Fiscalité comportementale : vous êtes coupables !

Avec la fiscalité comportementale, l’État fait d’une pierre deux coups : prélever votre argent avec votre consentement.

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Fiscalité comportementale : vous êtes coupables !

Publié le 6 mars 2014
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Par Charles Sannat.

Vous avez dû vaguement entendre parler de ce dernier truc à la mode au sein de notre élite : la « fiscalité comportementale ». Si, si, récemment au JT de 20 heures, on vous a parlé de ce projet de passer le prix du paquet de cigarettes à plus de 11 euros histoire de dissuader le consommateur de clopes. Dans l’esprit tortueux de ceux qui nous dirigent, il faut (et dès la maternelle) changer les mentalités, changer les comportements, sans évidemment nous demander notre avis… nous risquerions d’être contre le fait de changer notre façon de vivre.

Mais ce qui est bien avec la fiscalité comportementale, c’est que l’on fait d’une pierre deux coups. Non seulement on change les comportements mais surtout, et c’est le plus important, on gagne du pognon, ou plus précisément on prend le vôtre avec votre consentement puisque l’on va se charger de vous culpabiliser sur vos comportements. Un « coupable » est toujours plus malléable qu’un innocent, raison pour laquelle l’État fait de nous tous des coupables permanents.

Vous êtes coupable, vous méritez la condamnation à perpète !

Coupable de pollution avec votre bagnole au diesel ? Accusé, levez-vous ! Vous êtes condamné à payer des taxes jusqu’à épuisement de votre pouvoir d’achat : taxe sur les carburants toujours en hausse.

Coupable de pollution avec l’ensemble de votre consommation ? Calculez votre propre bilan carbone : même en prenant le métro vous assassinez les petites fleurs… Accusé, levez-vous ! Vous êtes condamné à payer des taxes jusqu’à épuisement de votre pouvoir d’achat : taxes sur les modes de transport, réduction du nombre de places pour se garer, amendes en hausse et plus nombreuses, etc.

Coupable de prendre des douches trop longues ? Accusé, levez-vous ! Vous êtes condamné à payer des taxes jusqu’à épuisement de votre pouvoir d’achat : augmentation des taxes sur la consommation de l’eau et du prix de l’eau, taxe sur les eaux de pluie en fonction de la taille de votre toiture, etc.

Coupable de trop bouffer, trop gras, trop salé, trop sucré, vous êtes obèse, rondouillard, laid et moche (comme moi, surtout avec le régime boîtes de raviolis actuel) ? Accusé, levez-vous ! Vous êtes condamné à payer des taxes jusqu’à épuisement de votre pouvoir d’achat : taxe soda et autres joyeusetés.

Nous pourrions poursuivre cette liste un bon bout de temps, comme par exemple avec l’interdiction des feux de cheminée… Ben oui, un feu de cheminée cela pollue drôlement. C’est surtout qu’il n’y a pas de lobby de la cheminée puisque le vendeur de cheminées qui devra vous vendre un poêle à bois à « haut rendement » pour l’installer dans votre cheminée est fondamentalement pour cette nouvelle loi ! Bref, on se fait couillonner en permanence à base de culpabilité pour nous faire avaler la pilule en douceur, c’est un principe de « management » vieux comme le monde1. La culpabilité est un outil de manipulation fort puissant.

Deux experts en culpabilisation

Les sénateurs Yves Daudigny (PS, Aisne), rapporteur général de la commission des affaires sociales, et Catherine Deroche (UMP, Maine-et-Loire) se sont vu confier par la Mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) du Sénat l’élaboration d’un rapport consacré à la fiscalité comportementale.

Je salue la performance exceptionnelle de ces deux grands artistes de l’entourloupe politique (pour notre bien), l’action profondément humaniste de ces deux personnes (pour notre bien), leur immense sagesse fiscale (pour notre bien), sans oublier cette clairvoyance dans la compréhension du bien et du mal et de la façon dont on peut faire évoluer (pour notre bien) nos propres comportements.

Il faut également leur décerner une médaille d’or pour leur performance inouïe en novlangue appliquée (pour notre bien).

On ne doit plus dire « fiscalité comportementale » mais « contribution de santé publique »

Mais alors mes amis, qu’est-ce que j’ai rigolé en page 5 de ce rapport totalement inutile que j’ai dû me tartiner pour vous avec attention ! C’est un tableau récapitulatif de leurs propositions (ça vaut le détour) lorsque je suis tombé sur cette perle. Ben oui, vous comprenez, avec la terminologie « fiscalité comportementale » vous auriez sans doute eu la puce à l’oreille, contrairement à ce que l’on pense un peu vite en haut lieu, le peuple n’est pas aussi crétin que ce qu’ils veulent bien croire. Conclusion : exit la « fiscalité comportementale » et bienvenue à la « contribution de santé publique ». C’est tellement plus beau, plus propre, plus sain, c’est pour vous, pour votre santé et en plus c’est public2

Bref, avec la « contribution de santé publique », là je suis sûr que vous ne pourrez pas être contre. Il y a des choses comme ça où si l’on veut passer pour une personne raisonnable, on est obligé d’être pour. Pour la parité homme-femme (chérie range ton rouleau à pâtisserie, tout le monde sait que le chef à la maison c’est toi), pour le mariage pour tous (sinon vous nous rappellerez forcément les heures les plus nauséabondes et les plus sombres de notre histoire), pour l’écologie (quoi que là, ça a tendance à passer de mode sauf pour vous taxer un peu plus), pour la pénalisation de la prostitution (on ne peut pas défendre le plus vieux métier du monde, avec la banque), de la même façon on ne peut être que pour la contribution avec mon pognon de la santé publique…

Les mots ont un sens mes chers lecteurs.

La liste des gens auditionnés, un grand moment !

Quand des élus font des rapports, ils font des « auditions », c’est-à-dire qu’ils reçoivent des gens dont la fonction première est de défendre des intérêts particuliers, l’ensemble pistonné par des lobbyistes qui ont le bon carnet d’adresses et qui monnayent leur intervention (mais chut, cela ne se dit pas). En notre belle France républicaine, la corruption n’existe pas. Sachez-le et ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit. Tout le monde est honnête dans notre classe politique.

Alors pour le moment, ont été entendus (liste non exhaustive) :

  • M. Louis-Olivier Fadda, chef du bureau « Politiques sectorielles et taxes sur les transactions » à la Direction de la législation fiscale. Je sens qu’il va bien vous faire contribuer celui-là.
  • M. Galdéric Sabatier, chef du bureau « Contributions indirectes » à la Direction générale des douanes et droits indirects. C’est comme les rasoirs, effet double lame : la première lame soulève votre pognon, et la deuxième prend tout votre pognon !
  • MM. Jonathan Bosredon, sous-directeur du financement de la sécurité sociale, et Brice Lepetit, chef du bureau « Recettes fiscales à la Direction de la sécurité sociale ». Heu pardon… finalement cela va être un effet triple lame !
  • « Les rapporteurs ont entendu des représentants de Japan Tobacco International France, British American Tobacco France, Imperial tobacco Seita et Philip Morris France SAS »… Ben c’est tous les fabricants de clopes qui vont tenter de faire taxer les autres en expliquant le risque d’augmentation du marché noir machin toussa, toussa…
  • Ils ont entendu aussi les représentants d’Orangina-Schweppes ; des représentants de Coca-Cola France. Ce ne sont pas les copains des vendeurs de clopes plus haut car chacun veut que ce soit le produit de l’autre qui soit taxé le plus. Dans tous les cas, on taxera un peu plus tout le monde et au bout du compte, c’est vous qui payez.
  • Le jeudi 23 mai, les rapporteurs auditionnent des représentants de Vin et Société, de la Fédération française des spiritueux et des Brasseurs de France. Ah, les vendeurs de pinard seront entendus fin mai. C’est bien ça. Ils vont pouvoir parler enjeux de la filière viticole, sauvegarde et développement de l’emploi et blablabla.

Je crois qu’au lieu de stocker des boîtes de raviolis, je vais constituer des réserves de bouteilles de Coca… ça se conserve bien ces boissons-là vu toute la chimie qu’il y a dedans. Je laisse reposer deux ou trois ans… D’ici là, avec leur politique « de contribution de santé publique », les cours de la bouteille de Coca auront doublé. Et hop ! je revends le tout au marché noir.


Sur le web.

Lire aussi : l’analyse de Valentin Petkantchin : Taxer les « vices » ne paye pas !

  1. C’est ce que j’explique à ma femme avant chacun de ses entretiens annuels. Ton chef va commencer par te faire la liste de tout ce qui va mal. Au bout d’une demi-heure de ce traitement tu as tellement peur de te faire virer… que tu oublies qu’en rentrant dans le bureau tu voulais demander une augmentation !
  2. La dernière fois qu’une ministre de la santé a voulu s’occuper de notre santé, cela nous a coûté 2 milliards d’euros et tout le monde voulait vous piquouzer à chaque coin de rue, pour votre bien, pour protéger vos enfants…
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  • Faire que les gens se sentent coupables puis jouer sur leur sentiment de culpabilité, c’est un vieux truc …chrétien ! Donc ce pays « déchristianisé » ne l’est finalement pas tant que ça.

  • Très drôle 🙂
    Hier j ai fais des cendres, aie, mais ajd je commence carême, ouf et demain j irais prendre une longue douche municipale! Trêve de plaisanterie, c est quand même bien un état qui puni ceux qui ne prennent pas soin de leur santé, ça veut dire qu il est attentif à notre bien-être, non?

    • Accepter que l’Etat soit attentif à notre bien-être, c’est tendre les poignets pour se faire menotter. Qui a décidé que l’Etat était compétent pour savoir ce qui est bien pour nous à notre place ?

      • Ça serait nous, enfin pas moi ni vous, ça je ne peux le dire, mais Nous global enfin collectif.
        Du coup pourquoi se poser la question, si l état le dit c est qu il y a une raison, il fait les choses pour notre bien, enfin normalement, mais là je ne suis pas sur du tout en fait!

  • Fiscalité comportementale, redressement comportemental, redressement fiscal, tout ça c’est pour notre bien, puisque nous n’avons pas de cerveau, alors que le leur est homologué par l’Etat.

  • A quand une loi sur la consistance règlementaire de la m…? Clairement le travers social-démocrate qui a amené la CIA dans votre oreillette. Rien n’est trop banal pour qu’ils s’y attaquent. Rien à voir avec de la vraie politique, celle des idées, cela ne les intéresse pas.

  • Maintenant on passe au niveau supérieur: prison ferme pour tous ceux qui ne corrigent pas votre comportement.
    http://leplus.nouvelobs.com/contribution/1154593-condamne-pour-avoir-laisse-un-ami-ivre-conduire-vous-risquez-quelque-chose-si.html

    Donc, si je résume, nous sommes censés confisquer les clés de la voiture de n’importe quel pote qui serait ivre en notre présence, en le privant ainsi d’un lieu où se reposer (vive le droit de propriété!), ce qui fait qu’il doit passer la nuit chez nous ou que nous devons attendre ensemble que son taux d’alcoolémie baisse (c’est une connaissance infuse, hein!).

    La même logique pourrait être appliquée aux copains des gens obèses. Attention, repas équilibrés pour tous les invités, parce que s’ils ont un arrêt cardiaque suite au dîner que vous avez servi, vous devenez responsables!

    • Dans mon groupe d’amis, nous proposons systématiquement à ceux qui ont bu de rester chez quelqu’un pour la nuit. C’est d’une part un geste citoyen mais surtout une preuve d’amitié.
      Sans parler de la responsabilité d’un point de vue légal, la responsabilité morale est à prendre en compte… surtout quand cela peut éviter un accident.

      • Nous les faisons aussi avec nos proches. Mais on ne peut pas généraliser à tout les niveaux. Pensez aux cas où deux personnes se disputeraient, un conducteur ivre insisterait pour pouvoir conduire, une femme échapperait à une tentative de viol par un alcoolique, des invités qui ne se comporteraient pas poliment et qui causeraient des dégâts chez vous.

        La confisque des clés, en plus, pose des incongruences au niveau du droit. De quel droit j’interdis à quelqu’un l’usage de sa voiture s’il veut se reposer? Si les clés ne sont pas insérées il ne commet pas d’irrégularité.

        Bref, l’aspect le plus inquiétant c’est que la sentence définit un précédent judiciaire et, comme j’ai dit dans mon premier commentaire, on pourrait étendre le concept de responsabilité aux repas servis à des personnes obèses, aux gâteaux offerts à des diabétiques, à la présence de poussières qui provoqueraient un attaque chez les asthmatiques, etc.

  • H16 dit que ce pays est foutu.
    Moi, je dis qu’il faut les pendre haut et court.
    Chacun sa maxime. La mienne a le mérite que ça sera jouissif !

  • Sur le principe oui, il ne devrait pas y avoir ce genre de taxe.
    Mais le principe libéral dans ce cas serait que le prix du tabac, etc, est libre, mais que ce n’est pas à la société d’assumer les conséquences (financières) d’un abus. (ex: payer xxxxxxx€ un traitement de cancer du poumon) Or avec notre système de santé étatisé cela ne peux pas être le cas.
    La fameuse « auto-régulation » du système ne peut pas se faire ici car un des aspects du problème est faussé.
    Si le risque santé était géré disons de façon privée, par une assurance à qui vous deviez déclarer vos habitudes, votre IMC afin qu’elle évalue le risque de maladie, et que ces tarifs seraient triple en cas de tabagisme et doubles en cas de surpoids, ce qui ne manquerait pas d’arriver, cela reviendrait au final au même.

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