Par Bernard Zimmern.
Un article d’Emploi-2017.
La financiarisation est la transformation du système bancaire d’un système qui convertissait de l’argent à court terme en investissements productifs à long terme, en banque « casino », suite à la suppression de la barrière mise en place par Glass-Steegall entre banques commerciales et banques d’affaires.
La Kauffman Foundation a publié en mars 2011 une note extrêmement intéressante sur la financiarisation de l’économie et ses conséquences sur l’entrepreneuriat1.
La première observation de cette note est que le secteur financier a pris au cours de l’histoire une place grandissante dans l’économie américaine mais qui, jusqu’à une période récente, pouvait être associée à l’apparition d’un secteur économique majeur : la construction du réseau ferré entre 1880 et 1900, celle du réseau électrique ainsi que le développement de l’automobile dans les années 1930, la montée rapide vers la fin des années 1990 correspondant à l’explosion des industries de l’information.
Il est clair que l’épanouissement de tous ces secteurs industriels n’aurait pas pu avoir lieu sans un secteur financier actif et innovant. Depuis la crise de 2008, il est cependant aussi clair qu’une grande partie du développement du secteur financier s’est faite, non pour accompagner l’économie réelle, mais pour des gains rapides qui se rapprochent du casino. Et les auteurs citent même Keynes qui aurait dit : « When the capital development of a country becomes the byproduct of the activities of a casino, the job is not likely to be well done ».
Et de noter que depuis les années 1980, la croissance du secteur financier est loin d’avoir été accompagnée d’une croissance comparable des introductions en bourse, et, plus grave, comme nous l’avons déjà rapporté à partir d’une autre étude de la Kauffman, a même été accompagnée par une chute de la création de nouvelles entreprises.
Une étude statistique des destinations des élèves sortis du prestigieux MIT – qui n’est pas sans rappeler le succès de la branche financière à l’X – a montré que la part des destinations financières n’avait cessé de monter depuis les années 1970 pour atteindre près du quart en 2006 (et retomber à moins de 10% en 2009).
L’une des grandes interrogations posées par cette recherche est de se demander s’il n’y a pas eu un détournement des talents des jeunes qui, au lieu d’aller créer des entreprises de l’économie « réelle », disons pour accuser le trait, des entreprises de fabrication, sont allés gonfler ceux qui essayaient de faire des fortunes rapides dans les « hedge funds ».
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Sur le web.
- Financialization and Its Entrepreneurial Consequences par Paul Kedrosky and Dane Stangler. ↩
Il me paraît un peu paradoxal de parler de l’attrait pour les gains rapides au moment où la majorité des biens financiers retrouvent tout juste leur valeur d’il y a 5 ou 6 ans. N’y aurait-il pas plutôt un découragement devant la difficulté accrue de s’enrichir honnêtement et lentement, de la manière classique, quand les taux de prélèvements obligatoires ont crû démesurément dans beaucoup de pays ? S’y ajoute une société réglementée, officiellement et officieusement, défavorable aux initiatives qui ne passeraient pas par de canaux reconnus. Les profils que l’ont voit dans la finance sont à mon avis chassés des autres secteurs par le peu de perspectives que fiscalité et normes y laissent, bien plus qu’attirés par l’économie virtuelle (si tant est qu’une telle distinction ait un sens).
Il n’y a rien de « casino » dans les marchés financiers actuels, contrairement aux « anciens ».
Prêter à 10 ans à une jeune entreprise est un pari du genre « impaire et passe ». Acheter des produits structurés, des dérivés en tout genre est au contraire plus proche de l’assurance que du casino. Et qu’on ne parle pas, par pitié de la différence entre « couverture » et « spéculation », elle est impossible : la couverture est une forme de spéculation (on parie sur une plus forte chance de réalisation du risque que ce que le coût de la couverture implique), et la spéculation constitue une forme de couverture (les profits « spéculatifs » peuvent absorber les pertes sur les activités « traditionnelles » et ont d’ailleurs essentiellement cette vocation).
S’il y a bien quelque chose à redire c’est que la « financiarisation » s’est faite sous contrôle de, et dans la direction indiquée par, la banque centrale. Cela empêche la concurrence de jouer correctement son rôle de régulation optimale. C’est d’ailleurs pourquoi regretter la fin du Glass-Stegall act est un non sens complet pour un libéral. Cette bouse législative a réduit la concurrence (et donc la solidité de ceux qui sont impliqués dans le secteur) et augmenté les coûts aux détriments de tous les clients (particuliers et entreprises).
Finalement, est-ce un mal que les esprits mathématiques (appliqués) les plus brillants aillent travailler dans un secteur qui permet un financement optimal de l’activité économique et permet de couvrir les risques à moindres coûts ? Faudrait-il qu’ils aillent travailler dans des labos publics, sous les ordres de mandarins, à faire de la recherche « à la Lyssenko » puisque financée par le politique dans sa grande majorité (d’ailleurs, qui est surpris qu’il n’y ait plus aucune découverte scientifique d’importance depuis une cinquantaine d’années ? Depuis que la recherche fonctionne surtout sur fonds publics et qu’elle est « planifiée » ?)
Il faut revenir à la responsabilité personnelle et supprimer le « hors bilan » …En plus de revenir à la liberté monétaire…
Bonsoir,
Lors de ma présence au salon Actionaria 2013, j’ai pu constater que la jeune génération est attirée par les fantasmes du secteur financier en espérant mettre un pied à Wall Street ou à la City. L’appât du gain rapide l’emporte sur la création de valeur à long terme.
Cdt.
Opposer artificiellement le secteur financier aux secteurs prétendument « réels » est une erreur, la survivance anachronique du fantasme socialiste barbare pour l’ouvrier musclé, sale et en sueur, qui bat des records de production dans sa mine. Les gars, réveillez-vous ! Ce monde est fini, terminé, effacé, périmé ! Dorénavant, le seul mouvement observable dans la mine d’Alekseï Grigorievitch Stakhanov sera celui d’un robot. Plus personne n’embauchera Stakhanov parce que son travail ne sert plus à rien et, par conséquent, ne vaut plus un kopeck.
La finance est un secteur économique tout aussi réel qu’un autre et il se trouve qu’il est un des plus productifs qui soit. En effet, marque et condition du progrès, la charge en capital relativement au travail est de plus en plus prégnante dans toute production de biens ou de services. Pour diverses raisons, on peut spéculer que le niveau optimal de financiarisation d’une économie moderne n’est pas de 3, 5 ou même 10% mais plutôt de 40% du PIB. Au lieu de lutter contre le mouvement inexorable du primat du capital sur le travail, l’honnête citoyen correctement éduqué ne peut que le souhaiter et l’encourager car il accompagne la libération de nos contemporains des tâches les plus ingrates qui, comme par hasard, sont les moins productives.
L’absurdité de la financiarisation actuelle tient en ce qu’elle est détournée pour financer les Etats obèses et leurs excroissances socialistes, alors que nous savons que les Obèses, par nature, ne produisent rien. Nous nous dirigeons donc vers une crise profonde, la crise terminale de social-démocratie, qui aura pour objet la purge des investissements ‘socialistes’ réalisés en pure perte, libérant ainsi un fantastique potentiel de croissance pour le XXIe siècle.
Bref, évoquer la financiarisation de l’économie n’est pas une erreur en soi. Sous condition de la purge des Obèses et de leur idéologie périmée, c’est au contraire une perspective enthousiasmante. Le défi de notre époque est de savoir si nous allons subir cette purge dans le chaos, aux dépens de chacun, ou l’organiser de manière ordonnée et volontaire, au bénéfice de tous.
Il est très clair que le déclin de notre industrie est dû au manque
d’investissement ( innovation,robotique,…) depuis 30 ans. Comme les avoirs
financiers ne sont pas allés à la construction de logement, ils
sont bien allés qq. part! A part les dépenses stupides de la sphère
Publique ( ronds-points, TGV , immobilier pour loger les nx fonctionnaires)
Quant à la rentabilité il y a 20 ans je faisais 50% de ROCE dans l’équipement
Automobile, je n’ai pas vu de financier faire autant ( j’ai les documents).
Absolument.
J’ajouterais, à l’appui de l’article, que les pays qui se sont démarqués par une gestion conservatrice de leur monnaie ont une industrie forte (Allemagne, Suisse…).
La monétisation d’actifs tangibles ne pose pas de problème, si elle bien faite.
Lorsqu’elle ne l’est pas, c’est à cause de l’immixtion étatique.
Et bien entendu, les États monétisent leur dépense, en contrepartie non pas d’actifs qu’ils peuvent céder aux banques, mais de leur capacité à spolier leur population.