Avec la réélection de Barack Obama et le maintien de Ben Bernanke à la Fed, les quantitative easing risquent de continuer, avec de gros dangers.
Par Philippe Herlin (*)
Publié en collaboration avec Goldbroker.
Durant sa campagne, Mitt Romney avait affirmé qu’en cas de victoire il se séparerait du président de la Fed, Ben Bernanke. Cette annonce forte signifie qu’il prenait les problèmes économiques des États-Unis par le bon bout, c’est-à-dire freiner puis stopper les rachats de dette par la banque centrale qui rendent de facto le déficit budgétaire indolore. En effet, pourquoi se fatiguer à équilibrer les comptes publics si la banque centrale achète une grande partie des obligations d’État servant à financer ce déficit ?
Bernanke défend cette politique de monétisation de la dette publique, en attendant un hypothétique retour de la croissance, sans comprendre que ce déluge de monnaie et ces taux d’intérêts fixés au plus bas découragent l’investissement productif et favorisent au contraire les bulles sur les matières premières, ainsi que la bonne tenue artificielle de la bourse. Le Quantitative easing est, dans les faits, un échec. Il sert juste à gagner du temps. Ces rachats sont réalisés par de la pure création monétaire, ce qui fait peser à terme un risque d’inflation. Le réveil n’en sera que plus douloureux, mais l’élection est passée et on verra plus tard !
Avec Barack Obama, cette politique de facilité monétaire va malheureusement continuer. On le sait néanmoins, à partir du 1er janvier, si aucun accord de réduction du déficit n’est trouvé d’ici là entre la présidence et le Congrès, on assistera à une réduction automatique des dépenses et à la fin des exemptions fiscales accordées sous l’administration Bush. C’est ce qu’on appelle la « falaise fiscale » (fiscal cliff). Cet accord drastique, négocié en août 2011 lorsqu’il fallait relever le plafond de la dette de l’État américain, amènerait une réduction du déficit budgétaire, mais dans l’équipe d’Obama, on semble vouloir le remettre en cause…
Quoi qu’il en soit, l’opposition entre le président démocrate et un Congrès majoritairement républicain provoquera de nombreuses frictions et ne facilitera pas la résorption du déficit. La planche à billets va encore tourner longtemps ! La « japonification » des États-Unis semble en marche, le cercle vicieux déficit-dette-monétisation-stagnation s’installe progressivement, on le voit dans les chiffres.
Toute cette impression de monnaie contribue à dévaluer le dollar, et la BCE de Mario Draghi prend la même direction en Europe. Alors bien sûr, ceci est fondamentalement bon pour l’or. Son cours ne devrait pas manquer de continuer à progresser. Il devrait constituer l’un des rares actifs à permettre de protéger son épargne en toute sécurité dans les années à venir. Mais faut-il s’en réjouir ? On préférerait une croissance économique solide et un cours de l’or qui se tient bien, plutôt qu’une période de forte incertitude et un système monétaire et financier boursouflé risquant d’exploser à tout moment. Mais le choix a été fait, et il penche malheureusement du côté de la manipulation de la monnaie.
Le Japon en est à son neuvième « QE » (Quantitative easing), record à battre ! Dans les quatre années qui viennent, Ben Bernanke y parviendra-t-il ? Il a déjà gagné le renouvellement de son mandat, ce n’est déjà pas mal.
(*) Philippe Herlin est Chercheur en finance et chargé de cours au Conservatoire National des Arts et Métiers à Paris. Il est également contributeur sur Goldbroker.com
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