Une remarque souvent entendue dans le débat public est qu’il serait possible, sans difficulté extraordinaire, de redéployer des crédits au sein du budget de l’état — en général, quelques milliards d’euros — pour favoriser une mission particulière. Je m’étais par exemple fait l’écho des difficultés de l’institution judiciaire en France dont le budget est d’un peu plus de 7,6 milliards €. On pourrait penser affecter 1 ou 2 milliards de plus par an pour aider à résoudre les problèmes qui se posent (engorgement des tribunaux, prisons vétustes, etc.). Dans le même ordre d’idée, Thomas Piketty proposait il y a deux semaines dans une tribune du journal Libération d’augmenter le budget de l’enseignement supérieur de 6 milliards € soit à peu près 50% des 12,7 milliards € prévus en loi de finances 2013.
À première vue, il semble en effet aisé de trouver de tels montants dans le budget de l’État ou des divers organismes publics : la dépense publique s’élève à plus de 56% du PIB de sorte que 1 milliard €, c’est moins de 0,1% de la dépense publique. La proposition de Thomas Piketty reviendrait alors à redistribuer un peu plus de 0,5% des dépenses, ce qui ne semble pas bien difficile a priori.
La première chose qui rend difficile une telle redistribution, c’est qu’il y a des demandes dans d’autres domaines. Rien que dans le premier paragraphe, j’ai réussi à citer deux causes où il existe une demande de crédits supplémentaires. Or, il en existe quasiment autant que de missions de l’État ! On peut aussi constater que François Hollande a promis d’embaucher des professeurs, des policiers et des personnels supplémentaires pour la justice pendant sa campagne présidentielle. La deuxième, c’est qu’il existe des postes budgétaires importants qui ont une grande persistance, comme les dépenses de personnel. Il est compliqué de faire passer des personnels d’une partie à l’autre de l’État en France à cause de besoins en compétences et de l’existence de statuts différents… et aussi sans doute d’une faible appétence pour quitter certaines administrations. Cette inertie explique en partie pourquoi les annonces d’économies dans les budgets publics se traduisent par une ribambelle de petites économies mises bout à bout. La troisième, c’est qu’il existe déjà un courant obligatoire de dépenses publiques supplémentaires : il y a alors une substitution obligatoire des dépenses de l’État en cours et il n’est pas forcément si évident qu’on puisse en rajouter.
Sur le graphe ci-dessus, on constate que la somme des dépenses de retraites et d’assurance maladie croît presque linéairement d’année en année. En une dizaine d’années, ces dépenses ont augmenté de 150 milliards €, soit 15 milliards €/an, plus du double de ce que revendique Thomas Piketty pour l’université. Mais contrairement à ce qu’il demande, cette augmentation se produit tous les ans ! Sauf changements de règles, il faut donc trouver tous les ans des crédits à redistribuer parmi les dépenses publiques, ce qui diminue d’autant le potentiel d’augmentation pour d’autres missions.
Même s’il y avait plus de croissance que dans la période actuelle, ces conclusions seraient sans doute encore valables. En période de croissance, les fonctionnaires demanderaient plus d’augmentations de salaire, le remplacement des équipements qui ont vieilli. Et on peut aussi constater qu’en moyenne, les dépenses de protection sociale augmentent en proportion du PIB — d’environ 0,2% par an —, ce qui rend toujours la tâche difficile pour trouver des fonds pour d’autres activités.
En conséquence, il ne me semble pas si facile de trouver 6 milliards € à affecter à l’université. Quel que soit l’intérêt de la cause, la difficulté est que les dépenses sociales imposées par le passé — retraites et une bonne part des dépenses de santé — augmentent d’année en année. Si on pense que la dépense publique a atteint un point haut en France et qu’on ne veuille plus augmenter les impôts, il faut alors soit diminuer les autres dépenses publiques et accepter l’éviction de dépenses utiles par ces nouvelles dépenses forcées, soit stopper cette hausse des dépenses sociales, ce qui est extrêmement difficile. Les dernières décisions sur les retraites montrent quel chemin a été choisi : celui de l’éviction des dépenses publiques par les retraites et les dépenses de santé, ainsi qu’une continuation des hausses d’impôts. Malheureusement, il est prévisible qu’on ne pourra pas trouver de sitôt 6 milliards € supplémentaires annuels pour financer l’université.
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Un billet du blog epi.proteos.info.
Bonjour
C’est tres simple il suffit (yakafokon) de bloquer en valeur tous les budgets de l’état secu et collectivites locales pendant 4-5 ans et avec l’inflation plus de déficit. Tout le monde paye pas de jaloux pas de prise de tête.
Yaka réduire les missions de l’État.
Le marché, organisation d’allocation des ressources reposant sur une technologie de l’information ancienne mais très efficace, l’argent, permettrait de faire mieux avec moins.
Il faut surtout que les dépenses publiques augmentent pas plus que le taux d’accroissement de la population active.On ne peut aller au delà de ce que la population est capable de créer de richesses…
De toute façon, l’état c’est plus de 20% de déficit/an sur son budget, argent qui est emprunté sur les marchés à la seule fin d’assurer le fonctionnement, dès lors la messe est dite.
Par ailleurs, l’inflexibilité des fonctionnaires français (certainement les salariés les plus retors au monde) ne permet pas de moduler au sein des administrations.
Du reste, c’est le modèle qu’impose l’état socialiste (droite/gauche) aux entreprises en les empêchant de licencier et en laissant filer un code du travail totalement dément, l’emploi en france est totalement figé dans ses statuts, il tire son modèle des exigences syndicales qui ne représentent que les salariés du public.
Cerise sur le capot, le gouvernement qui annonce une remise à plat fiscale, va discuter du sujet avec qui ? les syndicats…
On est pas sortis de l’auberge (rouge).
La sclérosisation du fonctionnariat vient principalement de la complexité de son régime. Chaque corps, niveau et fonction possède ses primes personnalisés et ses avantages spécifiques. généralement, ils ne sont d’ailleurs pas clairement définies de l’extérieur. Bouger est donc s’exposer à des modifications imprévisible de son statut. le système de la fonction publique française fait que ces salariés qui ne risque rien ont tout le temps peur du changement. C’est contradictoire avec le statut très précaire du privé en comparaison mais où els gens sont en fait moins apeurés par le moindre changement …