Les tours de vis successifs de Bercy conduisent à un effet pervers : une même richesse peut être imposée, taxée à plusieurs reprises.
Par Alexandre C.
Depuis plusieurs années déjà , la fiscalité en France s’est accrue de manière disproportionnée. L’absence de maîtrise des dépenses oblige les gouvernements successifs à rechercher des ressources financières supplémentaires en levant de nouveaux impôts. Et pour le coup, les éminences grises de l’Élysée, Matignon ou Bercy ne manquent pas d’imagination. Leur dernière invention en date est une merveille de machiavélisme : taxer les loyers fictifs. En clair, le gouvernement chercherait à imposer des loyers que vous percevriez si vous mettiez votre logement à la location. Une fois ce nouvel édifice fiscal mis en place, pourquoi ne pas continuer sur cette voie en taxant l’essence que vous utiliseriez même si vous ne vous déplacez qu’à vélo ?
Autant dire que pour en arriver à de telles idées, les services fiscaux doivent être sérieusement en manque d’argent frais [1]. Il est vrai que le budget présenté la semaine dernière est loin de rassurer nos partenaires : avec un déficit estimé à 4,1% du PIB pour l’année 2014, nous sommes classés parmi les mauvais élèves. S’ajoute à cela l’irresponsabilité des comptables de l’État : pour eux, les nouvelles recettes – à supposer que la ponction soit à la hauteur des espérances, ce qui est de moins en moins probable – ne servent pas à boucher les trous béants déjà existants mais à en creuser de nouveaux… Plus d’impôts appellent plus de dépenses. Hilarant pour l’observateur de passage, plus inquiétant pour le contribuable qui n’en finit plus de donner son argent.
Au-delà des nouvelles taxes, impôts et cotisations plus ou moins volontaires, Bercy n’hésite pas à donner un tour de vis conséquent à ce qui existe déjà : impôt sur le revenu, CSG, TVA… D’ailleurs, il demeure que l’ensemble produise un effet pervers : une même richesse peut être imposée, taxée à plusieurs reprises [2]. Cela pourrait s’apparenter à une atteinte à la propriété privée non ? Et pourtant, le plus souvent, sans que les gens s’en rendent compte, un tel mécanisme est déjà en place. Prenons un exemple.
Un jeune couple décide d’acheter un logement. Le mari et la femme travaillent tous les deux : lui est cadre supérieur dans une société pétrolière tandis qu’elle est chirurgien dentiste dans un cabinet. Leurs revenus leur permettent de vivre relativement confortablement, mais l’arrivée de ce bébé les obligent à changer de logement. Leur choix s’est orienté vers une maison de banlieue, 200 m2 habitable, disposant d’un vaste jardin. Le vendeur leur demande un prix de 550 000 euros. Là commence la grande aventure de l’accession à la propriété foncière.
Le couple dispose de quelques économies provenant à la fois de leur travail et d’un héritage [3]. Cet apport initial est de 100 000 euros. Le reste de la somme – 450 000 euros – proviendra d’un prêt sur 20 ans à 4% [4]. Une fois acquise, les jeunes parents commencent à s’installer, achetant du nouveau mobilier et faisant quelques aménagements d’intérieur. Les voilà donc à la tête d’un « capital » s’élevant à 550 000 euros. Dans sa grande mansuétude, l’État ne tarde pas à se rappeler à leur bon souvenir : tous les ans, les taxes locales – taxe foncière et taxe d’habitation – vont venir s’ajouter au prêt à rembourser. Prêt qui rappelons-le est pris sur leurs salaires, déjà taxés au titre de l’impôt sur le revenu. Sans compter l’entretien inhérent du logement.
Avec le temps, les revenus du couple augmentent : le mari est passé directeur du marketing sur l’ensemble de la France tandis que sa femme est devenue associée dans son cabinet de dentiste à hauteur de 25%. Désormais parents de trois enfants, leur maison a aussi pris de la valeur et le foyer fiscal en vient à  posséder suffisamment de biens pour être assujetti à l’ISF, l’impôt de solidarité sur la fortune. Alors certains me diront qu’avec leur niveau de vie, donner cet argent ne met pas ce couple en difficulté, qu’il ne risque pas de se retrouver à la rue, et c’est effectivement le cas. Cependant, le principe même de taxer encore une fois un capital déjà  passablement essoré par des ponctions successives, toujours plus importantes vient à poser une question  : est-ce moral de procéder ainsi ?
Les partisans du « le capital est mal réparti » diront que oui. Les riches accumulent trop de richesses – qui est un vol – et par conséquent, ils doivent participer plus que les autres à l’effort de solidarité envers les plus démunis. Ce raisonnement leur fait oublier, au passage, que sans ce capital, aucun emploi – et donc par conséquent aucune richesse – ne pourrait être créé. Les défenseurs de la propriété, comme moi, croiront que la taxation du capital est une atteinte à l’un des droits imprescriptibles jadis inscrits dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen [5]. Mais il est vrai que celle de 1948 est passée derrière…
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Sur le web.
Notes :
- On s’en doutait déjà depuis un moment… Chaque fois qu’un gouvernement arrive et voit les vrais chiffres des comptes publics il se rend compte que le pays serait en faillite s’il fonctionnait comme une entreprise. ↩
- L’exemple du fonctionnement de la TPS et de la TVQ (taxes sur la valeur ajoutée au Québec) est assez parlant. ↩
- Déjà passé à la moulinette des frais de succession… ↩
- Les mensualités seront de 2726,91 euros, soit à terme une somme de 654458,4 euros à rembourser, selon ma simulation. ↩
- Voir l’un de mes précédents billets sur mon blog : La Déclaration oubliée. ↩
Pour les entreprises, les charges d’emprunts sont déduits des revenus avant le calcul de l’IS. Il n’y a aucune raison qu’on n’applique pas la même logique aux ménages qui empruntent avant le calcul de l’IR. En poussant cette logique un peu plus loin, il n’y a aucune raison que les ménages ne déduisent pas, comme les entreprises, l’ensemble de leurs frais de fonctionnement (nourriture et chauffage par exemple) à l’occasion de leurs déclarations.
Ce qui revient à dire que l’IR, à l’instar de l’IS des entreprises, porterait exclusivement sur la capacité d’épargne, la « capacité d’autofinancement » des ménages. Conceptuellement, taxer l’épargne nouvelle revient à confier à l’Etat le soin d’investir à notre place. C’est une collectivisation de la propriété privée, de même nature que les taxes directes sur le patrimoine. Pour d’excellentes raisons démontrées par ailleurs, nous savons que l’épargne taxée ne crée aucune richesse nouvelle. Cette épargne est stérilisée. Bref, comme l’ISF, l’IR et l’IS ne devraient pas exister.
Les taxes type ISF détruisent leur assiette. L’IR et l’IS collectivisent également la propriété privée. Ces impôts sont des freins majeurs à la création de richesse. Tôt ou tard, ils devront être jetés avec l’Etat obèse. D’ailleurs, personne n’ignore que leurs rendements respectifs sont faibles, voire négatifs rapportés aux subventions versées. Que reste-t-il alors ? Quel est le seul impôt qui ne pénalise pas la création de richesse mais au contraire l’accompagne ?
La TVA, pardi !
TVA : impose les familles nombreuses et les pauvres bien plus proportionnellement que les célibataires et les riches
Comment un taux uniforme (on oublie temporairement les taux réduits) peut-il vous conduire à cette surprenante conclusion ? En proportion de quoi ? Sauf à prouver le contraire, chacun paye la TVA en proportion de sa consommation. Celui qui consomme plus paye plus : le riche qui possède sa Jag paye plus de TVA que le pauvre roulant en Renault ou Citroën. Où est le problème ?
Et ne venez surtout pas nous servir l’argument éculé de la propension à épargner ! Excepté les cas de grande pauvreté hors de propos, chacun est en mesure d’épargner selon sa volonté. L’arbitrage entre la consommation et l’épargne est un choix strictement personnel, en partie lié à l’éducation familiale, qui n’a pas à être pénalisé par le truchement des impôts.
Si c’est proportionnel, ce n’est pas bien plus ou alors par rapport à leur pouvoir d’achat. Ce qui veut dire que tu paie moins quand tu consomme moins et plus quand tu consomme plus.
En plus si tu consomme majoritairement à 5.5% (la bouffe à la maison, pas au resto)) c’est tout bénef tva-ment parlant !
Parce que la tva à 20%, c’est d’abord les familles nombreuses ou ceux à qui il reste un peu pour consommer du loisir ?
Celui qui se paie une ferrarri paie, selon vous, moins (je n’ose pas dire proportionnellement) que celui qui achète une 106 Peugeot (20% de 100, c’est moins que 20% de 10 !!!) ouais, c’est surtout dégoutant pour vous, parce les pauvres « y » peuvent pas se payer une ferrarri voir même pas la tva
Quelle bêtise ou est-ce de l’envie/jalousie made in France
Ça étonnera quelqu’un ici si je dis que certaines ménages relativement aisés pourraient avoir quelques problèmes pour payer leurs impôts?
D’où mon bémol sur la phrase affirmant qu’ils ne se retrouveront jamais à la rue.
La fraude à la TVA c’est jusqu’à 20 milliards. On pourrait diviser l’IR par 2 si les entrepreneurs fraudaient moins.
Si on divisait la taxe par deux, les gens frauderaient moins. Et si on supprimait toutes les dépenses de clientélisme, de stupidité administrative, de machins d’avenir qui ne rapporteront jamais un centime, on pourrait diviser la taxe par deux.
et c’est qui qui fraude le plus ?? Les 10% de gens aisés ou les 90% qui ne sont pas aisés et paient le plus souvent possible hors taxe pour diverses choses?
C’est le principe de l’impôt à base large et taux faible un petit impôt pour beaucoup plutôt qu’un gros sur un petit nombre!
non, on ne diviserait pas l’IR par deux, on gaspillerait plus.
Des gens comme vous n’en ont jamais assez (ou les autres en ont toujours trop)
Ben oui, c’est toute la beauté de la chose, on taxe même des revenus inexistants, voir la CSG qui est une taxe sur une somme que l’on ne perçoit pas, et des comme ça il y en a des milliers.
De la même manière, l’impôt sur le revenu taxe des ressources que l’on n’a plus.
Cette taxation existait en France jusqu’en 1965, elle existe en Suède encore aujourd’hui. Rien de scandaleux.
Exister dans un des quatre pays du monde qui imposent plus que la France n’immunise pas contre le scandale.
Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable. Elle doit être EGALEMENT répartie entre tous les Citoyens, en raison de leurs facultés.
Si l’impôt était réellement proportionnel, peut être que les gaspillage et autres détournements diminueraient, sachant que chacun paie « proportionnellement » pour ces gaspillages
j’ai trouvé: il faut inventer un taxe sur le travail au noir !
🙂 Oui, oui, une taxe forfaitaire générale sur les revenus « imputés » (lesquels, peu importe), à payer par tous quels que soient les revenus. C’est la devise de l’Etat obèse appliquée à la fiscalité : « Taxe aveuglément le citoyen tous les jours ! Si tu ne sais pas pourquoi, lui le sait. »
Un impot unique sous forme de TVA est une bonne solution, car réaliste, efficace et pragmatique. Mais idéalement, le prix que facture l’Etat aux citoyens pour ses services (qui seraient réduits à la protection des droits naturels) devraient être le même pour tous, et non proportionnel aux revenus ou aux dépenses.