Le pays part en Fraisse

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Le pays part en Fraisse

Publié le 7 novembre 2014
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Régulièrement en France, des paquets d’individus manifestent, plus ou moins bruyamment. Parfois, c’est organisé, et nombreux sont les vendeurs de merguez à y trouver leur compte. Parfois, c’est improvisé, plus ou moins spontané, affiché comme « populaire, citoyen & festif », et dans ces cas, ces réunions se terminent souvent par des affrontements avec les forces de l’ordre. Toujours, il y a arrestations. Et rarement, il y a un mort.

Egalité, Taxes, Bisous : République du Bisounoursland

Car en effet, la mort d’un individu lors de manifestations, mêmes violentes, est un fait très rare en France. Et histoire de fournir un peu de contexte, revenons sur les événements qui se sont emballés récemment autour du projet de barrage de Sivens. Celui-ci, placé sur une rivière locale, le Tescou, fait déjà débat depuis un moment. D’un côté, les autorités publiques (Conseil général du Tarn, l’Agence de l’eau Adour-Garonne), bien sûr épaulées par une de ces sociétés mixte dont la France a le sulfureux secret, la Compagnie d’aménagement des coteaux de Gascogne, le tout propulsé par des intérêts paysans bien compris, et de l’autre, une partie des riverains et des contribuables locaux ainsi que les inévitables écolos du cru. Les uns allant bon train pendant que les autres ne se sentaient pas assez consultés, des occupations plus ou moins sauvages des lieux et des manifestations furent rapidement organisées.

Le problème est qu’ici, dans le fond, la construction du barrage suit de façon presque rigoureuse tout ce qu’on peut reprocher à une décision étatique à peu près unilatérale, avec une étude d’impact payée par le commanditaire lui-même (fastoche), avec une passation de marché public dans le respect scrupuleux du capitalisme de connivence qu’on ne peut que dénoncer : transparence calculée (ou opacité choisie, disons), acteurs qui s’entendent comme larrons en foire pour que toutes les bonnes factures atterrissent dans les bonnes poches, c’est-à-dire dans le respect (minimal) des lois, certes, mais avec cette flexibilité morale et ces scrupules qui riment avec minuscule qu’on retrouve dans presque toutes les bidouilles étatiques sur capitaux publics. Autrement dit, il y a bien ici matière à protester.

Cependant, rapidement, la forme des protestations entraîne une petite crispation des autorités qui ont justement, ces dernières années, un problème croissant avec les expressions un peu trop vocales de désaccord avec la politique menée. Rapidement, la tension monte. Le dimanche 26 octobre, la manifestation prend une tournure nettement plus virile avec des échanges musclés de petits projectiles rigolos de part et d’autre : pif le cocktail Molotov, paf la fusée de détresse, pouf la grenade offensive, pof le militant tué. Oui, vous avez bien lu « cocktail Molotov, fusées, grenades ». Il y avait aussi mottes de terre et cailloux, mais c’est assez banal pour les oublier.

La mort du militant écologiste Rémi Fraisse tombe fort mal (un mort, de toute façon, tombe toujours mal). Un jeune (21 ans), un étudiant, un militant écolo pacifiste (et communiste, ne l’oublions pas), cela fait encore plus désordre : pour des politiciens au pouvoir officiellement à gauche, tous revendiqués du Camp du Bien, qui ont toujours joué sur leur immense compréhension du peuple, cela met plus que dans l’embarras, cela relève de la catastrophe (humaine probablement — les politiciens savent doser leur empathie, voyons — mais médiatique, sans aucun doute).

L’affaire, qui était locale, devient immédiatement nationale. Et comme, de surcroît, des clivages sont apparus depuis un moment au sein d’une majorité de plus en plus relative, c’est l’occasion pour certain-e-s d’une récupération parfaitement dénuée de la moindre honte. En politique politicienne de bas étage, rien de tel qu’appuyer là où ça fait mal. Cécile Duflot, qui n’aurait jamais su orthographier Sivens il y a encore 15 jours, se dresse à l’Assemblée comme un seul homme pour sottement demander une minute de silence. Sottement, parce qu’institutionnellement, les minutes de silence, à l’Assemblée, sont comptées : déjà que, toute honte bue, peu de nos soldats y ont droit (et en tout cas, aucun policier, même tué dans une course poursuite, dans l’exercice de ses fonctions), on voit mal un citoyen lambda, tombé parce qu’il participait à une manifestation violente, en bénéficier.

duflot récupère

Nous sommes en France. La récupération ne s’arrêtera pas là. L’occasion est trop belle. L’ombre de Malik Oussekine plane de plus en plus sur le gouvernement Valls. Alors que la droite, sous Chirac, avait dû composer avec ce genre d’événements douloureux qui avait conduit à la démission d’un ministre (Devaquet), la gauche se retrouve à son tour dans des draps similaires. De façon bien glauque, c’est une partie de la gauche elle-même, la plus dogmatique, qui participe au montage en épingle de cette histoire : elle veut absolument un Oussekine du PS et voit dans ce Fraisse des bois de Sivens l’arme qui lui permettra enfin de se désolidariser pour de bon d’un François Hollande coincé dans des abysses d’opinions défavorables et de conjonctures catastrophiques.

Les manœuvres de Duflot n’étonnent donc pas, ni d’ailleurs celles du maire de Carhaix, qui tient à donner le nom du militant à une rue de sa ville. Ben oui, que voulez-vous,

Il est inconcevable, comme cela a été le cas en 1986, lors de la protestation étudiante contre la loi Devaquet, qu’un jeune perde la vie dans une manifestation. Une rue Malik-Oussekine existe d’ailleurs à Carhaix, en hommage à ce jeune manifestant tué par les pelotons voltigeurs. La droite était alors au pouvoir.

Les quelques manifestations de lycéens (chair à canon endoctrinée dans le meilleur des cas, bande de branleurs dans le pire) participent du même esprit qui vise à attiser la dissension dans les rangs de la gauche. Du reste, le message porté par ces lycéens, quittant leurs établissements pour aller parader dans les rues de Paris, consterne par son incroyable médiocrité :

Rémi Fraisse est un symbole comme l’était Leonarda. Il représente la violence policière et Leonarda l’expulsion abusive

Quand on se souvient du pataquès lamentable que l’affaire en question avait déclenché, avec l’implication affligeante du président de la République lui-même dans ce genre de brouet médiatique minable, la juxtaposition de la mort de l’un avec l’expulsion de l’autre est une véritable insulte autant au mort de Sivens qu’au bon sens : on se demande bien quel symbole peut représenter l’expulsion d’une lycéenne et sa famille immigrante illégale alors que toutes les procédures d’arrangements étaient épuisées, et dont l’attitude, par la suite, n’a jamais rien eu de digne. On se demande aussi quel symbole peut bien porter celui de la mort d’un type en plein milieu d’un champ de bataille où des forces de l’ordre échangent des tirs de projectiles avec une foule absolument plus pacifique pour un sou qui n’est pas en reste pour répliquer.

Et s’il fallait quelqu’un pour ajouter l’injure à l’insulte, qui mieux qu’Edgar et ses morinades, gouttes précieuses de Pensée Complexe™ concentrée, pour nous dépanner ? Le piposophe, au milieu du torrent habituel de platitudes et de constats d’évidences mêlés à des tornades de poncifs, tente de nous expliquer que le pauvre Rémi bataillait pour une société plus vivrensemblesque, plus douce et plus câline, avec une agriculture plus gentille avec les vers de terre (qui se tortillent de bonheur) et les oiseaux (qui chantent de plaisir). Mais, mon pauvre Edgar, le vivrensemble, c’est devenu la tarte à la crème de tous ceux qui veulent vivre de l’argent des autres, écolos compris ! C’est maintenant l’alpha et l’oméga de la politique locale de terrain proche des gens qui tisse du lien social au kilomètre carré. S’il y a bien quelque chose que tous les gouvernements s’emploient à respecter, c’est ce vivrensemble qui s’en est même institutionnalisé !

le vivrensemble et sa règlementation

Dans le brouet confus du pauvre Edgar, un seul constat surnage qui touche du doigt la vérité : l’État est une machine énorme, qui broie sans sourciller de l’individu. Eh oui. Pour le coup, le Morin ne se trompe pas trop, et si le triste sort de Rémi Fraisse doit rappeler une chose, c’est bien cela : ne perdez jamais de vue que l’État, même lorsqu’il est au service du Camp du Bien Socialiste Bisou, devient de plus en plus violent à mesure que sa légitimité devient plus faible.

Et surtout, ne perdez jamais de vue que ce sont ceux qui, régulièrement, réclament plus d’intervention de l’État pour lutter contre la méchante corruption, le vilain capitalisme et les hordes abominables d’ultralibéraux, qui se retrouvent en première ligne lorsque cet État, devenu progressivement bien plus gros, vient pour leur péter la gueule.

more government
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  • Bravo , la gesticulation médiatique autour de ces différents faits divers est pathétique au plus haut point et décourage d’avoir un jour une classe politique digne de ce nom et des citoyens vraiment responsables .

    bref ce pays est foutu .

  • Pourquoi vous n’êtes pas venu hier à la Tv ?

    J’avais la blonde qui m’a cassé les nouilles avec ses entreprises délocalisées. Au moins avec vous on peut discuter !? Non ?

    J’ai toujours rêver une partie SM avec ma Julie et un gars viril portant un masque à gaz. Bah, que voulez vous, les goûts et les couleurs.

    Et puis c’est pas un mort qui va nous faire arrêter nos réformes, hein ? On a tellement fait de choses, non ?

  • Il fallait oser le « Fraisse des bois »! 🙂

  • J’aime beaucoup la dernière image… C’est une si belle synthèse de la France et de Albert J Nock: A chaque fois qu’on donne à l’Etat le pouvoir de faire quelque chose pour nous, nous lui donnons le pouvoir de faire quelque chose contre nous.

  • ENORME ! :mrgreen:

    Merci pour ses moments de fou rire….

    • bonjour alexis ,si nos amis écolos sont prompts à la récupération d’évènements ,ils le sont déjà beaucoup moins en ce concerne la récupération de ce qui devrait les préoccuper au premier chef ; à savoir les déchets de toutes sortes qui encombrent la nature et participent à la mort d’animaux auxquels ils font semblant d’accorder leur attention .
      Je parles en connaissance de cause ,car récupérant (avec d’autres plaisanciers )en fin de saison estivale les déchets collectés en mer ,ayant pour voisins de pontons des spécimens « écolos » , même en leur offrant le casse-croûte et l’apéro ;aucun d’entre eux n’a jamais daigné se décoller de leur poste d’amarrage .Attitude identique d’autres pseudos écologistes de l’intérieur lorsqu’il s’agit de débarrasser une certaine petite rivière des arbres et branches apportées par les crues . Pourtant ces braves gens aiment beaucoup la rivière …..pour y canoter

  • Il va encore y avoir de la casse à Toulouse demain:

    http://www.ladepeche.fr/article/2014/11/07/1986839-sivens-appel-a-manif-sous-haute-tension.html

    « Le collectif «Tant qu’il y aura des bouilles» et le TESTET (Tous ensemble pour sauver le Testet et tout le reste) appellent à une manifestation non autorisée cette fois encore, à partir de 14 heures à Jean-Jaurès à Toulouse. Provocateurs à l’égard de la police et des gendarmes, ceux-ci demandent aux participants de venir «protégés» à la manifestation, c’est-à-dire munis de «lunettes, masques, casques, boucliers…». Ils expliquent : «L’État n’a su proposer pour dialogue que mépris et répression. Ne nous laissons plus intimider par leurs tirs».

    Ces organisateurs de la manifestation ont plusieurs revendications parmi lesquelles «l’abandon définitif du projet de barrage à Sivens ; le désarmement total des forces de police et de gendarmerie ; l’amnistie complète des inculpés de Sivens.» »

    Marre du laxisme de nos politiques. Mon interrogation est: combien de membres des forces de l’ordre seront encore blessés par ces anarévolutionnaires ?
    Allez messieurs des forces de l’ordre, n’oubliez pas les bouquets de fleur ! Peut être de cette façon aurez vous, enfin, les coudées franches pour réprimer comme il se doit une telle manifestation.

  • 14/20

    L’analyse est pertinente notamment sur le danger que peut représenter l’état. Attention aux ratures, cela vous fait perdre des points.

  • L’affiche de la ville de Nice existe ??
    C’est pas un fake ?

  • Erreur dans l’article, les branleurs de banlieue c’est le meilleur des cas possible, les idéologues le pire.

  • Il n’ y a pas eu minute de silence pour la mort de Méric ? si non Duflot a eu tort si oui elle a eu raison

  • ça devient vraiment n’importe quoi…

  • Mon cadeau du samedi. A qui veut en faire bon usage. Pour le bien de notre avenir !

    2017, Retour vers le futur 2
    Monsieur le Président, merci pour ce moment, nous avons bien rigolé.
    Laissons-nous aller à une petite projection dans le futur, osons utiliser notre Delorean DMC-12.
    Les élections viennent d’avoir lieux, notre Président est sur le pas de la porte de L’Elysée. Une femme dans la cinquantaine, fausse blonde, au visage sournois indique la porte de sortie à notre « ex » Président. Des sourires gênés et coincés s’échangent, l’ex ne sera pas raccompagné à sa vielle voiture pourrie.
    Je voudrais vous faire un spécial, hip hip hourra et dégage vite de là, hélas votre remplaçante n’augure rien qui vaille.
    Entre temps, Montebourg et Ségol ont monté leur boite, une recyclerie. Ils recyclent des vieux déchets ministériels et les vendent à l’International. Le Made in France est sauf ! Certains sont même offerts, car vu leur CV, ils seraient capable de ruiner leur balais. DSK est d’ailleurs balayeur aux îles caïmans dans une banque.
    J+1, les choses commencent pour de bon, il ne faut pas attendre, la France est enfin en ruine. Les Français ont demandé plus d’Etat, plus de dirigisme, plus de radicalisme, plus de Nationalisme. Allons-y !
    C’est de la faute aux Arabes, yes, c’est de la faute des Gays, yes, c’est de la faute à la gauche, à la droite, à ta mère, au borgne, au chien qui a bouffé Pépette. Sale bête ignoble qui sera euthanasié. Bien fait pour sa gueule. On ne touche pas à Pépette. (C’est la chatte de la grosse blonde, un poil plus elle avait enfin un orgasme)
    J+2, on close les gates, plus personne ne rentre ou ne sort. Dommage !
    J+3, on shoot, les étrangers, pas tous, juste les pauvres.
    J+4 on fait les tiroirs caisse des banques.
    J+5 On instaure les règles du jeu : au boulot mes canards, et sans rémunération.
    J+6 La révolution commence, on shoot encore
    J+7 Dieu créa la fin du monde, on enterre les morts et on commence à utiliser son cerveau.
    Et si on essayait autre chose ?

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