Lors d’une conférence de presse de l’atelier de la république, l’économiste Christian Saint-Etienne a dressé un portrait noir mais lucide de l’état de la France et des réformes à mener.
Par Alexis Vintray.
S’il se définit non comme un décliniste mais comme un optimiste lucide, Christian Saint-Etienne n’a pas une vision particulièrement rose de la situation française. Comme il a pu l’expliquer lors d’une conférence de presse de l’Atelier de la République, un think tank centriste dont il préside le conseil scientifique, il y a « état d’urgence » (le livre sur Amazon).
Un monde en transformation
Le monde dans lequel nous vivons est en pleine transformation, une transformation qui remet à plat des systèmes de distribution entier, comme le montre la disparition de Virgin ou la transformation de la vente de voyages, etc. Ce n’est pas une révolution qui nous sort de l’industrie mais une révolution hyper industrielle, avec un besoin de capitaux propres énormes : on ne sort pas de l’industrie, mais on quitte une révolution industrielle pour rentrer dans une nouvelle révolution industrielle, marquée par le rôle des entrepreneurs, hyper-industrielle et très consommatrice de fonds propres.
Face à ce nouveau monde, les élites françaises sont ancrées dans le vieux monde et ne saisissent pas les évolutions auxquelles nous devons faire face. Et Christian Saint-Etienne n’a pas de mots assez durs pour caractériser les élites politiques. Les élites politiques, intellectuelles ou managériales font un « contresens d’analyse magistral » pour comprendre notre situation. Et Hollande est loin d’être le seul responsable : « Hollande c’est la cerise idéologique sur 15 ans de mauvais choix politiques » ajoute l’économiste. Même le rapport Gallois ne prononce pas les mots de 3e révolution industrielle.
Le bilan de nos politiques est désastreux : -30% part de l’industrie dans la valeur ajoutée et -40% de la part des exportations françaises entre 1999 et 2012. On n’en voit cependant pas la réalité car la France continue à faire des chèques sans provision pour soutenir la consommation. Comme le souligne Christian Saint-Etienne, « une majorité des adultes vit désormais de l’argent public. La seule démocratie au monde dans ce cas ». Au lieu d’avoir une fiscalité intelligente, « on augmente les impôts de ceux qui travaillent, avec des effets dévastateurs ». De même, alors que nos entreprises ont besoin de capitaux, on les matraque fiscalement, avec des taux de marge extrêmement bas : le taux des marges des entreprises françaises a atteint son plus bas niveau depuis 25 ans. Il est désormais le plus faible d’Europe selon l’Insee.
Encourager la prise de risque
Peu pourront réussir à trouver les bonnes formules pour le monde vers lequel nous allons, et il est impératif d’encourager la prise de risque au lieu de la décourager. Le gouvernement va à l’exact opposé de ce qu’il faut faire selon Christian Saint-Étienne : « en matraquant avec la fiscalité, vous tuez la prise de risque », comme les pigeons l’ont bien perçu. « La constitutionnalisation du principe de précaution est à cet égard une horreur absolue ».
Alors quid du futur ? Selon lui, en 2013, « les schémas de pensée dépassés vont exploser face à la réalité ». Nous allons systématiquement dans le mur depuis plusieurs décennies, et cet entêtement ne pourra plus tenir face à la pire crise depuis longtemps : « Les lumières, c’était la vérité qui nous guide, l’excellence à encourager. Aujourd’hui on fait l’inverse. Depuis une trentaine d’années, nous avons tourné le dos aux Lumières. On est tellement à contresens de l’évolution du monde que l’on ne peut pas aller plus loin. Le choc sera violent ».
Un choc qui pourrait venir de l’Europe : « La France peut emprunter à taux négatifs grâce à l’argent qui fuit l’Espagne et l’Italie. C’est probablement de là que viendra la rupture en 2013. C’est excitant d’être contemporain d’un tel moment de rupture ».
Faut-il attendre le salut des mêmes hommes politiques ? Pas vraiment, tant l’aveuglement est grand : « Le pouvoir politique est tellement tétanisé par la peur du peuple et par un monde qu’il ne comprend pas qu’il ne sait pas expliquer le nouveau monde et prendre les mesures nécessaires ». Il faut aussi cesser de croire qu’on est rentré dans un monde post-travail, post-industrie, cette idéologie à la Jeremy Rifkin qui guide les lois françaises de réduction du temps de travail depuis le milieu des années 1990.
Quelles réformes ?
Si Christian Saint-Etienne ne s’étend pas sur les réformes à mettre en Å“uvre, préférant renvoyer à son livre France, état d’urgence (le livre sur Amazon), l’économiste livre quelques pistes : il faut un Grenelle du modèle français, de son logiciel, en élaborant en particulier des « systèmes fiscaux et sociaux adaptés », pour remplacer le « système victimaire » actuel, où l’on attire une « immigration déqualifiée qui vient chercher des aides, alors qu’on fait fuir les talents, ceux qui veulent produire, créer, innover ». « Face à un monde mobile, nous avons les lois sociales les plus rigides et la fiscalité la plus lourde qui soient ». Des réformes qui doivent en particulier être fiscales, en encourageant la prise de risque.
Il y a également urgence à construire un système en phase avec la révolution en cours, en associant par exemple les salariés aux actions, ce qui serait une base intéressante pour un nouveau modèle social, dans la lignée de la participation. « On passe de la main d’œuvre au cerveau d’œuvre. Ça implique des changements d’organisation dans les entreprises ».
Quelques pistes intéressantes, à creuser.
A part attendre le mur, peu de chances de sortir de la dynamique actuelle.
@Olivier Vitri,
…le mur, mais en klaxonnant, bien sûr !
Les salariés avaient commencé à participer aux bénéfices au travers de l’intéressement, mais comme à l’accoutumée, on a préféré faire du matraquage fiscal !
Pendant longtemps j’ai trouvé Christian Saint-Etienne un peu terne : il participait souvent à C dans l’air, mais son discours était tiède.
Depuis un an, il se lâche complètement, et ça fait du bien !
« une majorité des adultes vit désormais de l’argent public »
Il faut dire les choses comme elles sont: la France est un pays communiste.
À l’époque de Brejnev, vers la fin des années 1970, certains soviétiques disaient déjà de la France qu’elle était « la 16ème république socialiste soviétique » !
Nihil novi sub sole
Ce raisonnement serait valable si Christian Saint-Etienne n’était pas obsédé par la dénonciation de la France. La réalité, c’est que tous les pays développés sont dans la même situation de crise, y compris le Royaume-Uni qui, du point de vue du modèle social, est l’exemple opposé.
Oui sur la désindustrialisation
Déjà que nous avons une histoire extrêmement proche de celle de la Russie;Une mentalité aussi très proches ;une bureaucratie et une corruption qui y ressemble de plus en plus…Alors nous vivrons a peu de chose prés des événements semblables a celle de la Russie Elstinienne puis malheureusement Poutinienne!
Ce qui est surtout inquiétant et que relève Christian Saint-Etienne en creux, c’est que la politique actuelle détruit par tous les moyens possibles la capacité de création de capital au sein de la société civile, ou l’oriente de manière à satisfaire ses propres besoins ou visées (fiscalité locale et immobilier en sont un exemple frappant, comme le ZIRP). Comment allons nous créer de nouvelles entreprises si seuls les grands groupes, les banques et les copains issus de la haute sphère publique ont accès au capital?
il y a des gens qui chechent a innover partout. moi, je suis dans le secteur agricole. depuis 10 ans, j’etudie a temps perdu un arbre asiatique, le paulownia, qui est utilisé comme intensificateur agroecologique dans les campagnes chinoises, il ce developpe dans d’autre partie du monde, grace a ses qualitées parfois extraordinaires. en france, aucun organisme n’a cru bon de l’experimenter. je cherches a le faire connaitre en vendant des plants, mais je ne rencontre que l’incredulité et le desinteret, la seul chose que j’ai reussi a faire, c’est a me faire cracher dessus par des ecologistes qui mon dit qu’il ne fallait surtous pas implanter cela dans « nos regions « . pourtant, a coté de nous, en espagne, le paulownia ce developpe. il est vrai que pour les espagnol, la socièté bornée etait synonyme de la dictature de franco, du passé, alors qu’en france, elle est synonyme du socialisme qu’il soit de droite ou de gauche, dont on n’est visiblement pas encore debarrassé