Par Daniel Hannan, député européen, depuis Oxford, Royaume-Uni.
Tenez-vous prêts mes amis. Pendant les deux prochains mois, aucune session ne sera tenue au Parlement européen. Les citoyens européens vont donc devoir se débrouiller sans personne pour voter des lois intracontinentales sur le miel ou les équipements marins ou la compilation de données sur l’emploi (pour vous citer trois exemples tirés de la semaine dernière).
Mes collègues députés européens et moi-même passeront donc le prochain mois à importuner les électeurs pour leurs votes et, si réélus, le mois d’après à se chamailler sur lequel d’entre nous finira dans quel groupe politique. Le reste d’entre vous n’aura qu’à laisser passer ce moment du mieux que vous pouvez.
Cela dit, nous autres eurodéputés avons gentiment terminé notre dernière session par un festival géant de lois, afin de vous garder dans l’ambiance. Des sessions spéciales de votes ont été mises en place, nous permettant de piocher dans une foultitude de texte de lois. Je pense que nous avons dû voter plusieurs milliers de fois ; même si tout eurodéputé qui dirait connaître plus de 5% des textes votés serait un fieffé menteur.
Posez-vous la question suivante, même en tant qu’euro-enthousiaste modéré : l’Europe a-t-elle vraiment besoin de centaines de députés débattant les mérites du « Rapport Martin sur les données ayant trait aux échanges de biens entre les États membres en ce qui concerne l’Accord de délégation et l’implémentation de pouvoirs sur la Commission pour l’adoption de certaines mesures, la diffusion d’Informations par le Département des douanes, les échanges de données confidentielles entre les États membres et la définition des valeurs statistiques » ? Ou le rapport Hubner sur l’ « Autorisation pour le Portugal d’appliquer une taxe à taux réduit sur certaines boissons alcoolisées dans les régions autonomes de Madeire et Açores » ? Ou encore le rapport McAvan sur l’ « Agence européenne des médicaments (Conduite des activités pharmacovigilantes concernant les produits médicaux à usage humain) » ? Ou n’importe quel autre sujet parmi la douzaine d’autres que les eurodéputés ont voté la semaine dernière – sans même être sûrs, dans la plupart des cas, de leurs teneurs ?
Laissez-moi poser la question différemment : comment en est-on arrivé au point où des problèmes de ce type sont décidés à un niveau continental et imposés uniformément à plus de 500 millions de personnes ? Pourquoi a-t-on jugé opportun de laisser Bruxelles nous dicter le nombre d’heures de travail à effectuer, quels types de vitamines et minéraux nous achetons, quel niveau musical est acceptable au bureau, quelles procédures de sécurité nous devons remplir avant d’ouvrir un compte en banque, quel est le prix des timbres que l’on place sur les enveloppes, ou quelle est la bonne hauteur pour les échelles ?
La réponse est que, depuis deux générations, les élus européens ont, par principe, changé le pouvoir du national au niveau de Bruxelles, convaincus qu’ils parviennent ainsi à assurer la paix et vaincre le nationalisme. L’effet a été de rendre l’Europe en tant que telle moins prospère, moins compétitive et moins libre. Et dois-je vous annoncer le plus tragique ? Tout cela en vain : il n’y aurait pas eu d’autre guerre européenne de toute façon.
Gideon Tucker, journaliste et homme politique new-yorkais, a plaisanté un jour en déclarant que la vie, la liberté ou la propriété d’aucun homme ne seraient en sécurité tant que le corps législatif serait en session (cette remarque est souvent attribuée par erreur à Mark Twain). En regardant à l’instant par ma fenêtre, je vois le pastel de saison pousser (et l’éclat éblouissant du pas-si-pastel colza) ; je m’émerveille face aux descentes en piqué des hirondelles printanières ; j’entends les trémolos des chants d’oiseaux de la fin avril, dominés par une alouette bruyante. Et je me demande : la vie serait-elle vraiment si intolérable si les eurodéputés cessaient de siéger en conseil législatif ?
« L’effet a été de rendre l’Europe en tant que telle moins prospère, moins compétitive et moins libre. »
Et de plus en plus nationaliste, cerise sur le gâteau.
Le parlement européen est parfaitement indifférent : le problème soulevé par l’auteur se pose avec autant d’acuité pour les parlements nationaux ou régionaux. Il est possible d’écrire exactement le même texte en remplaçant « Europe » par « France » ou « Grande-Bretagne ». Le fond du problème est ailleurs, dans la limitation stricte et claire, en un mot, constitutionnelle, du champ d’action des pouvoirs publics.
Autrement dit, quelle que soit son étendue territoriale, un pouvoir qui n’est pas limité par l’instauration d’un Etat régalien minimal est nécessairement absurde et néfaste. Les institutions d’un pouvoir qui ne connaît pas de limites (ou dont le champ d’action est tellement vaste que cela revient au même) sont génératrices de dysfonctionnements, de conflits, de crises, de pauvreté, de déliquescence sociale, d’immoralité et de mort.
Le problème politique européen est tout autant celui des institutions européennes que celui des institutions française ou britannique : indifféremment, toutes ont beaucoup trop de pouvoir.
Et l’empilement ?
Bah, ajouter une couche indigeste à un gâteau qui l’était déjà ne change pas le gâteau : il reste mauvais. En l’absence de la couche bureaucratique européenne, nous aurions quand même la couche française socialiste. Et c’est bien cette dernière qui est responsable de l’essentiel de nos soucis. Jusqu’à preuve du contraire, l’Europe ne nous a pas imposé les 35h, les dettes publiques, les retraites par répartition ou Hollande et ses minables gouvernements. Ce serait même plutôt le contraire.
Comment plus peut-il ne pas être pire et plus difficile à combattre et à vaincre ? Les 35h non, les éoliennes oui. Et bien plus qu’on ne le reconnait.
Lorsqu’ veut peser le pour et le contre, il faut voir le négatif…. Et le positif. L’Europe est bien derrière la fin (pas forcémenet achevée) de plusieurs monopoles publics.
J’aurai donc tendance à rejoindre à 100% Cavagnac et cette voix européenne manque. Nous avons le choix entre :
– plus d’Europe dans tout….
– jeter le bébé avec l’eau du bain.
À peu près personne nous propose « mieux d’Europe ». En l’occurence plus là où il faudrait (une diplomatie, une armée, une constitution qui délimite et limite les pouvoirs) et moins ailleurs (bye bhe la PAC, par exemple…).
Connaissant d’assez près ce » Milieu » (parlementaire et institutionnel, tous deux bureaucratiques), mon jugement de citoyen va radicalement à l’opposé de celui d’une armada de juristes, diplomates, politiciens et lobbyists qui y prospèrent au gré d’interminables palabres et méga-gaspillages de temps et de ressources publiques. Le temps des promesses fallacieuses a ..fait son temps !
Au gré de ses articles, l’auteur Daniel Hannan établit un juste procès de ces « machins » déjà pointés du doigt par Ch De Gaulle. Ce parlement supra n’a rien apporté à la cause européenne ; il la suffoque. Des dizaines de partis antagonistes peuplant nos E-M, partis constitués en huit groupes de clivages (PPE, PSE, Lib, EELV, etc.) le citoyen n’a rien à gagner. Les parlementaires étant pour la plupart de simples missi dominici chargés d’y propager des nuisances particratiques juqu’au niveau « supra ». Tous espérant de ceci une boucle de rétroaction qui s’avère contreproductive ! Idem dans les autres « machins » (ONU et consorts).
Si nous pouvions disposer d’une Commission de taille et aux missions réduites, elle-même agissant avec réalisme sur des matières essentielles et/ou vitales, un premier progrès serait accompli. Le second progrès consistant à régler nombre de concertations-décisions au niveau du seul Conseil européen.
Ah, ceci n’est pas conforme à la vue « tradition structurelles » des juristes, ces mages hautement habilités à nous reproduire des structures inopérantes ? Justement, ce qui manque à l’Europe, devenue ce gigantesque fromage multicouches et redistributif de ressources redondantes … serait une diversification des schémas de pensée aptes à faire éclater la bulle des organes superfétatoires et des postures idiotes !
Je plussoie.
Les parlementaires (européens, nationaux, locaux) ont pour fonction de voter des lois, c’est leur job, pas étonnant donc qu’ils en votent, ils sont payés à ça, donc un libéral conséquent qui se plaindrait de la logorrhée législative devrait admettre que le parlement est un problème (parmi d’autres) et qu’il faut l’abolir.
J’entends les critiques me dire que le parlement existe pour faire contrepoids au gouvernement, dans les faits nulle part ce fut le cas. Dans les faits le parlement fut institué par les rois pour calmer la populace et donner une part du gâteau à l’élite bourgeoise de plus en plus puissante et désireuse de participer au butin. Dans les faits l’exécutif utlise le pouvoir législatif pour asseoir son pouvoir localement, car il ne peut le faire tout seul, il a besoin de relai localement pour faire entendre la bonne parole. Les mêmes (à travers les partis politiques mais aussi les réseaux de grandes écoles administratives ou d’ingénieurs) se trouvent derrière les deux, parfois simultanément parfois en même temps.
Le parlement européen quand à lui a été créé pour amadouer le peuple qui se plaint du déficit démocratique de l’Europe (comme si les institutions nationales avaient des leçons à donner en ce sens, et comme si la démocratie était un graal). Le parlement européen est aussi une chambre qui permet de donner des postes au personnel des partis politiques et à des technocrates, les directions des partis nomment tête de liste ceux qui sont un peu gênants et qu’on désire voir le plus loin possible.