Le moteur ultime des entrepreneurs et de l’économie de marché, c’est la liberté d’entreprendre. Pour notre bien à tous.
Par Georges Kaplan.
Ce début d’année 2012 aura été marqué par le lancement de l’offre de téléphonie mobile de Free. C’était la promesse de Xavier Niel, son patron : il avait promis de diviser nos factures de téléphone par deux. Promesse tenue. Xavier Niel, malgré l’incontestable service qu’il vient de nous rendre, n’est pas un philanthrope désintéressé. Sa motivation, la raison pour laquelle il a créé Free Mobile n’est ni de concourir à « l’intérêt général », ni d’oeuvrer pour la « justice sociale », pas plus qu’il ne travaille pour « la grandeur de la France ». Il l’a fait pour gagner de l’argent.
Xavier Niel est un entrepreneur, un homme d’affaires qui a compris que les trois opérateurs historiques qui se partageaient le marché de la téléphonie mobile en France, protégés par leurs licences d’État, ne se livraient pas vraiment concurrence. Il a repéré une opportunité de profit, il a étudié le marché, il a évalué les moyens qu’il devait mobiliser, il a bataillé pour obtenir une licence et a investi lourdement dans le développement de son offre. Xavier Niel est un entrepreneur, un homme d’affaires qui cherche à gagner de l’argent et qui, ce faisant, va probablement diminuer nos factures de moitié.
L’action de l’entrepreneur, c’est ce qu’Adam Smith, le père fondateur de la science économique, avait illustré par la fameuse métaphore de la « main invisible ». C’est ce processus de coopération sociale spontanée qui fait qu’un individu, dans la poursuite de ses propres intérêts, prend des risques, utilise ses compétences et travaille dur pour nous rendre service à tous. Incontestablement, Xavier Niel vient de contribuer à notre bien-être en augmentant notre pouvoir d’achat. Pour autant, son action n’a été guidée par aucune considération politique et elle n’a pas été planifiée par un organe de décision central.
Xavier Niel a simplement pensé que certains d’entre nous aimeraient disposer de forfaits téléphoniques moins onéreux, il a constaté qu’il pouvait le faire, que l’opération pouvait être profitable et donc, il l’a fait. Pour son profit et notre bénéfice.
Là où l’homme politique cherche à décider pour nous tous de ce qui est bon pour nous, comme si nous étions tous identiques, l’entrepreneur nous sait différents et n’espère rien d’autre que nous soyions suffisamment nombreux à apprécier son offre pour lui permettre de vivre. L’entrepreneur n’impose pas, il propose et c’est le consommateur souverain qui valide son offre. L’économie de marché est une gigantesque démocratie qui fonctionne 24 heures sur 24 et où chaque euro représente un droit de vote. Les quelques milliers de nos concitoyens qui ont fait le choix de souscrire à l’offre de Xavier Niel ont voté pour lui : ils ont élu Free Mobile comme fournisseur de téléphonie mobile sans l’imposer aux autres et restent libres, à tout moment, de changer d’avis.
Là où l’homme politique peut nous contraindre à payer un produit dont nous ne voulons pas ou nous obliger à utiliser les services d’un fournisseur qui ne nous convient pas, l’entrepreneur n’a d’autre choix que de nous satisfaire. Contraint par la réalité, soumis au suffrage des consommateurs et remis en cause par ses concurrents, l’entrepreneur doit chaque jour s’efforcer de s’adapter et d’améliorer son offre. Il en va de la santé et même de la survie de ses affaires : s’il se trompe, s’il se laisse aller, il en subira immanquablement les conséquences. Si l’État peut se tromper indéfiniment, c’est un luxe que l’entrepreneur ne peut pas se permettre.
Là où l’homme politique estime que son dévouement à la cause commune, qu’il soit réel ou feint, mérite des louanges, l’entrepreneur n’a pas à être remercié. Sa récompense, son utilité sociale, est mesurée comme elle est récompensée : à l’aune de ses bénéfices. Chaque centime que gagne l’entrepreneur est un centime de richesse qu’il a créé. Il n’a volé ni spolié personne, il a créé quelque chose de nouveau en exploitant des ressources qu’il a achetées ou louées à d’autres entrepreneurs. Cette nouvelle richesse qui contribuera à améliorer nos vies, cette valeur ajoutée, n’a pas été décrétée par une obscure administration mais par ceux-là mêmes à qui elle est utile. L’entrepreneur, individu de chair et de sang issu de nos rangs, ne pense pas l’économie en termes de grands agrégats macroéconomiques, pas plus qu’il ne cherche à construire une société idéale. L’entrepreneur pense l’économie en termes humains : ses clients, ses fournisseurs, ses salariés, ses actionnaires, ses partenaires, ses concurrents sont des êtres humains qui, comme lui, vivent dans la société des hommes. L’entrepreneur est celui qui, mieux que personne, sait que l’économie est un phénomène qui n’existe que par et pour les hommes.
Porteur d’une infime fraction du savoir humain, guidé par les prix du marché, motivé par des opportunités de profits et modéré par des risques de pertes, il participe, souvent sans même le réaliser, à l’édification d’un système de production et de répartition des richesses d’une telle complexité qu’aucun planificateur, quels que soient les moyens dont il dispose, n’aurait pu concevoir. Si les trois derniers siècles ont vu le bien-être de nos semblables progresser plus que depuis l’aube de l’humanité, c’est aux entrepreneurs, et à eux seuls que nous le devons.
Pourtant, l’entrepreneur n’est ni un surhomme, ni nécessairement un être exceptionnel. En fait, nous sommes tous des entrepreneurs. Pensez-y : qu’est-ce qui différencie un salarié d’un entrepreneur si ce n’est la forme légale et le traitement administratif de leurs activités productives ? Un salarié n’est jamais rien d’autre qu’un entrepreneur individuel qui loue sa force de travail à un autre entrepreneur avec, éventuellement, un contrat d’exclusivité. Ce qui a réellement changé, le véritable secret de cette formidable aventure humaine commencée depuis maintenant trois siècles, ce ne sont pas tant les machines ni le développement des circuits financiers, ce ne sont pas les politiques économiques de nos gouvernements ni la performance de nos moyens de transport.
Ce qui a changé, le moteur ultime des entrepreneurs et de l’économie de marché, c’est la liberté d’entreprendre.
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un article qui mérite juste 20/20 mais quel fonctionnaire socialo boboide peut le comprendre ?
Cet article est intéressant et annonce, je l’espère, d’autres articles sur le sujet du salariat (et cette notion d’exclusivité). Cependant il me semble que la « main invisible » d’Adam Smith n’est qu’une pirouette de celui-ci, à une époque où il n’avait pas d’outils d’analyse macroscopique des comportements : on pourrait aujourd’hui parler de thermodynamique, structure, complexité, mémétique… et sans doute beaucoup de modélisations certes incomplètes mais qui nous permettent de sortir de la pensée magique. Adam Smith ne serait d’ailleurs pas le dernier à reconnaître qu’il n’y a pas nécessairement de collaboration ou de recherche de profit mutuel (en France en tous cas il y a la persistance de l’idée, profonde, peut-être culturelle, que l’arnaque est un idéal de relation économique). De même l’idée selon laquelle tout bénéfice est nécessairement mérité est tout à fait naïve, basée sur la croyance d’une objectivité du droit et de l’argent (ou plus généralement d’un système de mesure), et nécessite d’ailleurs l’usage de tout un tas d’affirmations non vérifiées utilisées à tort comme des données de base.
Il n’en demeure pas moins (c’est même une confirmation) que le rôle d’entrepreneur est primordial comme moteur dans l’organisation sociale ; à ce niveau il faudrait se rapprocher de Schumpeter qui faisait bien la distinction entre le capitaliste et l’entrepreneur. Aujourd’hui où certains se proclament « pigeons » il serait bon, et beaucoup le font, à commencer par les entrepreneurs eux-même, de ne pas se laisser abuser par des revendications alignées sur une tradition corporatiste qui s’inscrit systématiquement contre l’innovation.
Je pense qu’il faut désormais reconnaître que le salariat a justement écrasé l’idée du travailleur comme entrepreneur, et d’analyser pourquoi et comment la dynamique de l’entreprise et de sa centralisation dans l’industrie a permis de faire des sauts organisationnels et doit être aujourd’hui dépassée afin que les travailleurs puissent s’émanciper du salariat : en gérant de manière autonome leurs interdépendances. A ce niveau nous avons atteint nos limites dans toutes les directions, notamment dans le système scolaire qui apprend très tôt la peur du risque, l’interdiction de l’erreur et la soumission à des objectifs d’autrui et à des mesures pour le coup complètement abstraites (qu’on obtienne une note de 0/20 ou de 20/20 on sait que le travail fourni ira à la poubelle : ce qui fait croire à l’inutilité et l’absurdité ontologiques du travail et du profit)… je parle plus volontiers du système français évidemment qui est sans doute le champion en la matière.
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