Par Alain Goetzmann
Depuis la révolution industrielle du XIXe siècle, jamais le besoin en leadership dans l’art de l’innovation ne s’est, à ce point, fait ressentir. Trouvant toute sa justification dans une économie en constante accélération, le principe de destruction créatrice cher à Joseph Schumpeter s’est aujourd’hui développé à un niveau qu’il n’aurait jamais pu imaginer.
Les produits, les services, les stratégies et les business model qui marchaient bien ont désormais une durée de vie beaucoup plus courte, démontrant ainsi « qu’innover ou mourir » n’est plus un slogan, mais la réalité brutale de la concurrence au XXIe siècle.
Au fur et à mesure que l’innovation passe d’intéressant à urgent dans les priorités des entreprises, beaucoup de dirigeants reconnaissent qu’ils sont bien plus à l’aise dans la direction et l’exécution que dans le défi quotidien de la créativité. Générer de nouvelles idées, savoir reconnaître celles qui ont un potentiel de rupture, puis, mobiliser toute une organisation pour les amener au marché, avec les risques et les incertitudes que cela comporte, est un aspect récent de leur fonction qui les inquiète.
Il y a cent ans et plus, les innovateurs étaient des bâtisseurs d’industrie : Thomas Edison, Henry Ford, Walt Disney. Plus récemment, ce sont des « disrupteurs » : Steve Jobs, Jeff Bezos, Richard Branson. Aujourd’hui, les nouveaux barbares bousculent l’ordre établi : Elon Musk (Paypal, Tesla, SpaceX), Brian Chesky (Airbnb), Travil Kalanick (Uber), Frédéric Mazella (Blablacar).
Tous ces leaders de l’innovation sont-ils des extraterrestres, des gens qui disposent d’un don particulier, d’un chromosome unique ? Certainement pas. Chaque chef d’entreprise – c’est la conviction de Rowan Gibson, spécialiste de l’innovation et auteur de nombreux ouvrages – a la possibilité d’infuser de la créativité dans son organisation.
En étudiant de façon approfondie des centaines d’exemples d’innovation, un modèle émerge.
Les nouveautés ne viennent généralement pas d’un individu, aussi brillant soit-il, mais d’une façon radicalement différente de regarder le monde, avec d’autres lunettes, en quelque sorte. C’est ce qui ressort de la plupart des exemples d’innovations transformées en succès et qui caractérise les entrepreneurs qui en sont à l’origine.
1. Contester l’orthodoxie
Un leader innovant n’accepte ni l’ordre établi ni les bonnes pratiques immuables.
Il les conteste systématiquement et n’hésite pas à remettre en cause les principes les mieux ancrés dans l’ADN d’une entreprise. C’est ainsi que Nicolas Hayek a bouleversé l’industrie horlogère suisse avec la Swatch, d’un côté, le luxe de l’autre ou qu’Ingvar Kamprad d’Ikéa a pressenti les efforts (transport, montage) que le consommateur était prêt à consentir pour payer ses meubles moins cher. D’autres comme James Dyson ou Michael Dell ont, eux aussi, secoué le cocotier dans leur métier.
2. Dépister les tendances
Repérer les modèles qui, en évoluant, peuvent substantiellement changer les règles du jeu fait partie du quotidien des leaders innovants.
Ils veillent de très près à détecter les signaux faibles, les tendances naissantes et les amorces de ruptures qui peuvent avoir un impact significatif dans leur métier. Jeff Bezos a compris, dès 1994, l’extraordinaire révolution que serait l’e-commerce sur Internet. Il s’est ensuite demandé quel business model avait le plus de chance d’en profiter rapidement, et s’est orienté sur la librairie en ligne, donnant naissance à Amazon. Reed Hastings de Netflix, a lui compris que le streaming de vidéos remplacerait inéluctablement la location de DVD.
3. Valoriser ses ressources
Il vaut mieux considérer son entreprise comme un portefeuille de spécialités et d’actifs que comme un pourvoyeur de produits ou de services sur un marché donné.
Cela permet aux leaders innovants de chercher de nouvelles voies, en redessinant, en redéployant ou en recombinant les ressources variées de l’entreprise vers des opportunités créatrices. C’est Walt Disney qui évolue du dessin animé vers le film, puis vers l’univers du loisir, ou Richard Branson qui, à partir d’un petit éditeur de disques, déploie un groupe de plus de 400 sociétés.
4. Comprendre les besoins
Les leaders innovant vivent dans la peau de leurs clients. Ils savent donc, d’abord, comment sont reçus leurs produits et leurs services, ensuite, ce qu’ils désirent à l’avenir.
C’est ainsi qu’ils créent leurs nouveautés. Fred Smith avait compris la nécessité d’un service postal rapide. Il en est né Fedex. Personne n’a demandé à Steve Jobs un iPod, un iPhone ou un iPad. Grand amateur de musique, il en ressentait le besoin pour lui-même, en tant que consommateur.
Que peut-on apprendre des grands innovateurs ? Que même quand tout va bien, il faut rester en éveil, contester sa propre réussite, toujours rester proche de son public et de la société, en général, pour en détecter les évolutions avant les autres. Un brin de paranoïa ne nuit pas quand on est à la tête d’une entreprise.
Même si je conteste l’orthodoxie, je sais dépister les tendances, valoriser les ressources, et comprendre les besoins il me faudra quand même un moment de créativité pratique, une idée concrète de ce que je désire développer et les connaissances et moyens intellectuels (puis financiers) pour poursuivre un tel projet.
Qui était l’innovateur Jobs ou Wozniak? le premier eut-il pu exister sans le second?
Oui oui, je sais, il y a beaucoup de génies qui n’ont pas de succès, comme beaucoup de gamètes qui ne se rencontrent pas.
Je ne pense pas devenir un innovateur, ni pouvoir en déceler un, parce que j’aurais appris cette leçon en quatre chapitres.
En cinquième point, j’aurais ajouté : ils n’ont pas peur de l’echec.
On l’oublie un peu vite, mais la plupart des inventeurs ont connus tout un tas d’echec. Combien d’inventions mortes nées ou mises à la poubelle ou encore d’echecs commerciaux avant de connaitre le succès?
Pour moi innovation = risque
Ce n’est jamais en étant dans l’attentisme de l’idée du siècle que l’on devient inventeur!
Exact Guillaume, la peur de l’echec est le principal frein à l’innovation et fait que l’innovation elle meme ne peut faire partie de l’entreprise telle qu’elle est.
Chiffrage, planning, reporting, imputation, bon du premier coup, externalisation des risques…et j’en passe ; incompatible avec innovation.
Vous croyez que le téléphone a été inventé suite à un projet de grosse entreprise d’améliorer les pigeons voyageurs ?
Les inventions sont le fruits de start-up, de passionnés, de gens dans le besoin et qui cherche une solution à leur problème.