Le monde qui nous attend va imposer à chacun un changement de mentalité radical, impératif pour éviter de glisser dans la pauvreté.
Par David Descôteaux, de Montréal, Québec.
Ça a duré 80 ans. Vous aviez un emploi, on vous disait quoi faire, vous preniez ensuite votre retraite. C’est fini tout ça.
Pour plusieurs, cette récession sera éternelle. Le modèle industriel se meurt à nos pieds. Le temps où vous pouviez faire un travail moyen et gagner une bonne paye, c’est fini. Vous êtes un travailleur « moyen »? Vous êtes dans le trouble. Parce que quelqu’un, quelque part, peut faire votre travail pour beaucoup moins.
C’est le gourou du marketing Seth Godin qui déballait cette joyeuse théorie il y a quelques jours. Devant l’animateur George Stroumboulopoulos, sur les ondes de CBC (via Business Insider). Je l’écoutais, et je pensais à l’usine de Rio Tinto à Alma. Aux papetières. À Electrolux. Aux milliers d’emplois qu’on perd en ce moment au Québec.
Et à l’avenir.
Pour éviter de glisser sur un serpent (vers la pauvreté), il faudra changer de mentalité, dit Godin. Offrir un produit unique, foncer, se vendre. Seul problème : nos écoles, notre système d’impôts, de retraite… Tout est bâti autour du mantra : « contente-toi de faire ce qu’on te dit, et l’État (ou la compagnie) va prendre soin de toi. » Nous ne sommes pas du tout préparés pour ce qui vient.
Courir vers le haut
Les entreprises participent à une « course vers le bas ». Elles veulent produire au moindre coût possible. Grâce à la mondialisation, si elles peuvent économiser quelques sous en sous-traitant votre emploi à un Indien, elles le feront.
Votre job à vous, dit Godin, c’est de participer à la « course vers le haut ». Au lieu d’attendre que quelqu’un vous embauche ou vous dise quoi faire, vous devez prendre votre carrière en mains. Trouvez une façon d’offrir quelque chose d’unique, de valeur. Si vous le faites, le succès vous attend. Les gens vont vous trouver — grâce entre autres aux nouvelles technologies, à Internet — et vous payer cher. Salarié? Peu importe votre employeur, assurez-vous que votre boulot vous permette de vous développer. Au lieu de vous rendre inemployable ailleurs.
« Les gens grandissent avec l’idée que s’ils paient leurs impôts et font simplement ce qu’on leur dit de faire, un filet de sûreté ou une pension les attendra. Aujourd’hui, tout ça s’écroule », dit Godin.
Stabilité ? Oubliez ça !Â
Théorie à deux sous d’un vendeur de livres en série? Fast-food intellectuel ? Possible. Reste que Godin expose une réalité dérangeante : la stabilité, la permanence et le « filet social » sont de plus en plus des rêves de boomers. La viabilité des promesses de retraite et des programmes sociaux actuels reposent en grande partie sur la notion magique d’endettement perpétuel. Nos enfants — et les plus jeunes d’entre nous — devront peut-être apprendre à s’en passer.
Ce n’est pas un plaidoyer pour le cheap labour. C’est un aperçu du futur, version Godin. Un heads up! Et je crains que Godin ait raison. Qu’on aime ou pas, le système auquel nous sommes habitués est en train de virer tranquillement à l’envers.
Le problème : tout le monde n’est pas un entrepreneur. Une majorité de gens se contenteront toujours d’aller à l’usine, faire leur boulot, et puncher à cinq heures. D’ailleurs plusieurs entreprises préfèrent encore ce type de travailleurs, qui ne fait pas de vague.
Bien sûr, dit Godin. Quelqu’un devra toujours faire ce genre de boulot. Mais ça n’a pas à être vous…
Tout ça n’arrivera pas demain matin. Et le gourou peut se tromper. Mais supposons qu’il voie juste. C’est tout un changement de mentalité qui nous attend.
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