Les hommes de pouvoir ont de grands projets pour leur pays, et comptent bien mettre tout le monde à contribution pour les mener à bien – ou à mal. Barack Obama tombe souvent la veste et veut que tout le monde se retrousse les manches.
Par Baptiste Créteur.
Ah, que c’est beau, la réussite. En quelques années, certaines entreprises ont généré des milliards en proposant des produits et services qui simplifient la vie. Ordinateurs, téléphones et lecteurs multimédia en un seul appareil ; réseaux sociaux simples où chacun trouve son compte ; boutiques en ligne proposant un choix large et une livraison rapide à bas prix ; en répondant aux besoins de leurs clients parfois avant même qu’ils les expriment, les entreprises peuvent gagner des milliards.
Des milliards sur lesquels beaucoup aimeraient mettre la main pour servir leurs projets. Pour continuer à alimenter la bulle qui grossit, grossit et éclatera inéluctablement, pour « encourager » la création d’emplois, pour offrir un peu plus d’égalité et de droits-créances à leurs citoyens, les hommes politiques aimeraient beaucoup que les entreprises paient plus.
Ils développent pour cela des arguments presque crédibles si on ne réfléchit pas beaucoup.
D’abord, personne ne réussit seul. L’argument pourrait être valable s’ils entendaient par là qu’un entrepreneur doit savoir s’entourer, notamment développer des relations de confiance avec ses fournisseurs et ses clients et donner à ses employés l’envie et les moyens de faire de leur entreprise un leader. Mais ce qu’ils entendent par là, c’est que sans l’État, rien de tout cela n’aurait été possible, et que la dédicace de toute biographie de dirigeant devrait être « à l’État, sans qui aucun crayon n’aurait jamais existé ». Et ça, c’est faux ; l’initiative privée peut exister sans l’État, mais l’inverse n’est pas vrai.
Ensuite, les fruits de la croissance doivent être partagés. Comme si tout le monde avait un droit sur ce que les autres créent, au simple motif qu’ils vivaient au même moment ; et sans comprendre que tout le monde en bénéficie déjà. Dès la naissance, certains ont sans doute de meilleures dispositions pour certaines activités, certains talents et la chance d’avoir des parents fortunés. Mais tous, nous avons la chance, autrement plus importante, de bénéficier de ce que certains ont créé avant nous. Mourir de faim ou de maladie avant d’atteindre quinze ans est aujourd’hui exceptionnel, parce que des progrès immenses ont été faits ; la connaissance qui nous est aujourd’hui accessible, et en grande partie gratuitement et en quelques secondes, a une valeur autrement plus élevée que quelques milliers ou millions d’euros sur un compte en banque à la naissance. Les fruits de la croissance sont déjà partagés ; ce n’est pas parce qu’on n’en reçoit pas quelques euros sur un compte à chaque innovation qu’on n’en bénéficie pas.
Autre argument encore plus fallacieux, certains paient donc tout le monde doit payer. Avec une variante française, tout le monde devrait être honoré de contribuer à l’effort national. Un effort national qui consiste avant tout à faire tourner la machine bureaucratique, inonder les élus de privilèges et leur donner de quoi arroser leurs amis et les projets qu’ils aiment. C’est l’argument de Barack Obama aujourd’hui pour revoir la fiscalité : les petites entreprises paient, les grosses doivent payer aussi.
En bref, il veut empêcher les entreprises qui génèrent des profits de les utiliser comme bon leur semble ; il veut « créer » des emplois et lancer de grands travaux d’infrastructures. On connait le talent des hommes politiques pour la planification et le développement d’infrastructures ; il suffit de leur confier la gestion d’une ville pour qu’elle devienne un accident de l’histoire. On connait aussi leur talent pour créer des emplois, ou plutôt pour empêcher les entreprises d’investir et créer des emplois pour investir moins bien et créer moins d’emplois à leur place.
Il essaie de donner à ses idéaux collectivistes et étatistes des airs de rêve américain, comme les hommes politiques français donnent à leurs mesures liberticides le nom de liberté dans la plus belle tradition marxiste. Il prétend en effet se battre pour la classe moyenne, qui n’a pas les moyens d’échapper à l’impôt comme le font les plus riches.
Mais comment la classe moyenne peut-elle espérer s’enrichir si elle ne peut pas bénéficier des investissements des entreprises ? Comment peut-il leur apporter plus de richesse s’il entrave la création de richesse ?
Ce n’est pas en taxant les entreprises qu’on favorise l’esprit d’entreprise. Les impôts sont plus justes s’ils s’appliquent à tous de la même façon, mais cela ne signifie pas qu’il faut systématiquement niveler par le haut les taux d’imposition, au contraire. Comment s’étonner sinon que les grandes entreprises s’internationalisent et cherchent à échapper à des impôts qui impactent directement leur rentabilité et leur capacité à investir pour l’avenir ?
Ce que dit en réalité Barack Obama, c’est qu’il pense être plus à même d’investir pour l’avenir que les entreprises américaines hautement profitables, que les Américains ont plus besoin d’infrastructures que de création de richesse, et qu’il est plus légitime pour décider comment investir les profits que les entreprises qui les génèrent.
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