Alors que s’aggrave la crise de régime, François Hollande semble paralysé et ne rassure plus personne.
La situation devient de plus en plus préoccupante pour le président François Hollande. À la suite de l’« affaire Cahuzac », sa cote de popularité touche le fond. Cela peut-il encore durer quatre ans ?
Dans une veine tentative de renverser son affligeante cote de popularité alors que tous les indicateurs économiques sont au rouge, le président acculé s’est adressé à la nation. Non seulement l’exercice a été peu convaincant, mais quelques jours plus tard, son gouvernement s’est trouvé plongé dans un scandale digne d’une république bananière.
Après quatre mois de démentis véhéments, l’ancien ministre du Budget, Jérôme Cahuzac, a fini par avouer qu’il avait mis de côté une coquette somme d’argent non déclarée dans un compte bancaire suisse. Ce fatidique mardi, les contribuables ont alors compris que l’administration fiscale qui mène un travail d’une redoutable efficacité pour saisir chaque centime de leur poche était dirigée par un menteur et un escroc. Intuitivement, ils ont depuis le sentiment que l’indignation affichée par les membres du gouvernement n’est qu’une manÅ“uvre de communication. Comment ne pouvaient-ils pas être au courant ?
Sans les révélations d’un journalisme d’investigation qui agit tel un quatrième pouvoir dans une démocratie de plus en plus dysfonctionnelle, le ministre « de confiance » du président « normal » aurait continué à embobiner l’administration qu’il dirigeait et à lutter contre la fraude fiscale en France et à l’étranger.
La France n’a jamais été à l’abri de scandales politiques de toute sorte, mêlant argent, mensonges et sexe. Le président François Mitterrand avait notoirement menti sur son passé (notamment sa proximité avec le régime de Vichy) et caché une maîtresse entretenue aux frais des contribuables. L’ancien ministre des Affaires étrangères Alain Juppé a été privé de ses droits civiques pendant un an à la suite d’une condamnation pénale (abus de biens sociaux). Le Parti socialiste est à peine remis des scandales sexuels en série de l’ex-chef du FMI et espoir pour les présidentielles, Dominique Strauss-Kahn…
Le dernier scandale en date est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. À travers le pays, les sympathisants et membres du Parti socialiste expriment leur désespoir et leur ras-le-bol. L’opposition divisée trouve une occasion de se remobiliser, certains avec véhémence appelant à la dissolution de l’Assemblée nationale, d’autres réclamant un remaniement ministériel.
Une enquête récente a révélé des résultats inquiétants sur le niveau de défiance des Français envers leur classe politique pour une démocratie « avancée » (CEVIPOF). Quelques 72% pensent que « les politiciens agissent principalement dans leur intérêt personnel » tandis que 62% considèrent que « la plupart sont corrompus. » Des parallèles peuvent être établis avec le climat insurrectionnel de 1958, lorsque la crise de régime a conduit à un retour au pouvoir de Charles de Gaulle et à la naissance de la Ve République.
L’affaire Cahuzac est donc la pointe de l’iceberg visible et invisible des troublantes affaires d’État, dans un pays où l’élite politique vit apparemment en dehors des griffes d’une justice qui ne manque jamais de s’occuper des citoyens ordinaires. Ce sentiment qu’il y a quelque chose de pourri dans la république est renforcé ad nauseam par le flux de nouvelles quotidiennes sur les affaires judiciaires impliquant des élus.
Avec un État interventionniste obèse absorbant 57% du PIB, faut-il s’étonner que les politiciens soient tentés de mettre leurs doigts dans le pot de miel « public » ? Alors que le pays se transforme en enfer fiscal, peut-on encore blâmer les créateurs de richesse (entrepreneurs, professionnels) d’aller placer une partie de leurs actifs hors de portée des hommes politiques iniques ?
Dans un système hyper-présidentiel, tous les regards se portent maintenant sur François Hollande, qui a un gros travail d’explications et de leadership à faire. Pourtant, tandis que s’aggrave la crise de régime, un président indécis arrivé là par hasard pontifie sur la morale républicaine, évite désormais toute action et ne rassure personne. Le pédalo France semble avoir perdu son capitaine…
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Une première version de cet article a été publiée en anglais par Hürriyet Daily News.
RT @Contrepoints: La France en proie à une crise de régime Alors que s’aggrave la crise de régime, François Hollande semble par… http: …
« Avec un État interventionniste obèse absorbant 57% du PIB, faut-il s’étonner que les politiciens soient tentés de mettre leurs doigts dans le pot de miel « public » ? »
Je pense qu’il faudrait inverser: c’est parce que l’objectif des politiques est de mettre leurs doigts dans le pot de miel « public » que l’État est obèse. Ce sont ces politiques qui poussent à la goinfrerie de l’État, afin d’en tirer le maximum de « calories » au passage. La « carrière » politique est aujourd’hui le meilleur moyen pour un avanturier peu scrupuleux de faire sa place au soleil de la République.
Rares sont ceux qui ne recherchent pas l’ombre des cocotiers.
A quand une monarchie réformatrice ?
le changement…
Bonne conclusion mais l’écran de fumée tiré par Hollande a bien réussi à dissimuler le scandale de la énième faillite d’Heuliez pourtant arrosé de subvention par l’ex concubine du président nommée à la BPI! Cette affaire est encore un pur scandale financier ou l’argent du contribuable est jeté à la fenêtre pour satisfaire la carrière d’une incompétente. Et pourquoi la BPI serait-elle plus capable que le marché pour investir???
Avant que de sempiternel « sondages-à -la-française » témoignent de l’insatisfaction du peuple, les médias étrangers ne s’étaient pas privés d’exprimer leur opinion sur cet homo sapiens normal qui déshonore une grande Nation !
Sans vouloir tomber dans la grande cabale, faut reconnaître que le « système politique » pseudo-démocratique d’Europe latine ne fonctionne plus guère. En plus de quoi, le goût des français pour jalouser la VRAIE réussite est nauséabond. Le citoyen lambda (ces 28% qui continuent de croire au sauvetage par Hollande) est simplement camarade et client abscon. Cette tare ne se change pas d’un coup de baguette magique ! Vivement la venue d’un VRAI leader, haro sur ce pantin hypocrite et incompétent !!!
Comment en est-on arrive la ?
Peut-etre (donnez-moi votre avis) par la somme de toutes nos petites lachetes et habitudes depuis quarante ans. Peur du changement, ne pas sortir du ron-ron rassurant de la routine nationale, s’auto-rassurer sur notre exception culturelle que le monde nous envie (?), voter un coup a droite puis un coup a gauche, s’habituer aux scandales politiques tout en continuant a voter pour les memes, accepter les incompetences de plus en plus flagrantes des dirigeants, et l’immoralite grandissante d’une classe politique confiante en son impunite auto-proclamee, etre content d’avoir voter contre l’Europe lors du dernier referendum puis accepter de se faire dicter une decision opposee a la volonte du peuple par les politiques (ce qui correspond a la definition de la dictature, et non plus de la democratie,….. la, je sents que certains vont deja me sauter a la gorge, preferant nier l’evidence simple), etc…
Bref, il n’y a pas de fatalite (sauf dans les cas des catastrophes naturelles). Cette situation est d’origine humaine et nous en sommes les responsables, collectivement. Nous avons clairement choisi notre destin, au fil de nos petites lachetes et stupidites pendant ces quarante dernieres annees.
Il est donc temps de reprendre notre destin en main, et les methodes employees vont etre douloureuses,… car il faudra sortir de nos habitudes.
Cher BB, j’ai senti le dérapage fâcheux lorsqu’en 1991, pour la loi de financement des partis politiques, l’Assemblée Nationale a voté à l’unanimité l’immunité des parlementaires… Cela signifiait qu’ils avaient tous profité du système. Ceux qui sont tombés sous les fourches caudines de la justice sont les lampistes ou les élus qui n’avaient pas assez mis de sociétés écrans entre leurs fausses facturations, leurs délits d’initiés et autres prébendes, ceux qui n’avaient pas assez menacé de mort les témoins de ces affaires. Rares sont les politiques d’aujourd’hui qui peuvent se dire propres. Même au niveau des conseils généraux, l’argent public sert chaque année à envoyer les assemblées départementales à l’étranger au frais de la princesse, conjoints compris, cela permet de corrompre tout le monde, à la base, et en même temps faire taire toute velléité de transparence et de moralisme mal placé, dès le début de la carrière politique. Car on est dans ces situations face à du détournement d’argent public, comme chacun l’avait bien compris. Cela s’appelle le baiser de la mort. J’ajouterais que cela a toujours été ainsi et que ça ne date pas de 40 ans. Le système politique est ontologiquement corrupteur. Quand on cherche à y entrer, les parrains vous mettent tout de suite la main dans le cambouis pour vous rappeler à vos petits arrangements.
Il me semble que c’est bien plus grave qu’une « crise de régime », ce qui impliquerait un gouvernement délirant, mais une population saine.
Dans la pratique, on voit un pays né pour être libéral, mais formé contre nature à un gauchisme délétère, reposant sur la médisance et le profitariat à tous les niveaux. A un point tel que la « droite » elle-même fait figure de dangereuse bolchevique étatique, le reste étant pire.
A ce petit jeu, une grosse moitié de la population en veut toujours d’avantage, l’autre mourant à petit feu de parasitismes divers et variés, et l’ensemble étant distrait de cette trajectoire morbide par de menus scandales quotidiens.
« L’affaire Cahusac » aurait-elle produit un tel séisme dans un pays plus équilibré mentalement et moins régulé/ponctionné ? Evidemment non. Chacun aurait ri de découvrir ce « comble » d’un Ministre du Fisc roulant sa propre administration, on aurait jeté ce fruit pourri au compost, et on serait passé à autre chose. La dramatisation de ce micro évènement en dit long sur l’état moral du pays.
Pour le français moyen, qui ne suit que le spectaculaire sans aller voir le fond, c’est le « tous pourris » qui prévaut. La presse – autrement dit la gauche essentiellement – a tout fait pour :
– on a fait frémir avec l’horrible collusion entre Tapie et Lagarde, quand la Ministre a en fait réglé magistralement, et à moitié prix, un conflit qui avait fait à 20 reprises droit au plaignant.
– on a agité une casserole Karachi en impliquant à tout hasard Sarkozy, dont il est avéré qu’il n’avait rien à voir.
– il fallait plus fun ? Voila qu’arrive cette ridicule « affaire Bettencourt », un dossier tout aussi vide, mais qui a fait la réputation désastreuse du Président, ce qui était le seul but.
– Woerth, excellent Ministre, a été mouillé dans une autre carabistouille, reliant la vente tout à fait normal de l’hyppodrome de Chantilly … au fait que sa femme avait une participation dans UN cheval de course (super, ça, il fallait l’inventer)
Et pour faire bonne mesure (en fait non, mais juste pour faire croire que la presse est objective) on sortait un pauvre Tron accusé de délit d’ accupressure des pieds, ce dont chacun peu apprécier la violence inouie …
Toutes ces petites curées médiatiques exonèrent les vraies crapules, celles qui font magiquement disparaître des milliards d’argent durement gagné par les contribuables à coup de mesures imbéciles, par une majorité qui n’a recueilli de voix que par des manoeuvres incessantes et discriminatoires … Talleyrand disait que « cent affirmations valent une preuve », et le principe avait été mis en application dès le premier jour de l’élection de Sarkozy …
Bref, c’est toute la France qui est malade de malveillance, d’inculture, de jalousie, et elle n’a que le gouvernement qu’elle mérite.