Par André Rageot d’Emploi-2017.
Le désir de protéger le citoyen contre lui-même et la peur des responsabilités dans les administrations nationales et locales entraînent un renchérissement et un ralentissement considérable de la construction en France. Pourtant, la responsabilité personnelle des agents ne peut être mise en jeu.
L’article 1382 du Code Civil de 1804 dispose que « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». Cependant, il reste l’héritage de l’absolutisme royal selon lequel « Le Roi ne peut mal faire ». Ainsi l’administration a considéré longtemps que les actes de souveraineté nationale ne pouvaient être jugés par un tribunal.
En 1873, l’arrêt Blanco vient cependant atténuer légèrement cette vision, il en ressort ainsi que la responsabilité de l’administration peut quand même être engagée en cas de dommage causé aux usagers du service public, quoique seulement selon les règles du droit administratif et en cas de faute lourde. Depuis, le droit administratif et la jurisprudence ont évolué pour rapprocher la responsabilité administrative de la responsabilité civile, y compris dans ses règles d’indemnisation.
Néanmoins, même si la Constitution dispose que « nul ne saurait par une disposition générale de la loi être exonéré de toute responsabilité personnelle quelle que soit la nature ou la gravité de l’acte qui lui est imputé », il reste difficile de rechercher la responsabilité d’une administration pour ses décisions, et encore plus pour ses non décisions. Il reste par ailleurs des particularités typiquement françaises qui rendent extrêmement rare une condamnation des agents :
- Il est très difficile de rechercher la responsabilité pénale des membres de l’administration (cela nécessite une possibilité d’appréciation concrète, et une faute grave…).
- L’administration reste largement irresponsable de ses non décisions (actions passives) et de ses actions d’influence.
- Les juges restent largement irresponsables de leurs décisions au nom de la séparation des pouvoirs.
- Les syndicats restent irresponsables civilement.
L’exemple de l’irresponsabilité de l’administration dans le secteur de la construction est particulièrement frappant. Alors que l’on sait la pénurie de logement existant dans certaines zones géographiques, les obligations imposées par l’administration ont pour conséquence de renchérir considérablement le coût de la construction :
- Les normes d’isolation thermique ont dépassé le seuil pratique de rentabilité et coûtent bien trop cher à être respectées par rapport aux économies qu’elles permettront de réaliser.
- Les normes pour handicapés font construire trop grand donc trop cher. Ainsi un hôtel qui se construit doit être entièrement accessible à un handicapé alors que seuls quelques accès seraient suffisants.
- Le désir de surprotéger l’acheteur superpose les frais financiers obligatoires : l’acheteur ne paie que proportionnellement à l’avancement des travaux et peut avoir à payer une garantie de bonne fin.
- Outre cela, la législation superpose les dépenses d’assurances : garantie décennale de tous les intervenants + assurance du promoteur + assurance dommage ouvrage obligatoire.
- Enfin, la lenteur des démarches d’autorisation augmente les coûts d’études.
Ainsi, non seulement l’administration renchérit la construction par de nombreuses normes mais elle en ralentit la mise en œuvre. En principe, le délai d’instruction d’un permis de construire est de 3 mois et en l’absence de réponse de l’administration au-delà de cette limite, le permis de construire est réputé accordé tacitement. Il existe néanmoins un certain nombre d’exceptions qui font que cette règle est rarement appliquée :
- Si l’administration demande des pièces complémentaires, les 3 mois ne courent qu’à partir de leur réception par l’administration.
- L’administration évite le permis tacite en délivrant un refus avant la fin du délai. En ce cas, le délai d’un recours pour avoir gain de cause peut durer jusqu’à deux ans.
- Dans un certain nombre de cas (ex : construction à moins de 500 mètres d’un immeuble classé), la consultation de l’architecte des bâtiments de France est requise. Elle porte le délai à 6 mois ou un an et supprime la possibilité de permis tacite.
- Pour les locaux commerciaux, les problèmes d’accès handicapé peuvent aussi donner lieu à des épisodes kafkaïens.
Résultat : il faut un an et demi à deux ans en réalité pour avoir un permis et ce délai moyen augmente inexorablement !
Ces délais considérables s’expliquent par le fait qu’il n’y a pas de réels moyens de contraindre les administrations à raccourcir les délais :
- La juridiction administrative est débordée et juge lentement, de plus elle a maintenant deux niveaux de juridiction avant le Conseil d’État (tribunaux administratifs et cours administratives d’appel).
- La procédure de référé est inopérante car le juge du référé est le juge de l’urgence et de l’évidence ; construire est rarement urgent et la réglementation est loin d’être évidente.
- La responsabilité personnelle des agents ne peut pas être mise en jeu.
Cette paralysie résulte du souci de protéger le citoyen contre lui-même et de la peur d’engager la responsabilité de l’administration. C’est ainsi que l’administration nationale préfère sortir un règlement hyper précis et coûteux plutôt que de risquer d’omettre une disposition dans ce règlement et de même les administrations locales pensent risquer moins de contestation en ne délivrant pas les permis qu’en les délivrant !
Malheureusement cela ne concerne pas que la construction !
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Sur le web.
Je comprends que la ministre du logement pérore sur la composition du nouveau gouvernement. Cela lui évite de présenter son bilan calamiteux en matière de construction de logements sociaux. Elle pourra toujours nous expliquer que de méchants bobo-verts ont décidés de tellement de nouveaux règlements que tout dossier est très long, que le délai de réalisation a été de ce fait considérablement augmenté et que le coût unitaire s’est ainsi envolé.
Le permis de construire a d’autres effets pervers …
Le premier est l’effet de seuil venant de la surface à partir de laquelle un permis est nécessaire (pour un abri de jardin par exemple, rien en dessous de 5 m², déclaration en dessous de 20 et permis au delà, idem pour une véranda ou une serre plus d’autres règles d’urbanisme). La surface de ces extensions ne va donc pas correspondre aux besoins mais va être très concentré au niveau des effets de seuil !
Ensuite, de nombreux travaux se font sans permis de construire car cela est trop compliqué. Cela influe également sur les travaux réalisés. Des Velux sont par exemple fait du côté nord afin que cela ne se voit pas de la rue. La problématique est que cela bloque en parti l’immobilier par la suite, surtout si on désire faire de nouvelles extensions. En effet, les nouveaux permis de construire sont souvent refusés au titre eds anciennes irrégularités.
Les normes ubuesques, c’est super pour plomber la construction : https://www.youtube.com/watch?v=2aH8P8MbyMs
Sur la question des permis (pas seulement celui de construire !) , la meilleur preuve du problème c’est la quantité de « yaka fokon » qui viennent spontanément à l’esprit dès qu’on les évoque.
L’intérêt du permis, ce n’est pas de protéger les tiers : ceux-ci ont toujours le recours de saisir la justice si ils sont lésés, si ils ont tort il n’y a pas de sujet, si ils ont raison le constructeur devra en subir les conséquences.
Non, l’intérêt du permis, c’est de sécuriser le constructeur, l’assurer que personne ne pourra venir lui chercher des poux dans la tête après la construction. Je ne suis même pas sûr que cette garantie marche encore… et encore moins si elle vaut le prix qu’elle coute pour le constructeur et pour les pouvoirs publics (donc le contribuable). De plus, il y a bien d’autres moyens de donner cette garantie (un certificat par un organisme type bureau Véritas par exemple)
Le permis de construire est une HONTE!!!Il prive les habitants de logements à un cout abordable…Il doit etre absolument interdit par voie constitutionnelle.
Mais, si on supprime le permis de construire, qui voudra encore être Maire ? (lol)
A chaque innondation, parfois les mêmes quartiers se retrouvent les pieds dans l’eau….
Le propriétaire fait appelle à la solidarité obligatoire ( curieux concept) pour un fait généralement prévisible.
Il s’abrite derrière le permis de construire délivré par l’administration:
– accordé au profit d’un acheteur qui évite de regarder
– au profit d’un vendeur qui se garde bien d’informer ce qu’il sait
– tous déresponsabilisés par une administration conceptuellement et légalement au coeur d’un système corruptif… et responsable d’aucun de ses actes.
PS : un handicap… cela n’arrive pas qu’aux autres…
Il n’y a pas de pénurie de logements ?! Parcourez nos villes et nos villages ! Des affichettes à vendre, à louer partout !!!! Avec tous plans Scellier et autres, on a construit des quantités de logements partout ou c’était possible ……de plus la pyramide des âges est sans appel, les plus de 60 ans sont beaucoup plus nombreux que les moins de 60 ans, ce qui explique la baisse des prix dans l’immobilier qui est durable ?! L’immobilier jouit encore du réflexe d’investissement durable mais c’est une erreur stratégique (voir la pyramide des âges et les études de Friggitt) !