Depuis plusieurs années, la politique française compte parmi ses thèmes phares l’emploi et le pouvoir d’achat. Et, à en croire le raisonnement des politiciens, les deux sont incompatibles. Une preuve de plus que leur vision est erronée.
Par Baptiste Créteur.
L’emploi, en France, n’est pas au mieux. Depuis le choc pétrolier, c’est la crise ; et les inversions de courbe qu’on nous promet depuis non pas quelques mois, mais quarante ans, ne viennent pas.
Le pays compte donc entre 3 et 6 millions de chômeurs, selon les versions ; malgré les politiques de relance, d’accompagnement, d’insertion et de camouflage, les chômeurs sont toujours plus nombreux.
Les causes sont nombreuses, et ne sont surtout pas à chercher du côté des impôts et des lois qui étranglent l’économie. Au premier rang d’entre elles, la mondialisation sauvage qui, en permettant la concurrence internationale, conduit à une délocalisation de la production vers des pays où les coûts sont proportionnellement moins élevés que la productivité.
Sans oublier, bien entendu, le capitalisme, sauvage lui aussi, qui pousse les entreprises à réduire leurs coûts pour être plus compétitives. Les services de téléphonie mobile, par exemple, ne sont pas délocalisés ; mais un concurrent nouveau, en perturbant le cartel régnant jusque-là, détruirait de l’emploi.
Mondialisation et capitalisme, en permettant au consommateur de consommer pour moins cher, augmentent son pouvoir d’achat ; mais la baisse des coûts et les délocalisations, selon les politiciens, rongent les marges et détruisent l’emploi. Heureusement, ils ont la solution : il faut consommer responsable et consommer français.
Chaque consommateur peut désormais, en payant plus cher pour le même produit ou service, sauver l’emploi en France. En promouvant le Made in France, en labellisant les produits bien de chez nous, on peut donc inciter le consommateur à favoriser l’emploi – au prix de son pouvoir d’achat.
C’est un bien triste dilemme qui s’offre aux hommes politiques français. Comme tout sujet, il faut pour eux choisir ; la croissance du pouvoir d’achat s’accompagne d’une montée du chômage, comme la croissance de l’économie s’accompagne d’une montée des inégalités. Et c’est entre autre pour cela que nous aurions besoin d’eux, pour assurer une juste répartition des fruits de la croissance (ou du pouvoir d’achat).
Heureusement pour les Français, ce raisonnement est erroné. Contrairement à ce que certains semblent penser, l’argent qu’ils économisent chaque mois en payant leur abonnement téléphonique moins cher ne disparait pas. C’est, dans une certaine mesure, moins confortant ; en payant son forfait trop cher, on ne devient même pas un bienfaiteur de la France et un sauveur de l’emploi. Mais c’est en réalité fort heureux, car la notion de richesse n’est pas simplement affaire de quelques euros par mois.
Pour le comprendre simplement, il suffit de se demander ce qu’est réellement la richesse. Un abonnement téléphonique de 2 heures est-il moins utile s’il coute 20 euros au lieu de 50, apporte-t-il moins de satisfaction ? Non. Sa valeur est indépendante de son prix. C’est ainsi que l’on peut définir le pouvoir d’achat : la quantité de richesse qu’il est possible d’acquérir avec une somme donnée.
Un politicien habile répondrait sans doute qu’en détruisant l’emploi, le consommateur réduit aussi le salaire moyen dans l’économie – donc, collectivement, le choix du pouvoir d’achat n’est même pas rationnel à long terme pour les Français. Ils doivent donc, individuellement, faire les bons choix et sponsoriser les plus couteux.
Et ce serait, une fois de plus, une erreur causée par un raisonnement à courte vue. L’argent qu’on économise sur un forfait téléphonique ne disparait pas ; on peut donc l’utiliser ailleurs en achetant, en plus, autre chose.
Mais bien entendu, si on achète, avec 2 euros économisés chaque mois, une paire de chaussettes Made in China, l’emploi en France est toujours impacté à la baisse. Non content de proposer des prix cassés « détruisant » l’emploi chez les opérateurs anciens qui n’étaient pas parvenus (ou n’avaient pas cherché) à être assez efficients avant l’arrivée de Free, le fournisseur de services ne s’approvisionne pas en France, contrairement aux autres opérateurs. Ce qui aura valu des tribunes à charge, rédigées notamment par les dirigeants d’Alcatel-Lucent, demandant que Free achète français ; que la croissance d’un quatrième opérateur ne soit pas en pure perte pour la France.
Encore une fois, il faut comprendre que ce n’est pas en pure perte pour la France : les Français y gagnent, clairement, en pouvoir d’achat. Et il faut alors se poser les bonnes questions : faut-il à tout prix chercher à sauver tous les emplois ?
Par exemple, il fut un temps où Alcatel fabriquait des téléphones mobiles. Si l’entreprise avait su faire les bons choix et se positionner efficacement, elle le ferait peut-être toujours1 et n’aurait pas nécessairement les mêmes problématiques.
Faut-il chercher à sauver la production de chaussettes bas-de-gamme en France, ou la production d’acier, ou les métier de libraire et de chauffeur de taxi tels que nous le connaissons ? Sacrifier, pour cela, le consommateur (en réduisant ses choix), l’entreprise (en détruisant les secteurs qui auraient pu se développer grâce aux ressources dégagées), le contribuable (qui finance tous les sauvetages et subventions) et, de façon plus large, l’emploi ?
Car oui, tenter de sauver tous les emplois nuit à l’emploi. Rien de bien nouveau ; Frédéric Bastiat, économiste français, a expliqué il y a plusieurs siècles qu’il faut distinguer ce qui se voit de ce qui ne se voit pas. On voit les emplois sauvés, pas les emplois qui ne seront pas créés car sauver ces emplois est coûteux.
Il n’y a aucune contradiction entre emploi et pouvoir d’achat. Mais il faut que les entreprises et les hommes politiques changent de mentalité, et comprennent qu’ils ont le choix entre refuser la concurrence et accepter de s’y adapter.
Pour les Français, le choix est plus simple, même s’il est rarement présenté de cette façon. Ils ont le choix entre la prospérité que génèrent la liberté et la responsabilité, où les opportunités sont nombreuses et leur pouvoir d’achat est élevé, et un entre-deux mortifère où il faut favoriser le pouvoir d’achat, mais pas trop, pour favoriser l’emploi, mais pas trop.
À eux de choisir entre le cercle vicieux où les conduit une incompréhension de l’économie et le cercle vertueux de la croissance saine d’une économie libre. Le choix est-il vraiment si difficile ?
- Il est utile de mentionner, à leur décharge, que les dirigeants n’étaient pas les mêmes à l’époque. ↩
L’A.I est à notre porte !
Imaginons que demain, les hommes, le travail, la politique, Baptiste, moi, soyons remplacés par des super calculateurs.
Imaginons un ordinateur de bourse qui ne se trompe pas.
Un homme politique qui enfin est capable de calculer et de faire des vraies projections pour le futur.
Dans ce contexte, la liberté disparaît. Le résultat, lui est en revanche PARFAIT !
Goûtons aux dernières joies de la critique des ces socialistes pathétiques. Profitons de notre vie et de notre liberté dés aujourd’hui. Demain, nous serons plus dépendant, non pas des pitoyables performances de l’Etat, mais plutôt dépendant des 3 lois de la robotique. Isaac, tu était un précurseur, un devin, mais tu avais oublié l’immense capacité des socialistes à stopper toute chance de progrès.
A propos d’intelligence artificielle je pense que l’on se fait beaucoup d’idées même dans les prises de décision puisqu’une décision a toujours une charge affective. Et si cette décision n’a pas cette charge affective l’IA serait capable de prendre la décision logique de tuer un humain en bonne santé afin d’en sauver 5 ayant besoin de nouveaux organes, qui un rein, un foie, un coeur, des poumons.
Le jour où une IA pourra comprendre ce qu’est une plaisanterie n’est pas arrivé, par exemple :
« Une souris et un éléphant marchent dans le désert, la souris marche dans l’ombre de l’éléphant. Au bout d’un moment la souris dit “quand tu veux on échange…”.
Si seulement les socialistes pouvaient vous lire en quittant leurs lunettes/filtres ideologiques.
Au sujet des chaussettes chinoises, l’influence de celles-ci n’est pas forcement si negatif en ce qui concerne la valeur ajoutee et l’argent genere sur le territoire Francais grace aux marges realisees sur le produit. Les commercants Francais, les importateurs et les detaillants, souvent « fabriquent » de l’argent avec les benefices realises. Je n’ai pas connaissance des marges Francaises dans le domaine de la vente de produits d’importation a faibles couts. Je sais qu’en Irlande et UK les marges sont colossales sur ces produits. C’est un petit peu un probleme pour les gens comme moi qui fabriquent des produits ici, mais ce n’en est pas forcement un pour l’economie puisque pour faire simple et donner un exemple precis, j’ai un client qui achete des montres fantaisies en provenance de Chine pour 1,00 euro et les revend 500 euros. Chaque fois qu’il vend une montre il « fabrique » 4,00 euros qui sont ensuite redepenses en Irlande. Je pense donc que cela, pour finir, a un effet plutot positif pour l’economie. D’un autre cote, pour equilibrer cette situation dans le domaine de l’importation de produits de basse technologie, les Irlandais continuent d’attirer, grace a une fiscalite attrayante, particulierement a l’exportation, de tres grandes societes multinationales dans le domaine des technologies de pointe. IT et Pharmaceutiques principalement mais aussi textiles de pointe, etc… Tout le contraire de ce que fait Monsieur Holland. Cela fait d’ailleurs deja quelques annees que la France essaie de faire pression a travers Bruxelles pour que cessent ces exceptions fiscales en Europe. Il aurait pu au contraire en tirer des enseignements utiles, a traduire quelque peu pour la France bien entendu, mais ce n’est pas bien dans sa personnalite.
Ajoutons a votre commentaire l’impact TVA, c’est à dire Taxe sur la Valeur AJOUTEE.
En ajoutant 4 euros, c’est sur ces 4 euros que le gouvernement prélève sa dîme.
Si choisissant d’acheter local (et subventionné) le vendeur réduit sa valeur ajoutée à 2 euros, le même gouvernement se retrouve avec moitié moins de recettes et une subvention dûe.
Ils ont vraiment besoin d’enlever le filtre idéologique…
Le service rendu n’est pas plus grand, donc la richesse créée non plus. Il y a augmentation du prix (du service rendu par le commerçant, pas de la chaussette) sans augmentation de la valeur.
En tant qu’artisan, je me suis vite rendu compte que je devais (comme mes confrères) faire un maximum d’immobilisations financières, changeant de véhicule, d’ordinateur, de tout ce qui peut venir en déduction du BIC (bénéfice industriel & commercial).
Faute de quoi je grimpais, hardi petit, dans la tranche supérieure d’imposition sur le revenu.
C’est le système, et il est tordu.
Il s’applique aussi au particulier à qui on a distribué (sur l’argent de nos impôts) toutes ces incitations à acheter des panneaux photovoltaïques, « primes à la casse » et autres fariboles de ces dernières années.
Pourquoi ce gaspillage ? Réfléchissez et vous verrez où ceci est particulièrement tordu : ces achats superflus ne servent en fait qu’à une chose : faire mousser la mayonnaise du PIB. Ce qui permet à nos Zénarques de relativiser la dette nationale et de continuer à creuser ce gouffre tant que ça peut.
Une des phrases les plus lucides que j’ai lu recemment au sujet de la dette etait une definition proposee sur Contrepoints et qui disait : « La dette c’est la difference entre la croissance economique prevue par les politiciens et la realite economique toute crue ».
Il serait sans doute sain d’ajouter a notre constitution une clause qui interdise a tout politicien de contracter une dette pour une duree superieure a son mandat. En effet, depuis la chute de la monarchie, les politiciens n’honorent plus les dettes qu’ils ont contracte pendant l’excercice de leurs fonctions. Ni leur famille, encore moins leur famille politique. Le politicien qui hypotheque aujourd’hui le pays s’en fout puisqu’il sera confortablement a la retraite a Mougins alors que la dette du pays – qu’il n’a pas construite seul mais avec l’aide des precedents irresponsables – elle, sera toujours la.
Les dettes comme le socialisme devraient être simplement Interdits.
Exact, les subventions sont déduites du PIB mais pas les valeurs ajoutées qui, sans ces subventions, n’auraient pas été créées.
Désolé de le dire comme ça, mais je ne suis pas sût que vous ayez bien compris notre système d’impôt sur le revenu. Pour avoir évoqué la chose avec mon entourage, je crois pouvoir dire que vous n’êtes pas un cas unique. Je me permets donc quelques explications.
Pour prendre un exemple simple, supposons qu’il y ait 3 tranches d’impôt sur le revenu, la première de 0 à 10000€ taxée à 0% (on considère que c’est le minimum vital, auquel on ne doit pas toucher), la seconde de 100001€ à 30000€, taxée à 10% (elle est moins nécessaire que la précédente, on peut la taxer modérément), et la dernière à partir de 300001€, taxée à 50% (c’est les riches, on peut y aller!).
Vous gagnez 100000€ (ou moins) : vous ne payez rien.
Vous gagnez 200000€: vous ne payez rien sur les 10000 premiers €, et 10% (20000 – 100000) = 100€ sur les 10000 suivants.
Vous gagnez 40000€: vous ne payez rien sur les 10000 premiers, 10% (30000 – 100000) = 200€ sur les 20000 suivants, et 50% ( 40000 – 30000) = 5000€, sur le reste, soit 5200€ au total.
Chaque fois, vous payez davantage.
Mais il vous reste 10000 dans le premier cas, 20000 – 100 = 19900 dans le second, et 40000 – 5200 = 34800 dans le dernier. Il vous reste donc aussi davantage chaque fois.
Mais, bien évidemment, vous pouvez estimer trop faible le gain après impôt d’un effort supplémentaire et vous abstenir. C’est peut-être ce que vous vouliez dire ?
Pour ce type d’article, peut-être conviendrait-il de d’abord rappeler, en bon site libéral, que l’emploi et le pouvoir d’achat ne devraient pas regarder les hommes politiques. Pour aller vite, ce ne sont pas à ces derniers de trouver un emploi « satisfaisant » pour chacun et un niveau de pouvoir d’achat « satisfaisant » pour chacun. Cette responsabilité est celle de chacun d’entre nous, en tant qu’individu agent économique. C’est peut-être parce que certains ne partagent pas cette opinion que la France connaît la situation économique qui est la sienne aujourd’hui ( http://studiahumana.com/pliki/wydania/In%20Praise%20of%20Passivity.pdf ).
N’oublions pas non plus c’est la souveraineté du consommateur qui compte, comme le pensait apparemment Frédéric Bastiat ( note de bas de page n° 1 de http://bastiat.org/fr/prix_absolus.html#footnoteref1 ) ou comme cette citation le dit bien : http://cafehayek.com/2014/06/quotation-of-the-day-1034.html .
En demandant d’acheter français l’état demande au consommateur de subventionner l’industrie à sa place puisqu’il ne peut plus le faire lui-même…. grâce en soit rendue à l’Europe.
Il y a une loi inique qui interdit l’appel au boycott. L’appel à acheter français c’est un appel au boycott des produits étrangers, nan ?
Une analyse remarquable, bravo ! !
C’est toujours un plaisir de vous lire !
Il y a encore des gens sains d’esprit dans ce pays !