Christian Vanneste : « le système actuel privilégie les députés godillots et le clientélisme » (2e partie)

2nde partie de l’entretien avec Ch. Vanneste. Le député du Nord répond en philosophe aux questions de Contrepoints.

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Christian Vanneste : « le système actuel privilégie les députés godillots et le clientélisme » (2e partie)

Publié le 10 avril 2012
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Seconde partie de l’entretien avec Christian Vanneste. Le fougueux député du Nord répond en philosophe aux questions de Contrepoints sur l’actualité politique et sociale.

Entretien exclusif de Contrepoints.

Lire la première partie de l’entretien.

Contrepoints : Qu’est-ce qu’un parlement godillot ?

Christian Vanneste : Les députés godillots tiennent avant tout à être réélus et ont tendance à flatter le pouvoir. En retour, le pouvoir les flatte et leur en donne les moyens. C’est du donnant-donnant, accentué par le passage au quinquennat : le président est élu avant le Parlement, il peut faire sentir à chaque député qu’il lui doit son élection.

Le pire, ce sont les années qui viennent de se dérouler, les députés sont priés de ne lever leur main que pour approuver l’exécutif.

Un exemple : je suis en faveur de la suppression des départements, car c’est une strate coûteuse et obsolète. Mais lorsque nous discutions d’un projet de loi sur les collectivités territoriales, Hortefeux m’a répondu : « tu me demandes des choses et tu ne votes pas la loi ». C’est très piégeant, les députés n’ont pas d’autonomie, ils n’ont pas de droits en tant que tels et sont soumis à un marchandage permanent.

 

Est-ce que ce comportement godillot favorise les lois démagogiques ciblant une catégorie particulière ?

Oui bien sûr, la politique actuelle est une politique de marchés.

Premièrement, vous avez d’un côté des professionnels, à l’image de Nicolas Sarkozy déclarant « mon métier c’est la politique ». Au passage, je serais d’avis que les politiciens aient de vrais métiers avant de s’engager, avec une connaissance pratique de la vie et des gens.

Deuxièmement, ces professionnels considèrent que l’électorat est un marché segmenté en clientèles. Vous avez des groupes d’intérêt qu’il faut servir, soit en fonction de leur poids médiatique, de leur capacité de mobilisation dans les revendications sociales, ou encore de leur poids électoral.

On distribue les prébendes, l’intérêt général étant complètement évacué dans ce genre de tractations.

 

Parmi ces clientèles, vous avez eu maille à partir avec ce qu’on appelle le lobby gay, c’est-à-dire un ensemble d’associations militantes…

D’abord, je n’ai absolument rien contre les homosexuels, et surtout pas contre les personnes. Je déteste ces accusations d’homophobie. J’ai des amis homosexuels avec lesquels j’entretiens d’excellentes discussions, et qui respectent mes opinions. Ainsi j’ai récemment dîné avec Renaud Camus avec qui j’ai sympathisé. Il n’est pas connu pour être un homme de gauche, et certains le décrivent même comme le Mishima français.

Ce que je ne supporte pas c’est le lobby, le groupe de pression qui pousse la politique de notre pays dans un sens contraire à l’intérêt général, par des méthodes intellectuellement agressives, comme le mensonge et le bourrage de crâne.

En particulier mes propos ne visaient qu’à dénoncer deux désinformations du lobby : le premier concerne la déportation des homosexuels, le second le nombre de familles homoparentales en France, 300 000 selon le chiffre répété par les media, alors que l’INED en compte 20 000.

On m’a collé une étiquette d’obsessionnel, mais lorsque l’on regarde mon travail parlementaire, on s’aperçoit que je n’évoque pratiquement jamais ce sujet qui m’intéresse moins que l’économie ou la sécurité. Même si la défense de la famille traditionnelle est pour moi cruciale, je me suis abstenu d’intervenir pendant le débat sur le mariage homosexuel. Je voudrais que l’on puisse parler de ces sujets tranquillement, mon attitude est avant tout intellectuelle, anti-lobbys, et non moralisatrice.

 

La question du mariage homosexuel n’est-elle pas secondaire par rapport à celle du clientélisme et des associations subventionnées qui influencent l’opinion publique ?

Vous avez entièrement raison, d’autant que la première fois que j’ai eu un problème avec ce lobby, c’était pour un problème de financement public.

Lorsque je présidais la commission Santé et Citoyenneté au Conseil régional du Nord, je me suis aperçu que de nombreuses associations percevaient des fonds sans remplir les conditions de leur mission.

 

La Droite populaire n’a-t-elle pas pour fonction de singer une pseudo opposition au sein de l’UMP qui est un parti caporaliste ?

Au départ ce courant a une bonne origine, il s’agissait d’un regroupement de personnes aux idées claires et bien enracinées, qui souhaitaient manifester une sensibilité composée en grande partie de vrais gaullistes, de libéraux à droite du Parti républicain et de Démocratie libérale, dans le sillage d’Alain Griotteray. Ma spécificité au sein du groupe est que je me définis comme gaulliste moins étatiste, libéral et conservateur, avec un ancrage chrétien hérité de Maritain.

Ensuite il y a eu manifestement une tentative de récupération. Nous avons d’abord été bien traités, reçus partout, mais Thierry Mariani doit manifester une totale solidarité gouvernementale. Enfin l’arrivée imprévue d’Éric Raoult, était également destinée à tenir la Droite populaire en laisse.

 

Comment voyez-vous votre avenir politique dans les mois qui viennent ?

Cet avenir pour le moment est certain : je suis toujours membre de l’UMP, pour une raison évidente, c’est qu’on ne peut exclure quelqu’un qui se contente de rappeler une vérité historique. L’UMP a cru intelligent d’annoncer que j’allais quitter la vie politique, ce qui a provoqué l’effet contraire.

Jean-François Copé a refusé ma demande d’explication devant le bureau politique de l’UMP. La manœuvre pour m’exclure est irrecevable en droit. Si elle avait eu lieu, je l’aurais contestée devant les tribunaux, et j’aurais gagné.

 

Dans l’éventualité où vous vous présenteriez aux élections législatives, sous quelle étiquette le feriez-vous ?

Pour l’instant je ne suis pas investi, peut-être que je me présenterai, ma décision n’est pas encore prise. Mais je viens tout juste d’être élu à la présidence du RPF. Ce que je crains, c’est que Nicolas Sarkozy soit battu.

Malheureusement, les faits penchent plutôt en faveur de cette hypothèse. De plus, dans la plupart des pays européens, les sortants sont battus. Dans ce cas, il y aurait sans doute une recomposition du paysage politique.

 

Pour remporter les législatives, l’UMP devra-t-elle faire alliance avec le FN ?

Non, cette option est impossible. D’une part cela provoquerait l’éclatement immédiat de l’UMP. Et d’autre part le FN ne veut pas de cette alliance, car c’est une entreprise familiale qui entend prospérer sur la défaite de la droite.

Pour ma part, je préfèrerais une logique de bipartisme à l’anglo-saxonne, avec une élection à un seul tour par circonscription, favorisant un spectre très large de chaque côté.

 

Pour conclure, comment expliquez-vous la médiocrité du débat public actuel ?

On peut imputer les mauvais résultats de la France à l’absence dans le débat public des idées libérales et conservatrices. C’est une trahison qui nous coûte très cher, car cela nous a empêché de faire les réformes salutaires au bon moment.

La France a toujours oscillé entre une droite qui a été un conservatisme de notables liés à des intérêts locaux, c’est-à-dire l’esprit de Pierre Queuille et de son successeur Jacques Chirac. Et d’autre part, un délire révolutionnaire stupide, qui méconnait l’existence de deux révolutions françaises, dont la seconde, jacobine, a anéanti les résultats de la première, libérale. Cet esprit de changement brusque a détruit le réformisme et n’a cessé d’abaisser le pays.

 

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