Précisions sur les infractions pénales commises par les cons qui ont fait le mur des cons

Le scandale du mur des cons du syndicat de la magistrature aura probablement des conséquences juridiques. Lesquelles ?

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Mur des cons du syndicat de la magistrature

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Précisions sur les infractions pénales commises par les cons qui ont fait le mur des cons

Publié le 29 avril 2013
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Le scandale du mur des cons du syndicat de la magistrature aura probablement des conséquences juridiques. Lesquelles ?

Par Morgane Daury-Fauveau.

Mur des cons du syndicat de la magistrature

Le mur des cons suscite plusieurs questions juridiques.

Premièrement, quelle(s) qualification(s) retenir ?

La diffamation et l’injure sont incriminées par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. L’injure est définie comme « toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait » et la diffamation comme « toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation ». L’assertion diffamatoire doit exprimer un fait précis. Cette condition permet de distinguer la diffamation de l’injure. On est en présence, dans les deux cas, de propos insultants. Mais la diffamation seule comporte l’énonciation d’un fait dont l’authenticité est susceptible d’être vérifiée c’est-à-dire « dont la preuve peut être rapportée et faire l’objet d’un débat contradictoire », selon l’expression jurisprudentielle traditionnelle. Toutefois, la distinction est parfois délicate. Le même terme peut constituer soit une injure, soit une diffamation, selon que son auteur avait ou non en tête un fait précis, au moment de la formulation. Ainsi, l’insulte « nazi » est une injure (Crim. 6 mars 1974, bull. n° 97 ; crim. 14 février 2006, n° 05-82475) à moins de reprocher en réalité des actes de collaboration à la personne visée (Crim. 23 février 1950, bull. n° 69).

Nul doute que le terme « con » constitue une injure. Quant à la mention « l’homme de Vichy » apposée sur la photo de Brice Hortefeux, elle constitue également une injure et non une diffamation à moins que les membres du syndicat de la magistrature aient vraiment cru que l’ancien ministre a appartenu au gouvernement de Vichy. Ce n’est d’ailleurs pas totalement exclu puisqu’ils ignorent manifestement que le mur de Berlin est tombé…

Deuxièmement, les infractions sont-elles publiques ou privées ?

La question est importante car l’injure publique est un délit puni de 12 000 euros par l’article 33 de la loi de 1881 sur la liberté de la presse alors que l’injure privée constitue une simple contravention de première classe punie d’une amende de 38 €, sur le fondement de l’article R 621-2 du code pénal. Le local syndical est un lieu privé. Le délit reste privé si l’écrit injurieux est uniquement accessible à des personnes liées par une communauté d’intérêts, celle-ci étant définie par la jurisprudence comme « un groupe de personnes liées par une appartenance commune, des aspirations et des objectifs partagés, formant une entité suffisamment fermée pour ne pas être perçue comme des tiers par rapport à l’auteur des propos mis en cause » (V. crim. 28 avril 2009, n° 08-85249). Mais l’injure devient publique dès qu’il est établi qu’une personne étrangère au groupe en a eu connaissance (Crim. 15 juillet 1981, bull. crim. n° 232). Or, apparemment, la porte du local n’était pas fermée à toute personne n’appartenant pas au syndicat. Dès lors, la condition de publicité est remplie.

Troisièmement, les infractions sont-elles prescrites ?

Selon l’article 65 de la loi du 29 juillet 1881, la prescription de l’action publique est abrégée puisqu’elle n’est que de trois mois. La question fondamentale est donc celle du point de départ de la prescription. Le délai court du jour de la publication car il s’agit d’infractions instantanées (propos tenus en public) ou, parfois, permanentes (périodique diffusé plusieurs semaines), caractérisées par des effets qui se prolongent automatiquement dans le temps. C’est le cas du mur des cons : l’injure se poursuit tout le temps de l’affichage. Mais il ne s’agit pas d’infractions continues dont la prolongation des effets nécessite la réitération de la volonté coupable. Une jurisprudence constante rappelle que le point de départ de la prescription ne saurait être retardé au jour où la victime a pris connaissance de l’injure, puisque sa publicité est un élément constitutif du délit. Les juges du fond fixent la date en fonction des éléments dont ils disposent (ici les photos…).  En l’espèce, seules les personnes qui ont été épinglées sur le mur des cons il y a moins de trois mois pourront utilement porter plainte.

Enfin, précisons que lorsque l’injure a été diffusée par internet, la fixation du point de départ de la prescription n’est pas retardée pour autant. Par exemple, le point de départ de la prescription de l’injure qui consiste ici à qualifier de cons les membres du syndicat de la magistrature qui ont collé des photos sur le mur des cons, singulièrement ceux qui y ont fait figurer les pères de deux jeunes femmes assassinées, doit être fixé à aujourd’hui.


Morgane Daury-Fauveau est maître de conférences en droit privé et sciences criminelle à la faculté de droit et de science politique d’Amiens.

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