Publiée concomitamment à l’examen à l’Assemblée nationale du projet de loi de finances pour 2015, qui prévoit une baisse des dotations de l’État vers les collectivités territoriales de 3,7 milliards d’euros l’an prochain, la deuxième édition du rapport de la Cour des comptes sur les finances publiques locales est alarmante.
Par Anthony Escurat.
Les rapports de la Cour des comptes se succèdent et se ressemblent. Une fois de plus, au cours de l’année 2013, les édiles des assemblées locales ont tiré sur la corde budgétaire, creusant, nolens volens, les déficits et l’endettement. Bien qu’habillés d’un langage diplomatique dont les magistrats de la rue Cambon ont le secret, les indicateurs révélés par leur rapport constituent ni plus ni moins une bombe à destination des exécutifs locaux. Étrillant une gestion hasardeuse, voire irresponsable.
Certes, les collectivités territoriales représentent 70% des investissements publics. Certes, leurs déficits et leur endettement ne sont pas du même acabit que ceux accusés par l’État et la sécurité sociale, représentant respectivement 3% de l’ensemble des déficits publics et 9,5% de la dette publique au sens de Maastricht (correspondant à la somme des dettes de l’État, des organismes sociaux et des collectivités territoriales).
Néanmoins, dans un contexte d’atonie économique et de raréfaction des deniers publics, la dynamique de leur évolution est inquiétante et force l’indignation.
En effet, les dépenses globales des administrations locales ont progressé en 2013 de 3,2% par rapport à 2012 tandis que les recettes n’ont crû, quant à elles, que de 1,1%. En d’autres termes, les dépenses des collectivités ont augmenté plus rapidement que leurs recettes. Dans ce sillage, les dépenses de personnel ont enregistré une hausse de 3,1% sur le même exercice, une courbe ascendante supérieure à celle de l’État.
Résultat, passant de 3,7 milliards d’euros en 2012 à 9,2 milliards d’euros en 2013, le déficit des communes, départements et régions réunis a plus que doublé en un an. Du fait de ce train de vie peu rigoureux, le solde des collectivités territoriales s’est in fine creusé à hauteur de 0,4% du PIB l’an dernier. Une gabegie coupable, selon les magistrats financiers, du « tiers du retard pris dans la réduction du déficit public ».
Des dépenses de fonctionnement pointées du doigt
En 2012, les dépenses publiques hexagonales ont représenté 56,6% du PIB, soit le deuxième taux le plus élevé de la zone OCDE après le Danemark. Dans la ventilation de ces dépenses, la part des collectivités locales, bien qu’inférieure à celles de l’État et des organismes sociaux, n’a cessé de croître.
Représentant un peu plus de 7% du PIB en 1978, les dépenses des collectivités territoriales pèsent aujourd’hui – avec 12% – pour un cinquième du total imputable, selon Pierre-François Gouiffès, à « une forte croissance annuelle en volume sur les vingt dernières années ». Au total, le poids des collectivités dans la dette nationale a progressé de 67% en dix ans.
D’après les sages de la rue Cambon, les deux vagues de transferts de compétences de l’État vers les collectivités, opérées en 1982 et en 2003, ne suffisent pas à expliquer une telle dynamique. La Cour des comptes pointant du doigt des dépenses de fonctionnement – et notamment de personnel – surélevées, en inadéquation avec les nouvelles attributions reçues de l’État.
Autrement dit, c’est la gestion discrétionnaire des exécutifs locaux qui est directement visée par les magistrats ; ces derniers les estimant responsables pour 60% de cette progression, contre seulement 40% pour les transferts de compétences.
Les dépenses de frais de personnel sont, de surcroît, loin d’être marginales : représentant 25% des dépenses locales globales, elles ont progressé de 5,3% en douze ans et de 3,9% entre 2012 et 2011. Une dynamique haussière à laquelle ni l’État ni la sécurité sociale ne se sont assignés.
Une réforme territoriale en trompe-l’œil
Avec plus de 36 000 municipalités, 2 581 intercommunalités, 101 départements et 26 régions, la France est championne d’Europe du nombre de collectivités territoriales.
Par-delà ce maillage administratif unique sur le Vieux Continent, la clause générale de compétence constitue l’une des principales raisons de la fuite en avant budgétaire des collectivités. Dès lors, à la faveur de l’inflation des dépenses locales, la réforme territoriale engagée par le gouvernement se devait d’être à la hauteur des enjeux.
Le récent rapport de la Cour des comptes révèle en ce sens que les régions ont consacré en 2013 près de 21% de leurs dépenses à des compétences dont elles n’ont pas l’exclusivité ; des compétences partagées avec les départements, les intercommunalités et les communes, sources de doublons financiers et grevant les budgets locaux.
Supprimée un temps par la loi du 16 décembre 2010 puis réhabilitée par le gouvernement Ayrault, la clause générale de compétence est finalement abrogée par la réforme territoriale de Manuel Valls. La région est, à cette aune, consacrée dans son rôle de chef de file économique.
Cependant, ajoutant du flou à l’illisibilité, le gouvernement maintient des compétences partagées entre les acteurs locaux pour tout ce qui a trait au sport, à la culture, à la santé et au tourisme. Une suppression en trompe-l’œil de la clause générale de compétence !
Aussi, parce que les économies proviendront inéluctablement de la rationalisation du millefeuille administratif, le gouvernement avait annoncé au début de l’été, en parallèle de la réduction du nombre de régions, la mort des départements.
Au prix de tractations politiques et aux dépens du « big-bang territorial » annoncé par l’exécutif, ces derniers ont finalement ressuscité à l’automne puisque, d’après Manuel Valls, une cinquantaine de départements ruraux continueront à battre pavillon sur le territoire national ; passant de ce fait entre les gouttes de la réforme.
Une ineptie alors que le projet de loi n’entend pas fusionner les petites communes – comme le recommande l’OCDE – et que le développement des intercommunalités et des métropoles est consacré par le législateur. Les quinze milliards d’euros d’économies escomptés par André Vallini, secrétaire d’État à la Réforme territoriale, apparaissent dès lors au mieux comme un vœu pieux, au pire comme un mensonge.
L’orthodoxie doit remplacer la gabegie
Réagissant vivement au rapport de la Cour des comptes, l’association des maires de France (AMF) a dit assumer ses responsabilités ; le bloc communal agissant, selon elle, « sous le contrôle du seul suffrage universel, duquel procède toute légitimité ».
Dans un contexte de croissance nulle, de chômage de masse et de déficits abyssaux, le gouvernement procède actuellement – par le biais du Pacte de responsabilité et de solidarité – à un redressement de la trajectoire des finances publiques. Ce faisant, les collectivités locales ne peuvent s’exonérer d’une meilleure maîtrise de leurs dépenses et de leur endettement, et ce même sous l’onction démocratique.
La baisse des dotations de l’État vers les collectivités de 3,7 milliards d’euros par an sur la période 2015-2017 est un mal nécessaire. Le chiffon rouge du suffrage universel ne pouvant justifier plus longtemps une mauvaise gestion des deniers publics.
Dès lors, l’orientation actuelle de l’exécutif – qu’il convient de saluer – ne doit pas être sacrifiée sur l’autel de querelles politiciennes et de desseins politiques personnels. La France n’en a plus les moyens et les citoyens attendent autre chose de leurs responsables politiques. L’orthodoxie doit remplacer la gabegie, enfin !
Les petites communes sont des laisser pour compte mais sont gérées et il existe des communautés de commune d’où l’impôt sur l’intercommunalité. La mutualisation serait une bonne chose pour supprimer l’endettement.
Diminuer la dotation aux collectivités locales, elles adapterons leurs dépenses au produit de leur fiscalité locale. Les citoyens arbitrerons leur gestion.
« les citoyens arbitreront leur gestion »
Comment les citoyens vont ils arbitrer leur gestion, ils n’ont aucun pouvoir ?
Le vrai problème c’est le recrutement de foncsios titulaire.
C’est plein de petits arrangement entre amis, partis politique etc….
La loi du 12 mars 2012 ( http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000025489865&categorieLien=id) produite par Fillon et le nain a pour conséquence de titulariser énormément de contractuels. Ces chiffres sont invisibles car les gens sont déjà en poste. Ils deviennent titulaires. Ils n’apparaissent pas forcément dans les chiffres.
Mais le résultat sera là quand toutes ces nouvelles recrues vont voir leurs salaire augmenter avec le temps…. le cout salarial va devenir de plus en plus lourd…..
Tout cela reflète l’incapacité des élus à servir les intérêts à long terme de leurs administrés. Ils préfèrent faire du clientélisme en créant des emplois bidons ( on devrait les assimiler à des emplois fictifs) et ils tolèrent un taux d’absentéisme scandaleux.Ou bien ils pensent bien faire en faisant des travaux qui n’ont aucun retour sur investissement et ils sont d’une incompétence grave ou bien ils ne cherchent qu’à faire travailler les copains. La cour des comptes ne fait qu’effleurer le sujet car faire apparaître la vérité serait de la dynamite.
Espérons qu’un jour tous ces gens auront à rendre des comptes aux citoyens et que leurs acquis et leurs médailles seront réquisitionnés.
le vrai problème est l’information pour tous, la transparence pour la population.
J’ai du mal à comprendre les decisions prises au sein des petites communes pour le PLU. Évitez tous conflits fait partie de la démocrate
C’est vrai, les % de effectifs des collectifs des collectivités locales sont pléthoriques et en constante inflation. C’est vrai que le clientélisme, et le poids des lobbies pèsent très lourd. C’est vrai que les structures s’empilent et s’entrecroisent rendant les dossiers complexes et difficiles à gérer. Mais qui donc est à l’origine de ces maux ? Qui doit gérer au quotidien les injonctions contradictoires, les incohérences des politiques publiques sous tendues par de la basse démagogie, les conditions de travail indignes, le soupçon et le dénigrement du travail réalisé ? Qui se prévaut de sa qualité d’élu pour s’accorder des pouvoirs qu’il n’a pas en disant que la sanction véritable est celle des urnes alors que seules sont « montrées » les actions électoralement rentables même si elles sont globalement calamiteuses en matière de service public ? Être et rester fonctionnaire, c’est d’abord accepter de gérer la frustration de voir le gâchis d’énergie, d’intelligence et d’argent qui est le fruit de notre organisation politico administrative.
Les dépenses des collectivités territoriales sont la plupart du temps basées sur des justifications politiques et non économiques. Elles ne correspondent pas nécessairement à une demande réelle. Elles les financent avec des impôts qu’il a soutirés aux contribuables et aux entreprises. On enlève d’une main ce qu’on redonne de l’autre, en créant du gaspillage et des distorsions additionnelles en route. C’est pourquoi augmenter les activités des collectivités territoriales n’a pas pour effet de « soutenir l’économie », comme le répètent quotidiennement dans les médias les illettrés économiques, mais bien de la couler encore davantage.
L’intégration intercommunale qui ne diminue pas les impôts municipaux. Le transfert de compétences aurait dû, logiquement, se traduire par une diminution des taxes versées à la commune. Mais l’effet pervers de la multiplication des niveaux de collectivités se vérifie une fois de plus. En période de crise, particulièrement difficile pour les ménages, n’est-ce pas le moment :
· de réduire les dépenses des collectivités (notamment de fonctionnement),
· de clarifier le partage des compétences de chaque échelon,
· de supprimer les échelons inutiles,
· de redéfinir un « cœur de métier » pour les collectivités ?
Changer les méthodes de gestion. Dépenser mieux en dépensant moins. Faire passer l’intérêt général avant les intérêts particuliers. Chasser le gaspillage, le clientélisme et le saupoudrage. Réduire fortement le budget de la communication des voyages et autres festivités. Proposer, non pas une alternance mais une véritable alternative par une politique rigoureuse de réduction des emprunts et de la fiscalité.
La politique étant ce qu’elle est, les collectivités territoriales et ses apparatchiks ne vont évidemment pas suivre ces conseils et s’appuyer sur la logique économique, mais plutôt sur la rentabilité politique. Les élus doivent comprendre que cette pression fiscales ne peut plus continuer. Ce qui est fait est derrière nous, nous ne pouvons hélas revenir en arrière d’un coup de baguette magique. Mais pour l’avenir, ne pourrions nous pas admettre une fois pour toutes de réorienter la dépense publique dans le bon sens, c’est à dire en forte baisse ? L’Etat, les organismes sociaux et les collectivités en France dépensent plus que ce que produisent les entreprises françaises ! Formidable ? Ces questions sont largement tabous dans les media français soit du fait de leur complexité apparente, soit parce que l’esprit du temps interdit qu’on en discute a fond.
Oui Chris, il devient urgent de faire quelques choses de mieux pour faire vivre les communes pour l’intérêt de la population et non pour l’intérêt de quelques uns.
»
Changer les méthodes de gestion. Dépenser mieux en dépensant moins. Faire passer l’intérêt général avant les intérêts particuliers. »
On est d’accord sur toute la ligne. Sauf que pour moi l’intérêt général c’est la fiction, le prérequis intellectuel pour justifier l’état pléthorique.
A mon sens, l’intérêt général n’existe pas.
Quand on veut, on peut. Voir Robert Ménard à Béziers: baisse des impôts et discours au personnel communal au grand complet pour donner les nouvelles règles: plus de promotion automatique, contrôle de l’absentéisme, fonctionnement par objectifs etc…
Pas de réaction immédiate, mais après coup, beaucoup de fonctionnaires contents, car ceux qui abusent sont mal supportés par leurs collègues.
Dommage pour la démocratie et l’avenir de notre pays que de devoir compter sur des partis marginaux.
Mais les autres que font-ils ? La réponse est ce que dit l’article: que des dépenses de copinage.
Je croyais que la loi obligeait les collectivités a voter un budget a l’équilibre. Qui a autorisé cet endettement ?
A l’équilibre, emprunt compris à mon sens ?