Lorsque le Président Hollande a renouvelé son gouvernement, il a clairement expliqué qu’un des piliers de ses prochaines actions en faveur du bon peuple qui l’a mis à cette place serait de s’assurer de la bonne santé des uns et des autres, ou, à tout le moins, que la Sécurité Sociale, cet exemple mondial de réussite du collectivisme en matière de soins, serait préservée. Et on comprend, lorsqu’on voit les dérives actuelles des dépenses de santé, que la question préoccupe notre petit Roi Solex.
Enfin, je dis « préoccupe », je veux dire « sur le plan électoral » seulement : les toussotements de la Sécurité Sociale ont en effet cette capacité à rendre malade tout gouvernement qui n’y prendrait garde tant l’institution est devenue une forteresse, bastion de syndicalistes et de fonctionnaires prêts à toutes les journées d’inaction possibles pour faire perdurer le mastodonte. Et lorsqu’on voit les comptes actuels, on comprend que les toussotements ont un petit côté cancéreux qui ne laissent rien présager de bon : la Sécu a tout ce qu’il faut, à glavioter ainsi, pour se transformer en un Walter White français, sombrer dans le trafic de drogue, la violence et le racket pur et simple… (Oh, wait !)… ou disons, plus vite qu’actuellement.
Autrement dit, Hollande a tout intérêt à surveiller de près l’état général des comptes de la Sécurité Sociale s’il veut espérer limiter la casse à chaque échéance électorale. Or, il y a fort à faire : déjà, l’institution continue d’enregistrer des résultats moins que brillants en matière de comptes, et empile des déficits franchement préoccupants au point que Valls ait dû en faire mention dans son programme politique présenté ce 8 avril. Et malgré cela, elle devra faire des efforts notoires : une partie (au moins 10 milliards d’euros) des économies prévues au fameux plan de 50 milliards sur trois ans porteront justement sur l’assurance maladie.
De façon intéressante, il faut se rappeler que la Sécurité Sociale, institution officiellement paritaire, ne dépend pas à proprement parler de l’État ; toute économie réalisée ne le sera normalement que par la volonté de ses dirigeants, volonté issue d’un compromis entre différentes organisations syndicales au milieu desquelles l’État n’a – sur le papier – qu’un rôle d’arbitre. Il faudra donc jouer finement pour faire changer les mauvaises habitudes dispendieuses des Français et la gestion approximative des caisses par ces syndicats qui y trouvent, c’est évident, une partie de leur financement, et de leur puissance.
Il sera indéniablement plus facile pour l’État de jouer sur la partie de la santé qui est directement à sa charge (ou disons, plus exactement, à la charge du contribuable), notamment l’Aide Médicale aux Étrangers. Là encore, il y a de quoi faire puisqu’un récent rapport sur le projet de loi de finances pour 2014 relatif à la santé laisse entrevoir une réalité assez douloureuse : le système est à bout de souffle (non ? si !) et la facture déjà fort conséquente de 800 millions d’euros pourrait bien passer le milliard dans la prochaine année.
Au passage, on ne peut s’empêcher de noter que pour pondre le rapport, le député Goasguen aura dû batailler contre l’opacité savamment entretenue du Ministère de la Santé, ce qui a donc placé le parlementaire dans l’une des positions pourtant rituelle du Français moyen lorsqu’il s’adresse à cette entité. Quelque part, ça lui fera les pieds. Au-delà de ce camouflage des chiffres pour éviter de dévoiler l’ampleur du désastre aux contribuables effarés, le rapport dénombre plus de 250.000 sans-papiers pris en charge, et note la prise de retard dans le remboursement de l’État aux organismes sociaux (40 millions encore en souffrance).
Bref : la santé directement « gérée » par l’État, c’est la foire totale, l’absence de contrôle et les sprinklers à pognon ouverts en grand pour arroser un peu tout le monde dans la bonne humeur. Le lecteur régulier de ces colonnes n’est pas surpris, l’irrégulier tiquera mais reprendra fermement le cours normal de ses activités en croyant avoir cauchemardé, moyennant quoi tout ceci continuera sans aucun changement.
Oui, je sais, Valls a dit des trucs et des machins comme quoi il allait faire faire des économies. Certes. Même si l’on passe rapidement sur ce genre de promesse de politiciens (qui ont encore moins de valeurs que celles d’alcooliques), on ne peut oublier la situation actuelle : comme d’une part les Français, dans leur grande majorité, ne veulent surtout pas changer quoi que ce soit de ce système-là, et que d’autre part, les acteurs mêmes du système ont déjà plus ou moins décidé sa totale et inévitable nationalisation à moyen terme, croyez-moi, rien ne changera, les dépenses et les déficits continueront d’augmenter.
Et je ne m’avance pas en disant cela : mardi dernier, alors que le Président sortait enfin son Manuel pour apprendre à se servir de sa boîte à outils, on apprenait que le Conseil d’analyse économique (CAE), qui dépend de Matignon, publiait des propositions particulièrement généreuses sur la santé. Pour lui, c’est évident, il faut revoir de fond en comble la façon dont est facturé l’accès à la santé en France et il préconise que les patients paient leurs consultations chez le médecin jusqu’à atteindre un plafond fixé selon leurs revenus, quitte, en échange, à ce que les soins hospitaliers soient entièrement gratuits. Parallèlement, il envisage aussi la disparition complète des mutuelles, englobées ou absorbées par l’entité publique.
Oui, vous avez bien lu : une assurance en fonction des revenus, des soins hospitaliers totalement « gratuits » (i.e. payés par tous), une disparition de toute branche privée, c’est bel et bien d’une nationalisation et d’une collectivisation complètes de la santé dont on parle ici, alors même que les déficits s’accumulent et que chaque nationalisation, que ce soit dans ce pays ou dans n’importe quel autre, s’est toujours traduite par une déroute fracassante.
Tout comme récemment je notais qu’en matière d’éducation, on avait soigneusement évité d’envisager la moindre solution libérale, en donnant aux responsables d’établissement une véritable autonomie garante à la fois de créativité, d’adaptation et d’économie, je ne peux m’empêcher de voir qu’ici encore, pour combattre le fléau des déficits et d’une gestion calamiteuse, d’une déconnexion complète de ceux qui dépensent avec ceux qui payent, de ceux qui produisent du soin et ceux qui en consomment, les seules idées en rayon sont des bricolages marginaux et l’antienne communiste habituelle de la nationalisation.
Nulle part n’est imaginé le fait de rendre à nouveau les Français responsables de leurs dépenses, par exemple en transformant l’actuel gloubiboulga d’institutions en véritables assurances. Plus perversement, comme chacun des bénéficiaires de ce système pourtant pourri jusqu’à l’os sait pertinemment qu’une concurrence officielle et acceptée avec des organismes privés signerait immédiatement la fin du vieux débris communiste de 1945, aucun, des politiciens jusqu’aux syndicalistes et une partie non négligeable des professionnels de santé eux-mêmes, ne veut prendre le risque de remettre à plat le système.
Coincée entre l’impensable réforme, trop polémique pour être autorisée, l’impossible augmentation des recettes par des cotisations déjà mortellement élevées, et l’inenvisageable baisse des dépenses pour des raisons idéologiques, la Sécurité Sociale s’achemine doucement vers un destin inévitablement funeste.
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Sur le web
Il faudrait prendre exemple sur ce que fait en ce moment Cameron en Grande-Bretagne. L’homéopathie et l’acuponcture ont été démontrées par des études détaillées que ce sont des thérapies sans aucun effet. En France les consultations auprès des « spécialistes » de ces deux pseudo-médecines sont remboursées. En Grande-Bretagne et en Australie, c’est terminé ! Les personnes en surpoids sont sur-taxées en raison des sur-dépenses qu’occasionne leur état de santé entièrement provoqué par un manque d’hygiène comportementale basique, un peu comme les mutuelles et les compagnies d’assurance santé font payer plus cher les cotisations au fur et à mesure qu’on vieillit (j’en ai fait l’expérience). combien de milliards d’euros d’économie ce type de mesures permettrait ? Aucun commencement d’explication en France tant l’opacité généralisée du ministère de la santé est immense. On peut d’ailleurs avoir quelque soupçon sur cette opacité savamment entretenue. Un autre exemple, l’open data médical n’est toujours pas à l’ordre du jour en France alors qu’il a prouvé aux USA, au Canada et en Australie (encore les mêmes pays) qu’il conduisait à des économies substantielles car il révèle l’inutilité de bon nombre de médicaments. Je parlerai demain du Tamiflu dans mon blog à la suite des révélations de Cochrane Collaboration dont le rapport est disponible en ligne. Pour l’homéopathie voici le lien :
http://jacqueshenry.wordpress.com/2014/04/09/lhomeopathie-revisitee/
> En France les consultations auprès des « spécialistes » de ces deux pseudo-médecines sont remboursées.
…et de la même manière, des spécialistes véritablement efficaces ne sont pas remboursés. J’ai l’impression que la règle est de ne pas rembourser ce qui est très cher.
Mon expérience de la SS, ce n’est pas que ça coûte trop cher et que c’est mal remboursé, c’est bien pire : ça ne sert à rien. Si vous tombez véritablement malade, vous allez payer très cher de votre poche, tout en attendant des mois pour aller voir un spécialiste. Et encore, ces histoires de médecin traitant font tout pour vous empêcher d’aller voir un spécialiste. Bref, la SS ce n’est pas qu’une très mauvaise assurance, c’est une machine à tuer.
Trait d’esprit du jour à l’intention de Mr H16 et des yeux qui traînent ici:
Mieux vaut penser le changement, que changer le pansement…
Amusant, merci.
Le changement de pensées serait pas mal non plus.
@français: je suis souvent très drôle!! J’ai aussi fait la blague suivante: ajd on ne nivelle pas on rame haut…
Ahhh, c’est pour fermenter la pression!
Ahah, j’ai compris…;)
@ Jacqueshenry, je suis d’accord pour mettre en évidence ce qui ne fonctionne pas mais précisez, l’acupuncture et l’homéopathie sont remboursés si il s’agit d’un médecin qui pratique cet acte. Sinon pas remboursés, comme pr l’ostéopathie, la psychothérapie…
Pour la grande réforme, il faudra attendre que les principaux bénéficiaires du « casse qui dura un siècle » meurent. La funeste génération des papy boomeurs, première consommatrice des prestations de santé.
Reprenons un peu face à la désinformation :
1. « déficits franchement préoccupants ». On s’aperçoit qu’en réalité ils représentent moins de 1% du PIB français ou encore 3,4% des recettes de la sécurité sociale. Pas de quoi faire du catastrophisme. D’autant plus que si on tient compte des 60 milliards d’exonération de cotisations sociales, on arrive à un excédent.
2. L’AME maintenant. 800 millions donc 0,04% du PIB ou 0,2% des dépenses de sécu ! Et vous prétendez que la facture est déjà fort conséquente ? un peu de sérieux ! D’autant plus que soigner permet d’éviter les épidémies et donc les surcoûts.
3. « la santé directement « gérée » par l’État, c’est […] l’absence de contrôle. Mais quand on milite comme vous pour la suppression des fonctionnaires, il ne faut pas ‘en étonner autrement cela frise l’idiotie ou la malhonnêteté, je vous laisse le choix.
4. « solution libérale, en donnant aux responsables d’établissement une véritable autonomie garante à la fois de créativité, d’adaptation et d’économie ». Encore heureux quand on connaît un peu le sujet on sait les catastrophes que cela donne ; Un exemple : la Suède avant et après les années 90 en matière d’éducation. D’autre part, c’est méconnaître la réalité, car les réformes notamment la loi hôpital-entreprise a mis en place de telles gouvernance. ON voit le résultat : dette des hôpitaux qui explosent, désorganisation, baisse de la qualité des soins.
1) « déficits franchement préoccupants ». On s’aperçoit qu’en réalité ils représentent moins de 1% du PIB français ou encore 3,4% des recettes de la sécurité sociale. »
drôle de façon de gérer …, surtout quand on sait que le PIB français est largement surévalué à cause du poids étatique.
2) pourquoi certains doivent payer et d’autres pas ? Où est l’Egalité ?
3) Avez-vous un exemple de quelque chose correctement géré par l’Etat ?
4) Les hôpitaux français n’ont pas de dette ??? Leur organisation est parfaite ??? La qualité des soins optimale ???
halte au sketch !
1. Je ne vois pas en quoi est(ce une drôle façon de gérer. Je constate simplement que faire du catastrophisme est un peu exagéré. Quant au poids de l’action publique dans le PIB, je n’y vois aucun problème étant donné que la puissance publique produit des richesses et de la valeur monétaire. D’ailleurs, il faudra un jour m’expliquer cette curieuse logique qui voudrait qu’une tâche effectué par un salarié du privé serait comptabilisé dans le PIB et donc considéré comme création de richesse et de valeur monétaire alors que la même tâche effectuée par un agent public ne le serait pas. je précise que depuis que je pose cette question, personne n’a jamais été capable de me répondre.
2. C’est le principe de l’assurance, vous payez sans pour autant être sûr de récupérer ce que vous avez versé. Quant au fait que certains ne paient pas cela relève du mythe étant donné que chacun paie des impôts.
3. La police, le justice, l’éducation, pour résumer quasiment toutes ces prérogatives.
4. Relisez bien ce que j’écris.
2. L’AME maintenant. 800 millions donc 0,04% du PIB ou 0,2% des dépenses de sécu ! Et vous prétendez que la facture est déjà fort conséquente ? un peu de sérieux ! D’autant plus que soigner permet d’éviter les épidémies et donc les surcoûts.
Le rapport de 0.2 à 0.04 ne vous fait pas sursauter?
L’AME c’est bien l’aide médicale d’urgence, non?
2. L’AME est l’aide médicale de l’Etat qui concerne les étrangers en situation irrégulière. Faites le rapport entre leur nombre et la population française et vous verrez que le taux est tout à fait normal.
« 60 milliards d’exonération de cotisations sociales »
pourquoi, d’après vous ?
Pour satisfaire des lobbys.
« 1. « déficits franchement préoccupants ». On s’aperçoit qu’en réalité ils représentent moins de 1% du PIB français ou encore 3,4% des recettes de la sécurité sociale. Pas de quoi faire du catastrophisme. D’autant plus que si on tient compte des 60 milliards d’exonération de cotisations sociales, on arrive à un excédent. »
Juste à titre de comparaison, le secteur automobile contribue à 0,6% du PIB, l’energie à 2%. Il n’y a vraiment pas de quoi s’inquiéter !
Et le secteur de la santé ? A lui seul je n’ai pas l’estimation mais si on y ajoute le secteur de l’éducation cela représente 25ù du PIB ! Vous m’excuserez de préférer la santé et l’éducation à l’automobile !
Au passage, il faudrait peut être arrêter d’être stupide avec ces histoires de PIB et réfléchir deux minutes supplémentaires. C’est bien de dire ça représenté tant du PIB, sauf que jusqu’à preuve du contraire, c’est par rapport au budget de l’Etat qu’il faut calculer, à moins que vous ne considériez que 100% du PIB finit dans les caisses de l’Etat…
Quant à la défense du système de Sécu écoeurant que l’on a, seul un bénéficiaire éhonté peut le faire. Quelqu’un qui n’a jamais sorti sa calculatrice pour regarder combien lui coute réellement sa sécu, combien les médicaments coutent horriblement chers quand ils sont remboursés (bah oui c’est les cons qui payent, augmentons les prix!), et surtout, à quel point la politique de toujours plus de dépenses publiques favorisent une fuite en avant permanente des tarifs. La France est un bon exemple, les Etats Unis également.
C’est bien pour cela que je donne deux points de vue à chaque fois. Cependant, ce n’est pas stupide de considérer par rapport au PIB puisque finalement cela montre quelle part de la richesse produite par notre société nous sommes prêts à débourser pour la santé. Que le lobby pharmaceutique est un rôle en France, je ne le nie pas, mais certains vous répondront que cela permet de maintenir des emplois en France. Ensuite vous comparez avec les USA, très bonne comparaison quand on sait que le système US est largement libéralisé et privatisé et que les dépenses de santé sont bien plus grande pour une efficacité bien moindre qu’en France.
D’un autre coté, l’AME franchement…. 800M quoi… Sur 1200 milliards de dépenses (oui parce que les 50 milliards sur trois ans sont bien a économisés non pas sur les dépenses de l’Etat, mais bien sur les dépenses totales). Une goutte d’eau. Et franchement pas l’urgence.
Les mesures les plus urgentes sont celles qui rapporteront le plus. Rien que supprimer le ministère de la Culture et les 7.5 milliards qui vont avec rapporterait 9 fois plus qu’une suppression de l’AME… Et des mesures comme ça, y’en a plein les tiroirs. Même sans faire d’efforts particulier sur le système en place. Les caisses de retraite par exemple, une trentaine de caisses et leurs cortèges de fonctionnaires inactifs qui se refilent des dossiers en boucle, ou comment utiliser 20 fonctionnaires là où un seul aurait normalement suffit…. Bon bah là c’est pareil, suppression des régimes spéciaux, et une caisse unique de retraite. Et boom, les milliards qui tombent à foison dans la popoche.