Comment la droite française pourra-t-elle sortir du piège Front National tendu par Mitterrand, tout en ne s’alliant pas avec le parti de Marine Le Pen, aux réflexes illibéraux?
Par Marc Crapez.
En 1964, Mitterrand identifiait un piège dont souffrait la gauche : « L’habitude prise de compter sur les suffrages communistes pour abattre les gouvernements et de les décompter pour former les majorités… en enfermant les citoyens qui votent communiste dans un ghetto électoral ». A partir de 1983, il renversa ce piège en parquant les électeurs du Front national dans un enclos électoral.
Chirac tomba dans le panneau et fourvoya la droite en appelant à voter en faveur de candidats communistes contre des candidats FN. La ligne Sarkozy s’en distingue. Ni alliance, ni diabolisation. Des consignes au cas par cas. Libre à chacun de voter blanc ou en faveur d’un candidat socialiste. Pas question d’aller voter pour l’extrême-gauche, ni de se laisser dicter son comportement électoral par la gauche !
Cela concorde avec le tempérament de droite qui n’est pas moutonnier et croit au libre-arbitre. Compte-tenu des souhaits de la base, il conviendrait de lever l’excommunication qui pèse encore sur l’éventualité de reports individuels de voix UMP vers un candidat FN plutôt que PS. Et inversement « d’accepter les voix » d’où qu’elles proviennent, car ce chantage à l’acceptation des voix du FN va recommencer après l’élection présidentielle.
Le piège du front républicain
Hormis ces deux jurisprudences, celles de Chirac et de Sarkozy, reste la possibilité d’accords électoraux avec le FN. Ce serait une erreur. Marine Le Pen est trop entichée de thèses illibérales. De la Grèce aux Pays-Bas, les partis populistes s’emploient à torpiller les tentatives d’assainissement budgétaire. Un rapprochement ne serait viable qu’après une nouvelle étape d’aggiornamento.
Il faut raisonner sur des réalités. En l’état de l’opinion publique et de la sociologie électorale, ce type d’accord ferait automatiquement fuir un quart des électeurs de droite vers l’abstention ou le vote socialiste, tandis qu’un quart des électeurs du FN n’en feraient qu’à leur tête et se reporteraient comme à leur habitude vers le candidat socialiste.
La droite n’est pas majoritaire car une partie de l’électorat FN est de gauche. Schématiquement, le FN est composé d’un gros quart de gauche, d’un petit quart d’extrême-droite et d’une moitié de droite. Généralement, au deuxième tour d’un scrutin, la moitié de droite se reporte vers le candidat de droite, tandis que le quart de gauche se reporte vers le candidat de gauche. En cas d’accord de désistement entre UMP et FN, la consigne de vote de ce dernier ne déplacerait donc vers la droite que le quart des électeurs FN qui est d’extrême-droite, et ce gain serait contrebalancé par la défection d’environ un quart d’électeurs UMP rebutés par le FN.
En bon mitterrandien, Hollande a appelé, au soir du 1er tour, au « sursaut républicain ». Il s’agit de rameuter la fibre antifasciste, en vue de faire bloc et barrage à la collusion entre la droite et l’extrême-droite, patati et patata. Jargon mis à part, cela signifie obliger le centre-droit à se retourner contre la droite. La gauche laisse l’extrême-gauche prendre en otage les notables du centre-droit pour les forcer à se retourner contre la droite en l’accusant de dérive droitière.
Trahison payante en termes d’impact médiatique. Toute la tactique de Villepin –qui a fait semblant de ne pas pouvoir recueillir ses 500 signatures– consiste à exister médiatiquement, à être invité par les journalistes en échange de critiques contre une pseudo-dérive droitière. Ce n’est pas toujours aussi cynique. Certains au centre-droit sont de bonne foi. Mais sous l’emprise idéologique de la gauche.
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Publié initialement sur le cercle des Echos, reproduit avec l’autorisation de l’auteur.
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Ce n’est pas aux législ
Ce n’est pas aux législatives de 2012 qu’il faut traiter avec le Front National . Ces élections sont perdues.C’est donc à partir de Juin 2012 qu’il faut developper une stratégie de reconquête . Marc Crapez distingue 7 droites : on peut se contenter de 3, la Souverainiste , la Sociale conservatrice et la Libérale. La gauche étale des diversités bien plus grandes que celles séparant ces 3 droites , les encourage sans doute ( qui finance le parti de Melenchon ou le NPA ? Serait ce le PS ?) mais regroupe ses electeurs aux deuxième tour. Ce n’est que la médiocrité des candidats de gauche aux Présidentielles de 2002 et 2007 qui a caché le succès de la stratégie. L’UMP, qui n’explosera pas apres ces élections calamiteuses portées par un candidat – Président qui ne pouvait pas gagner, car seule l’UMP aura les financements, devra s’ouvrir aux courants libéraux et s’entendre avec les Souverainistes sur un programme de Reconquista pour regagner Villes Regions Département Sénat Assemblée et Présidence en 5 ans.L’UMP devrait donc innover certes mais l’exemple de la stratègie de la Gauche pourra la guider .
L’analyse de René Rémond est toujours d’actualité bien qu’un peu ancienne quand il distinguait les droites légitimiste, orléaniste (libérale) et bonapartiste (césarienne), sachant que la première a disparu, restent les deux suivantes.
Rémond qualifiait le gaullisme de bonapartisme rénové. Depuis Chirac, l’UMP est devenue orléaniste et le FN, la nature ayant horreur du vide, a repris l’étendard du gaullisme de l’époque de l’UNR/UDT (union démocratique du travail), d’où son succès dans les milieux populaires – on a voulu oublier que le parti gaulliste était un parti de masse s’appuyant sur le peuple de droite. On a également oublié que de Gaulle refusait d’être catalogué à droite « en France, la gauche trahit l’Etat et la droite la Nation »(Mémoires t3).
De toutes façons, les deux droites existent. Amies, elles ont plus que la majorité tout simplement parce que la France est de droite, ennemies elles laissent le pouvoir à la gauche. C’est pourquoi l’UMP a perdu les départements, les régions, le Sénat, la présidentielle et l’Assemblée Nationale et les européennes.