Second volet de l’excellente série en trois volumes sur le futur des retraites, par Jacques Garello et Georges Lane.
Avec aujourd’hui la capitalisation, ou comment espérer passer de manière tout à fait réaliste d’une retraite actuelle encore (mais pour combien de temps ?) en moyenne à la moitié de son salaire brut à une retraite au moins égale à ce même salaire, sans qu’il en coûte plus (bien à l’inverse). L’expérience de nombreux autres pays le prouve. Pourquoi ne pas l’envisager chez nous aussi ?
À l’heure où la question des retraites est de nouveau débattue et où tout le monde convient qu’une nouvelle réforme du système s’impose, au-delà des habituels replâtrages dont nous sommes coutumiers, voici un ouvrage indispensable sur la grande question oubliée de nos politiques et autres journalistes médiatiques, et même hélas économistes : celui du choix du système lui-même.
Pourquoi ne jamais l’évoquer ? Pourquoi éluder ce nécessaire débat qu’on en vient même à oublier, tout le monde semblant considérer, en France, le système par répartition comme une évidence ?
Des craintes à dissiper
Or, la faillite des retraites par répartition semble bien inscrite dans la réalité démographique comme on le sait très bien et ainsi que le rappellent les auteurs (voir tome 1 : Futur des Retraites et Retraites du Futur : le futur de la répartition), que ce soit en France ou ailleurs.
Ce qui empêche de se pencher sur la question de la capitalisation est cette crainte qui serait liée à l’incertitude. Pourtant, face à un système condamné par avance, en quoi la capitalisation serait-elle plus incertaine encore ?
En effet, sans nier l’existence de dangers potentiels, Jacques Garello et Georges Lane montrent comment la couverture des risques peut et doit être conçue, les progrès en la matière étant importants, ce qui limite considérablement les risques du système (ceux-ci étant inévitables par nature quel que soit le système et contrairement à ce que l’on voudrait faire croire).
Ainsi, nombreux sont les pays qui se sont lancés dans la capitalisation, soit partiellement via les deuxième (retraites complémentaires) et troisième (épargne personnelle) piliers de leur système, soit directement en la plaçant au cœur du système, avec un succès bien manifeste. Pourquoi ne jamais l’évoquer ? Pourquoi ne pas s’intéresser à ce qui est fait à l’étranger et a montré ses résultats ?
Un système par répartition qui pèse lourd
Que constatons-nous effectivement en examinant la situation de notre système actuel par répartition ?
Devant l’impasse de plus en plus criante de ce système, on nous a annoncé sans cesse des hausses de cotisations sociales et des baisses de prestations afin de tenter de garantir la solvabilité du système (assurée d’ailleurs uniquement grâce aux placements financiers qui ont été effectués par la Sécurité sociale elle-même !). Quand il n’est pas question de repousser toujours davantage l’âge de départ en retraite dans des débats sans fin où l’on cherche à ménager les uns ou les autres en fonction de leur pouvoir de nuisance ou les intérêts électoraux.
Or, tout cela pèse à la fois sur :
- l’épargne nationale,
- l’investissement en capital,
- la productivité,
- les salaires,
- le revenu national,
- et en définitive la croissance économique.
La capitalisation, un potentiel à l’origine d’un véritable cercle vertueux
Inversement, les systèmes privés de capitalisation permettent d’engendrer, et les expériences menées le montrent, une élévation conséquente de :
- l’épargne nationale,
- l’investissement,
- la productivité,
- les salaires,
- la production,
- l’emploi,
- la croissance économique.
Excusez du peu !
Mais que deviendraient alors les plus fragiles, rétorque-t-on toujours ? Ce système ne serait-il pas réservé au plus riches ?
Hé bien, contrairement aux idées reçues, non seulement il n’est pas question de laisser quiconque de côté et de supprimer la solidarité qui pourrait demeurer à l’égard des plus fragiles, mais l’ensemble des vertus attachées au système par capitalisation aboutiraient à ce que les pauvres et les minorités (États-Unis) soient parmi les principaux gagnants.
Ils bénéficieraient ainsi notamment de prestations considérablement supérieures à celles que pourrait leur verser la Sécurité sociale avec une contribution inférieure. De plus, selon certains auteurs le caractère transmissible de ces rendements (contrairement au système par répartition) serait susceptible de venir briser le cercle de la pauvreté ; aujourd’hui, la famille du bénéficiaire qui décède dès son entrée en retraite ne touchera absolument rien de ce qu’il a cotisé tout au long de sa vie active. En outre, les effets favorables sur la croissance économique, les salaires et l’emploi revêtiraient une plus grande importance pour les pauvres.
Le système par capitalisation est en outre plus redistributif et équitable. Ceci est d’autant plus criant que dans le système par répartition, il n’existe aucun « droit acquis » contrairement à ce que beaucoup croient.
Bien au contraire, les problèmes que rencontre le système par répartition sont tels qu’il peut de moins en moins honorer ses engagements et nécessite sans arrêt de trouver de nouvelles dispositions de plus en plus lourdes pour s’en sortir.
Une expérience éprouvée dans de nombreux pays
Mais comment fonctionnerait un système par capitalisation ?
Le second tome de cette série très bien conçue de trois ouvrages se propose justement de nous présenter les systèmes par capitalisation mis en place dans de nombreux pays (ici, 33 pays jugés représentatifs).
Ce vaste panorama nous permet de mieux observer les pratiques de nos voisins et partenaires. Avec des présupposés qu’il faut bien sûr être prêts à accepter, ce qui semble difficile en France à l’heure actuelle où nous sommes si dépendants de cet État-providence qui semblait tant nous rassurer jusque-là : savoir et bien vouloir passer de l’obligatoire au volontaire, du monopole à la concurrence, du public au privé, du budgétaire au financier.
Autre question récurrente : quid des quelques échecs retentissants évoqués dans les années 1990 et qui nous sont sans cesse rappelés ? Jacques Garello et Georges Lane ne contournent pas la question, bien au contraire. Ils l’abordaient déjà dans le premier tome, insistant sur le caractère isolé de ces cas et surtout sur les garde-fous à adopter systématiquement pour éviter de tels cas issus pour l’essentiel d’actes de corruption ou d’inconséquence contre lesquels on est désormais prévenus et donc à même d’éviter.
Et maintenant, en pratique ?
Comment, en France enfin parvenir à passer le cas échéant du système actuel par répartition à celui par capitalisation ?
N’est-ce pas trop tard ? trop compliqué ? trop risqué ? C’est justement l’enjeu du tome 3 : Futur des retraites et retraites du futur : La transition, que nous vous présenterons dans les prochains jours…
— Jacques Garello et Georges Lane, Futur des retraites & retraites du futur – II- Les retraites du futur : la capitalisation, Librairie de l’université d’Aix, décembre 2008, 230 pages.
Un article publié initialement le 13 octobre 2013.
Mais que deviendraient alors les plus fragiles ?
Ils deviendraient moins fragiles, aisés, voire riches pour la plupart.
Article initialement publié en 2013… dix ans de perdus 🙁
Ce qui montre au passage – hélas – que la RpR n’est pas en faillite. Et qui explique, que sans volonté politique, ou pédagogique, il perdurera longtemps.
Car.
La RpR perd en intérêt avec l’évolution de la pyramide des âges. Mais est équilibrable à tout moment. En ajustant âge de départ, cotisations, et niveau de pension.
Faudra-t-il attendre que chaque actif ait son propre retraité à financer pour qu’on passe à autre chose ?