Le professeur Jean-François Chazerans, nouvelle victime de la chasse aux sorcières

Suspendu quatre mois, Jean-François Chazerans fait l’objet d’une enquête absurde pour « apologie d’acte de terrorisme ».

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chazerans - D. Theillier

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Le professeur Jean-François Chazerans, nouvelle victime de la chasse aux sorcières

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 1 février 2015
- A +

Je suis très inquiet de la détérioration du climat de la réflexion et du débat en France, particulièrement depuis les attentats de Paris. Mon collègue professeur de philosophie Jean-François Chazerans, que je connais personnellement, a été mis en cause par des élèves et leurs parents pour des propos jugés « inadmissibles » en classe. Suspendu, il fait l’objet d’une enquête pour « apologie d’actes de terrorisme ».

Quand bien même je ne partage pas toutes ses prises de position, je peux dire que c’est un authentique philosophe. Son engagement politique citoyen n’est pas le mien, mais il est respectable. Et comme d’habitude, les artistes, humoristes et les philosophes sont les premiers touchés par cette vague de purges totalitaires. Il ne fait pas bon penser librement en France de nos jours (voir ma chronique dans La Tribune).

 

Pourquoi Jean-François Chazerans est-il ainsi visé ?

Plus encore que le sectarisme de certains, ce sont l’agressivité, l’intimidation et l’incapacité de supporter la pensée critique, essence même de la philosophie, qui m’inquiètent.

Prenons un exemple. Charles Maurras a été banni du paysage des idées en France, traité comme un dangereux réactionnaire antisémite. Je ne me réjouis pas de cet ostracisme stupide et inutile. Une pensée est toujours plus subtile et pertinente que ce qu’on veut bien en dire, même si on ne la partage pas. Elle nous pousse à nous interroger, à mettre en question nos propres certitudes. Maurras a eu deux maîtres à penser : Auguste Comte et Édouard Dumont, deux personnages avec lesquels je n’ai aucune affinité intellectuelle ! Mais je n’ai aucun problème à exposer la pensée de ces auteurs-là et sans la déformer. Je suis favorable à ouvrir le débat au maximum, pour critiquer, pour réfuter, pour éclairer avec des arguments. J’ai toujours à cœur dans mes classes de confronter les penseurs les plus opposés entre eux, d’exposer leurs désaccords.

Comme enseignant, je reprends à mon compte l’argument de John Stuart Mill (De la liberté) selon lequel si une opinion n’est pas « discutée, pleinement, fréquemment et sans crainte », elle devient « un dogme mort et non une vérité vivante ». Cessons de vouloir occulter ou diaboliser. La vérité émerge de la confrontation libre et pacifique des opinions, y compris des plus dérangeantes, elle a tout à y gagner.

 

Philosopher est une activité subersive

Revenons à l’affaire Chazerans. Voici ce qu’il écrivait il y a déjà quelques années dans un article :

« Philosopher est une activité subversive. Penser par soi-même, c’est arrêter de laisser les autres penser pour nous, c’est aussi s’abstenir de penser pour les autres. Une telle forme de pensée suppose qu’elle ne s’isole pas dans un savoir réservé. Elle s’impose de s’ouvrir à l’universel, et d’être accessible par tous. C’est donc se défier nécessairement de tous les pouvoirs, et les prendre pour ce qu’il sont en réalité : des baudruches se dégonflant au moindre coup de butoir de la pensée philosophique. Penser par soi-même, c’est donc bien se réapproprier ce dont les spécialistes nous ont dépossédé : notre propre pensée et notre propre agir en tant qu’être responsable de notre propre destinée et de notre propre histoire. »

Et il ajoutait en citant Nizan :

« Quiconque veut penser aujourd’hui humainement pensera dangereusement : car toute pensée humaine met en cause l’ordre entier qui pèse sur nos vies » (Les chiens de garde).

 

En défense de Jean-François Chazerans

Penser librement n’est pas sans risque de nos jours, surtout quand on relit les récentes déclarations de la ministre Najat Vallaud-Belkacem :

« Nous avons tous entendu les « Oui je soutiens Charlie, mais », les « deux poids, deux mesures », les « pourquoi défendre la liberté d’expression ici et pas là ? » Ces questions nous sont insupportables, surtout lorsqu’on les entend à l’école, qui est chargée de transmettre des valeurs. »

Les mois qui viennent laissent présager le pire…

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  • ha , si ce monsieur avait la même phylosophie qu’un BHL , il n’aurait pas de problêmes ; à sa place , s’il veut garder sa liberté de penser et de dire ce qu’il pense , il faut qu’il quitte la france , car ce pays , dirigé par des tares , ne va pas manquer de tomber dans une hystérie débile et sans fondement , et tout individu normal n’y aura plus sa place ; élites de merde , vous ne valez rien ;

  • ah non mais là on atteint des très hauts sommets dans l’Ed Nat, l’idee c’est d’être les grands frères de la république et dc la jouer à l’affect, hein, histoire que les ados ne tombent pas sous le joug des jeunes des cités, par exemple… Tout en gardant notre neutralité bienveillant non parce que qd même l’école est laïque…
    Ce professeur a sûrement voulu bien faire, mais ce n’était peut être pas le moment pour en parler en philo, je ne suis pas à sa place, mais vu la charge émotionnelle telle, il aurait pu faire le minimum, histoire de traiter l’affaire, puis y revenir dans quelques mois, plus sereinement, sans évoquer Charlie en particulier mais laisser les elève faire le lien ou pas et penser véritablement par eux-mêmes. Ne pas réagir sur les mêmes canaux c’est Une des clés, pour maintenir un semblant d’harmonie dans ce monde violent!

  • Comme d’habitude, le gouvernement prend les gens pour des imbéciles : il édicte une vérité universelle : la sienne, celle qu’il a soigneusement fabriquée lors de réunions internes et qui a été soigneusement enrobée de verbiage politiquement correct par ses conseillers en communication.

    Il a juste oublié qu’il y avait Internet … c’est bête.

    Il a juste oublié que les gens, à force de se faire plumer, on développé un instinct naturel, un sonnette d’alarme, un avertisseur à bullshit … c’est bête.

    Il a juste oublié que l’effet de boomerang qui fait que quand on fait la morale aux gens, et que l’on n’est pas à 300% intègre avec la morale que l’on a édicté, les gens vous prennent (avec raison) pour des gros menteurs manipulateurs pervers.

    Il a aussi malheureusement oublié que quand les gens se sont rendu compte qu’on leur faisait avaler des couleuvres, ils ont tendance à aller vers des menteurs, manipulateurs, pervers encore pire …

    Merci Mesdames Messieurs les socialistes, en banalisant la tyrannie intellectuelle et la morale officielle de faire monter l’UMPS++

    (UMPS++ : mafia familiale, dont l’unique objectif est de rester politicien professionnel à vie sans exercer aucun travail pour la collectivité et ce en vendant un programme ultra-communiste qui est une caricature de la droite vue par le PS et une caricature de la gauche vue par l’UMP)

    • « Il a aussi malheureusement oublié que quand les gens se sont rendu compte qu’on leur faisait avaler des couleuvres, ils ont tendance à aller vers des menteurs, manipulateurs, pervers encore pire … »

      Ca fait partie du plan, ils ont prévu d’être eux-mêmes demain encore plus menteurs et manipulateurs.

  • Bonjour,
    Votre article reflète un esprit ouvert. Je ne suis pas adepte de Maurras, mais force m’est de constater l’admirable écrivain, je dis bien écrivain. Je pense que les gens qui se réclament de Maurras font des confusions mentales graves, ce qui les conduit à tout mélanger. D’accord encore avec vous, le débat a été évacué de la sphère publique. On ne débat plus; la télévision service public de se point de vue ne remplit plus son rôle et depuis fort longtemps.
    Nous vivons une triste période et je pense que le pire est devant nous. Et pourtant j’appartiens à cette catégorie d’individus qui font preuve d’optimistes en toute situation.
    Cordialement

  • Le problème de fond est, à mon avis, que l’État se mêle de ce qui ne le regarde pas: son champ d’action est ce qui est légal, non ce qui est moral. La confusion entre les deux est le début du totalitarisme. C’est ce qui se passe quand l’État nous oblige à penser selon ses vues politiquement correctes. Pas de quoi être optimiste en effet!

    • Absolument, quand la morale (que ce soit la moralisation ou la transgression) devient un sujet public pris en charge par des professionnels, commence la déresponsabilisation et l’intolérance.

      • Mais oui, les juges sont des fous furieux.
        Il n’y a pas de droit sans moral, si ce n’est dans les délires des libertariens, et encore.

        • Heum.
          Vous êtes assez violemment régressif, vous, là !

          Parce que ça fait depuis Abélard que le bon et le légal sont séparés tant en philosophie qu’en droit. Vouloir remettre de la morale dans le droit, c’est une idée « moderne » qui est en fait ultra-datée (pré XIIè siècle, donc)…

          • Il ne s’agit pas de « remettre » de la morale dans le droit, vu qu’elle ne l’a jamais quitté.
            Le droit n’est pas la morale, mais sans morale il n’y a pas de droit.
            Les catégories morales imprègnent le droit.
            Ce qui montre qu’il existe bien une morale « publique ».

      • Des libertariens, et des déséquilibrés mentaux qui voient des socialistes partout.

  • « La vérité ne doit pas craindre l’erreur et elle a tout à gagner à la liberté. »
    Si: la mauvaise monnaie chasse la bonne…

    • Un professeur bénéficie d’un certain pouvoir moral sur ses élèves, ce qui implique un devoir de neutralité en matière de politique ou de religion.
      Ce devoir de neutralité a été largement bafoué depuis mai 68, et nos profs se sont appliqués à fabriquer des générations de gauchistes politiquement corrects.
      Alors, si aujourd’hui, sous le feu des événements, on se souvient tout à coup du devoir de neutralité, je ne m’en plaindrai pas.

  • bonjour,
    je suis bien entendu d’accord avec vous pour condamner toute « chasse aux sorcières ». Je voudrais juste donner quelques renseignements complémentaires. Je ne suis pas sûr de ceux ci car ce ne sont que des dires rapportés mais ils me semblent plausibles suivant ma connaissance de l’éducation nationale.
    Il semble que ce professeur se sert de son autorité par sa fonction autant que par ses connaissances de la philosophie ou de la rhétorique pour tenter de faire passer SES idées dans nos « chères têtes blondes ».
    Il semble qu’il utilise le « système » en s’en moquant, le tout ouvertement.
    Pour ma part, en tant que parent, ce n’est pas du tout ce que j’attends d’un professeur de philosophie mais il est impossible de changer un tel état de fait assez courant dans l’éducation nationale.
    Il est possible, si cela est vrai, que cela s’apparente à un retour de bâton. Que certains ont utilisé la situation pour faire ce qui n’était pas possible en temps normal.
    En résumé, cette personne utilise le système qui le protège habituellement contre les élèves et parents et ceux-ci profitent de ce même système qui leur donne soudain une ouverture inespérée.
    Ou, en d’autre termes, cracher en l’air n’est pas sans risque!

  • « Maurras a eu deux maîtres à penser : Auguste Comte et Édouard Dumont »

    Il manque un « R ». C’est évidemment Édouard Drumont, dont j’avais jadis parlé dans les colonnes mêmes de Contrepoints : http://www.contrepoints.org/2011/03/17/17322-aux-racines-de-l%E2%80%99antisemitisme-francais

  • Il est toujours désolant de voir un enseignant de cette envergure offert en pâture à la vindicte populaire.

    Ceci étant dit,
    l’initiation à la philosophie ne doit pas se faire de manière tendancieuse.
    Si ce professeur s’avère être un militant d’extrême gauche,il aurait plus sa place à l’université:certains débats demandent une maturité et une maîtrise de la controverse dont sont dépourvus les lycéens.

    L’exhibition Charlie Hebdo au collège est tout simplement lamentable.
    Il aurait été plus judicieux de montrer le patrimoine satirique de ce pays ,
    en expliquant que cet atavisme culturel existe
    -sous toutes les formes-
    depuis les fabliaux du moyen âge.

    P.S. Avant d’avoir la prétention d’affranchir les autres, mieux vaut s’assurer au préalable de n’être pas soi-même assujetti à des schémas mentaux préétablis…

  • La philosophie laïque se borne à former nos élites républicaines ( IIIème République) par une philosophie stoicienne avec une conception du « libre arbitre » que l’on trouve dans l’éthique à Nicomaque : tu Acquièce ou tu t’Excuses. Dans ce contexte , vouloir aborder l’oeuvre de Leibniz formé au Thomasium de Liepzig, premièrement les oeuvres de cet auteur sont en Allemand et si il n’y a pas de classe d’Allemand à Poitiers , par exemple , ce fonctionnaire aurait du demander sa mutation dans un lycée comportant des classes Allemand bilingue, deuxièmement commenter Leibniz au miroir d’Aristote de Bekker et de la scholastique Médièvale , c’est possible , mais si comme Jean Paul Sartre vous ne connaissez ni le Latin , ni le Grec , ni l’Allemand , vous vous contenter d’envoyer à Gallimar votre Master

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