Qui sont les libertariens ?

Longtemps marginalisés sur la scène politique américaine, les libertariens ont aujourd’hui le vent en poupe

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Qui sont les libertariens ?

Publié le 4 mars 2012
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Longtemps marginalisés sur la scène politique américaine, les libertariens ont aujourd’hui le vent en poupe. Dans leur viseur : l’État fédéral et l’administration Obama. Mais qui sont-ils vraiment ? Quelles sont leurs idées ?

Par Damien Theillier 
Saviez-vous que Jimmy Wales, l’inventeur de Wikipédia, est un libertarien ? Il assure qu’il a conçu son encyclopédie sur le modèle de l’ordre spontané du prix Nobel d’économie Friedrich Hayek et se dit grand lecteur d’Ayn Rand [1]. Il en va de même pour les concepteurs de South Park ou des Simpson : la romancière et philosophe Ayn Rand apparaît régulièrement dans les épisodes de ces séries de cartoons.

Dans Libertarianism : A Primer [Abécédaire du libertarianisme, non traduit en français], David Boaz, vice-président du Cato Institute, un influent think tank libertarien, définit le libertarianisme comme « l’idée que chacun a le droit de vivre sa vie comme il l’entend tant qu’il respecte les droits d’autrui, qui sont les mêmes que les siens. »

Longtemps marginalisés sur la scène politique américaine, les libertariens ont aujourd’hui le vent en poupe. Dans leur viseur : l’État fédéral et l’administration Obama. Lors d’un sondage Gallup réalisé en 2009, 23% des Américains pouvaient être assimilés à des libertariens, contre 18% en l’an 2000. Le mouvement Tea Party, dont le mot d’ordre est « moins de gouvernement, moins d’impôt » est ce qui ressemble le plus à un mouvement libertarien de masse dans l’histoire récente.

Ron Paul, représentant du Texas (sud), célèbre libertarien candidat à l’investiture républicaine pour l’élection présidentielle de 2012, assure que les Américains sont désormais prêts à partager ses idées.

Qui est Ron Paul ? 

En France, le journal Le Monde lui a consacré un article en janvier 2011, expliquant que l’économiste français Frédéric Bastiat était son « maître à penser ». Ex-candidat à la présidentielle de 2008, élu à la Chambre des représentant depuis des décennies, Ron Paul (75 ans) a été nommé en 2011 à la présidence de la sous-commission parlementaire chargée de contrôler la Réserve fédérale. Il réclame « la fin de la Fed » (la banque centrale américaine) et le retour à l’étalon-or. Ces positions ont fait de lui une icône du mouvement Tea Party, composé pour moitié de libertariens et pour moitié de conservateurs traditionnels.

Son fils, Rand Paul (48 ans), a été élu en novembre dernier sénateur républicain du Kentucky. Tous deux sont médecins et tous deux s’opposent aux mesures interventionnistes de l’État fédéral, comme le programme de sauvetage des institutions financières, le plan de relance économique et la réforme Obama du système de santé. Depuis son élection, Rand Paul a déjà associé son nom à un projet de loi anti-avortement visant à déclarer que l’embryon était une personne dès le moment de sa conception. Surprenant pour un défenseur acharné des libertés individuelles ? Le libertarianisme ne se laisse pas facilement ranger dans des catégories toute faites.

Êtes-vous libertarien, conservateur ou socialiste ?

Il existe aujourd’hui un autre choix que la droite ou la gauche. Les socialistes défendent en général les libertés civiles, mais veulent que l’État contrôle les affaires économiques. Les conservateurs inversent cette tendance, en prônant une plus grande liberté économique, mais sont désireux de contrôler la vie privée. Les libertariens préconisent un maximum de liberté individuelle et économique compatible avec le respect d’autrui. Les libertariens ne sont ni « de gauche » ni de « droite » ni même une combinaison des deux. Ils pensent que, sur chaque question, chacun a le droit de décider pour lui-même ce qui est meilleur pour lui et d’agir selon ses préférences, tant qu’il respecte le droit des autres à faire de même.

Arthur Gautier, dans un article récent sur la morale des libertariens, expliquait que « le problème principal de l’axe gauche-droite est qu’il ne laisse aucune place à la pensée libérale, celle-ci ne pouvant être rangée ni avec l’égalitarisme de la gauche, ni avec le nationalisme de la droite. En son temps, l’économiste et député libéral Frédéric Bastiat votait tantôt avec la gauche, tantôt avec la droite, selon le projet de loi discuté. »

Aux États-Unis, le bipartisme ne permet pas de troisième voie ou de parti politique indépendant. C’est pourquoi David Nolan, fondateur du Libertarian Party en 1971, a eu l’idée de créer un diagramme (voir ci-contre) qui ajoute à l’axe gauche-droite un deuxième axe liberté-contrainte. De cette façon, explique Arthur Gautier, « la pensée libérale trouve enfin sa place sur l’échiquier politique. »

Les libertariens ont le vent en poupe

Récemment, le Courrier International publiait un dossier intitulé « Les libertariens en vedette » (Courrier international, n° 1058 du 10 au 16 février 2011). Il y était décrit que pour les libertariens, la liberté individuelle est la valeur politique dominante. Ce qui n’exclut pas qu’il y en ait d’autres ! Et c’est d’ailleurs pourquoi, il y a des différences de sensibilité entre libertariens, notamment sur l’avortement, les drogues dures, la défense nationale, l’immigration…

L’hebdomadaire soulignait : « comme toute philosophie politique, le libertarianisme renferme des milliers de courants, depuis les anarchistes qui veulent abolir l’État jusqu’aux conservateurs (…). La ligne libertarienne classique est que les seules activités auxquelles un gouvernement devrait se limiter sont l’entretien d’une armée de métier, le maintien de la sécurité du pays et l’organisation du système judiciaire. Rien d’autre. C’est ce qu’on appelle le minarchisme. »

Le libertarianisme est un courant qui est né dans les années 60 en opposition à la croissance ininterrompue de l’État au cours du XXe siècle. Mais il puise ses sources philosophiques dans l’histoire des États-Unis depuis ses origines. Selon le journal, « la révolution américaine a été un mouvement libertarien contre le pouvoir de la couronne britannique. La Constitution américaine est un texte libertarien qui limite le rôle de l’État à la couverture des besoins les plus basiques de la société en lui fournissant un corps législatif pour adopter des lois, un système judiciaire pour les interpréter et une armée pour la protéger (quoique certains des Pères fondateurs, comme Alexander Hamilton, aient voulu centraliser le pouvoir). »

Le politologue Sébastien Caré y a consacré un ouvrage [2] dans lequel il écrit, « les libertariens ne prétendent pas inventer une philosophie politique, mais plutôt réhabiliter la pensée libérale. Ils opèrent une mutation du libéralisme classique (…) en généralisant ses principes, autrement dit en projetant la logique du marché dans toutes les sphères de la vie sociale et en les subvertissant, en faisant de la défense des libertés une lutte incessante contre l’État. »

Aux États-Unis, un parti libertarien existe depuis 1970. Ce parti reste très minoritaire face aux deux grands partis traditionnels. Mais il arrive à présenter un candidat à chaque élection présidentielle. En fait, le véritable impact des idées libertariennes passe au travers d’Internet, de réseaux intellectuels informels et de think tanks comme le Cato Institute.

L’éthique libertarienne

Revenons à David Boaz. Dans un article de 1997 [3], il proposait quelques éléments d’éthique « libertarienne » :

  • Droits des individus : les « libertariens » sont attachés au droit de chacun à la vie, à la liberté et à la propriété – que tout un chacun possède naturellement et ce, bien avant la création des gouvernements. Ces droits ne sont pas concédés par un gouvernement ni par la société ; ils sont inhérents à la nature de l’être humain. Dans cette optique, toutes les relations humaines doivent être volontaires. Les seules actions que la loi puisse interdire relèvent de l’usage unilatéral de la force – dans les cas de meurtre, viol, vol, rapt et fraudes.
  • Autorité de la loi : la doctrine « libertarienne » n’est ni libertinage, ni hédonisme. Loin de prétendre que « tout un chacun peut faire ce qu’il veut sans que quiconque puisse y redire », elle propose une société de liberté dans le cadre de la loi, où les individus peuvent vivre à leur guise tant qu’ils respectent les mêmes droits chez autrui.
  • Un gouvernement au pouvoir restreint : Les « libertariens » veulent diviser et limiter le pouvoir que le peuple délègue au gouvernement. Imposer des limites au gouvernement est le fondement politique de la doctrine « libertarienne ».
  • Liberté des marchés : Le droit de propriété entraîne celui de l’échanger par consentement mutuel. À des individus libres correspond le système économique des marchés libres, indispensables à la création de richesses.
  • Vertus de la production : les « libertariens » défendent le droit qu’ont ceux qui produisent de garder ce qu’ils gagnent, contre une nouvelle catégorie de politiciens et bureaucrates qui veulent s’emparer de leurs gains pour les redistribuer à ceux qui ne l’ont pas produite.
  • Harmonie des intérêts : les « libertariens » croient à l’existence d’une harmonie naturelle d’intérêts parmi les membres pacifiques et producteurs d’une société équitable. (…) C’est seulement lorsque le gouvernement se met à distribuer des récompenses à la suite de pressions politiques que se développent des conflits entre groupes, que s’exacerbe la course au pouvoir politique.
  • Paix : Les « libertariens » se sont toujours farouchement opposés au fléau qu’est la guerre. (…) Certes les hommes et femmes libres ont à maintes reprises eu à défendre leurs sociétés contre les menaces étrangères ; mais l’histoire du monde démontre que la guerre s’est faite le plus souvent l’ennemie commune des tenants de la paix et de la productivité dans les deux camps.

—-
Sur le web

Article originellement publié sur 24HGold.

Notes :
[note][1] Ayn Rand est l’auteur du roman Atlas Shrugged, considéré comme une référence littéraire et philosophique par tous les libertariens.

[2] Les libertariens aux États-Unis : Sociologie d’un mouvement asocial, Presses Universitaires de Rennes, 2010.

[3] The Coming Libertarian Age.[/note]

À consulter :

 

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  • Moi qui pensait qu’un libertarien avait des griffes et faisait des prières devant un billet de banque, je suis deçu 😀

  • Le libertarien est donc un grand optimiste persuadé qu’il ne sera jamais gravement malade et donc jamais vieux, qu’il pourra toujours subvenir à ses besoins sans aide simplement par le jeu de l’échange de sa production contre celle des autres, qu’il pourra également subvenir aux besoins des siens, qu’il sera protégé de ceux qui ne voudraient pas suivre ses règles simples en tentant de le dépouiller et qu’il évoluera dans un monde parfait peuplé d’autres libertariens uniquement soucieux de partager avec lui équitablement.

    C’est donc un neuneu, quoi.

    • Rien à voir, le libertarien sait que les problèmes sociétaux sont trop complexes pour être réglés par une agence coercitive monopolistique et qu’il existe des solutions de coopération pacifique infiniment plus efficaces et viables que la grossièreté archaïque de l’intervention étatique. La violence est une drogue qui offre ponctuellement l’illusion d’une résolution des problèmes mais génère davantage de problèmes sur le long terme.

      Quant à l’étatiste il croit que plein de gens son mauvais donc il faut un gouvernement plein de gens sont mauvais donc il faut un gouvernement pleins de gens sont mauvais donc il faut un gouvernement…

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