Par Oliver Rach, depuis Liège, Belgique.
L’information vous aura sans doute échappé : les médias traditionnels, trop occupés à parler sport, people et fin d’année, ont en effet complètement oublié d’en toucher mot à leurs tristes lecteurs. Seuls Legal World, L’Écho et maintenant Contrepoints relaient cette nouvelle qui, pourtant, mériterait meilleur sort de la part de ceux qui se targuent d’être un contre-pouvoir.
Le record d’obésité du Moniteur belge — le journal officiel en Belgique —, établi l’an passé à plus de 89.000 pages, a été pulvérisé au cours de cette année. Plus de 100.000 pages de lois, règlements, arrêtés divers, arrêts des hautes cours nationales, etc., ont été publiées en 2013 — soit sept fois plus qu’à l’orée des années 80. Cela confirme la tendance actuelle du tout-à-l’État, seulement dénoncée en Belgique francophone par de petits mouvements politiques comme l’Union des Libéraux (UdL) et le Parti libertarien (PLib). À n’en pas douter, la coalition dirigée par le Premier ministre Elio Di Rupo (PS), est entièrement vouée au peaufinage des finitions socialistes de l’immeuble Belgique : de toutes les autorités du pays, elle est celle qui a commis le plus grand nombre de pages de règlementations (plus d’un tiers), devant la Région flamande (30 p.c.) et la Région wallonne (18 p.c.).
Les palmes de la bureaucratie sont d’ailleurs attribuées à ces trois exécutifs, dans le désordre. L’or revient au gouvernement flamand, qui a publié trois arrêtés relatifs au statut du personnel enseignant, lesquels, mis bout à bout, cumulent 10.000 pages de prescrits. Le gouvernement wallon échoue — un brin honteux — à la seconde marche de ce podium du socialisme, avec un peu moins de 3000 pages pour sa réglementation du Code wallon de l’action sociale et de la santé des pouvoirs publics wallons. Pourtant, avec un tel titre à rallonge, il partait en pôle position. L’argent, donc, — tiens, tiens — pour Rudy Demotte (PS) et son équipe. Enfin, le bronze est attribué au fédéral qui, avec ses contrats de gestion des quinze services publics fédéraux, dont l’INAMI, a noirci 2500 pages du Moniteur belge.
Les écologistes seront soulagés d’apprendre que le journal officiel belge n’est plus publié en version papier depuis 2003. Les citoyens désabusés, quant à eux, penseront peut-être que le vieil adage d’Aristote, Nemo censetur legem ignorare, était en fait une boutade adressée, de loin, de très loin, aux sociétés bureaucratiques modernes.
100.000 pages supplémentaires créées en une année ou par l’accumulation ?
100.000 pages en une année.
Eh eh eh, 100 000 en tout, ce serait bien trop beau.
Cela dit M.Rach, je vous invite a vous pencher sur la même question, mais en France. Vous verrez que, hélas, vous ne faites pas exceptions en Belgique… En France depuis 5 ans le nombre de décret a été multiplié par 2.5… (on est 280 000 aujourd’hui). Après on nous explique que nul n’est censé ignorer la loi….
Mais aussi, en 2009, aux Etats-Unis, il y avait déjà 70 000 pages annuel…. Certes le pays est plus grand, mais comme les taches a régir ne sont pas fonction de la population, ça fait un sacré paquet aussi…
Il nous manque des points de comparaison.
Nos amis belges auraient-ils fait mieux que le score… français ? !
J’ai du mal à le croire.
;–)
C’est possible. Les entités fédérées belges sont prolixes en la matière.
En 5 ans, mille lois et 160 000 décrets supplémentaires. Il faut voir ce que ça représente en terme de pages, sachant qu’une loi peut facilement dépasser les cent pages. Il faudrait la taille moyenne des lois pondues depuis 5 ans ainsi que celle des décrets. Mais à vue d’oeil, oui, on doit etre au dessus.
Et au passage, je pense que si on fait la moyenne sur 5 ans, on « domine » très largement.
Quand vous avez un coup de cafard, regardez du coté de Paris, c’est la preuve qu’on peut toujours trouver plus con (quoique dans notre cas ça devient difficile de trouver….).
Ce lundi 30 décembre, nous en sommes à 103 686 pages (3ème édition du Moniteur du jour). Mais l’année n’est pas encore terminée, il nous reste un jour. Anxiété : la dernière édition du dernier jour de l’année nous forcera-t-elle à avaler plus de 1000 pages ou plus avant de pouvoir réveillonner ? Ou nous livrera-t-on seulement quelques centaines de pages ce 31 décembre 2013 ?
Si c’est 100’000/an, ça fait combien au total ????
C’est pas possible, j’y crois pas…
Ce qui fait que pour appliquer l’adage, il faut mémoriser 284 nouvelles pages par jour… Complètement malades, ces gens.
Et un nouveau né, il a du rattrapage à faire…
Comprennent-ils seulement que ces lois sont faites pour être suivies par des humains ?
Enfin… On paie grassement des gens pour faire des lois, ils faut bien produire une contrepartie à ces salaires…
Comme je l’ai cité plus haut depuis 5 ans, 1000 nouvelles lois dans notre pays. Ce qui peut paraître modeste.
Et pourtant ça fait 200 par an. Sachant que chaque projets de loi pèse de quelques dizaines de pages à plusieurs milliers, et peuvent contenir des milliers d’amendements.
Sachant que techniquement, le legislateur est censé analyser chaque projet de loi qu’il vote, savoir précisément ce qu’il vote, et l’impact de chaque amendement. Tout doit etre analysé.
C’est à dire qu’en moyenne, un député à un peut moins de 44h pour analyser des projets de loi pouvant peser plusieurs milliers de pages et contenant autant d’amendements, le tout avec une analyse fine de la situation, après avoir pesé chaque décision.
Ou alors ils se foutent de notre gueule et ne savent absolument pas ce qu’ils votent.
C’est selon.
On peut aussi se poser la question des 160 000 décrets en 5 ans, ça fait une jolie moyenne de 32 000 par an, soit 87,6 par jour, ce qui me fait dire que notre Premier Ministre et notre Président, ainsi que notre très cher Conseil d’Etat doivent etre vraiment très occupés… D’autant qu’à coté de ça, ils trouvent le temps de faire campagne, de se baffrer au palace du coin, et de mener leurs petites magouilles entre amis!
En voilà des gens extraordinaires qui gèrent bien notre pays!
Joie ! La dernière livraison du Moniteur belge, celle du 31 décembre 2013, ne comprend qu’environ 300 pages. On termine donc l’année avec 103 972 pages. Encore que l’on puisse avoir, comme il y a quelques temps, des « deuxième », « troisième », « quatrième » … éditions, datées du 31 décembre et parues dans les premiers jours de l’année suivante, avec des textes législatifs entrant cependant en vigueur au 1er janvier. Procédé curieux, qui ne fut toutefois critiqué par quasi personne (sauf par un flamboyant avocat fiscaliste, qui n’y gagna rien…).
Ah zut, finalement ! Il y avait une deuxième édition ce jour (parue dans la journée) alors que je n’ai pas encore fini de lire la première.
Enfin, bon, dès que j’ai fini de la lire, j’entamerai les préparatifs du réveillon. Faut ce qui faut.
J’ai toujours imaginé les belges comme étant plus raisonnables que les français.
Je vois que j’avais tort.
Et dire qu’on se moquait du système bureaucratique soviétique ….
Mais on se moquait de la gérontocratie qui le dirigeait… alors que l’âge de nos sénateurs par exemple est du même acabit…
Un jour après Contrepoints, La Libre Belgique en parle : http://www.lalibre.be/actu/belgique/qu-est-ce-qui-fait-104-000-pages-et-que-vous-etes-censes-connaitre-52c2bad935701baedaadaa63
Est-ce bien nouveau ?
Le 18 mars 1671, paraît une instruction en trois cent dix-sept articles pour composer toutes les couleurs et en soixante-quatorze articles pour composer des drogues.
De 1666 à 1683, le gouvernement émettait quarante-quatre règlements et de 1683 à 1739 deux cent trente. Toute modification à ces règlements, du reste variables, c’est-à-dire tout progrès, non autorisé par privilège, était un délit.
suite
…
Le roi multiplie les charges d’inspecteurs, visiteurs, payeurs, contrôleurs : à la mort de Louis XIV, elles étaient au nombre de 40.000 ; elles s’élevèrent au nombre de 100.000 sous Louis XV.
Le travail est un droit t régalien que le Roi cède, vend ou accorde à certains privilégiés. Chaque métier est enfermé dans la sphère d’activité la plus étroite. Il ne fallait pas moins de six corporations pour l’équipement d’un cheval. Chacune était dominée par l’esprit d’exclusivisme.
Ce qui se devine à peine derrière ces ‘00000s pages, est l’armada de fonctionnaires nécessaires pour en interpréter l’application.
Etant sûr que chaque version « pondue » par nos zélites politiques l’est de manière imparfaite, ceci ajoutera à la création d’emplois pour des avocats et la justice, tous deux chargés – en des buts différents – de débrouissailler l’embrouillamini !
De ceci, nous comprendrons l’étouffoir fonctionnel que génèrent nos instances surnuméraires.