Vendredi, François Hollande et Eveline Widmer-Schlumpf, présidente de la Confédération suisse, se sont rencontrés pour évoquer les différends fiscaux qui existent entre les deux pays.
Par Thibault Doidy de Kerguelen.
Si le Président a souligné «la volonté» mutuelle de régler les différends, son homologue helvétique a préféré la voie de la vérité en déclarant : «Nous avons les mêmes vues d’équité fiscale et de lutte contre la fraude, mais pas les mêmes moyens», «La Suisse a décidé il y a trois ans d’avoir une place financière propre. Nous faisons tout pour cela.»
Quatre grands sujets séparent Paris et Berne.
Les accords « Rubik »
Le premier concerne les accords «Rubik» que nous avons déjà évoqués. La position du nouveau gouvernement est strictement la même que celle du précédent. La France reste fermement opposée à cet accord fiscal, qui prévoit un prélèvement forfaitaire à la source et préserve l’anonymat des détenteurs de compte. «Nous refusons toute forme d’amnistie !» a insisté François Hollande. Berlin semble s’être rangé derrière la position française, même si la procédure d’examen n’est pas encore arrivée à son terme. À la posture « morale » de Paris, Berne oppose le principe de réalité. Il s’agit de mettre en place des rentrées fiscales sûres et rapides, beaucoup plus efficaces que l’échange automatique d’information. Ce choix a déjà été fait par la Grande-Bretagne, l’Autriche et l’Italie.
Rappelons ici que notre interprétation de la position française est tout autre que le discours officiel. Si le gouvernement ne veut pas des accords « Rubik », c’est, de notre point de vue, parce que dans la cadre de ces accords, tous les comptes ouverts par des ressortissants français seraient taxés. Par contre, exiger des autorités suisses qu’elles agissent « à la demande » permet à notre administration de choisir ses cibles… et de soigneusement en éviter d’autres. J’évoquais dans un article précédent la compagne d’un ministre d’alors, il semble que l’actualité mette en lumière d’autres éventualités… Rappelons aussi que le principe « intangible », auquel les Suisses se réfèrent en permanence, du secret bancaire a permis en certaines « heures sombres de notre histoire » à des familles persécutées de sauver leurs avoirs et à des organisations de résistance de financer leurs actions et de transférer anonymement des fonds vers la France.
Le « manque de réactivité »
Le second contentieux concerne le « manque de réactivité » des autorités suisses aux demandes d’entraides fiscales. Paris aurait adressé près de 300 demandes, depuis 2011, aux autorités suisses dont moins d’une cinquantaine seulement auraient été jugées satisfaisantes. Il faut dire que les autorités helvétiques se sont engagées à donner suite à toutes les demandes dès lors qu’elles sont précises et justifiées. Or Bercy a une fâcheuse tendance à « aller à la pêche » aussitôt qu’un soupçon apparaît et sans forcément posséder d’éléments sérieux.
La troisième source de conflit concerne la convention de double imposition sur les successions que nous avons aussi déjà évoquée. À la demande de Paris, Berne avait accepté un texte qui prévoit qu’en cas de décès d’une personne résidente en Suisse – qu’elle soit de nationalité française ou suisse – ses descendants, s’ils sont domiciliés en France, seront imposés par le fisc français à partir de janvier 2014. Or, jusqu’à présent, ils étaient soumis à la fiscalité helvète. Cela fait une différence de taille, le taux d’imposition français allant jusqu’à 45%, contre 7% en Suisse. Ce texte ayant soulevé un vaste mouvement d’opposition en Suisse, Berne souhaite des aménagements auxquels Paris se refuse obstinément.
Enfin, la dernière question concerne la régularisation des «avoirs cachés». Officiellement, la cellule mise en place sous le précédent gouvernement est close. Le gouvernement Hollande avait la ferme intention de n’accorder aucune voie de régularisation autre que les règles fiscales en vigueur. Quelques voix plus ou moins bien intentionnées laissent entendre que certaines polémiques actuelles pourraient aboutir sur une nouvelle période de grâce. Un sujet qui fait beaucoup sourire en Helvétie…
Cette rencontre semble déboucher sur quelques résultats
Une réunion « technique » a été programmée pour janvier prochain.
Quelques propositions de réaménagement du texte de la convention d’imposition sur les successions, paraphé il y a quelques mois, ont été présentées par François Hollande. La conseillère fédérale s’est refusé à dévoiler quelles étaient ces modifications, dont elle réserve la primeur aux responsables cantonaux des Finances.
De son côté, Eveline Widmer-Schlumpf a présenté les changements prévus dans la nouvelle loi sur l’assistance administrative fiscale, qui entrera prochainement en vigueur. Elle a expliqué que le processus de traitement des demandes sera accéléré et que les personnes concernées ne seront plus informées que par exception.
Enfin, pour marquer sa volonté de renforcer la coopération économique, universitaire, scientifique ou culturelle entre les deux États, le Président de la République française a accepté l’invitation de la Suisse. Il se rendra à Berne «dans les prochains mois».
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Sur le web.
RT @Contrepoints: Différends fiscaux : sommet franco-suisse à l’Élysée Vendredi, François Hollande et Eveline Widmer-Schlu… http://t.c …
Je ne comprendrai jamais cette obsession des politiques suisses à aller dans le sens des français… Le peuple est contre et de toute façon, il faut le dire franchement, les moyens sont toujours là pour contrer ce genre de folies, les banques disposent d’un arsenal bien complet! et tant mieux!
La Suisse manque de c*****
Abatardissement total
@Â Silent Bob
Widmer-Schlumpf est une étatiste corrompue. Qu’elle s’entende bien avec Hollande n’est pas très étonnant.
Et bientôt la Suisse membre de l’OTAN?Parce que à ce rythme la on y va direct!
Le secret bancaire ne peut-être levé que par un juge – Si les nouveaux accords prévoient d’autres dispositions alors, tyrannie.
Anecdote
Des voyous de Bercy se présentent à une banque pour obtenir des infos et sont renvoyés comme des voyous, menacés par un appel à la police s’il le faut. Au niveau diplomatique arrive à arracher le cas particulier du français soumis à une procédure fiscale en France, mais toujours avec intervention du juge suisse.
Bingo, il n’y a plus qu’à traquer le contribuable pour lui coller contraventions sur contraventions et accelérer la procédure de recouvrement qui est un… contentieux fiscal ! Quand le juge suisse s’est aperçu de la supercherie… Pour l’application de ces « bonnes » résolution, je ne me fais pas trop de soucis, la France est très mal vue par la justice suisse – wait and see.