Nicolas Sarkozy, ce problème français (Replay)

Les problèmes judiciaires de Nicolas Sarkozy avec la justice témoignent de la politisation grandissante de la société française.

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Nicolas Sarkozy à Davos (Crédits : World Economic Forum, licence CC-BY-NC-SA 2.0), via Flickr.

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Nicolas Sarkozy, ce problème français (Replay)

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 23 septembre 2014
- A +

Par Stéphane Montabert [*].

Nicolas Sarkozy (Crédits World Economic Forum licence Creative Commons)Aussi discret que pouvait être le personnage depuis sa défaite à la présidentielle contre François Hollande, il est revenu sous le feu des projecteurs au cours d’une opération médiatique parfaitement orchestrée, preuve d’une maîtrise étendue de sa communication et de son image, mais aussi de ses relais. Quel justiciable comme les autres a jamais eu accès à un tel accès en prime time pour un plaidoyer sans contradicteur ?

M. Sarkozy ne pouvait bien sûr se contenter de jouer sa partition sans se livrer à sa tactique favorite, la contre-attaque. La justice française – muette dans le spectacle – est ainsi devenue une marionnette inféodée au pouvoir socialiste, pourchassant un innocent avec la dernière mauvaise foi. Les gentils, les méchants, TF1 ne diffuse pas du prêt-à-penser que pendant les pauses publicitaires.

La réalité n’est évidemment pas aussi simple. Comme le relevèrent de nombreux Français, il faut un certain culot pour prétendre être innocent et pur lorsqu’on est poursuivi par une demi-douzaine de chefs d’accusation portant sur autant d’affaires différentes.

Pourtant, il faut aussi le reconnaître, l’acharnement judiciaire existe lui aussi.

On sait depuis plus d’un an que l’Élysée a mis en place un cabinet noir pour empêcher le retour politique de Nicolas Sarkozy. Une des deux juges d’instruction en charge de l’affaire est membre d’un syndicat fortement engagé à gauche. La garde des Sceaux Mme Taubira a montré par une incroyable gaffe que, non seulement elle ment effrontément (ce dont chacun se doutait depuis longtemps), mais aussi que le gouvernement suit de près les soucis judiciaires de l’ancien président.

Que lui est-il reproché ? Sur le dernier dossier en date, un mélange de soupçons fort peu étayés :

Les policiers cherchent à prouver que Nicolas Sarkozy aurait tenté d’obtenir des informations à propos de la décision que s’apprêtait à prendre la Cour de cassation sur le sort de ses agendas saisis dans le cadre de l’affaire Bettencourt.

Pour y parvenir, il aurait proposé un poste à Monaco à Gilbert Azibert, avocat général à la Cour de cassation, affirme-t-on. Problème, aucune parole ne le prouve de façon claire ; le poste en question n’a de loin rien de prestigieux ; l’homme ne l’a de toute façon pas obtenu ; enfin, ces conversations compromettantes n’ont été arrachées qu’après de longs mois d’écoute « à filet dérivant » entre un avocat et son client, au mépris du secret professionnel et des besoins de l’enquête pour laquelle elles avaient été réclamées en premier lieu…

On ne peut s’empêcher de penser que Nicolas Sarkozy a été mis sur écoute sur un prétexte, et gardé sous ce régime jusqu’à ce que l’on trouve quelque chose à se mettre sous la dent.

L’ancien président de la République n’est pas blanc comme neige pour autant. Slate fait l’inventaire des dossiers de Sarkozy, et celui pour lequel il a été placé en garde à vue n’est ni le plus grave ni le plus solide. De nouvelles affaires pourraient encore s’ajouter à la longue liste, notamment sa responsabilité dans l’affaire des fausses factures entre l’UMP et Bygmalion pour le financement de sa campagne de 2012, où il paraît impensable qu’il n’ait été au courant de rien. Et pourquoi quelqu’un qui se prétend innocent de tout a-t-il besoin d’acquérir un second téléphone sous une fausse identité ?

Si Nicolas Sarkozy a des raisons personnelles d’être furieux, c’est avant tout pour des questions de calendrier. Envisageant vraisemblablement son retour officiel à la rentrée, il aurait eu alors beau jeu de dénoncer les accusations le visant comme autant de tentatives d’obstruction lancées par François Hollande pour se prémunir contre lui en 2017. Mais en imposant leur agenda à Nicolas Sarkozy, les juges d’instruction l’ont pris de vitesse. L’actualité judiciaire l’a rattrapé dans sa retraite. Cela colorera d’une tout autre manière son avenir politique, où son retour est désormais perçu comme une fuite en avant à la Berlusconi pour espérer échapper à ses déboires judiciaires.

Entre des enquêtes trop liées au pouvoir socialiste et un politicien surjouant l’indignation, la confusion règne. Les socialistes sont empêtrés dans le discours sur l’indépendance de la magistrature alors que tout prouve le contraire. L’UMP hésite à soutenir un candidat gênant, alors que tant d’ambitions se dévoilent pour 2017. En dépit de tout, les Français sont invités à renouveler leur confiance en leur classe politique puisque la thèse du « tous pourris » fait le jeu du Front national.

Des sondages au lendemain de sa prestation montrent que les Français sont très partagés. 47 % se disent convaincus de son innocence, 49 % de sa culpabilité : l’objectif de semer la confusion est donc atteint. Et si 69 % des Français estiment qu’il n’y a pas eu d’acharnement judiciaire, 33 % ne le jugent pas honnête.

Mais quelle importance devrait avoir l’opinion des Français dans une instruction judiciaire ? La culpabilité ne doit pas dépendre de la popularité. En prenant les Français à témoin sur ses déboires personnels, Nicolas Sarkozy a détruit les derniers restes d’honorabilité dont pouvait encore disposer les magistrats. C’est la tactique de la terre brûlée. Qu’il finisse condamné ou non, la crédibilité des juges est en miettes : le grand public ne verra plus que des desseins politiques à la moindre occasion. La justice a été traînée dans l’arène médiatico-politique et n’en sortira pas indemne.

En France, la politique semble phagocyter petit à petit tous les rouages de la société. Désormais, même les notions d’innocence et de culpabilité s’effacent devant les considérations partisanes et les sondages d’opinion.

[*] Cet article a été publié à l’origine le 6 juillet 2014 sur Contrepoints [NDLR]

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  • L’honorabilité des magistrats ?
    Lesquels, ceux du Mur des cons, ceux qui ont défilé dans les rues en appelant à faire battre Sarkozy ?
    La Justice n’a pas « été trainée », dans l’arène médiatico-politique, elle y est entrée de son plein gré via le SM.

  • Vous oubliez un détail important. On ne peut prédire de la culpabilité de NS sauf si on est au courant des détails des dossiers. Ni vous ni moi le sommes. Tout le monde suppute sur… sur rien. Ce n’est pas de l’information, c’est de la diffamation. En apparence, tous ces dossiers se tiennent et ne tiennent pas à grand chose. D’autant que certains sont basés sur des écoutes diligentées et illégales après une plainte pour financement libyen basées sur un faux… Drôles de méthodes de justice ! On se croirait vraiment dans une chasse menée par une meute qui a cru longtemps que les fausses preuves et le cabinet noir de l’Elysée suffiraient à occire la bête.

    Vous oubliez un dernier détail, la France est un régime bananier : la justice n’en est pas une. La Fontaine en a fait une fable : « Les animaux malades de la peste ». Ce n’est pas très nouveau en France. On a déjà eu Outreau… Personne ne souhaite ici être jugé. Même les innocents ont peur, car nous avons de toute évidence une part de cette justice qui est une justice politique, idéologique, très nettement ancrée à gauche et à l’extrême gauche. C’est une justice de classe qui innocentera un chanteur assassin d’extrême gauche (parce qu’il est une victime, logique, il est de gauche) et qui mettra les fers rouges à un innocent de droite (simplement parce qu’il est de droite).

    NS dit qu’il croit en la justice française. Pas moi.

    Au passage, on oublie les affaires très sérieuses qui aurait dû ébranler le pouvoir socialiste au lieu de ce très épais nuage de fumée qui tient lieu de vérité médiatique – non judiciaire, car pour l’instant aucune condamnation n’a été prononcée -. Hollande qui a fait une fausse déclaration de patrimoine en entrant à l’Elysée (la maison de Mougins a été démontrée sous estimée de plusieurs centaines de milliers d’Euros par des agents immobiliers du lieu -> invalidation de l’élection de Hollande). L’affaire Tristane Banon qui aurait dû voir Hollande qualifié dans l’affaire comme complice ou témoin, en tant que « non assistance à personne en danger » ou « protection de malfaiteur ou de violeur » quand il était premier secrétaire du PS…

    Je doute que NS ne soit un jour condamné, ces mises en examen sonnent vraiment comme des coquilles vides… D’autant que la chronologie de celles-ci permettent de penser que le calendrier va nous emmener jusqu’en 2017… Comme par hasard !

  • Et pourquoi quelqu’un qui se prétend innocent de tout a-t-il besoin d’acquérir un second téléphone sous une fausse identité ?
    C’est une question qui ridiculise l’ensemble du texte.

    L’écoute est une agression de l’individu dans sa vie intime. Il est tout a fait normal de défendre son intimité relationnelle et sa liberté sociale par l’utilisation d’un portable anonyme.

    C’est au contraire une bonne chose que l’institution judiciaire apparaisse telle qu’elle est. Une succursale de gauchistes enragés, qui remet en cause l’enseignement politisé de l’école de la magistrature.

  • Monsieur Montabert, vous qui êtes naturalisé Suisse, vous savez certainement qu’en Suisse personne ne parle, et qu’il y est impossible de dénoncer les dysfonctionnements de l’administration sous peine de se retrouver auditionné par la justice pour « calomnie et accessoirement diffamation ».
    Les affaires contre Sarkozy ont le mérite de voir le jour, même si elles sont peu étayées, alors qu’une affaire en béton armé contre un fonctionnaire suisse ne fera jamais une ligne dans les journaux de ce beau pays.
    Ainsi, devant le juge, vous êtes obligé de vous incliner car tout le monde a peur de parler, et personne ne témoigne, même pour dire la plus simple des vérités. C’est paradoxal, plus les gens sont en sécurité et plus ils ont peur de la vérité.
    En cela, le système Suisse dysfonctionne profondément. Les enquêtes internes ne sont pas lancées, et tout le monde se protège devant « l’atteinte à l’honneur ».
    Les affaires graves sont traitées en interne, et ne sont que rarement dévoilées au grand jour.
    Même si je ne suis pas en accord avec le sort de Sarkozy, il me semble que la France a de quoi donner des leçons à la Suisse en matière de justice.

    • Jean-Pierre Papin déclarait aussi dans le même registre sur Le Figaro cet été qu’il avait été très heureux au Bayern pendant sa carrière (salaire, méthode, encadrement, équipements, le top mondial disait-il…), mais qu’il avait été effaré par un détail sociologique typiquement allemand (Suisse allemand par extension) comparativement à l’omerta marseillaise (typiquement méditerranéenne) : en Bavière, tout le monde dénonce tout le monde à la police, pour un chien qui aboie, pour une tondeuse qui fait trop de bruit, pour une personne qui fait un bain de soleil sur sa pelouse, pour une voiture qui passe au feu rouge… J’ai moi-même fait l’expérience à Bonn un dimanche après midi, à l’époque où l’Allemagne n’était pas encore réunifiée (Bonn était alors la capitale fédérale). Notre ami allemand, Werner, était au volant. Personne sur une une immense place au centre de la capitale… Quand je dis personne, je dis personne ; il faut avoir connu Bonn en cette période, qui n’était qu’une capitale administrative, sans vie, sans culture, comme la City à Londres un dimanche après-midi… Bref, le feu rouge met 5 à 10 bonnes minutes à passer au vert… Personne sur la place, personne… Werner n’est pas passé au feu rouge, malgré les exhortations des français dans la voiture…

      J’ai mis longtemps à comprendre. Impossible en France !
      Notre pays a des défauts… et des qualités.
      Vivre en Suisse, c’est paradisiaque une semaine à 15 jours par an, pour le ski.
      Les français s’y emmerdent tellement à l’année qu’ils n’y vivent que la moitié de l’année plus 1 jour. Je n’ai pas encore compris pourquoi…

  • un individu qui est capable de détourner le vote des français ( en 2005 ) pour arranger ses petires affaires est capable de tout et surtout de mentir comme un arracheur de dents ; le mensonge , chez les politiques , c’est inné ;

  • Il serait fâcheux qu’un ex-président de la république n’ai pas dans son entourage, des personnes susceptibles de l' »aider ». L’extravagance de certaines poursuites judiciaires allant de pair avec le « laisser aller » de tant d’autres, montre une déliquescence de la morale, c’est à dire l’absence d’exemplarité et de réciprocité dans ce qui ce qui peut opposer les hommes entre eux et entre les institutions. Il suffit de considérer sur un plan de principe, la situation des sans papiers de Calais toléré si ce n’est encouragé, ou le délai de jugements pour une personne responsable de violences volontaires, ou l’assurance loyer impayé ( c’est à dire que la partie respectant sa part contractuel doit s’assurer contre le fait que l’autre partie de la respecte pas). Toute personne qui subit la rigueur expéditive de la loi à son encontre et qui peut observer la banalisation de la légèreté à l’endroit des autres, ne peut qu’être excédée par ces gesticulations judiciaires tatillonnes, dans le laisser aller général. Il devrait exister un délit d’abus de biens publiques pour faire rembourser des sommes investis à tort et à travers dans des entreprises. Madame Royal et la société Mia, si cela n’ajoutait des lois à d’autres. « Un pays qui a 100.000 lois n’a pas de lois ». Bref qu’un personnage important cherche à tout savoir sur ce qui le concerne est la marque de son importance qui entraîne chez les collaborateurs de cet homme le désir d’utiliser cette importance. Le népotisme et pantouflage de bon nombre de nos élus me semble plus exemplaire que celui de cet ex-président

  • « La justice française est ainsi devenue une marionnette inféodée au pouvoir socialiste, pourchassant un innocent avec la dernière mauvaise foi. » Le contexte de cette phrase laisse penser que l’auteur ne le pense pas tout à fait. Il a tort. Il n’ y a que deux petites corrections à faire :
    Tout d’abord, la justice française n’est pas « devenue » cela, elle l’est par constitution (voir l’idéologie dominante à l’école de la magistrature, et son panel d’enseignants).
    Ensuite, et surtout, ce n’est pas au pouvoir socialiste qu’elle est inféodée, mais à tous les pouvoirs, selon le moment. La période de l’occupation est à cet égard éclairante ; il suffit de poser aux historiens une simple question : y-a-t-il trace d’une résistance dans la justice entre 40 et 45 ? On en trouve à la SNCF, dans l’armée, l’enseignement, la police même (en 44 surtout mais bon, ne faisons pas la fine bouche…). Dans la justice, calme plat.
    Quant aux procédures en cours contre Sarkozy, même si l’une ou l’autre s’avérait justifiée (jusqu’à présent elles ont explosé l’une après l’autre en petits pschitts, la dernière pas plus tard qu’aujourd’hui), les défenseurs de la liberté et du droit que nous sommes sur ce site devraient faire passer le droit et la liberté avant les légitimes griefs qu’on peut avoir envers l’ex-président, car un principe fondamental du droit a été violé avec une impudence que même les dictatures les plus noires n’ont pas osé avoir officiellement (elles le faisaient, mais sans le claironner comme un juge français) : le principe du secret des échanges entre un accusé et son avocat.
    Ces écoutes sont illégitimes non en droit français mais en droit universel. Ce secret est le socle même de la notion de procès équitable, et des droits de la défense. Il doit être absolu, sans la plus petite exception, sinon il disparaît en entier, et avec lui les notions mêmes de défense et de justice. Une telle transgression est incroyable dans un état de droit, ou plutôt c’est la preuve que ce n’est déjà plus un état de droit.

    Et à partir du moment où ce principe est violé, je refuse en ce qui me concerne d’accorder une milliseconde d’attention aux procureurs, médiatiques autant que judiciaires ; rien de ce qu’ils pourront dire, ou prétendre démontrer, n’a pour moi la moindre valeur, parce que c’est leur valeur à eux qui devient nulle.
    On ne saura peut-être jamais si Sarkozy est innocent ou coupable de ce dont on l’accuse ; mais ce dont on est sûr dès maintenant, c’est que ses accusateurs ne sont pas dignes, ni de respect, ni d’attention. Passons donc à autre chose.

    • « Et à partir du moment où ce principe est violé, je refuse en ce qui me concerne d’accorder une milliseconde d’attention aux procureurs, médiatiques autant que judiciaires ; rien de ce qu’ils pourront dire, ou prétendre démontrer, n’a pour moi la moindre valeur, parce que c’est leur valeur à eux qui devient nulle. »

      +1

      Procureur médiatique, Montabert récidive.

    • Voilà une démonstration qu se passe de commentaires et renvoie aux égouts de la justice politico-médiatique ceux qui ont franchi le rubicon. Par ailleurs, pour tous ceux qui suivent l’affaire de près dans tous ces détails et qui ont lu quelques minutes des procès de Beria, on voit sur quelles références juridiques se basent non seulement les hommes politiques au pouvoir aujourd’hui, Élisée (cabinet noir et manipulation illégale et anticonstitutionnelle d’archives présidentielles), Matignon (coordination de l’abject et discours mensongers), Intérieur (bras armé), justice (de classe et politique matinée méthodes fascistes d’Amérique centrale et caribéenne, la machette et le pistolet sur la tempe en moins, ils en sont si contrits), sur ces méthodes odieuses qui fondaient la justice d’exception sous le régime stalinien et d’Allemagne de l’Est, méthode généraliste des pouvoirs socialistes par ailleurs, partout sur la planète.

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