Conditions de détention : la menace de la Cour européenne

La surpopulation carcérale, lorsqu'elle s'accompagne de conditions d'hygiène dégradées, peut être qualifiée de traitement inhumain et dégradant.
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Conditions de détention : la menace de la Cour européenne

Publié le 22 janvier 2013
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La surpopulation carcérale, surtout lorsqu’elle s’accompagne de conditions d’hygiène particulièrement dégradées, peut être qualifiée de traitement inhumain et dégradant.

Par Roseline Letteron.

La Cour européenne a rendu, le 8 janvier 2013, un arrêt Torregiani et a. c. Italie que les autorités françaises vont certainement méditer. Il porte sur les conditions de détention dans les prisons italiennes, et plus précisément sur le surpeuplement carcéral. Les requérants, qui purgent des peines de réclusion dans les prisons de Busto Arsizio et de Piacenza, se plaignent d’occuper à trois des cellules de neuf mètres carrés, dépourvues d’eau chaude et d’éclairage suffisant. La Cour leur donne satisfaction et estime qu’une telle situation constitue une violation de l’article 3 de la Convention européenne. La surpopulation carcérale, surtout lorsqu’elle s’accompagne de conditions d’hygiène particulièrement dégradées, peut donc être qualifiée de traitement inhumain et dégradant.

La décision du Conseil d’État du 22 décembre 2012

Pourquoi les autorités françaises doivent-elles s’intéresser à cette décision ? Tout d’abord parce que nul n’ignore que les conditions de détention dans certains établissements pénitentiaires français ne semblent guère différentes de celles dénoncées dans l’arrêt Torregiani.

Tout récemment, le Conseil d’État, statuant en référé le 22 décembre 2012, a ordonné la dératisation de la prison des Baumettes, estimant que la situation sanitaire de cette prison vétuste était constitutive d’une carence de l’administration dans la protection du droit à la vie et à la dignité des détenus. Observons que le Conseil, comme à son habitude, demeure très prudent et ne donne satisfaction aux requérants que sur une seule question jugée urgente. Mais l’essentiel est qu’il se place sur le fondement de l’article 22 de la loi du 24 novembre 2009, selon lequel « l’administration pénitentiaire garantit à toute personne détenue le respect de sa dignité et de ses droits« . Et le Conseil précise qu’elle doit « prendre les mesures propres à protéger la vie des détenus ainsi qu’à leur éviter tout traitement inhumain et dégradant ». Pour le juge français, un examen très concret de la situation sanitaire des prisons et des efforts réalisés, ou non réalisés, pour y remédier, peut conduire à considérer que les détenus subissent un « traitement inhumain et dégradant« . L’inertie des autorités françaises face à une telle situation pourrait donc conduire les détenus, et surtout leurs conseils, à saisir la Cour européenne.

Un arrêt-pilote

Surtout, la Cour européenne a recours à la procédure de l’arrêt-pilote, qui accroit la visibilité de sa décision. Elle s’applique aux « affaires répétitives » qui trouvent leur origine dans un dysfonctionnement chronique du droit interne d’un État. Dans l’affaire Torregiani et autres, la Cour était en pratique saisie d’un grand nombre de requêtes à peu près identiques portant sur la condition pénitentiaire en Italie. L’arrêt-pilote permet alors à la Cour de traiter en priorité une ou plusieurs d’entre elles et d’indiquer ainsi au gouvernement concerné les mesures qu’il doit prendre pour remédier à une situation qui viole la Convention européenne. Les autres affaires pendantes sont alors gelées jusqu’à ce que les mesures adéquates soient prises pour améliorer la situation. Bien entendu, si les autorités n’exécutent pas l’arrêt-pilote, la Cour peut toujours « dégeler » les affaires pendantes et prononcer de nouvelles condamnations.

Il est vrai que la Cour ne sanctionne pas seulement la situation matérielle dans laquelle se trouvent les établissement pénitentiaires italiens. Elle considère aussi un système juridique qui prive les prisonniers d’un recours efficace pour faire cesser ce type de situation. Le seul recours possible en Italie est en effet le juge d’application des peines qui, en l’espèce, avait effectivement considéré que les prisonniers étaient victimes d’un traitement inhumain et dégradant. Mais cette juridiction ne dispose d’aucun instrument juridique pour faire exécuter sa décision. Tel n’est évidemment pas le cas en France, comme l’a montré le succès de la procédure de référé devant le Conseil d’État, en décembre 2012.

Il n’en demeure pas moins que le recours à la notion de traitement inhumain et dégradant pour qualifier une situation particulièrement grave de surpopulation carcérale est indépendant des recours ouverts aux victimes. Sur ce point, la situation française est particulièrement préoccupante, et les conseils des personnes détenues pourraient s’engouffrer dans la brèche ouverte par l’arrêt Torregiani et autres. Heureusement, le Garde des Sceaux, Christiane Taubira a annoncé la mise en chantier de trois nouveaux établissements pénitentiaires et la rénovation du parc existant. Espérons que les travaux seront achevés avant la condamnation par la Cour européenne.


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  • Pour qu’un traitement soit « dégradant », il faut qu’il entraine une dégradation, forcément. Il faudrait donc analyser les conditions de vie non-carcérales de chaque détenu, voir s’il dispose toujours d’eau chaude dans sa planque, etc. Quant aux surfaces, 9 m² pour 3, c’est mieux que le ratio dans la marine, petits yachts compris.
    Pourquoi des détenus devraient-ils jouir d’un confort refusé aux gosses des orphelinats, et de tant d’autres comme les sdf dans des abris de nuit, etc.
    La Belgique par exemple se ruine à louer des chambres carcérales dans des prisons hollandaises (plus de 50.000 euros/an/détenu) et fait construire de nouvelles prisons « design » avec chambres privatives délicatement colorées et agencées …
    Sans préconiser les culs de basse fosse, il n’y a aucune raison de privilégier l’hôtellerie des détenus par rapport à un tas d’autres groupes de population qui ont le malheur de ne pas être délinquants..
    Notons encore que plus de 80 % des détenus européens sont d’origine immigrée …

  • L’Etat socialiste obèse ne fait pas que du « social ». Il a également choisi d’abandonner ses fonctions régaliennes. La justice, financièrement en déshérence, noyautée par des idéologues qui la détruisent consciencieusement, en est le symptôme le plus frappant. Et ne parlons pas de l’infini mépris exprimé à l’égard des policiers et des militaires, seuls véritables fonctionnaires du pays.

    L’Etat socialiste n’apparaît pas seulement plus gros que l’Etat régalien minimal. Il en constitue l’exact opposé.

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