Aujourd’hui, troisième et dernier volet de la présentation de l’ouvrage en trois tomes de Jacques Garello et Georges Lane sur le futur des retraites. Avec la question concrète de la mise en pratique, ou comment passer à la transition. Une approche toujours très pédagogique et fondamentalement salutaire.
En commençant la lecture de ce troisième volet de réflexion sur notre système de retraites, on ne peut s’empêcher d’avoir en tête l’idée qu’à ce jour ce sont 51 pays à travers le monde qui se sont lancés dans la transition vers la capitalisation.
Pourquoi pas nous ? Qu’est-ce qui fait que la seule évocation du mot « capitalisation » n’a pas même lieu, ne vient absolument jamais à l’esprit des intervenants dans les débats publics ou dans la bouche des spécialistes censés réfléchir à des pistes pour tenter de nous sortir du marasme dans lequel se trouve notre système actuel ?
Refus d’ouvrir les yeux et fuite en avant
Tout se passe comme si seules des solutions paramétriques (durée de cotisation, âge légal de départ à la retraite, montant des cotisations, calcul des pensions) existaient et non des solutions systémiques.
Engoncée dans ses intérêts catégoriels, ses régimes spéciaux et surtout le souci des politiques de se faire réélire, véritable tare de la démocratie (voir école du public choice) les conduisant à craindre les pressions syndicales et des lobbies, la société est victime de la dictature du court terme plutôt que des grandes décisions engageant la longue période.
Là encore, ainsi que sur de nombreux autres sujets, l’ignorance joue un grand rôle.
Et c’est le mérite de nos deux auteurs de montrer en quoi on a tort de fermer ce débat et de ne pas chercher à écouter les arguments qui plaident en la faveur de la capitalisation.
Il faut dire qu’ici comme ailleurs les fausses idées, les mensonges et les manipulations pullulent. À l’instar de cette caricature systématique qui est faite de la capitalisation à travers les fausses expériences d’Enron et Maxwell, déjà évoquées et développées dans le tome 1 et qui ne portent d’autre nom qu’escroquerie ; ce qui existe dans tout système (surtout d’ailleurs étatique, l’expérience ne le montrant que trop).
Dans le prolongement de l’ignorance se trouvent les peurs. Et c’est là que ce troisième tome prend tout son sens. Montrer que la transition n’est pas, ainsi que les auteurs l’affirment en connaissance de cause, « un saut dans le vide » ; et qu’il y a donc de bonnes raisons de se pencher sans plus tarder sur le sujet en abandonnant l’idéologie, les vues à court terme et la démagogie, pour s’intéresser à ce que font les autres et étudier de quelle manière l’adaptation serait largement réalisable chez nous et sans prises de risques insensées, bien au contraire.
Le problème perpétuel étant, à la manière d’un Frédéric Bastiat dans son pamphlet Maudit Argent !, de ne pouvoir sortir facilement de la léthargie dans laquelle nous a plongé le système actuel, la lecture forcément trop confidentielle de ces trois solides ouvrages, malgré toutes leurs qualités pédagogiques, rendant « incapable de lutter contre l’erreur à laquelle il a donné naissance autrement que par une longue et fastidieuse dissertation que personne n’écoutera ».
Or, à l’instar de ce Maudit Argent, « … de cette confusion sortent des erreurs et des calamités sans nombre ».
D’où l’importance de ne jamais renoncer et d’où le caractère fortement louable de l’entreprise de Jacques Garello et Georges Lane, que nous nous devons de contribuer à diffuser et faire connaître.
Ce n’est qu’ainsi, en effet, que l’on peut espérer un jour faire avancer les choses.
Les garanties du système
Une fois de plus, les auteurs commencent donc par rappeler en quoi la transition n’est en aucun cas un saut dans le vide.
En effet, dans ce système par capitalisation,
Les retraités actuels ne perdraient rien, ce que la Sécurité sociale leur donnant actuellement étant au moins garanti en fonction du scénario de transition retenu (les auteurs en proposent trois), étant entendu que le système par répartition actuel ne garantit rien et les pensions ayant plutôt tendance à y diminuer.
Les plus démunis bénéficieraient toujours d’un filet social.
Les futurs retraités auraient des pensions nettement supérieures à celles que la Sécurité sociale serait en mesure éventuelle de leur verser (ceci étant d’autant plus vrai que la faillite du système par répartition est inéluctable (voir tome 1).
Les auteurs nous montrent qu’en seulement 13 ans il est ainsi possible de capitaliser autant qu’en 40 ans à la Sécurité sociale.
Affirmation validée par les expériences à l’étranger, et non un quelconque fantasme.
Mais quid alors du double fardeau consistant à abonder son fonds de pension tout en se préoccupant de payer pour continuer d’honorer les « droits acquis » des retraités actuels et futurs ?
Là aussi, Jacques Garello et Georges Lane nous montrent que la retraite demeurera bien plus élevée qu’elle aurait pu l’être dans le système actuel même s’il faudra environ 30 ans (deux générations) avant que ne s‘éteignent les derniers retraités entièrement régis par la répartition.
Même les « privilégiés » des régimes spéciaux seraient gagnants.
Quelle transition choisir ?
Selon les deux auteurs il existe différentes transitions possibles selon les choix que l’on retiendra.
Les solutions « douces » peuvent aboutir à une transition qui s’étalerait sur 70 ans, comme elle peut se limiter à 25 ans si l’on y consacre plus d’efforts tout de suite.
Mais tout dépend bien évidemment aussi du rythme de croissance économique, du poids de l’endettement public ou encore des ressources financières disponibles.
Le Chili a réalisé sa transition en seulement 14 ans, bénéficiant de conditions très favorables (l’argent des privatisations, notamment, n’y a pas été dilapidé en financement des dépenses courantes, comme ici).
Les auteurs passent donc en revue les différentes options possibles, montrant chaque fois en quoi elles sont réalistes ou irréalistes, adaptées ou inadaptées à la situation française, qui n’est pas celle qu’ont pu connaître certains pays voisins qui s’y sont lancés : transition obligatoire ou volontaire, opting out total ou partiel, capitalisation en fonction de l’âge des assurés, etc.
Cette dernière hypothèse est d’ailleurs celle qui fut retenue au Chili où les personnes proches de la retraite restaient dans le système par répartition car n’ayant pas le temps de reconstituer un capital suffisant en capitalisation, tandis qu’à l’autre extrême ce dernier système s’imposait aux plus jeunes, contribuant en parallèle au paiement des pensions des retraités actuels, les assurés d’âge intermédiaire étant libres quant à eux de choisir entre répartition et capitalisation, sachant que leurs droits acquis en répartition étaient conservés, grâce à des « bons de validation ».
Reste ensuite la question de la gestion des fonds de pension. Qui et comment ?
Comme en d’autres domaines, nous disent les auteurs, le meilleur système est la concurrence.
L’exemple du Chili sert là encore de référence avec une concurrence à deux degrés, les assurés choisissant leur gestionnaire et celui-ci son fonds, étant entendu qu’assurés comme gestionnaire peuvent remettre en cause leur choix à tout moment et même en avoir plusieurs (matérialisés par des « carnets de retraite »), obligeant chaque acteur à agir au mieux des intérêts des retraités dont ils ont la charge, concurrence oblige.
À l’inverse, Jacques Garello et Georges Lane déconseillent très fortement le système américain qui a conduit au désastre Enron, l’entreprise choisissant son fonds de pension (ce qui n’offre aucune garantie solide) ou, pis, allant jusqu’à créer son propre fonds dont elle contrôle le capital (et y puisant de manière illicite, comme dans les cas Maxwell et Enron, pour tenter de se sortir d’une mauvaise situation financière, pratique interdite dans presque tous les pays depuis).
Dans la plupart des expériences connues, la réglementation est intervenue dans l’intention de protéger les assurés. Avec là encore des situations diverses analysées par les auteurs, le poids de cette réglementation (contrôle de l’accès au marché, qualité des informations délivrées aux assurés, placements des fonds de pension) et l’origine de ses instances de contrôle n’étant pas anodin si l’on entend laisser la libre concurrence jouer pleinement ses effets.
Une enquête de la Banque mondiale révèle que là où la libre concurrence était la plus élevée, les rendements étaient nettement meilleurs et la situation personnelle des assurés mieux prise en compte.
Enfin, selon les auteurs on pourrait tout à fait imaginer que la transition prenne la forme d’une assurance retraite privée laissée à la préférence des individus, se substituant aux choix des gouvernants. Cette solution aurait le mérite de respecter l’idée selon laquelle la retraite est une question personnelle et pourrait en toute logique s’inscrire dans un cycle de vie, variable selon chaque individu (tenant compte de l’âge et des besoins et dépenses différents selon les moments de la vie, les éventuelles périodes de cessation totale ou partielle d’activité, le patrimoine dont on dispose, ou encore la situation familiale, entre autres).
Des contrats d’assurance d’une grande souplesse permettraient ainsi de tenir compte de cette diversité de situations personnelles, offrant de vrais droits individuels plutôt que de privilégier une vision systémique et de finances publiques, avec des « droits sociaux », comme c’est trop souvent le cas, y compris dans beaucoup de modèles de transition.
Comment concevoir la mise en œuvre politique ?
Le courage politique étant ce qui manque le plus pour agir, face au risque électoral et aux groupes de pression, ainsi qu’au poids de l’idéologie dans le pays qui véhicule tant de fausses idées, Jacques Garello et Georges Lane proposent d’aider les politiques à trouver le courage des réformes.
Premier conseil : face à l’ignorance, informer et dire la vérité
C’est le seul moyen d’éveiller la prise de conscience de l’importance de la transition et d’obtenir ainsi le soutien du plus grand nombre. Cela devant se faire non en citant de grands chiffres agrégés mais en partant du vécu personnel et du montant dépensé par chacun (cf. notion de salaire complet).
Selon les auteurs, ceci devrait être complété par de véritables formations pour les adultes, plus efficaces que l’information, par nature ne permettant pas d’aller au fond des choses.
Deuxième conseil : ramener de la transparence au système actuel, mettre fin à l’arbitraire (privilèges) et respecter droit de propriété et droit à l’initiative
Pour commencer, la transparence consisterait à permettre à chaque Français de savoir exactement ce à quoi il a droit.
Or, le montant des pensions n’est en réalité pas une somme fixe ni même assurée, des ajustements fréquents ayant lieu de la part des pouvoirs publics et de la caisse gestionnaire. Sans compter les changements de règle du jeu en cours de route (modifications du mode de calcul, allongement de la durée de cotisation, diminution des taux de pension en cas de retraite anticipée, mais aussi très probablement pour tous et de manière substantielle dans les années qui viennent, en raison des risques d’explosion du système, etc.) et la forte probabilité de faillite totale du système. D’où le succès des contrats d’assurance-vie et autres PER, hélas pas à la portée de tous.
Manque de transparence aussi lorsque les taux de remplacement annoncés par les statisticiens officiels le sont en rapport du dernier salaire net au lieu du salaire brut à l’étranger (alors que ces taux sont inférieurs à 50 % si l’on se réfère au salaire complet).
Tout en ne perdant pas de vue que beaucoup oublient ou ignorent que les sommes qu’ils auront versées pendant 40 ans ne sont pas placées mais immédiatement redistribuées.
Troisième conseil : revenir à la réalité en détruisant l’idéologie et instaurant la liberté de choix
Les conséquences économiques de la transition…
Pour finir et dans une dernière partie les auteurs montrent par quels mécanismes cette transition vers la capitalisation occasionnera en outre une fantastique relance économique bien éloignée de celles d’essence keynésienne artificielles et destructrices.
L’expérience des pays qui l’ont mise en œuvre parle, là encore (voir notre deuxième volet).
Accélératrice de croissance, pourvoyeuse massive d’épargne et facteur important de rétablissement des finances, notamment, elle peut se révéler très bénéfique si la liberté économique est par ailleurs correctement assurée dans le pays qui l’initie.
Et la transition, comme au Chili, en sera d’autant accélérée.
Grâce à l’allègement en charges sociales qui s’ensuit, elle permettra également de favoriser la compétitivité des entreprises de même que le pouvoir d’achat des assurés et des retraités, ainsi bien sûr que l’emploi.
… avec quelques mises en garde
Mais les auteurs y insistent : tout cela suppose un véritable changement des mentalités, la fin de la bureaucratie, de la centralisation et de l’arbitraire pour laisser place à d’autres valeurs, telles que « l’initiative, la curiosité, l’effort, le mérite, la performance, la rigueur, le souci des autres, le désir de servir, et peut-être même la générosité et l’honnêteté », en lieu et place de la passivité, le découragement, l’envie ou le comportement de profiteur.
La gestion de son patrimoine, la prévoyance, voire le désir de transmettre constituent, de la sorte, « un moyen de rendre aux gens leur liberté et le sens de leur dignité ».
On n’y arrivera, de surcroît, qu’en cessant de changer les réglementations en cours de route, d’alourdir la fiscalité sur l’épargne ou même en général à des niveaux insupportables dès que l’État a besoin de faire face à ses problèmes d’endettement insurmontable ou encore de manipuler les taux d’intérêt ou compliquer sans cesse les réglementations des marchés du travail ou financiers dès lors que les politiques ont eux-mêmes contribué à fortement perturber ces marchés.
De même, les politiques purement conjoncturelles ne s’attaquant pas aux causes des problèmes ne sont pas adaptées pour favoriser la transition. Et pire encore, la tentation protectionniste constitue un danger certain.
Bref, comme le disent nos deux auteurs, « derrière la transition, il y a un vrai choix de société ». Et, plutôt que de se perdre en conjecture dans des choix ou considérations idéologiques, rien de tel que « d’en revenir au gros bon sens ».
L’enjeu n’est pas anecdotique, puisque pour les jeunes générations en particulier, « c’est la promesse de la liberté ».
Telle est la conclusion de ce magnifique travail salutaire que nous offrent Jacques Garello et Georges Lane, qu’il est par conséquent tout indiqué de se procurer et de lire, ce que je vous encourage fortement à faire.
— Jacques Garello et Georges Lane, Futur des retraites & retraites du futur – III- La transition, IREF Contribuables Associés Editeurs, mai 2009, 150 pages.
Un article publié initialement le 14 octobre 2013.
Je dénonce la retraite par répartition et la msa depuis plus de 10 ans. Les politiciens sont les grands responsable de ce fiasco, aidé par les juges des tribunaux et également un grande partie des acteurs de la vie des entreprises qui ne fait pas sont travaille; huissiers, expert comptable etc…
Ce seras le plus gros scandale financier que nous allons connaitre depuis l’emprunt Russe !!!
A mon humbla avis un système miste conviendrait à la France comme dans un pays qui s’apelle la Suède ou la Chine.
Comment évoluer vers un tel système alors qu’une immense partie des fonctionnaires français voient le capitalisme et la capitalisation comme le diable en personne : frontpopulaire.fr/opinions/contents/leconomie-selon-satan_tco_18922932 et que ce lavage de cerveau est omniprésent et distillé depuis les langes dans les têtes de nos enfants ? Je doute même que la faillite suffise , ils diront que c’est la faute au méchant turbo libéralisme , et quand bien même deviendrions nous communistes avec la NUPES du grand Melanchetou ils diraient encore en faisant la queue pour une portion de pain que « ce n’est pas la faute au communisme car ce n’est pas le vrai communisme  » . Par moment mon espoir a du plomb dans l’aile . Seule consolation : nous n’avons ni gaz , ni pétrole , les cocos partiront vite faute de rente .
Il faudrait trouver un système où n’évolueraient vers la capitalisation que ceux qui le souhaitent. Techniquement, ça ne doit pas être très difficile, mais administrativement et politiquement, ne pas savoir d’avance combien le choisiraient est en effet un obstacle majeur.
La transition que je propose vers la capitalisation est la suivante:
1ere étape: Après 10 ans de cotisation, vous offrez la possibilité de choisir d’abandonner vos droit à la répartition et ne plus payer cette retraite par répartition. Ceux qui sortent de la répartition se débrouillent. Vous maintenez ça pendant 20 ans.
2eme étape: Vous annoncez à tous les nouveaux entrants qu’ils devront payer 10 ans pour liquider le système, mais que ce sera à perte: C’est un impôt comme on a fait la CRDS.
3 eme étape, chaque année on regarde combien coûte les reliquats de retraite pa répartition et on finance ça sur le budget de l’Etat jusqu’à extinction.