes qui, avec plaisir, se chargeraient de ramasser les poubelles et de réaliser d’autres travaux que les adultes considèrent répugnants. Le problème, apparemment insoluble, trouvait ainsi une brillante solution.

Il est possible que cette idée semble folle à certains. Mais ce doit être dû, sans doute, au fait que dans notre monde matérialiste et capitaliste, beaucoup ont renoncé à construire l’utopie. Et ainsi vont les choses.

—-
Article originellement publié par Libre Mercado.

Lire aussi :
Charles Fourier et le phalanstère

Voir le commentaire (1)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (1)

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

L'un des principes fondamentaux du marxisme est la théorie de la valeur du travail, qui énonce que la valeur d'une marchandise est déterminée par le temps de travail socialement nécessaire pour la produire. Dans ce cadre, le travail lui-même devient une marchandise – quelque chose qui peut être acheté et vendu sur le marché. Marx affirme que, sous le capitalisme, les travailleurs sont contraints de vendre leur force de travail aux capitalistes, qui les exploitent en leur versant des salaires inférieurs à la valeur totale produite par leur tra... Poursuivre la lecture

50 % des Allemands de l'Est déclarent : « De nombreux développements négatifs en Allemagne aujourd'hui me rappellent l'Allemagne de l'Est socialiste. »

 

Le gouvernement allemand intervient de plus en plus dans l'économie. De nombreux Allemands ont été scandalisés par les mandats du gouvernement qui leur dictent les systèmes de chauffage qu'ils sont autorisés à utiliser. Et pour la première fois peut-être dans l'histoire, un pays a volontairement interdit son produit numéro un : les voitures à moteur à combustion.

Co... Poursuivre la lecture

L’exil d’Edmundo González Urrutia en Espagne, où il est arrivé lundi 9 avril, menace la stratégie de l’opposition vénézuélienne. Et les socialistes espagnols pourraient ne pas être totalement étrangers à cette décision qui ravit le dictateur Nicolas Maduro. 

 

Le positionnement tiède de l’UE 

À quelques jours de l’élection présidentielle du 8 juillet 2024, alors que le candidat de l’opposition démocratique, Edmundo González Urrutia, détenait une avance de 10 points dans les sondages, Nicolas Maduro menaçait le pays d’un « b... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles