À regret pour François Hollande, l’économie ne cède pas à la rhétorique
Par Guy Sorman.
Le vocabulaire comme politique : François Hollande nous promet de « lutter » contre le chômage par la multiplication des déclarations. À regret, l’économie ne cède pas à la rhétorique : la récession française – le revenu par habitant, actuellement, diminue – détruit des emplois. L’investissement privé baisse, l’investissement public va baisser, en particulier celui des communes parce que l’État réduit leur dotation. Aucune innovation spectaculaire n’invite les entrepreneurs à se lancer dans de grandes aventures en France. L’augmentation des impôts sur les entrepreneurs et sur les entreprises réduit les marges pour investir dans l’avenir. Le verrouillage du code du travail qui, de fait, interdit de licencier, décourage tout recrutement à risque.
Tout ceci, qui est mécanique, incontesté, est la raison incontournable d’une progression inéluctable du chômage : les plus affectées sont les jeunes générations qui arrivent sur le marché du travail et n’y entrent pas. L’augmentation incessante du chômage est donc certaine.
Ce que l’on ne comprend absolument pas, mais pas du tout, est la pensée magique du gouvernement. François Hollande croit-il vraiment que le chômage va baisser alors qu’il augmente ? Pareille négation de la réalité, toute considération partisane mise de côté, ne relève plus de l’économie, mais de l’analyse psychologique.
Un précédent vient à l’esprit : François Mitterrand, de 1981 à 1983, crut aussi échapper à la réalité, en engageant un repli de la France sur elle-même, avec dévaluations répétitives (impossible aujourd’hui grâce à l’Euro, ouf !), nationalisations (tout aussi impossibles en raison de la mobilité du capital), voire retrait de l’Europe. Jusqu’à ce que la catastrophe fut si évidente que Mitterrand en 1984 appela Laurent Fabius à Matignon et Jacques Delors aux Finances, pour en revenir au réel. Mitterrand, dès lors, ne se mêla plus d’économie. Mais Fabius est passé à gauche-gauche et Delors est loin : qui d’autre ? On trouverait, bien entendu, une relève rationnelle mais au préalable, François Hollande devrait se retirer dans sa bibliothèque comme Mitterrand sut le faire à partir de 1983.
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Sur le web.
Malheureusement, il est possible que Mollande arrive à respecter en apparence son objectif d' »inversion de la courbe du chômage » en fin d’année. cela ne sera qu’une illusion et un mensonge mais les statistiques pourraient bien le servir.
En effet :
– les très nombreux contrats aidés prévus vont se concentrer vers la fin de l’année. Il y a actuellement 20 000 chômeurs supplémentaires par mois. Avec 100 000 emplois d’avenir, il est théoriquement possible d’annuler le chômage sur 5 mois. Il faut cependant tenir compte de l’effet d’aubaine …
– statistiquement, en décembre, le chômage augmente moins que sur le reste de l’année grâce à l’activité généré par les fêtes, les bilans, les inventaires, …
– il est fort possible que suite aux augmentations massives du chômage des années précédentes, le rythme de croissance diminue voir s’annule quand l’économie française aura atteint son niveau de chômage structurel. En clair, les entreprises fragiles auront globalement toutes fait faillite et les autres auront licenciés tout les salariés non indispensables …
– l’influence du gouvernement sur de nombreux groupes para-publiques va probablement les empêcher de diminuer leurs effectifs pour s’adapter à la crise actuelle. La SNCF, la RATP, EDF, GDF, … vont probablement continuer à embaucher comme si la crise n’existait pas.
– Via le FSI, le gouvernement va peut être sponsorisé de nombreux entreprises dans le seul but de créer des emplois au lieu de créer des entreprises pérennes …
Il est donc possible que FH parade comme un coq vers la fin de l’année en tant que vainqueur du chômage. Cela lui laissera alors le temps de trouver un coupable pour la rechute brutale de début 2014 …
A priori, Jacques Delors était déjà ministre des Finances de 1981 à 1984 (c’est lui qui a apparemment laisser jouer François Mitterrand au « petit ministre des Finances », celui-ci nourrissant un complexe d’infériorité dans ce domaine par rapport à Giscard. Il a fait joujou et nous avons tous perdu). Pour ce loyal service, Delors sera nommé à la Commission Européenne en Janvier 1985.