Par Valentin Petkantchin.
Un article de l’Institut économique Molinari.
La fiscalité comportementale a indiscutablement le vent en poupe. Que ce soit en matière de tabac et d’alcool, ou encore de nutrition, les propositions de taxes visant à changer les habitudes de consommation se multiplient.
Dans l’espoir de faire baisser le tabagisme, le plan cancer 3 de François Hollande, mise ainsi – dans la lignée des plans précédents – sur des augmentations à répétition du prix du tabac. Un rapport d’information dédié spécialement à la fiscalité comportementale et présenté récemment au Sénat par M. Yves Daudigny et Mme Catherine Deroche proposerait entre autres, selon le site publicsenat.fr qui a pu se procurer le texte, de les augmenter de 10 % par an pendant cinq ans.
Pourtant, les pouvoirs publics font eux-mêmes le constat suivant : en dépit du fait que la France est le pays d’Europe où ces prix ont le plus fortement augmenté, « il y a aujourd’hui plus de fumeurs qu’il y a cinq ans ». Un tel constat remet indirectement en question l’efficacité de la fiscalité dans la lutte contre la diminution du tabagisme.
La fiscalité comportementale s’invite aussi dans les assiettes des Français et dans ce qu’ils boivent. Après la taxe sur les sodas de 2012 et celle sur les boissons énergisantes de 2013, un nouveau rapport, dévoilé début 2014 (le rapport Hercberg), propose désormais de passer les produits alimentaires à la moulinette de la fiscalité nutritionnelle.
Bref, la volonté politique, consistant à recourir à l’arme fiscale afin de changer les comportements de la population, semble de plus en plus grande. Qu’il s’agisse de tabac, d’alcool, d’aliments ou de boissons, le modus operandi est souvent assez similaire. Pour justifier ces taxes, leurs partisans soulignent que les consommateurs des produits viciés seraient un fardeau pour les finances de l’État, suggérant par la même occasion que la suppression de ces vices permettrait d’assainir les comptes publics. Des coûts sociaux se chiffrant souvent en dizaines de milliards d’euros ou de dollars – en matière notamment de coûts de santé – sont alors régulièrement avancés. Il s’agit d’un argument d’autant plus facile à faire passer que la crise économique et financière a mis à mal les finances publiques en France.
Pourtant, une telle instrumentalisation de la fiscalité est loin d’être la panacée que ce soit en matière de finances publiques, de santé et de bien-être. Pourquoi ?
Examinons par exemple l’argument des coûts sociaux souvent utilisé dans ce domaine. Celui-ci est loin de faire l’unanimité. Car quand on tient compte de la globalité des coûts de santé et de retraite, tout au long de la vie (concept de lifetime costs), plusieurs études suggèrent qu’il serait hasardeux d’attendre de la disparition des comportements à vices, un redressement des comptes publics. En effet, si un mode de vie sain assure une espérance de vie plus élevée, alors les coûts de santé de ces personnes – particulièrement importants dans un âge plus avancé – vont contrebalancer, voire dépasser, l’ensemble des surcoûts générés par des personnes par exemple obèses ou fumeuses.
Une étude portant sur les Pays-Bas conclut ainsi qu’en l’absence totale de fumeurs, les coûts de santé de l’ensemble de la population seraient plus élevés que ce qu’ils sont actuellement au sein d’une population comprenant fumeurs et non fumeurs.
Selon une autre étude, les lifetime costs des personnes non fumeuses et de poids normal seraient supérieurs de près de 28 % à ceux des fumeurs et de 12 % à ceux des obèses. Une estimation de l’impact financier global du tabagisme aux États-Unis conclut à des économies de 0,32 dollars par paquet. Bref, contrairement à ce qui est souvent suggéré, il serait imprudent de miser sur la disparition des comportements à vice en tant que solution pour améliorer l’état des finances publiques.
Un autre point, souvent ignoré ou sous-estimé dans le débat, est que la contrainte fiscale demeure par ailleurs un outil dangereux en soi quand il s’agit de faire évoluer les modes de consommation. Elle suscite en effet plusieurs effets inattendus.
Car si les ventes officielles du produit surtaxé sont susceptibles en effet de baisser, les consommateurs tendent en revanche à substituer un autre produit tout aussi, voire éventuellement plus nocif que celui qui est visé. Une telle réaction face à la fiscalité comportementale compromet généralement l’atteinte des objectifs sanitaires affichés par les pouvoirs publics.
L’expérience américaine des taxes sur les sodas montre ainsi que les consommateurs – notamment les enfants et les adolescents – se mettent à boire d’autres boissons caloriques relativement moins chères avec un effet inexistant ou minime sur le surpoids et l’obésité. Quand les pouvoirs publics se mettent à taxer le gras – comme au Danemark en 2011 – les consommateurs augmentent leurs achats transfrontaliers et se tournent vers des produits moins chers, présentant les mêmes risques pour la santé en cas de surconsommation, voire plus élevés, du fait de leur moindre qualité. Le même phénomène a été observé pour l’alcool, les consommateurs se rabattant à cause des taxes, sur des boissons alcooliques moins chères et plus fortes, ou encore possiblement sur la consommation de produits comme le cannabis.
Même dans le cas du tabac – souvent cité en exemple – les taxes ne sont pas exemptes d’effets pervers similaires. Des études ont ainsi montré que les fumeurs se mettent à fumer chaque cigarette de manière plus intense ou passent à des cigarettes plus puissantes, avec pour résultat davantage de nicotine et de goudron absorbés par cigarette. La hausse des taxes n’est donc pas forcément associée à une amélioration de l’état de santé, même quand le nombre de cigarettes vendues diminue. Sans compter qu’arrêter de fumer favorise souvent la prise de poids, d’autres études suspectant là-aussi la présence d’une fiscalité lourde comme l’une des causes d’augmentation des taux d’obésité.
Enfin, si les effets des taxes comportementales sont mitigés en matière de santé et de finances publiques, leur mise en place est extrêmement néfaste quand on comprend qu’elle se révèle souvent un véritable casse-tête pour les entreprises (à l’image de la taxe sur le gras au Danemark) et qu’elle est la seule raison nécessaire et suffisante à l’existence d’un marché parallèle dynamique.
Ce marché peut prendre la forme d’achats transfrontaliers – comme dans le cas de la fat tax qui a poussé les Danois à acheter leurs produits en Allemagne ou en Suède causant des gaspillages inutiles – et d’achats au noir pouvant représenter au total 10 % du marché de l’alcool au Royaume-Uni et monter à 20 % ou plus dans le cas des cigarettes en France.
On perd souvent de vue que ce n’est pas la nature du produit surtaxé en soi, ou le vice, qui est à l’origine de la contrebande, mais la fiscalité à laquelle il est soumis. Même des produits aussi banals que le sel ou le savon deviennent rapidement l’objet de contrebande quand ils sont fortement taxés.
Rappelons-nous l’exemple de la gabelle en France qui a provoqué une très forte contrebande de sel à l’époque. Ou encore du développement du marché noir du savon en Angleterre où il y fut soumis, jusqu’à milieu du XIXe siècle, à une taxation spécifique lourde, allant jusqu’à 110 % à 120 % de son prix.
Les taxes comportementales risquent d’autant plus de raviver la contrebande qu’elles sont régressives, à savoir qu’elles frappent relativement plus lourdement les ménages à faibles revenus, plus enclins par nécessité à préserver leur pouvoir d’achat. Selon une étude, l’ensemble des taxes comportementales (en incluant notamment les taxes sur les carburants et les véhicules, ainsi que celles sur l’énergie verte visant à modifier les comportements en matière de consommation d’énergie) atteindrait ainsi 11,4 % des revenus disponibles des personnes les plus pauvres au Royaume-Uni. Cette part serait de 21,7 % si on y inclut la TVA, soit le double de celle des ménages les plus aisés.
Alors que les pouvoirs publics s’intéressent de plus en plus à la fiscalité comportementale, il serait utile qu’ils ne perdent pas de vue l’ensemble de ces écueils. Ces derniers devraient faire partie du débat public chaque fois que des taxes sont proposées sous prétexte de sanctionner des comportements à vice, d’améliorer la santé et le bien-être de la population.
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Sur le web. Publié initialement dans l’édition de mars 2014 de la Revue Parlementaire.
Pour plus de détails lire : Taxer les « vices » ne paye pas !
Même si elle était la panacée, le fait qu’elle attente à la liberté (ici, de choisir) et qu’elle se mêle de la vie privée des hommes, la fiscalité comportementale est condamnable. Elle est à placer au même niveau que la prohibition car toutes les deux sont liberticide.
Réponse : NON !
De quel droit punir le choix des uns pour satisfaire le caprice des autres (ne peut que mal finir) ?
Ce genre de politique punitive et discriminatoire (l’inégalité est interdite par la constitution française) ne peut que produire des conséquences néfastes (augmentation du tabac = plus de marché noir qui revends du tabac frelaté bien plus dangereux pour la santé) qui ne fait que dégrader la santé des citoyens.
Sans négliger les millions de frontaliers qui achètent le tabac à l’étranger parce qu’il se considèrent « volés » par l’état qui nage en plein fantasme paternaliste.
Le même principe utopique (en pire) dirige la loi sur les stupéfiants qui accuse littéralement le citoyen de commettre un acte criminel en consommant une drogue (l’accusation arbitraire est interdite par la constitution, tout comme la persécution), hors consommer une drogue ne nuit à personne, quand à la santé, elle n’appartient pas à l’état, mais à l’individu qui décide de son choix de vie (également inscrit dans la constitution) ce qui rends caduque l’objet de cette idéologie inacceptable à vouloir empêcher les Français d’êtres libres de disposer de leur bien-être.
Car poursuivre une personne en l’affligeant d’une culpabilité inventée de toutes pièces (lire le texte de loi) et de pénalités dégradantes (stages de propagandes à ses frais) , est perçu comme un odieux racket par les citoyens, obligés de subir les trafics, son économie souterraine (qui n’inquiète pas l’état..étrange…) et sa criminalité galopante combattue par la politique qui la provoque de fait (de qui se moque-t-on).
Mais notre société est prête à perdre tout crédit en instaurant ces zones illégales pour en faire le profit illicite en prétextant la bienveillance d’une santé, qui aux regrets de ce dogme populiste, restera privée et inaliénable, même devant la loi, car nul n’a droit de regard sur la santé et l’intimité de l’individu dans notre république, et le citoyen à le devoir garanti de combattre l’inégalité, les persécutions, et la tyrannie.
Ces exemples démontrent que l’on ne peut pas opposer la santé contre la liberté des choix ( de la nature humaine), en effet, même si la loi se refuse à cette invariable réalité que le monde du vivant se drogue, animaux et humains confondus, c’est inexorable.
Celui qui prétend changer cela, est forcément un escroc qui ne vous veut pas du bien.
Outre le côté liberticide et l’inefficacité des mesures, c’est la responsabilisation des politiques qui est en cause. J’utilise ce terme de responsabilisation faute de mieux.
La fiscalité comportementale permet de lever des impots supplémentaires pour boucher les trous dans les budgets à cause d’une mauvaise gestion, tout en donnant un os à ronger aux moralisateurs de toute sorte, députés, écolos ou ONG. Les responsables du budgets savent vraissemblablement que les mesures sont inefficaces tant pour le but affiché que pour les finances globales, mais cela permet de contourner la rigueur et s’assurer le soutien temporaire des lobbies anti-tout-et-n’importe-quoi. C’est une forme de corruption douce dont le but est de conserver le pouvoir et masquer son incurie.
La e-clop a fait plus pour l’arrêt de la consommation du tabac en une année que le vol fiscal comportemental en plus de 20 ans.
La fiscalité comportementale n’a pas pour but de modifier les comportements. Au contraire, plus les individus dévient des réglementations ubuesques, plus les hommes de l’Etat sont satisfaits. Le but de l’agression fiscale et des réglementations qu’on ne peut pas respecter est de placer les individus en position de culpabilité, en situation d’illégalité artificielle, de telle sorte qu’ils soient malléables et soumis à l’Etat omnipotent. C’est une véritable guerre civile que l’Etat obèse mène contre la population pour s’imposer à tous, dernière étape de la politique de collectivisation de la France entamée il y a quelques décennies par les socialistes de gauche comme de droite.
Désormais, la majorité des Français n’ignore plus la nocivité de l’Obèse tellement elle est devenue flagrante (chômage de masse, montagne de dettes, agressivité bureaucratique, déliquescence économique et sociale…), en dehors des fonctions régaliennes minimales. L’abstention majoritaire aux dernières élections en est l’expression éclatante. Mais plus le crime de l’Etat socialiste sera évident aux yeux de la population, plus l’Obèse deviendra agressif, plus les élections seront trafiquées, plus les mensonges politiques seront systématiques et grossiers, plus le vol fiscal sera ample et brutal, plus les réglementations seront complexifiées ad nauseam pour qu’elles ne puissent pas être respectées.
« La e-clop a fait plus pour l’arrêt de la consommation du tabac en une année que le vol fiscal comportemental en plus de 20 ans. »
L’État n’a jamais aimé la concurrence, celle-ci démontrant l’inutilité des solutions étatiques. Et la chose la plus importante pour un politicien est de faire croire à sa nécessité. Sinon comment justifierait-il son job et son salaire ?
En plus, si les gens ne fument plus des cigarettes surtaxées, ça crée un trou dans les recettes fiscales…
Oui, pour les étatistes, la e-clop a tout pour déplaire, ce qui en fait un bouc émissaire idéal pour une intervention musclée des sévices publics, sans doute à l’occasion d’une étude pseudo scientifique qu’on ne manquera pas de lire prochainement, outrageusement relayée dans les médias complices. Ce qui est bien avec cette innovation, c’est qu’on peut anticiper précisément la démarche à venir des socialauds. C’est un cas d’école édifiant pour éclairer la population sur les méthodes perverses des séides de l’Etat obèse.
Il y a fiscalité comportementale car il y a un régime de sécurité sociale collectiviste.
La centralisation et la collectivisation mènent à ce genre de spoliations. Les « savants » appuient les décisions en toute connivence et les médias se chargent du reste.
Dans l’idéal, les individus assument les risques pris et trouvent l’assurance privée qui leur convient.
en premier lieu c’est liberticide ,en second absurde car fonder une telle politique sur le constat qu’un produit est néfaste et taxer revient à bénéficier du commerce du produit ( on peut discuter sur le fait que les recettes des taxes soient allouées à « soigner » le mal fait ), mais c’est quasiment une des rares options possibles si on maintient une assurance maladie qui ne remplit pas son rôle d’évaluation des risques comportementaux pour calculer les primes tout en autorisant les gens à un peu de liberté ….
faut-il taxer la coupe des vices ?
Concernant les taxes sur le tabac, quand le tabac a commencé à être taxé (en 1629) ce n’était certainement pas pour des raisons de santé…