Par Fabio Rafael Fiallo.
Lorsque le rapport de Nikita Khrouchtchev au 20e congrès du Parti communiste de l’Union Soviétique (1956) reconnut et dénonça les crimes de Staline, l’aura du socialisme réel reçut un coup fatal.
Les partis communistes prosoviétiques, de même que les intellectuels qui avaient professé une vénération mystique pour Staline – tels Aragon, chantre du goulag stalinien (« Je veux parler de la science prodigieuse de la rééducation de l’homme »), ou le Chilien Pablo Neruda (« Staline est le midi, la maturité de l’homme et des peuples ») – virent leur fanatisme désavoué par l’autorité suprême de leur propre camp : Moscou.
Aujourd’hui, un phénomène d’une autre nature, mais non moins bouleversant pour autant, est en train de briser ce qui pouvait rester de foi dans la viabilité du socialisme chez les « révolutionnaires » de l’Amérique latine et d’ailleurs. Il s’agit de l’échec économique patent du « socialisme du XXIe siècle » instauré au Venezuela par l’aujourd’hui défunt Hugo Chávez.
Tous les indicateurs y sont en effet au rouge, ou plutôt par terre.
Le pays est entré en récession en 2014. Le taux d’inflation, le plus élevé de l’Amérique latine, atteignit le chiffre record de 68,5 % en 2014 et s’achemine cette année vers les 100 %. La pénurie de produits de première nécessité se généralise et oblige les Vénézuéliens dans leur ensemble à passer un total de 35 millions d’heures par semaine à faire la queue à la recherche d’articles dont les prix sont contrôlés par l’État.
Selon une étude récente menée par trois universités vénézuéliennes, la pauvreté – que le chavisme se vantait d’avoir réduite – dépasse aujourd’hui le niveau d’avant Chávez : le pourcentage des foyers pauvres aurait atteint 48,4 % en 2014 contre 44 % en 1998, année de l’arrivée de Chávez au pouvoir.
Le fait qu’un énième modèle socialiste soit parvenu à mettre à bas l’économie du pays possédant les plus grandes réserves d’or noir de la planète – et ayant de surcroît profité d’un boom pétrolier sans précédent, pendant lequel le prix de ce produit de base a augmenté de plus de 1000 % – oblige les défenseurs du castrochavisme à tempérer leurs ardeurs idéologiques.
À commencer par le régime cubain, qui a de sérieuses raisons de s’inquiéter du désastre vénézuélien. Car le Venezuela chaviste porte à bout de bras l’exsangue économie cubaine, lui fournissant à des prix dérisoires, depuis de longues années, autour de 100 000 barils de pétrole par jour, dont une partie est revendue régulièrement au prix fort par le régime cubain dans le marché international.
Tout naturellement, La Havane se voit contrainte d’anticiper le jour où l’aide du Venezuela devra cesser. Il lui faut donc chercher des moyens alternatifs de survie, quitte à se tourner vers l’« empire », avec son juteux marché intérieur et ses touristes, son dynamisme technologique et son capital naguère honni.
D’où le rapprochement diplomatique entre Cuba et les États-Unis sans qu’ait été levé, comme le demandait le régime cubain, l’embargo imposé par les États-Unis.
Le castrisme essaie de présenter ce dégel diplomatique comme une réussite cubaine, arguant que Cuba a bien fait de « tenir bon face à l’empire ». Or, à y regarder de plus près, il s’agit plutôt, comme le souligne la bloggeuse et dissidente cubaine Yoani Sánchez, d’une défaite pour La Havane.
En effet, la rupture des relations économiques entre Cuba et les États-Unis depuis plus d’un demi-siècle et l’embargo qui s’en est suivi furent des mesures prises par Washington en réaction aux expropriations non indemnisées des entreprises américaines opérant à Cuba. Or, ces expropriations n’eurent qu’une seule raison d’être : l’hostilité idéologique de la révolution castriste envers les investissements étrangers.
Le « peuple », prétendument représenté par le Parti communiste, mettrait toutes les ressources confisquées au service d’un véritable développement économique de l’île, lequel profiterait, martelait-on, à toute la population plutôt qu’à une caste de privilégiés au service de l’impérialisme, sous-entendu américain.
Hier, donc, les castristes stigmatisaient les capitaux étrangers, source selon eux d’exploitation néocoloniale des pays du tiers-monde. Aujourd’hui, après avoir mis à bas l’économie de Cuba, ils accueillent à bras ouverts ce même capital, empochant au passage une partie du salaire des ouvriers travaillant pour des entreprises étrangères.
C’est à y perdre son latin. Depuis le début de la révolution cubaine, le régime castriste aurait parfaitement pu profiter de la proximité géographique de l’économie américaine s’il n’avait pas cru, par ferveur idéologique, pouvoir faire mieux en se débarrassant des capitaux américains. Mais voilà que, plus d’un demi-siècle plus tard, il lève le drapeau blanc face à ces capitaux, ayant entre-temps fait perdre à Cuba, dans le petit jeu d’expropriations-embargo, la bagatelle de 100 milliards de dollars selon ses propres estimations.
Le socialisme réel en Amérique latine, avec Cuba à la recherche d’une nouvelle bouée de sauvetage et le Venezuela au bord d’une crise humanitaire, offre un spectacle de désolation qui nous ramène curieusement à Aragon.
Dans son roman Aurélien (inspiré du cas non glorieux de son ami Drieu La Rochelle), Aragon se réfère à une ville vide et silencieuse :
« Une ville frappée d’un malheur. Quelque chose comme une défaite […] Des épées abandonnées, des armures. Les restes d’un combat sans honneur. »
Rien ne pourrait dépeindre mieux que ces mots l’état délabré dans lequel se trouve, non pas une ville, mais une idéologie, celle du castrochavisme, avatar contemporain et déjà flétri du communisme jadis loué par Aragon.
« Le fait qu’un énième modèle socialiste soit parvenu à mettre à bas l’économie… oblige les défenseurs du castrochavisme à tempérer leurs ardeurs idéologiques. »
Pour toute personne raisonnablement sensée, oui, mais pour les illuminés communistes qui continuent de broger la fin de l’illusion soviétique, il n’en est rien. Pour eux, le chaos au Vénézuela, c’est la faute au grand satan américain qui, armé de ses deux démons nommés CIA et Finance ultralibérale apatride, a ruiné par ses manoeuvres maléfiques le grand oeuvre visionnaire de Castro.
Le communisme, si ça ne marche toujours pas, c’est parce que ça n’a pas été bien exploité, ou bien c’est la faute aux américains épicétou.
C’est vrai. Il n’empêche que, après avoir entendu Fidel Castro en personne dire (à un journaliste de la revue Atlantic) que le socialisme ne marche même pas à Cuba, et Raúl Castro ajouter que l’économie cubaine était au bord du précipice sans que l’on puisse blâmer exclusivement le « blocus », et voire maintenant Raúl chercher les investissements du « grand capital », les moins obtus des « révolutionnaires » seront obligés de se poser des questions sur le bien-fondé de leurs illuminations.
Impertinent: « les moins obtus des « révolutionnaires » seront obligés de se poser des questions sur le bien-fondé de leurs illuminations. »
Voici deux ans le moindre article sur Chavez était inondé de commentaires d’admirateurs.
S’ils ne sont plus visible c’est simplement qu’ils se dépêchent de regarder ailleurs quand un de leur fier vaisseau sombre comme prévu.
Mais ils chantent toujours l’internationale, la réalité ne les atteint pas le moins du monde.
Le communisme aurait dut mourir avec son frère le nazisme.
les socialistes français aussi chantent toujours l’internationale
Vous devriez lire le rapport de Kroutchev, c’est très instructif et vous ne semblez pas l’avoir fait. Si vous souhaitez creuser la question, lisez le livre de Grover Furr: « Krouchtchev a menti », vous y trouverez au moins le fac simile du tlégramme par lequel Krouchtchev proteste parce qu’il veut fusiller 50000 personne et que Staline lui interdit d’en fusiller plus de 2000. Enfin, en ce qui concerne Cuba, à tort ou à raison, mon point de comparaison est la démocratique Haïti: mêmes conditions climatiques, mêmes chances. Et drolement démocratique si j’en crois l’absence quasi totale de critique dans les médias. Mais on comprend la hargne de l’Empire contre Cuba, un pays dans lequel d’après Forbes (je vous assure que ce n’est pas un magasine bolchévique) 68% sont fiers de leur gouvernement. Et ils ont des raisons de l’être: le seul pays qui a soutenu la lutte de Mandela quand il était en prison et le pays qui a défait l’armée sud-Africaine en Angola, après les ignobles massacres que celle-ci et les mercenaires anglo-saxons y avaient commis (avec l’aide de leur héros Mobutu). Enfin, un pays résistant, avec difficulté, au crime que constitue un embargo non approuvé par l’ONU, chapeau! Enfin rappelons l’interview de Kennedy par Jean Daniel: « Je pense qu’il n’y a pas un pays au monde, … où la colonisation économique, l’humiliation et l’exploitation ont été pires que celles qui ont sévi à Cuba, du fait de la politique de mon pays, pendant le régime de Batista ; je pense que nous avons sécrété, …compte, le mouvement castriste (…)Je peux vous dire que j’ai compris les Cubains. J’ai approuvé les proclamations de Fidel Castro dans la Sierra Maestra, l…. Je vais vous dire encore : dans une certaine mesure, c’est comme si Batista avait incarné un certain nombre de péchés des Etats-Unis. Maintenant, il nous faut payer ces péchés. » Alors n’échangeons pas les criminels et les victimes!
Batista a été déposé en 1959, vous avez manqué 56 années de rapport des différentes ONG sur la dictature cubaine, mettez-vous à jour. Quant à vos « 68% d’admiration du peuple », tout fout le camp décidément, dans les pays communistes, c’est plutôt 90% traditionnellement.
Votre doctrine est mortelle, liberticide et a échoué partout, créant misère, pauvreté et cruauté. On pouvait comprendre une certaine admiration dans les années 60-70, mais actuellement les données des pays sont disponibles partout sur internet et sont on ne peut plus clair: croire encore au communisme relève du sectarisme ou de l’imbécilité.
Comparer Cuba avec Haïti, comme fait Skevin, trahit une ignorance lamentable de la réalité latino-américaine.
Avant Castro, Cuba était le 3e pays de l’Amérique latine en termes de PIB par tête, et ce, non pas à cause de Batista, mais déjà avant lui, depuis l’époque des gouvernements démocratiquement élus de Grau San Martin (1944-1948) et PrÃo Socarrás (1948-1952). Des gouvernements, d’ailleurs, dont Fidel Castro vanta le caractère démocratique dans son discours « L’Histoire m’acquittera ». Haiti, par contre, est le seul pays de l’Amérique latine qui fait partie depuis toujours de la quarantaine de « pays les moins avancés » de la planète selon la classification de l’Onu.
La richesse était-elle inégalement répartie à Cuba avant Castro? Sans doute, et il fallait corriger cela, comme le font bien des pays démocratiques de l’Amérique latine, où la pauvreté a sensiblement reculé, sans supprimer la liberté et sans casser la croissance économique.
Aujourd’hui, par contre, à Cuba il n’y a pas de richesse à répartir. De surcroît, de nouvelles inégalités y ont vu le jour. Les éléphants du régime ont accès aux magasins demandant des dollars et vont se faire soigner en Angleterre et au Brésil, tandis que le commun des mortels y vit avec des salaires de misère (moins de 30 dollars par mois) et ne trouve guère les médicaments dont il a besoin.
pour la santé et l’éducation, il faut rappeler que Cuba disposait déjà des meilleurs standards latino-américains (et même meilleurs que dans beaucoup de pays européens) en la matière avant 1957, et avant la prise du pouvoir par les castristes. Malheureusement, depuis, la qualité n’a cessé de diminuer dramatiquement au point que, par exemple, les patients sont obligés d’apporter leur propre savon et très souvent leurs médicaments et leur literie quand ils se font hospitaliser. il ne suffit pas de nationaliser les hôpitaux et réquisitionner de force les médecins pour faire « des soins gratuits, naïf. Tout ce que ça a accompli, c’est faire fuir les médecins (d’ailleurs, chaque fois que Fidel ou Raul en envoie comme main d’oeuvre taillable et corvéable à ses potes Chavez ou Ahmadinejad, il y en a qui disparaissent vite fait dans la nature) et laisser les infrastructures pourrir sur place.
La « santé » à laquelle les vrais Cubains ont réellement accès sans se ruiner en pots de vin et marché noir (et encore, à condition de ne pas avoir la peau trop foncée !), ce sont des immeubles vieillissants et souvent insalubres, des équipements obsolètes, datant presque tous d’avant la révolution, et pas assez de personnel ni de médicaments et de fournitures pour les faire fonctionner.
Juste pour t’illustrer l’ampleur du désastre: en 1957, le taux de mortalité infantile de Cuba était le 13e plus bas au mode selon les chiffres de l’ONU, devançant des pays comme la France, la Belgique, l’Allemagne de l’Ouest, Israël, le Japon, l’Autriche, l’Italie, l’Espagne ou le Portugal. Aujourd’hui elle est passée 40ème, tandis que le taux de mortalité des mères à l’éccouchement est passé à 33 pour 1000 (quatre fois le taux des USA !). Le taux de suicide a triplé depuis la révolution. Le taux d’avortement s’est envolé.
Alors, merci les « soins gratuits », surtout que ce sont les plus pauvres qui en pâtissent en priorité. Quant à l’éducation à Cuba, c’est du même tonneau.l’apartheid médical à cuba: http://www.minarchisteqc.com/2010/09/dossier-sante-3ieme-partie-cuba-lapartheid-medical/
Si vous prenez le système de santé cubain, il y a un réelle aparatheid entre d’un coté,les dirigeants, les militaires, les touristes et de l’autre, le reste du peuple (qui a un système de santé déplorable)
Cuba est le seul pays latino-américain qui a vu diminuer son apport calorique diminué pour la population, en passant de 2.700 calories/jour/hab. en 1957 à moins de 2.500 après la fin des subventions soviétiques. De même Cuba doit être le seul pays au monde qui a vu son nombre de voitures par habitant diminuer depuis 1957. regardez le salaire moyen: http://www.one.cu/publicaciones/03estadisticassociales/Salario%20Medio%20en%20Cifras%20Cuba%202013/II.pdf
Au marché payable en devises, le pain coûte $0,80, le kilo de blanc de poulet, plus de $3. Ce qui veut dire qu’un Cubain ne peut même pas s’acheter un pain par jour et qu’il ne peut que subsister que grâce au système de rationnement. Enfin, à quelque chose malheur est bon : l’obésité n’est pas un réel problème à Cuba.
Cuba n’a survécu à l’effondrement de son économie que grâce aux subsides de l’ex-URSS, qui lui accorda 65 milliards de dollars sous forme de « prêts et aides » jusqu’à 1990. Je ne parle même pas de l’aide des autres pays d’obéissance communistes. Si il y aujurd’hui un dégel des relations entre cuba et les usa c’est grace au fait que le vénézuela est ruiné. Or le vénézuela apporte de l’aide à Cuba sans l’aide vénézuélienne cuba s’effondre.
la russie a annulé 90% de la dette cubaine envers l’Union soviétique, soit $29 milliards. En 2010, La Havane est parvenue à restructurer sa dette d’un montant total de $6 milliards envers la Chine. En 2012, le Japon a accepté d’annuler 80% de la dette cubaine envers Tokyo ($1,4 mds).
« Alors n’échangeons pas les criminels et les victimes » quelques livres que vous feriez bien de lire sur cuba: le livre de Jacobo Machover : « Raul et Fidel : La tyrannie des frères ennemis », le livre de Jacobo Machover : « Cuba : l’aveuglement coupable : Les compagnons de la barbarie », « La face cachée du Che » de Jacobo Machover, « La véritable histoire d’Ernesto Guevara » de Pierre Rigoulot , « Cuba : mémoires d’un naufrage » de Jacobo Machover.
Castro est millardaire. plusieurs gens de son entourage ont racontés son train de vie (ce mec vit dans le luxe le plus total).
Cuba s’est l’exemple type de la dictature communiste: une poignée d’oligarches vivent dans le luxe tandis que le peuple crève de faim.
La dictature castriste ne fonctionne que grace à la pauvreté. c’est justement grâce à la faim et à la misère que le régime tient. Il a mis un système de rationnement qui lui permet de controler sa population. le livret de fourniture est un moyen pas du tout subtil de contrôle social et une manière contondante d’obliger à l’obéissance. La dictature castriste serait inimaginable sans la pauvreté du peuple cubain : elle a consacré plus d’un demi-siècle à « résoudre » la pauvreté, en la maintenant et en l’augmentant, au lieu d’implémenter des institutions qui canalisent les incitants pour éliminer la dépendance et créer de la richesse. Le castrisme n’a rien fait de tout cela en 50 ans, plus préoccupé à ce que les pauvres continuent d’être pauvres et, par conséquent, vulnérables et dépendants du pouvoir politico-militaire qui soutient et administre la laisse autour de leur cou.
Fidel castro a publiquement reconnu que le modèle cubain ne marchait pas. je ne sais pas ce qu’il vous faut de plus