Huile de palme : le triple fail des sénateurs

Grâce à leurs belles taxations, les sénateurs enchaînent un triple fail sur l’huile de palme.

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Fruits du palmier à huile

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Huile de palme : le triple fail des sénateurs

Publié le 10 décembre 2012
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Vous le savez, nous le savons tous : manger trop gras, trop salé, trop sucré, ne pas bouger, ne pas s’hydrater quand il fait chaud, ne pas se couvrir quand il fait froid et ne pas voter bien comme il faut quand on nous le demande peuvent provoquer des kikis tout petits et des maladies graves. C’est absolument certain, comme la mort et les taxes, du reste. Et pour nous aider dans notre lutte quotidienne contre les produits que nous aimons, l’État a récemment posé toute une série de gestes forts qui, avec l’habituel empressement chaleureux des cuistres interventionnistes, conduiront à distribuer une bonne louche de malheur supplémentaire sur une humanité qui n’en demandait pas tant.

mangibougisme, programme nationale d'interdiction du funCette fois-ci, l’État s’est rendu compte, aussi stupéfait qu’ébahi, que l’huile de palme est dangereuse pour la santé. Dangereuse dans le sens où on la trouve partout et comme elle n’est pas plus taxée que le reste, il est dangereux pour la santé financière de l’État de ne rien faire à ce sujet. Ce qui se passe est fort simple : un odorant bouquet de sénateurs s’est auto-commissionné sur la douloureuse question des Graisses Qui Font Du Mal, propulsés par un de ces nombreux et bruyants lobbies écolos, et mus par ce désir composite de faire parler d’eux, d’agir, et de répondre à l’émotion poignante qui saisit le politicien de base lorsqu’une campagne publicitaire dégoulinante de bons sentiments sirupeux leur est lancée à la figure, sans prévenir.

Bien évidemment, les arguments avancés ne sont pas ceux d’un manque cruel de fonds pour l’État, ni l’honnête aveu que le lobbyisme de Greenpeace ou d’autres a atteint son but. On s’est contenté de l’habituelle prétexte de la bonne santé de nos concitoyens sur le mode « J’ai froid, couvre-toi » inhérent au fonctionnement de l’État-maman : l’huile de palme a été décrétée mauvaise pour la santé, et donc taxable à merci, et pas qu’un peu, méchante huile ! puisqu’on va en multiplier ainsi la taxe par trois, et pan dans les dents.

En substance, le principe est donc de faire durement payer le consommateur qui ose porter atteinte à sa santé qui, depuis qu’elle a été collectivisée, ne lui appartient plus. Notez qu’à présent, à l’exception de Contrepoints, qui est revenu plusieurs fois sur le sujet, on ne lit pas beaucoup d’analyse dans la presse sur la dangerosité réelle ou supposée de l’huile de palme. Or, le sujet de l’impact des graisses alimentaires sur notre santé est loin d’être tranché, simple et, pour tout dire, à la portée d’un groupe de sénateurs.

Pour résumer, le corps humain a de toutes façons besoin d’acides gras, et principalement d’acides gras saturés. Ces derniers sont soit trouvés dans la nourriture, soit produits à partir d’acides gras insaturés, que le corps humain saturera par biochimie interne. À mesure que les études sérieuses (mais malheureusement peu relayées dans les médias mainstream) avancent, on découvre que ce sont essentiellement les acides gras « trans » insaturés et hydrogénés industriellement qui sont dangereux pour la santé (là encore, je simplifie volontairement).

Pour en revenir à l’huile de palme, elle est utilisée dans sa forme « non industriellement hydrogénée » ; dans ce dernier cas, elle n’est pas plus dangereuse que d’autres huiles. Comme le précise Cécile Philippe dans son article, on oublie de préciser qu’elle ne contient ainsi aucun acides gras « trans », qui apparaissent par l’hydrogénation industrielle, pas nécessaire dans le cas de cette huile naturellement solide à température ambiante.

FacepalmBref, en surtaxant cette huile, les sénateurs ont commis une première et bien jolie bourde : ils incitent directement les producteurs et les consommateurs à se diriger vers d’autres huiles, devenues artificiellement moins coûteuses, qui seront hydrogénées pour compenser une température de fusion plus basse. Ce qui veut dire que les huiles de remplacement seront potentiellement plus mauvaises pour la santé. Bien joué !

Évidemment, si l’erreur est humaine, pour une vraie catastrophe sanitaire, il faut faire intervenir des lobbies et des politiciens.

On découvre ensuite que l’autre argument utilisé pour punir les consommateurs de faire attention à leur porte-monnaie est un argument écologiste, parce que ça marche bien auprès de la ménagère soigneusement conscientisée à coup de campagnes verdoyantes ces trente dernières années. En substance, le sénateur écodurable remarque que les plantations de palmiers à huile prennent une place considérable, et empiètent sur de la forêt vierge, ou primaire, et que c’est, forcément, très mal. Chacun sait, en effet, que chaque mètre carré de forêt tropicale détruit, c’est deux millions d’espèces inconnues qui disparaissent (au moins), c’est trois mille cures contre des maladies rares qui disparaissent avant d’avoir été trouvées (au bas mot) et trente koalas mignons qui se vaporisent dans le grand néant probabilistique d’une statistique dégotée on ne sait où. Et quand ce n’est pas ça, ce sont des orangs-outans, des pandas ou des scolopendres.

En réalité, peu importe que ce soit vrai ou fantaisiste. Tout simplement parce que le rendement de l’huile de palme est d’environ 3,72 tonnes à l’hectare alors que celle du soja est de 0,40 et celle du colza de 0,72 tonnes. Autrement dit, le palmier à huile produit près de 10 fois plus de matière grasse que le soja, et plus de 5 fois plus que le colza. Imposer un boycott, une taxe punitive ou une campagne de dénigrement sur l’huile de palme, cela revient indirectement à favoriser des cultures 5 à 10 fois plus gourmandes en superficie.

Bear FacepalmLes orangs-outans n’ont qu’à bien se tenir : au lieu de périr à cause des plantations de palmier à huile, ils périront à cause des plantations de colza ou de soja. Et si ce ne sont plus les orangs-outans, gageons que les nouvelles surfaces défrichées pour compenser feront là encore disparaître des monceaux de petites bestioles innocentes. Voilà qui est super-malin : les sénateurs, avec leur taxe, vont accroître le problème de déforestation. Bien joué !

Mais pour que la catastrophe sanitaire prenne une ampleur internationale, il faut maintenant laisser les sénateurs en roue libre.

En effet, après avoir bien crié haro sur le baudet facepalmesque huile-de-palmesque, après avoir enchaîné campagne dramatique sur pamphlets enflammés contre les méchants producteurs qui saccagent les forêts et notre sécurité sociale à coup de crises cardiaques coûteuses, ce qui devait arriver arriva : les principaux industriels qui utilisent cette huile de palme dans leurs préparations ont senti la nécessité de se diriger vers une alternative, et d’en prévenir les consommateurs. Eh oui : le goût et le coût des produits vont changer. Aux grandes campagnes de sensibleries sensibilisation des écolos répond donc des campagnes de promotion de nouveaux produits, forcément respectueux des portefeuilles et des réglementations sénatoriales débiles (et, accessoirement, vantées comme respectueuses d’un environnement à géométrie variable).

Sauf que… sauf que ces campagnes ont un effet direct sur les producteurs d’huile de palme dont on a un peu oublié qu’il s’agissait de leur gagne-pain. Et ce n’est pas exactement comme si les plantations de palmiers n’employaient qu’une ou deux personnes localement. On apprend ainsi que des milliers d’emplois, et donc des milliers de familles (plus de 35.000 en Côte d’Ivoire), généralement pauvres, vivent grâce à l’exploitation du palmier à huile. C’est d’ailleurs ces exploitations qui permettent à de plus en plus de pays émergents d’élever le niveau de vie général de sa population ; rappelons cependant que pour un écolo, la vie d’un orang-outan et un hectare de forêt vierge vaut bien plus que la vie d’un triplet ou deux d’enfants pauvres et sous-nourris : après tout, ils sont loin et n’ont même pas la sécurité sociale (les cons !)…

Bilan : l’impact économique de la taxation vexatoire et du dénigrement massif de ces productions (et par voie de conséquence, des producteurs) a provoqué de nouveaux problèmes. Ces derniers ont ainsi décidé d’attaquer Système U qui leur avait bien gentiment taillé un costard en béton (celui qu’on enfile avant d’aller couler dans un océan quelconque, bien loin des yeux occidentaux)… L’organisation d’un colloque, en juin 2013, sur le sujet de l’huile de palme, permettra peut-être, s’il n’est pas tout simplement ignoré de la presse occidentale, de remettre un peu de mesure dans les discours amoureusement teintés de greenwashing des industriels français.

Mais en attendant, le constat est sans ambiguïté : par leurs abrutissantes décisions, les sénateurs ont provoqué des tensions inutiles entre les pays émergents et la France, et vont, si on continue sur la même pente glissante, ajouter une bonne louche de problèmes à ces populations qui n’en avaient pas besoin en sapant le développement économique des producteurs locaux. Autrement dit, les sénateurs ont choisi de conserver dans la pauvreté des producteurs de pays émergents, pour remplacer une huile bon marché par des huiles plus chères et plus dangereuses pour la santé, dont l’exploitation accroît les problèmes de déforestation au lieu de les résoudre.

C’est un Triple Fail. Bien joué, messieurs.

triple facepalm

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  • article génial, once more…

  • Sérieusement, H16, connaissez vous un homme politique intelligent en France ???

  • Tous les prétextes sont bons pour taxer, faire du protectionnisme, manipuler les comportements.

    La sénatrice (UMP) Catherine Procaccia a combattu le projet de « taxe Nutella » en commission.

    • Merci pour cette autre vision des choses. Une petite rectif cependant. L’huile de palme, comme beaucoup d’autres huiles tropicales, est taxée à son entrée en France, 99 euros / tonne. Cette taxe se nomme la
      Fipsa (fonds indexés des prestations sociales agricoles)…
      vous pouvez ajouter un 4eme Fail = cette taxe est dangereuse pour l’industrie alimentaire française, puisqu’à formulation égale, le produit fini est moins cher en dehors des frontieres et fait la promotion de la délocalisation …

  • Cet article est très intéressant et fait bien de rappeler que les petits producteurs ont gagné leur procès contre ces greenwashers que sont Super U & co… En attendant, il serait bien de rappeler également qu’EELV continue d’avancer comme si de rien n’était et veut imposer aux cantines de Paris le retrait de l’huile de palme de l’alimentation http://www.rtl.fr/actualites/info/politique/article/l-huile-de-palme-bientot-bannie-des-cantines-parisiennes-7755683324

  • Quand on sait que la chime du cerveau est basé sur les corps gras …

    Ceci explique peut-être cela !

    Il est parfois des jours maudits où je n’ai pas le temps de lire l’édito de h16. Heureusement ce n’est que parfois.

  • Bonne remarque sur la réorientation vers des graisses trans effectivement dangereuse.

    Par contre je tenais à préciser que la sous-nutrition est favorisée par la « hausse du niveau de vie » dont vous parlez : les hectares occupés à planter de l’huile de palme ne servent pas à produire du blé et ce durablement (car c’est cons utilisent ce qu’on leur dit d’utiliser : des engrais et pesticides low-cost ultra chimiques). C’est ceci dit impossible de lutter contre ça car toute mesure entraine une conséquence parfois pire que la précédente.

    • Le blé est moins nourrissant que l’huile de palme.

    • Et le blé, et surtout la farine que l’on en dérive, est infiniment plus nocif pour la santé que l’huile de palme…

    • Neoxys : « les hectares occupés à planter de l’huile de palme ne servent pas à produire du blé  »
      —————————–
      Le blé ne se plante pas aux latitudes où l’on plante des palmiers à huile, c’est un non-sens agronomique. A la rigueur, le maïs ou le riz oui mais le besoin en eau et donc d’irrigation n’est pas du tout le même.

      Soit dit en passant, les pays où on « massacre » prétendument la forêt pour planter ces palmiers, c’est là où il y a 2 fois plus de forêts en % de la superficie qu’en Europe. Le taux de forêt de la Malaisie par ex., c’est 65%, contre 30% en France.
      Alors quand nos politicards répètent comme un perroquet le prétexte greenpisseux de la déforestation pour donner des leçons aux Malaisiens, il y a comme un malaise.

  • Comment écrire un article en étant incompétent sur le sujet ?

    « le rendement de l’huile de palme est d’environ 3,72 tonnes à l’hectare alors que celle du soja est de 0,40 et celle du colza de 0,72 tonnes »-> Le soja est un oléoprotéagineux. Le colza : un rendement inégalé avec ses tonnes de résidus données comme fourrage aux animaux.

    « Ce qui veut dire que les huiles de remplacement seront potentiellement plus mauvaises pour la santé » -> Faux vous avez déjà vu de l’huile de palme remplacée par des huiles hydrogénées comme dans des chips ou des pains de mie ? Non.

    « donc des milliers de familles (plus de 35.000 en Côte d’Ivoire), généralement pauvres, vivent grâce à l’exploitation du palmier à huile. » -> Vous savez combien produit la CI en huile de palme ? Même pas 1/2 million de tonnes sur plus de 40 produites en Asie …Vous savez qu’il existe aussi des plantations industrielles ?

    « rappelons cependant que pour un écolo, la vie d’un orang-outan et un hectare de forêt vierge vaut bien plus que la vie d’un triplet ou deux d’enfants pauvres et sous-nourris  » -> l’orang-outan ne vit pas en Afrique, il faudra ouvrir un atlas.

    4 fail et je suis très gentille

    • « Le soja est un oléoprotéagineux. Le colza : un rendement inégalé avec ses tonnes de résidus données comme fourrage aux animaux. »

      Et donc ? Le fourrage ne va pas remplacer l’huile, on aura quand même besoin d’une surface 10 fois plus importante pour produire l’équivalent.

      « Faux vous avez déjà vu de l’huile de palme remplacée par des huiles hydrogénées comme dans des chips ou des pains de mie ? Non. »

      Heu si jamais on supprimait l’huile de palme par exemple du Nutella, expliquez nous par quel genre d’huile non hydrogénée on la remplacerait ?

      « Vous savez combien produit la CI en huile de palme ? Même pas 1/2 million de tonnes sur plus de 40 produites en Asie …Vous savez qu’il existe aussi des plantations industrielles ? »

      En quoi le fait que l’exploitation de palmier a huile représente un faible pourcentage a l’échelle du monde change quoique ce soit au sort de ces 35000 familles qui en vivent dans ce pays ?

      « l’orang-outan ne vit pas en Afrique, il faudra ouvrir un atlas. »

      Non mais la c’est un gag, le problème soulevé par l’auteur n’est pas de savoir si ce serait l’orang outan ou le yéti a poil ras qui serait menacé mais le fait qu’on (les sénateurs notamment) accorde plus d’importance a des espèces animales qu’a ces populations humaines, l’exemple de l’orang outan n’était qu’une figure de style humoristique destinée a illustrer la déconnexion complète entre les écolos et la réalité.

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