Les progressistes américains invoquent aujourd’hui l’héritage des pères fondateurs, non sans mauvaise foi. Les premiers progressistes étaient bien plus honnêtes : les principes de la Constitution et de la Déclaration d’Indépendance devaient être systématiquement écartés.
Par David Azerrad depuis les États-Unis.
Titre original : The Good Ol’ Progressive Contempt for the Founding. Traduit de l’Anglais par Le Bulletin d’Amérique.
Tout conservateur qui prend ses repères à partir des principes fondateurs de l’Amérique ne peut s’empêcher de regretter la franchise avec laquelle les premiers progressistes écartèrent nos documents fondateurs, perçus comme des reliques surannées d’une époque révolue. Contrairement aux politiciens progressistes qui, à partir de Franklin Delanoe Roosevelt, masquaient leurs pensées étatistes dans une rhétorique de la fondation, Woodrow Wilson, Herbert Croly et leurs contemporains faisaient clairement savoir que la Déclaration d’Indépendance et la Constitution barraient la route de leur programme progressiste et devaient être mises au rebut.
« Si vous voulez comprendre la Déclaration d’Indépendance réelle, ne répétez pas la préface » conseilla Wilson à une audience au Jefferson Club de Los Angeles. « Faites une nouvelle table des matières, faites une nouvelle série de chefs d’accusation, faites un nouvel état des choses que vous voulez fixer correctement. »
Dans The Promise of American Life, Croly admet volontiers que
tout accroissement de la puissance et de la responsabilité centralisée, opportune ou inopportune, est préjudiciable à certains aspects de la démocratie américaine traditionnelle. Mais la faute dans ce cas réside dans la tradition démocratique. La tradition erronée et trompeuse doit céder devant la marche de la démocratie nationale constructive.
Quel rafraîchissante franchise ! À l’époque, au moins, vous saviez où un homme se trouvait. Les progressistes ne pouvaient refaire totalement l’Amérique, et le disaient ouvertement. Ils admettaient clairement que leur agenda étatiste ne pouvait tout simplement pas être concilié avec les droits naturels, le fédéralisme et l’énumération des pouvoirs.
Aujourd’hui, en revanche, les progressistes invoquent les fondateurs pour justifier n’importe quelle politique pour animaux de compagnie, et peu importe à quel point ils s’éloignent du constitutionnalisme des fondateurs.
Ainsi le magazine Time a t-il consacré un numéro spécial à George Washington dans lequel il nous est dit que notre premier président a commencé la tradition politique qui a produit la victoire du Nord pendant la guerre civile, le Conseil de la Réserve fédérale, la sécurité sociale, Medicare et, plus récemment, Obamacare. Premier à s’être engagé dans la guerre d’Indépendance, premier à avoir permis la paix et maintenant, semble t-il, premier à avoir permis les droits progressistes [entitlements].
Ainsi le président Obama présente t-il l’ensemble de son programme de second mandat — du changement climatique au mariage homosexuel — comme une ode aux Fondateurs et à la Constitution. We the people, afin de réduire l’émission de gaz carbone et redéfinir le mariage …
Et dans la dernière itération, John D’Amico, un juge retraité de la Cour supérieure du New Jersey, vilipende le Tea Party, le Conservative Political Action Committee, Rand Paul, Rick Santorum, les républicains conservateurs, et «l’extrême droite» pour leur refus obstiné de voir que nos documents fondateurs exigent l’adoption de l’ensemble du programme électoral du Parti démocrate. Dans un essai décousu écrit pour la revue Salon, il explique :
La poursuite du bonheur est dépendante, et appelle à la protection gouvernementale de notre vie et de la santé. Vu à travers le prisme de la Déclaration, alors, la vérification des antécédents universels pour les achats d’armes à feu, la législation de réforme des soins de santé pour couvrir la garde d’enfants non assurés, la sécurité au travail, les lois et règlements protégeant l’air que nous respirons et l’eau que nous buvons, et des mesures pour ralentir ou inverser le réchauffement planétaire, dont la science nous dit qu’il menace la santé de notre planète et de ses habitants, sont essentiels pour protéger notre droit à la vie et encourager notre poursuite du bonheur.
Le Juge D’Amico invoque alors la seule partie de la constitution originelle que les progressistes aiment vraiment — le Préambule — pour justifier la loi Dodd-Frank de réforme de Wall Street, un trésor de dispositions inconstitutionnelles.
Pas même une seule fois fait-il allusion au fait que la Constitution ne peut en aucun cas limiter les pouvoirs du Congrès. Pas même une seule fois ne mentionne t-il le dixième amendement ou la distinction entre les différents niveaux de gouvernement. Pas même une seule fois n’envisage t-il la possibilité que les divers droits économiques positifs dont il est si épris peuvent se heurter à des droits naturels de la Déclaration d’Indépendance.
Sa diatribe se résume essentiellement au syllogisme suivant : nos textes fondateurs parlent de la poursuite du bonheur et du bien-être général de la population. Ceux-ci, à leur tour, sont tributaires du gouvernement et en appellent à lui. Par conséquent, le gouvernement fédéral peut faire ce qu’il veut pour assurer le bonheur et le bien-être général du peuple (des termes fourre-tout pour chaque idée progressiste dans le livre).
Ce serait amusant si ce n’était pas écrit avec une telle ferveur.
Les Conservateurs constitutionnalistes peuvent cependant encore trouver un réconfort dans le progressiste occasionnel qui ne mâche pas ses mots. L’année dernière, le juge à la Cour suprême Ruth Bader Ginsburg a offert un conseil mémorable aux Égyptiens : «Je ne voudrais pas regarder la Constitution américaine si je devais rédiger une constitution pour l’année 2012. »
Si seulement tous les progressistes pouvaient être aussi francs…
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Ce qui me dérange un peu avec cet article, c’est qu’on laisse entendre qu’un progressiste ne peut être qu’un étatiste.
C’est quoi un progressiste?
Quelqu’un qui pense que la société est toujours en progrès, en évolution, et qu’elle nécessite donc d’être réformée sans cesse. Un progressiste s’oppose donc au conservatisme.
Quoiqu’en fait en disant cela je me contredis tout seul…
En gros, c’est un mec qui a pas compris que quand l’Etat respecte la constitution, la société se reforme toute seule. Pas besoin de son aide.
Donc,
un progressiste = un idiot.
Les progressistes ont un don pour inverser la réalité et déformer le sens des mots jusqu’à ce qu’ils perdent leur sens voir prennent le sens opposés.
Ironiquement, les progressistes sont la quintescence d’un régréssionnisme. Ça serait amusant à regarder s’ils n’avaient pour objectif d’emporter tout le monde dans leur chute.
Progressisme = Maladie mentale
« Qu’elle nécessite d’être réformée ». Un progressiste est donc un constructiviste qui veut plier « la société » (périmètre précis, définition exacte, please ?) et la faire « progresser ». Seul il n’y arrive pas. Il lui faut donc un Etat pour forcer les autres « pour leur bien ».
Le progressiste est donc un étatiste vicelard qui se cache derrière « le progrès » (comment on mesure ça ?) pour imposer ses idées aux autres, par la coercition de l’appareil gouvernemental.
La constitution américaine n’est pas une panacée. Comparée aux articles de la confédérations, qui l’ont précédé, elle constitue même un retour en arrière substantiel. La constitution américaine, vue dans le contexte de son époque, représente une victoire de la frange étatiste des pères fondateurs (Madison, Hamilton et cie). Bref, elle est à revoir.
oui elle n’est pas parfaite, notre DDHC 1789 non plus et encore moins notre constitution, aujourd’hui les libéraux en feraient une bien mieux. Mais bon, vu que ce n’est pas demain qu’ils vont réécrire une Constitution, mieux vaut s’accrocher a celle qui existe, qui est quand même pas mal.
La déclaration d’indépendance définit la « poursuite du bonheur » comme un droit, pas le bonheur. Les politiques seraient bien avisés de prendre en compte la nuance. Le bonheur dépend de l’individu, et peut-être un peu de la chance. Aucune politique ne peut le garantir. L’État doit surtout faire en sorte de ne pas entraver la recherche personnelle du bonheur.