Fusionner l’impôt sur le revenu et la CSG, cette idée ancienne refait surface au niveau gouvernemental. Mais réaliser une telle fusion n’a d’intérêt que si cela contribue à nous extraire de l’oppression fiscale que nous éprouvons. Pour cela, une piste intéressante serait de faire de cette réforme une partie de l’indispensable réforme systémique des retraites par répartition.
Par Jacques Bichot.
Fusionner la CSG et l’impôt sur le revenu (IR) est une idée qui revient régulièrement sur le tapis, en provenance de courants de pensée assez différents les uns des autres. Personnellement, j’avais préconisé une telle fusion en 2006, avec des caractéristiques et des objectifs qui ne sont probablement pas ceux du gouvernement Ayrault, dans une note de l’Institut Montaigne consacrée au financement de la protection sociale.
Le premier but de cette fusion de la CSG et de l’IR en un « nouvel impôt sur le revenu » (NIR) était de rendre imposables tous les Français, l’impôt direct constituant un symbole important de la citoyenneté.
Le moyen préconisé était simple et efficace : faire démarrer le NIR au premier euro de revenu, comme la CSG ; conserver des tranches d’imposition assorties de taux croissants, comme dans l’IR actuel ; prendre pour taux de la première tranche celui de la CSG, dûment unifié ; et aux tranches suivantes affecter des taux donnant le même résultat que le cumul actuel de la CSG et de l’IR (donc des taux peu éloignés de la somme du taux de la CSG et du taux l’IR pour la tranche considérée).
Un prélèvement à la source égal à l’actuelle CSG serait pratiqué sur la totalité des revenus ; ceux-ci seraient donc taxés au taux minimal du NIR au moment même de leur mise en paiement. Le calcul du NIR s’effectuerait ensuite comme celui de l’actuel IR ; les « tiers provisionnels » ou versements mensuels pourraient subsister, complétant la retenue à la source pour lisser les recettes de Bercy.
Le maintien du quotient familial (QF) ne poserait aucun problème. La réforme pourrait même être l’occasion d’en finir avec la façon injustifiable dont il est actuellement présenté, à savoir comme une réduction d’impôt1 : jusqu’à un certain niveau de revenu par part, mais pas au-delà , l’impôt serait calculé selon la formule du QF. Une réforme de l’attribution des parts, actuellement trop généreuse à partir du 3e enfant, pourrait également intervenir dans la foulée.
Reste à savoir si le NIR constituerait un impôt stricto sensu ou plutôt une source de financement de certaines dépenses relevant logiquement de la sécurité sociale. La seconde solution n’est pas sans intérêt. En effet, le NIR libéré de sa condition fiscale pourrait jouer un rôle central dans deux indispensables réformes étroitement liées : celle des retraites par répartition, et celle de l’enseignement.
L’inclusion de la sécurité sociale dans le périmètre de l’État est la cause d’une partie importante des maux dont nous souffrons. En particulier, cette inclusion a permis au législateur de commettre un contresens économique aux conséquences très lourdes : faire des cotisations vieillesse la cause juridique des droits à pension, alors qu’en répartition ces cotisations ne servent en rien à préparer les pensions de ceux qui les versent. Pour sortir de cette ornière où l’État providence nous a embourbés, il convient d’attribuer les droits à pension à ce qui prépare les retraites futures : la mise au monde et la formation des nouvelles générations. Dans un régime par points rationnellement organisé, les points seraient donc attribués aux parents ès-qualités d’investisseurs « en nature » dans la jeunesse, et à tous ceux qui abondent le budget des organismes chargés d’un aspect de l’investissement dans les nouvelles générations, notamment le système scolaire et universitaire et les caisses d’allocations familiales.
Dès lors, il serait logique que la contribution pécuniaire de chaque personne soit en fonction inverse du nombre d’enfants qu’elle élève : ceux qui auraient beaucoup d’enfants obtiendraient suffisamment de points de retraite de ce fait pour ne pas avoir besoin d’en obtenir énormément au titre de versements monétaires ; et réciproquement les personnes sans enfants et les parents d’enfants uniques seraient intéressés, pour bénéficier de pensions convenables, à payer plus pour l’investissement dans la jeunesse.
Affecter le NIR au financement de la formation initiale, de la branche famille, de l’assurance maternité et de l’assurance maladie des enfants répondrait bien à cette logique : à revenu égal les parents de famille nombreuse, payant moins de NIR, obtiendraient moins de points à titre onéreux (mais davantage au titre de leurs enfants) et les personnes sans enfant en obtiendraient davantage au titre du NIR. Moyennant un réglage convenable des paramètres, on pourrait obtenir ainsi un système de retraites par répartition et de financement de la formation initiale tout à fait cohérent et juste.
Cela desserrerait le frein qui bloque actuellement l’activité et la croissance, à savoir l’excès de prélèvements obligatoires sans contreparties. Faire du résultat de la fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG l’équivalent d’une cotisation obligatoire à un fonds de pension investissant dans ce qui est le plus important pour notre avenir, la jeunesse, voilà le genre de réforme dont nous avons besoin pour sortir du ras-le-bol fiscal et retrouver le goût du travail ! Sans compter que ce fonds d’investissement dans la jeunesse, chargé du financement des établissements scolaires et universitaires, serait autrement mieux placé que l’État pour instaurer des formules favorables à l’innovation et au sérieux pédagogiques, telles que le bon scolaire.
Ces quelques lignes ne constituent évidemment pas un plan de réforme. Mais elles indiquent une direction dans laquelle réfléchir si l’on veut réformer utilement ce fatras de prélèvements obligatoires sous lequel nous étouffons. L’innovation dans le domaine du non marchand (actuellement géré par l’État de manière calamiteuse) est de nature à booster notre productivité autrement mieux que les formules éculées dites « allègement de charges » ou crédit d’impôt recherche. Au point où nous en sommes, seule l’audace intelligente, ou l’intelligence audacieuse, peut nous faire faire un véritable bond en avant.
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Sur le web.
-  Rappelons ce qui est l’essence même du quotient familial (QF) : mettre en pratique la maxime « à niveau de vie égal, taux d’imposition égal ». Raisonner en termes de réduction d’impôt quel que soit le niveau de revenu revient à nier cette maxime, ce qui est injustifiable. Mais au-delà d’un certain montant par unité de consommation, le revenu ne constitue plus un moyen de procurer aux membres du « foyer fiscal » des biens et services destinés à la consommation ; il est plutôt une source de pouvoir financier à la disposition du couple parental ou du parent isolé, si bien qu’il n’y a plus lieu d’appliquer la modalité de calcul dite QF. ↩
En gros, vous nous expliquez qu’il faut réformer l’impôt pour ne pas avoir à changer le mode de dépenses totalement inefficace actuel, et pour encourager à faire plus de bénéficiaires. Ca signifie une réforme pour améliorer le moteur, sans tourner le volant et changer la direction qui nous envoie dans le mur.
Une réforme doit être l’occasion de ramener l’impôt à sa fonction essentielle, financer les dépenses de l’état là où d’autres ne peuvent pas être plus efficaces que lui. Elle ne sera acceptable que couplée à une réduction drastique des dépenses de l’état afin d’aboutir à une amélioration du niveau de vie par le maintien des services et la suppression des pertes en ligne.
Surtout, au nom de la liberté, elle doit faire table rase du principe d’utilisation de l’impôt comme levier pour influer sur les comportements.
L’avion est en piqué, le pilote est au toilette et devant le manche que faire:
A-nettoyer l’affreuse petite tâche de chocolat sur le siège du copilote.
B-tirer fermement sur le manche.
Bonjour
« Rappelons ce qui est l’essence même du quotient familial (QF) : mettre en pratique la maxime « à niveau de vie égal, taux d’imposition égal ». »
« Dès lors, il serait logique que la contribution pécuniaire de chaque personne soit en fonction inverse du nombre d’enfants qu’elle élève »
« à revenu égal les parents de famille nombreuse, payant moins de NIR, obtiendraient moins de points à titre onéreux (mais davantage au titre de leurs enfants) »
OMG
Quelle belle usine à gaz. Tout cela pour une politique familiale bien constructiviste.
Libéral-conservateur ou Conservateur-libéral?
« Dans un régime par points rationnellement organisé » : aucun régime de retraite par répartition ne peut être rationnellement organisé, peu importe qu’il soit organisé par points ou par durée de cotisation. D’ores et déjà , plus de 15% des retraites actuellement versées ne sont pas financées. Dans les décennies à venir, ce taux va dépasser 50%. La répartition est tout simplement intenable.
Pour éviter l’effondrement du pays, il est urgent d’abandonner la répartition au profit de la capitalisation individuelle dès le premier euro cotisé.
Ne jamais oublier le « jumeau » du régime par « répartition »… et qui l’accompagne dans son destin funeste.
-vieillissement > grand âge > hausse vertigineuse des coûts médicaux
C’est la double peine. Le multiplicateur.
Tout ça pour dire : le régime de retraite est ENCORE PLUS condamné.
Les besoins de financement dépassent l’entendement.
Le vieillissement accélère la chute de la répartition mais n’en est pas la cause, à rechercher dans les flux financiers destructeurs imposés par la répartition qui détruisent les richesses.
A tous ceux qui souhaitaient quitter la sécu pour ne pas payer la CSG, ceux là vont être contents …….
Jacques, vous nous avez habitues a mieux. Votre proposition est une rustine inefficace doublee d’une usine a gaz :
– aucune action sur les depenses, notamment sociales.
– aucune prise en compte du droit de chacun de s’assurer ou et comment il le souhaite.
Aucune reforme efficace et juste sans traiter ces deux points.
J’oublais le 3eme point : alignement public/prive
pourquoi voulez vous aligner le public sur le privé ? leur donner autant que les salariers du privé, c’est un peu comme donner du sucre à un cochon !
et encore, c’est trop avilir l’animal ! brave bète …
Ce que je retiens de bien :
« Le moyen préconisé était simple et efficace : faire démarrer le NIR au premier euro de revenu, comme la CSG ; conserver des tranches d’imposition assorties de taux croissants, comme dans l’IR actuel ; »
Tout le monde paye, en fonction de ses moyens.
Et ce que je retiens de mal de l’article et des commentaires précédents :
C’est le financement par le NIR du même système de retraite, du même système de sécurité social. Ce sera toujours les mêmes inégalités injustifiés. Les mêmes gaspillages, détournements, abus de fonds…
Ce que propose l’auteur c’est une nouvelle usine à gaz…il ne faut pas donner aux politiques la possibilité de modifier les impôts actuels pour en faire soi disant « nouveaux » qui n’auraient de nouveau que le nom…Le principe incontournable devrait être que les recettes soient affectées aux dépenses (pas dans le grand saladier commun où chacun fait ce qu’il veut)..et que l’impôt ne serve qu’à financer l’état dans ses obligations régaliennes..
 » dans un régime par point rationnellment organisé, les points seraient donc attribués aux parents es-qualité d’investisseurs en nature  »
merci pour les  » zivas « . les français de souche risque de sérieusement grogner !
Il faudrait surtout en profiter pour réduire les taux de ce nouvel I.R par exemple :2% entre 0 et 2200 € de revenus mensuels;10% entre 2201 de revenu mensuel et 28% à partir de 5000 € de revenu mensuel.
Gain :+30 ,9 Milliard d’euros par rapport au système actuel! C’est à dire que l’on passe de 146,8 Milliard d’euros de recettes fiscales actuellement à 177.7 Milliards d’euros avec ne nouveau barème IR et CSG fusionné….
voir: http://www.revolution-fiscale.fr/simuler/nouvel_ir/resultats_rapide.php?sid=1444585770&danger_reactions=0
S’il faut fusionner, pourquoi ne pas supprimer l’IR, tout simplement ? Cet impôt inutile peut bien disparaître : la perte de recettes pour l’Etat sera largement compensée par les milliards économisés en supprimant les services du Portique en charge de contrôler sa collecte, quitte à augmenter le taux de la CSG de 1 ou 2%.