Ce que la médecine soviétique nous enseigne

Jour 5 de l’anthologie des 30 textes de Robert Wenzel qui vous amènera à devenir un libertarien bien informé : la médecine soviétique.

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Ce que la médecine soviétique nous enseigne

Publié le 21 juillet 2013
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Jour 5 de l’anthologie des 30 textes de Robert Wenzel qui vous amènera à devenir un libertarien bien informé : cet article du Mises Institute sur la médecine soviétique a été originellement publié le 21 août 2009.

L’Institut Coppet vous propose pour cet été, en partenariat avec Contrepoints, l’anthologie des trente textes libertariens de Robert Wenzel traduite en français. Robert Wenzel est un économiste américain éditeur du site Economic Policy Journal et connu pour son adhésion aux thèses autrichiennes en économie. Cette anthologie regroupe une trentaine de textes qui s’inscrivent quasi-exclusivement dans le courant autrichien et plus généralement dans la pensée libertarienne. Le but principal de cet ensemble bibliographique de très grande qualité est de former au raisonnement libertarien, notamment économique, toute personne qui souhaiterait en découvrir plus sur cette pensée.

Lire aussi les premiers textes de l’anthologie.

Résumé : Les systèmes médicaux socialisés n’ont pas amélioré la santé générale ou le niveau de vie n’importe où. En fait, et le raisonnement analytique et la preuve empirique démontrent le contraire de la conclusion. Mais l’échec lamentable de la médecine socialiste pour améliorer la santé populaire et la longévité n’a pas affecté son attrait pour les politiciens, les administrateurs et leurs laquais intellectuels en quête de pouvoir absolu et de contrôle total.

Par Yuri N. Maltsev.

Traduit par Clouseau [1].

Yuri N. Maltsev, du Mises Institute, a travaillé comme économiste dans l’équipe de réforme économique de Mikhaïl Gorbatchev avant de passer aux États-Unis. Il est le rédacteur de Requiem for Marx. Il enseigne l’économie au Carthage College.

En 1918, l’Union soviétique est devenue le premier pays à promettre l’universalité des soins de santé du berceau à la tombe, par la socialisation complète de la médecine. Le « droit à la santé » est devenu un droit constitutionnel des citoyens soviétiques.

Les avantages proclamés de ce système consistaient à assurer qu’il limiterait les dépenses et éliminerait les pertes provenant de la duplication inutile et du parallélisme ─ c’est-à-dire de la concurrence.

Ces buts étaient semblables à ceux déclarés par Barack Obama et Nancy Pelosi ─ des buts séduisants et humains de couverture universelle et de bas coûts.

Où est la différence ?

La saleté, les odeurs, les chats errants dans les corridors, l’ivrognerie du personnel médical et l’absence de savon et de produits nettoyants, additionnés au désespoir et à la frustration, ont paralysé le système.

Le système a eu des décennies pour réussir, mais l’apathie répandue et la pauvre qualité du travail ont paralysé le système des soins. Dans les profondeurs de l’expérience socialiste, les établissements de soins en Russie étaient au moins cent ans derrière le niveau moyen américain. De plus, la saleté, les odeurs, les chats errants dans les corridors, l’ivrognerie du personnel médical et l’absence de savon et de produits nettoyants, additionnés au désespoir et à la frustration, ont paralysé le système. Selon les évaluations officielles russes, 78 % de toutes les victimes du sida en Russie ont contracté le virus par des aiguilles sales ou du sang, contaminés par le virus dans les hôpitaux d’État.

L’irresponsabilité s’exprimant ainsi : « Ils feignent de nous payer et nous feignons de travailler » a causé la piètre qualité des services, la corruption répandue et d’innombrables décès. Mon ami, un neurochirurgien célèbre en Russie d’aujourd’hui, recevait un salaire mensuel de 150 roubles ─ un tiers du salaire moyen d’un conducteur d’autobus.

Pour recevoir les services minimum des médecins et du personnel infirmier, les patients devaient donner des pots-de-vin. J’ai même été témoin du cas d’un malade qui, n’ayant pu s’en acquitter, est mort en essayant d’atteindre un cabinet de toilette au bout du long couloir après une chirurgie cérébrale. L’anesthésie n’était pas chose usuelle pour les avortements ou les chirurgies mineures de l’oreille, du nez, de la gorge et de la peau. C’était un moyen d’extorsion par les bureaucrates sans scrupules de la médecine.

Pour améliorer la statistique de la mortalité élevée dans le système, on donnait généralement congé aux patients avant qu’ils ne donnent leur dernier souffle.

Ayant été député populaire dans la région de Moscou de 1987 à 1989, j’ai reçu beaucoup de plaintes de négligence criminelle, de pots-de-vin pris par des apparatchiks de la médecine, des ambulanciers ivres et d’intoxication alimentaire dans les garderies et les hôpitaux. Je me rappelle le cas d’une fille de quatorze ans de ma zone, morte de néphrite aiguë dans un hôpital de Moscou. Elle est morte parce qu’un docteur avait décidé qu’il valait mieux économiser les précieux films radiographiques (importés par les Soviets contre de la monnaie forte) au lieu de revérifier son diagnostic. Ces radios auraient réfuté son diagnostic de douleur neuropathique.

Au lieu de cela, le docteur a traité l’adolescente avec une compresse chaude, ce qui l’a tuée presque immédiatement. Il n’y avait aucun remède légal pour les parents et les grands-parents de la jeune fille. Par définition, un système de payeur unique ne peut pas permettre un tel remède. Les grands-parents de la fille ne pouvant pas faire face à cette perte sont tous les deux morts dans les six mois suivants. Le docteur n’a reçu aucune réprimande officielle.

Ce n’est pas étonnant que les fonctionnaires et bureaucrates du gouvernement du Parti communiste, dès 1921 (trois ans après la socialisation de la médecine par Lénine), se soient rendu compte que le système égalitaire des soins était bon seulement pour leurs intérêts personnels comme donneurs, administrateurs et distributeurs de rations ─ mais pas comme utilisateurs privés du système.

 

Comme dans tous les pays avec la médecine socialiste, un système à deux vitesses a été créé.

Ainsi, comme dans tous les pays avec une médecine socialiste, un système à deux vitesses a été créé : un pour la masse populaire, et l’autre, d’un niveau de service complètement différent, pour les bureaucrates et leurs serviteurs intellectuels.

En URSS, c’était souvent le cas, tandis que les ouvriers et des paysans mouraient dans les hôpitaux d’État, la médecine et l’équipement qui auraient pu les sauver demeuraient là inutilisés dans le système de la nomenklatura.

À la fin de l’expérience socialiste, le taux de mortalité infantile officiel en Russie était de plus de 2,5 fois plus élevé qu’aux États-Unis et plus de cinq fois que celui du Japon. Le taux de 24,5 morts pour 1000 naissances a été remis en question récemment par plusieurs députés au Parlement russe, qui prétendent que c’est sept fois plus haut qu’aux États-Unis. Ce serait un taux de mortalité russe de 55, comparé au taux américain de 8,1 pour 1000 naissances. (au Québec, le taux est de 333,3 pour 1000 naissances à cause des avortements.)

Cela dit, je dois préciser que les États-Unis ont un des taux les plus hauts du monde industrialisé seulement parce qu’ils comptent tous les enfants morts en bas âge, incluant les bébés prématurés, qui constituent la majorité des décès infantiles.

La plupart des pays ne comptabilisent pas les décès des prématurés. Certains ne comptent pas les morts qui surviennent dans les 72 premières heures. Quelques pays ne comptent pas celles intervenues durant les deux premières semaines de vie. À Cuba, qui se fait fort d’un taux de mortalité infantile très bas, les enfants en bas âge sont seulement enregistrés quand ils ont plusieurs mois, sortant ainsi hors de la statistique officielle toutes les nombreux décès d’enfants en bas âge.

Dans les régions rurales de Karakalpakia, de Sakha, de Tchétchénie, de Kalmykia et d’Ingushetia, le taux de mortalité infantile approche 100 pour 1000 naissances, mettant ces régions dans la même catégorie que l’Angola, le Tchad et le Bangladesh. Des dizaines de milliers d’enfants en bas âge sont victimes de la grippe chaque année et la proportion d’enfants mourant de pneumonie et tuberculose sont en augmentation. Le rachitisme, causé par un manque de vitamine D et inconnu dans le reste du monde moderne, tue beaucoup de jeunes.

Les dégâts gynécologiques sont répandus, à cause des 7,3 avortements que la femme moyenne russe subit pendant ses années de fertilité. En gardant à l’esprit que beaucoup de femmes évitent les avortements, la moyenne de 7,3 signifie que beaucoup d’entre elles subissent une douzaine ou plus d’avortements dans leur vie.

Même aujourd’hui, selon le Comité de statistique d’État, l’espérance de vie moyenne pour les hommes en Russie est de moins de 59 ans ─ 58 ans et 11 mois ─ tandis que celle des femmes est de 72 ans. La moyenne combinée est de 65 ans et trois mois. [2] En comparaison, la durée de la vie moyenne des Américains est de 73 ans et pour les Américaines de 79 ans. Aux États-Unis, l’espérance de vie à la naissance pour la population totale a atteint le record américain de 77,5 ans, de 49,2 ans plus élevé qu’il ne l’était il y a un siècle. L’espérance de vie russe à la naissance est inférieure de 12 ans. [3]

Après 70 ans de socialisme, 57 % de tous les hôpitaux russes ne disposaient pas de l’eau chaude courante, et 36 % des hôpitaux situés dans les secteurs ruraux de la Russie n’avaient ni eau ni égout. N’est-il pas étonnant que le gouvernement socialiste, en développant l’exploration spatiale et des armes sophistiquées, ignore complètement les besoins humains de base de ses citoyens ?

 

La qualité épouvantable des services n’est pas simplement la caractéristique de la Russie barbare et autres nations de l’Europe de l’Est : c’est le résultat direct du monopole de l’État sur les soins, et il peut se produire dans n’importe quel pays. En Angleterre, par exemple, la liste d’attente pour les chirurgies est presque de 800 000 pour une population de 55 millions. L’équipement dernier cri est inexistant dans la plupart des hôpitaux britanniques. En Angleterre, seulement 10 % des dépenses des soins de santé proviennent du privé.

La Grande-Bretagne a ouvert la voie dans la technologie de dialyse des reins, mais le pays a encore un des taux de dialyse les plus bas dans le monde. La Brookings Institution (sûrement pas un partisan du libre marché) a constaté que chaque année, 7000 Britanniques ayant besoin d’une prothèse de hanche, entre 4000 et 20 000 d’un pontage coronarien, et environ 10 000 à 15 000 d’une chimiothérapie, se voient refuser les soins médicaux en Grande-Bretagne.

La discrimination selon l’âge est en particulier apparente dans tous les systèmes lourdement étatisés des soins de santé. En Russie, les patients de 60 ans et plus sont considérés comme des parasites sans valeur, et ceux de plus de 70 ans n’ont souvent pas droit aux soins élémentaires de santé.

Au Royaume-Uni, les patients âgés de 55 ans et plus n’ont pas droit à la dialyse dans 35 % des centres de dialyse, 45 % des patients des 65 ans et plus n’ont pas droit au traitement, et ceux de 75 ans sont rarement soignés.

Au Canada, la population est divisée en trois tranches d’âge en fonction de leur accès aux soins : ceux de 45 ans et moins, les 45-65 ans et les 65 ans et plus. Inutile de dire que le premier groupe, les contribuables actifs, sont prioritaires.

Les chantres de la médecine socialiste aux États-Unis emploient la tactique de propagande soviétique pour atteindre leurs buts. Michael Moore est l’un des propagandistes socialistes les plus en vue et les plus efficaces aux États-Unis. Dans son film Sicko, il compare injustement et défavorablement les services médicaux des patients plus vieux aux États-Unis aux soins des pathologies complexes et incurables en France et au Canada pour les accouchements routiniers. S’il avait fait la réciprocité ─ c’est-à-dire comparer les soins pour les accouchements routiniers aux États-Unis avec ceux réservés aux patients âgés avec des maladies complexes et incurables dans des systèmes de soins socialisés ─ le film aurait été le même, sauf que le système des soins des États-Unis semblerait idéal et ceux du Royaume-Uni, du Canada et de la France sembleraient barbares.

Maintenant, aux États-Unis, la population subit un lavage de cerveau pour accepter la discrimination selon l’âge dans le système de santé. Ezekiel Emanuel est le directeur du Département de Bioéthique Clinique, à l’Institut National de Santé des États-Unis, et l’un des architectes du programme de réforme de la santé d’Obama. Il est aussi le frère de Rahm Emanuel, le chef du personnel d’Obama à la Maison Blanche. Foster Friess révèle qu’Ezekiel Emanuel a écrit que l’on ne doit pas garantir la sécurité sociale aux individus irréversiblement incapables de devenir des citoyens participants. Un exemple évident ne garantit pas de sécurité sociale aux déments. [4]

Dans une œuvre de collaboration écrite par Emanuel parut dans le journal médical The Lancet en janvier 2009, les auteurs écrivent :

« À la différence de l’assignation [des soins] par le sexe ou la race, l’assignation selon l’âge n’est pas de la discrimination désobligeante ; chaque personne passe par des étapes de la vie différentes plutôt qu’un simple âge. Même si les 25 ans ont la priorité sur les 65 ans, tous les 65 ans ont déjà eu 25 ans. Le traitement des 65 ans diffère à cause des stéréotypes ou des mensonges serait agéiste [5] ; les traiter différemment parce qu’ils ont déjà vécu plus d’années à vivre ne l’est pas. » [6]

La médecine socialiste créera la bureaucratie massive de l’État ─ semblable à nos zones scolaires unifiées ─ imposera des mandats coûteux aux employeurs, détruisant les emplois en étendant la couverture et en imposant des contrôles des prix qui mèneront inévitablement aux manques et à la mauvaise qualité du service. Il mènera aussi au rationnement d’économies réalisées par des moyens autres qu’une action sur les prix (c’est-à-dire le rationnement basé sur des considérations politiques, la corruption et le népotisme) de soins par les bureaucrates du gouvernement.

Des économies réelles dans un système de soins socialisé pourraient être réalisées seulement en serrant les fournisseurs et en refusant les soins ─ il n’y a aucune autre façon de sauver. Les mêmes arguments ont été employés pour défendre l’agriculture de coton du Sud avant la guerre civile. L’esclavage a certainement réduit les coûts de main-d’œuvre, éliminé les pertes causées par la négociation salariale et évité la duplication inutile et le parallélisme.

En supportant la vague de la médecine socialisée, les professionnels de la santé américains sont comme des moutons invitant les loups : ils ne comprennent pas que les coûts élevés des soins médicaux aux États-Unis sont partiellement dus au fait que les professionnels de la santé américains ont le niveau le plus haut de rémunération dans le monde. Une autre source du haut coût de nos soins provient des règlements du gouvernement sur l’industrie, des règlements qui empêchent la compétition de baisser les coûts. Des règles existantes comme les certificats de besoin, les permis et autres restrictions de la disponibilité des services de soins empêchent la compétition et, donc, aboutissent à des coûts plus élevés et des services réduits.

La plupart des pays asservis par l’Empire soviétique ont délaissé le système entièrement socialiste par la privatisation.

Les systèmes médicaux socialisés n’ont pas amélioré la santé générale ou le niveau de vie n’importe où. De fait, le raisonnement analytique et la preuve empirique démontrent le contraire de la conclusion. Mais l’échec lamentable de la médecine socialiste pour améliorer la santé populaire et la longévité n’a pas affecté son attrait pour les politiciens, les administrateurs et leurs laquais intellectuels en quête de pouvoir absolu et de contrôle total.

La plupart des pays asservis par l’empire soviétique ont délaissé le système entièrement socialiste par la privatisation en s’assurant qu’il y ait de la concurrence dans le système de santé. D’autres, incluant beaucoup de démocraties européennes socialistes, ont l’intention de privatiser le système de soins à la longue et de décentraliser le contrôle médical. On voit la propriété privée d’hôpitaux et d’autres unités comme un facteur déterminant critique d’un nouveau système plus efficace et humain.


Suivre les articles de l’anthologie libertarienne de Robert Wenzel.

Notes :

  1. La traduction originale de l’article peut être trouvée sur le blog Démystifications de Clouseau.
  2. « Russian Life Expectancy on Downward Trend » (St. Petersburg Times, 17 janvier 2003).
  3. Rapport du CRS pour le Congrès américain : « Life Expectancy in the United States. » Mis à jour le 16 août 2006, Laura B. Shrestha, Order Code RL32792.
  4. Foster Friess, « Can You Believe Denying Health Care to People with Dementia Is Being Considered ? » (14 juillet 2009). Voir également Ezekiel J. Emanuel, « Where Civic Republicanism and Deliberative Democracy Meet » (The Hastings Center Report, vol. 26, no. 6).
  5. NdT : Agéiste = faisant preuve d’âgisme ; attitude ou comportement visant à déprécier les individus du fait de leur âge. Ce terme, formé par analogie avec racisme, sexisme, s’emploie pour désigner la discrimination ou la ségrégation dont sont victimes des personnes du fait de leur âge, et plus particulièrement les personnes âgées.

    Le regroupement des personnes âgées en catégories en fonction de leur âge chronologique (« jeunes vieux », « vieux vieux », « troisième âge », « quatrième âge ») peut être vu comme une manifestation d’âgisme.).

  6. Govind Persad, Alan Wertheimer, et Ezekiel J. Emanuel, « Principles for Allocation of Scarce Medical Interventions » (The Lancet, vol. 373, issue 9661).
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