Messieurs les Anglais, tirez-vous les premiers

Le Royaume-Uni envisage de quitter l’Union Européenne, dont les dirigeants déploient une rhétorique familière pour les inciter à rester.

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Messieurs les Anglais, tirez-vous les premiers

Publié le 27 janvier 2013
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Alors que David Cameron envisage une sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne et souhaite demander leur avis aux citoyens, les ministres des Affaires étrangères français et allemands ont la même réaction que les ministres français face au départ de certains citoyens.

Par Baptiste Créteur.

David Cameron

Lorsqu’un citoyen français veut quitter la France, on ne manque pas de lui rappeler son devoir de solidarité et de lui rappeler que le contrat social pour lequel sa naissance vaut acceptation lui confère des obligations envers les autres citoyens. Quand un pays envisage de quitter l’Union européenne, c’est la même chose.

Avant même que le premier ministre britannique, David Cameron, expose dans son discours très attendu sur l’Europe de consulter les Britanniques à l’horizon 2015-2017 sur le maintien ou pas du Royaume-Uni dans une Union européenne réformée, le chef de la diplomatie française a estimé, mercredi matin sur Radio France, qu’on ne pouvait pas «faire l’Europe à la carte». «Nous souhaitons que les Britanniques puissent apporter des éléments positifs à l’Europe», a-t-il dit. Mais «l’Europe, admettons que ce soit un club de football, on adhère à ce club, mais une fois qu’on est dedans, on ne peut pas dire qu’on joue au rugby». «Ça risque d’être dangereux pour la Grande-Bretagne elle-même, parce que la Grande-Bretagne hors de l’Europe (cela va être) difficile», a poursuivi Laurent Fabius.

Les constantes face à l’éventualité d’un départ sont donc d’une part le rappel de l’appartenance à une communauté, d’autre part la menace. De là à appeler les pays qui voudraient quitter l’UE des déserteurs, il n’y a qu’un pas que n’hésiteront sans doute pas à franchir les dirigeants européens si la perfide Albion choisit de quitter une union qui a tant à leur offrir.

Après l’intervention de David Cameron, la tonalité de la réaction allemande a été semblable à celle de la France. Après avoir insisté, tout comme François Hollande, sur le souhait de Berlin de voir la Grande-Bretagne rester un «membre actif et constructif» de l’Union européenne, le ministre allemand des Affaires étrangères, Guido Westerwelle, a souligné que l’Europe n’était pas «la somme des intérêts nationaux», mais une «communauté de destins». Pour l’Europe, «choisir à la carte n’est pas une option», a-t-il insisté. En Conseil des ministres, peu auparavant, le président de la République française avait manifesté son souhait que la Grande-Bretagne «demeure au sein de l’Union européenne», tout en notant qu’«être membre de l’UE présente des obligations», dont «la solidarité». «Nous avons besoin d’un Royaume-Uni membre à part entière, qui ne reste pas ancré dans le port de Douvres», a alerté le président du Parlement européen Martin Schulz.

Autre constante, l’injonction au sacrifice des intérêts particuliers au profit d’un ensemble chimérique plus large, qu’on ne peut pas assimiler à la somme de ses membres. François Hollande rappelle le devoir de solidarité de chaque membre de l’Union envers les autres membres, de la même façon qu’a été rappelé par différents ministres et députés le devoir de solidarité  des Français envers les autres Français.

«L’autre jour, je participais à une réunion avec des hommes d’affaires britanniques et je leur ai dit: “Écoutez, si la Grande-Bretagne décide de quitter l’Europe, nous vous déroulerons le tapis rouge”», a ironisé M. Fabius, en réponse à son homologue britannique, qui s’était dit prêt à dérouler le tapis rouge aux entreprises fuyant l’impôt en France.

Le tapis rouge ne suffira sans doute pas à attirer les hommes d’affaires. Pour leur faire oublier la fiscalité confiscatoire française, sans doute faudra-t-il leur offrir des avantages fiscaux, des subventions, des conditions préférentielles temporaires dont la fin sonnera le départ des entreprises ainsi incitées.

Une nouvelle fois, on demande des sacrifices de plus en plus important à ceux qui ont le plus à offrir et le plus à perdre. La rhétorique est rodée ; faire partie du groupe donne des obligations, comme celle de renoncer à ses intérêts propres au profit de ceux du groupe – c’est-à-dire renoncer à son propre jugement rationnel ; le départ pourrait avoir de graves conséquences. La seule raison rationnelle pour laquelle les citoyens du Royaume-Uni pourraient préférer rester dans l’Union, ou pour laquelle les Français pourraient préférer rester en France, c’est d’avoir à y gagner, mais rien n’est moins évident. Le collectivisme des États européens dépasse les frontières et ils souhaitent aujourd’hui l’imposer outre-manche.

Leurs moyens sont plus limités envers un État qu’envers un individu. L’État français n’a aucun scrupule à déployer tout l’arsenal coercitif que seul un esprit collectiviste est capable d’imaginer, mais l’Union Européenne ne peut utiliser la force ni lâcher une foule de zélés percepteurs sans frontières sur le Royaume-Uni pour exiger l’accomplissement du devoir de solidarité des Britanniques. Rien n’empêche le Royaume-Uni d’adhérer à une zone de libre-échange ou une union douanière sans pour autant adhérer à une union politique pour rejoindre un club où les pays irresponsables comme la France côtoient d’autres pays moins irresponsables comme l’Allemagne, et on voit mal comment les pays européens pourraient le refuser.

L’insistance des dirigeants européens à voir le Royaume-Uni rester dans l’Union européenne semble indiquer que David Cameron a raison d’envisager sérieusement de mettre fin à son adhésion à l’UE ; mieux vaut ne pas attendre qu’un député européen en mal de publicité propose une expropriation du Royaume-Uni pour entériner ce départ. Messieurs les Anglais, tirez-vous les premiers.

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  • Porcinet va déclarer la guerre a Cameron. Vu notre faiblesse matérielle (quoiqu’en disent les journaleux à la solde du pouvoir socialiste en place…) d’un point de vue militaire en raison des chutes continues de crédits alloués à la défense , la défaite serait cuisante, et ce serait un risque de voir des envahisseurs british sur notre territoire, comme se fut le cas au Moyen-Age (surtout s’ il fallait défendre le pays avec quelques chars Pagaie) ! 🙂

  • qu’ils partent ces anglais…dans deux mois ils toqueront à la porte de l’UE pour en faire de nouveau partie…

  • Plus malins et courageux que nous les Anglais. Comme la majorité des Français, ils ont bien compris que l’europe et l’euro sont un bourbier où l’on meure progressivement, mais ils sauront faire ce qui est le mieux pour eux.

  • « La rhétorique est rodée ; faire partie du groupe donne des obligations, comme celle de renoncer à ses intérêts propres au profit de ceux du groupe – c’est-à-dire renoncer à son propre jugement rationnel »

    Je pense qu’il s’agit surtout de culpabiliser ces gens pour leur faire renoncer à leur pouvoir politique – au profit des seuls politiciens.

    Dans une société libre et juste, chaque individu responsable est dépositaire du pouvoir politique, et pas juste une clique de monopolistes qui s’auto-cooptent selon leurs intérêts propres.

  • Que de propos franco-français – finalement étroits – dans certaines idées contenues dans cet article et ses quelques premiers commentaires ! Une preuve flagrante de l’inaptitude hexagonale à analyser « l’AUTRE » avec le besoin d’empathie qui devrait pourtant constituer la richesse de notre culture. De l’égocentrisme pur et dur, sorry !

    Visiblement, beaucoup jettent leur opinion sans guère connaitre les travers organisationnels et/ou législatifs qu’introduit l’U.E. dans un monde en transformation profonde… Vue obtuse de juristes et de bureaucrates;

    Apprenez donc à porter un oeil critique sur ces institutions que vous ne connaissez visiblement pas, sinon au travers de l’intox qu’elles tâchent de vous vendre d’elles-mêmes, imbibées qu’elles sont d’autocomplaisance (complecency …).
    J’ai le privilège de les connaître de l’intérieur, avec une foule de faits et gestes erronés, depuis plusieurs décennies. Les travers que le jeune auteur projette habituellement de nos administrations hexagonales s’y retrouvent à une échelle supérieure (tandis que les médias et leurs 3.000 correspondants accrédités ont réussi à vous aveugler). Triste !

    Cameron et la dominante de citoyens UK exigeant des réformes U.E. effectives (sinon la sortie via référendum) ont parfaitement raison de secouer l’U.E., avec l’espoir de la libérer de sa gangue bureaucratique. Ils l’ont au nom de la liberté de juger sur pièce, ce que vous vous révélez incapable de faire ! Salut ;-p

    • Je suis de tout coeur avec vous my friend !!! Votre coup de dés stratégique… Nous allons voir… Ne pas oublier aussi que Merkel est à droite donc pourrait soutenir Cameron… Wait and see…^^

  • L’angleterre en deux points:
    -Pays d’imigration
    -Mentalités d’ailleurs

    • Il y a quelques mois, sur ce même site, certains (beaucoup) pensaient que l’Allemagne sortirait de l’Euro dans son propre intérêt…Y a-t-il aujourd’hui quelqu’un pour soutenir cette même hypothèse ?

      • Je ne suis pas certain de comprendre votre argument: les politocards et leur clique de vassaux (journaleux compris) ont une fois de plus gagné…cela prouve quoi au juste ?

  • il y a un truc que j’aimerais comprendre :

    on nous martelle que si les anglais quitte l’UE, ils ont beaucoup à y perdre car 50% de leur commerce exterieur est fait avec l’UE.

    Donc si j’ai bon, ça veut dire que si ils quittent l’UE, ils ne pourront plus exporter en europe ?
    la livre n’a pas été ré-évaluée (ou dévaluée) au passage à la monnaie unique ?
    l’euro restera au meme court meme sans les Anglais ?
    le taux de change restera le meme donc ?

    donc ça change quoi en faite ?
    c’est juste pour faire peur ou bien ?

    • oui c’est juste pour faire peur, si les anglais quittent l’UE ils auront un accord de libre-échange qui leur permettra de commercer comme avant avec l’Europe sans avoir les contraintes de l’UE.

      De toutes façons l’UE n’aurait strictement aucun intérêt à établir des mesures protectionnistes contre le Royaume-uni.

  • L’Europe n’a de sens que si elle est fédérale et faite en une seule fois, pas en 50 ans ni en 100 ans, crise après crise, dans le dos des gens et à pas de mouche.

    Constitution > référendums > Etat-Unis d’Europe

    Sinon arrêtons tout de suite le massacre et revenons aux Etats souverains avec simple zone de libre-échange européenne.

    Elle est là la vérité…

    • Pauvre Mr M. : de l’U.E. en ses réalités profondes, vous n’avez toujours rien compris, sinon ces leçons que vous bassinent des J.Delors et sa fondation « Notre Europe », plus l’armada des bureaucrates peuplant les hémicycles ??? De la lucidité ne ferait pas de tord…

  • On dirait que la « carte orwellienne du monde » est en train de se dessiner…

  • L’allemagne attend merkel le retour !

    Donc dans l’attente, plus rien ne se passe.

  • Les anglais ont des facultés à faire certaines choses plus facilement que nous, exemple: Lorsqu’ils voient qu’ils ont raté quelque chose et bien ils n’hésitent pas à changer d’idée et à revenir en arrière. certains chez nous devraient bien s’en inspirer plus souvent…

  • Oui , il très souhaitable , à mon avis ,que la France sorte de l’Europe et de l’euro , quitte à suivre en cela , les anglais !! Les «  »menaces » exprimées par certains « politicards » ne font que conforter cette position , guidée surtout par l’intérêt national , et non par la conservation des avantages .financiers juteux qu’ils perçoivent

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