Social-libéralisme : l’expérience du blairisme

Que peut-on apprendre des Mémoires de l’ancien premier ministre britannique sur le sujet ?

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0
tony blair credits center for american progress (licence creative commons)

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Social-libéralisme : l’expérience du blairisme

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 9 octobre 2014
- A +

Par Philippe Robert.

tony blair credits center for american progress (licence creative commons)

Pour ne pas mourir idiot, j’ai pensé que cela valait la peine, en matière de socialisme scientifique, d’aller voir de plus près de quoi il retournait chez nos voisins immédiats. Car en France, malgré quelques rares et incertaines velléités de social-libéralisme (sic !), tout reste à faire pour passer de l’ombre à la lumière, suivez mon regard.

Ainsi, pour alimenter ma réflexion sur ce sujet très contemporain, m’est-il apparu des plus avantageux de faire mon miel des Mémoires de Tony Blair vers lequel nombre de nos socialistes les plus lucides, à la recherche d’un socialisme plus pragmatique que celui prôné par Martine Aubry & Co, regardent avec une certaine appétence mais en catimini.

Si, dès 1959, les sociaux-démocrates allemands ont été précurseurs en abandonnant les idées d’inspiration marxiste, il a fallu attendre 1995 au Royaume-Uni, suivi de l’entrée de Tony Blair au 10 Downing Street en 1997, pour tordre le coup à la clause IV prévoyant « la propriété commune des moyens de production, de distribution et d’échanges ».

« Alors que nous approchions du XXIe siècle, cinq ans après la chute du Mur de Berlin, tandis que la Chine communiste adoptait l’économie de marché socialiste, si le parti travailliste britannique affirmait qu’il croyait à la propriété de l’État des moyens de production, de distribution et d’échange, cela revenait à dire que nous n’étions pas sérieux. Une telle proposition confirmerait les pires craintes de l’opinion ».

Où en est la France ? Hélas, toujours au même point puisqu’à l’inverse des Allemands et des Britanniques qui ont officiellement rejeté l’idéologie collectiviste en tant que telle, les lois d’une grande rigidité votées par un Parlement français majoritairement de gauche sont frappées au coin d’un progressisme aujourd’hui totalement passé de mode.

Laissons donc aux socialistes l’illusion grandiose d’avoir mieux compris que quiconque de quelle façon, grâce au socialisme scientifique, l’humanité pouvait légitimement aspirer au bonheur grâce à ce que le grand économiste libéral Friedrich Hayek, prix Nobel d’économie 1974, a nommé à bon droit la présomption fatale ou les erreurs du socialisme.

Cependant, n’étant pas sectaires, laissons au réformateur éclairé mais toujours socialiste Tony Blair le soin de définir cette fameuse présomption fatale qui, selon Hayek, est à la source des erreurs qui rendent le socialisme haïssable dans sa soif inextinguible d’instaurer une « justice sociale » dont les applications successives se sont toujours révélées systématiquement liberticides :

« Le problème fondamental du Labour de l’après-guerre réside en ce qu’il avait perdu le contact avec ce qui était son objectif originel. Ce but, qui lui tenait à cœur, concernait l’individu. Un État plus puissant, des syndicats, des mesures sociales, une convention collective du travail, tout cela n’avait qu’une visée : donner une chance à l’individu, lui donner une chance d’aller au-delà des limites arbitrairement imposées par la pauvreté, le manque d’instruction, une mauvaise santé, l’allocation logement ou l’aide sociale, il ne s’agissait pas de mesures générales, elles concernaient l’individu. Elles répercutaient et captaient quelque chose de profond dans la nature humaine : le désir d’être libre, d’être le meilleur possible ».

Le désir d’être libre, d’être le meilleur possible, certes, mais sous l’étouffante autorité de l’État tout-puissant agissant en lieu et place de l’individu auquel il faut à tout prix, conformément au dogme socialiste, rogner les ailes de sa liberté propre pour mieux l’inscrire dans le projet d’un bonheur collectif toujours repoussé au fur et à mesure de son déploiement.

En France, nous rapporte Manuel Valls1Jean Jaurès n’a-t-il pas écrit dans Socialisme et Liberté : « Le socialisme est l’affirmation suprême du droit individuel. Rien n’est au-dessus de l’individu. Mais pour que chaque homme soit autonome pleinement, il faut assurer à tous les moyens de liberté et d’action. » Et il ajoutait cette formule que certains, selon Valls, feraient bien de méditer : « Le socialisme est l’individualisme logique et complet ». Scientifique, quoi !

Mais je ne voudrais pas terminer mon propos sur une note trop négative que ne mérite d’ailleurs absolument pas l’honnête Tony Blair, cet homme d’État de gauche qui s’est montré tout à fait capable, fût-ce même par calcul politique bien naturel à son haut niveau de décideur avisé, de rendre à César ce qui appartient à César, chapeau l’artiste :

« Bien que ce fût un sujet de désapprobation et de discorde au sein du parti, j’ai même décidé de soutenir les changements que Margaret Thatcher avait apportés. Je savais que la crédibilité de tout ce que voulait entreprendre le New Labour reposait sur l’approbation d’une partie inéluctable de ce qu’elle avait voulu réaliser dans les années 80 (…) La façon dont elle avait opéré était souvent très idéologique, parfois sans nécessité, mais cela ne changeait rien aux faits : la Grande-Bretagne avait besoin des réformes économiques et sociales de l’époque Thatcher ».

Sur le web 

  1. Manuel Valls, Pouvoir, éditions Stock, 2010
Voir les commentaires (2)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (2)
  • On a persuadé les « pauvres »(cad les moins riches),et on tente de persuader tout le monde, c’est un fond de propagande, que la pauvreté serait une sorte d’erreur de la nature, Tellement anormale qu’en fait,elle devait sûrement être la conséquence d’une mauvaise organisation sociale. Que,naturellement, tous les êtres, devraient posséder les mêmes biens, bénéficier des mêmes faveurs du sort, avoir accès aux mêmes possibilités,aux mêmes pouvoir, la définition de la liberté dans l’égalité étant à ce prix,à ce niveau.

    En quelque sorte, dans les inconscients, l’inconscient collectif, sommeille,mais que d’un oeil, l’idée (vite faite idéologie), de la fameuse  » PRISE AU TAS « , révélée et promise par la Nature elle-même, en l’occurrence, le désir’ (wishfullthinking) , l’illusion vitale !(et fatale!,nécessaire!). Tout à la fois,comme pour le sein de la nounou !)

    Mais c’est là, de la part du peuple, une manifestation de nostalgie
    Laquelle oublie que,parmi toutes nos illusions-revendications,figure la liberté (au-delà de la tétée) de faire et donc d’inventer,et qu’elle est liée à l’acceptation de l’individualité (contre laquelle on va ensuite protester et faire la morale!) et que cette liberté, c’est désormais, dès l’âge adulte, celle des individus, et non plus celle de la Nature nourricière.

    Ce dont découle que la richesse ne peut être universelle et égalitaire,puisqu’elle n’est pas une donnée première, mais effet de l’action humaine individuelle ! Et sera toujours une exception !

    Et c’est la pauvreté,effet de la rareté, qui est la norme première et naturelle, et non pas effet d’un vol.

    L’homme,c’est bien connu,nait sans cheveux,sans dents,et sans illusions,mais aussi sans rien, et meurt de même !
    Il reste, l’entre-deux, l’existence, le temps de l’action, la seule égalité !

  • « Car en France, malgré quelques rares et incertaines velléités de social-libéralisme (sic !), tout reste à faire pour passer de l’ombre à la lumière » :

    « Manuel Valls » vient de rappeler une nouvelle que c’est là « son intention ». Et justement parce que « Aubry et Co l’en empêcheront TOUJOURS », plutôt que d’attendre sur une victoire sa motion à un congrès qu’il n’obtiendra JAMAIS, il ferait mieux de « plaquer ce parti et de créer le sien propre » (avec les adhérents de base PS qui l’approuvent et « d’autres qu’il trouverait sans difficulté à l’extérieur » ! C’est regrettable et surtout « incompréhensible » qu’il « semble totalement aveugle sur ce point », ce alors que « Jean-Marie Bockel issu de ce même PS, l’a compris, lui, depuis longtemps maintenant » quand il l’a quitté pour créer La Gauche Moderne !

    « Les lois d’une grande rigidité votées par un Parlement français majoritairement de gauche sont frappées au coin d’un PROGRESSISME aujourd’hui totalement passé de mode » :

    NON pitié !! Le problème du socialisme n’est pas le ‘progressisme’ mais uniquement le COLLECTIVISME. De « progressisme », nous en « manquons justement flagramment », la France est un pays « réactionnaire » et « en la matière aussi elle fait contraste avec le reste du monde » ! Le libéralisme n’a « rien à voir avec le conservatisme », il est même « théoriquement à l’opposé » et justement le seul problème de Margaret Thatcher est qu’elle n’était « pas une vraie libérale » parce qu’elle venait du Parti Conservateur ! Les « vrais » libéraux britannique sont « ceux qui sont au pouvoir aujourd’hui : les Lib’Dems ( bon sang on ne peut pas dire que Cameron soit plus tendre que Thatcher sur le plan économique !….).

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Par Sylvain Fontan.

[caption id="attachment_127195" align="alignleft" width="235"] Milton Friedman (Crédits : The Friedman Foundation for Educational Choice, licence Creative Commons)[/caption]

L'interview qui suit est donnée par Milton Friedman, économiste libéral, prix Nobel d'économie 1976 et chef de file de l'École monétariste. L'entretien date de 2003, il est dirigé par l'économiste français Henri Lepage.

Depuis cette interview, Milton Friedman est décédé. Âgé alors de plus de 90 ans, lors de cet échange il dresse so... Poursuivre la lecture

En 1966, les Beatles ont sorti une chanson intitulée « Taxman », qui commence par ces lignes :

Let me tell you how it will be That’s one for you, 19 for me… Should 5 percent appear too small, Be thankful I don’t take it all. Laisse-moi te dire comment ça va se passer Ça fait un pour toi, dix-neuf pour moi Si cinq pour cent semblent trop peu Remerciez moi de ne pas tout prendre

 

Les paroles ont été écrites pour protester contre la fiscalité excessive au Royaume-Uni, qui, jusque dans les années 1970, revenait à exprop... Poursuivre la lecture

Alors que la liberté d’expression et plus généralement les libertés civiles sont plébiscitées par les Français, le libéralisme économique, quant à lui, continue de susciter la suspicion, voire le rejet chez la plupart des gens, y compris à droite.

Ce terme est en effet connecté à des questions difficiles comme la mondialisation, le profit, les délocalisations, la loi du plus fort, etc., et génère des sentiments négatifs comme la peur ou l’envie.

 

Pour pallier les défauts d’un libéralisme « débridé », l’État apparaît... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles