En Chine comme ailleurs, il y a trois principaux types de fraudes : la fraude financière, la corruption, et l’abus de biens sociaux. En revanche, les conséquences en Chine peuvent être particulièrement désastreuses pour toute entreprise. Nous avons discuté avec le professeur Stéphane Grand, consultant en implantation d’entreprise sur le marché chinois et fondateur de SJ Grand. Il nous explique les grands cas de fraude sur le marché chinois et la meilleure façon d’y faire face.
Entretien dirigé par Thibaut André.
L’abus de biens sociaux
L’abus de biens sociaux est le type de fraude le plus répandu dans le monde et bien sûr en Chine. C’est aussi le type de fraude qui cause le moins de dommages à la société, très sensible à l’absence de contrôles internes (l’employé qui rentre chez lui avec un notebook et un crayon de l’entreprise), à une culture de gaspillage comme on a pu en repérer dans certaines sociétés de haute technologie.
La corruption
La corruption est un type de fraude également très répandue en Chine, mais cette fois de façon plus spécifique. Il s’agit, par exemple, du cas d’un acheteur d’une société qui va recevoir un paiement, un avantage en nature, lié à la conclusion d’un contrat avec un vendeur. Dans ce cas, l’intérêt de l’acheteur est en conflit avec l’intérêt de son employeur. C’est un cas particulièrement courant en Chine car dans la culture chinoise, la relation entre l’employeur, l’employé, une société commerciale et un tiers est très différente de celle identique, entretenue en Occident. Dans ce cas, comme dans beaucoup d’autres, le concept même de fraude, qui a été importé d’Occident avec le concept de société commerciale à responsabilité limitée, est relativement abscons pour un employé chinois qui n’a pas forcément l’impression de faire quelque chose de très répréhensible. Même dans une société chinoise, il est important de donner le change, et l’impression que l’on ne fraude pas, même si tout le monde sait que cela se fait.
Ceci étant dit, dans une société purement chinoise, c’est une question qui est beaucoup moins problématique car faisant partie du système féodal de management qui fonctionne, semble-t-il, très bien dans ce pays. Il y a eu des cas récents de fraude de ce type qui ont fait les premières pages des journaux, notamment celui de Glaxo SmithKline, dans lequel les employés chinois avaient été mis sous forte pression du management occidental en Grande-Bretagne qui leur demandait des résultats irréalistes. Pour obtenir ces résultats, le management chinois soudoyait des médecins pour les forcer à recommander leurs médicaments. L’argent qui a servi à soudoyer a dû sortir des comptes, et c’est à travers le remboursement de faux voyages que l’entreprise, ou en tout cas le management chinois, a réussi à sortir des comptes les sommes nécessaires au graissage des pattes des médecins. Le cas n’est pas rare en Chine, mais Glaxo SmithKline a été utilisé comme exemple pour indiquer un changement de politique qui vise à modifier ces acquis dans les pratiques commerciales chinoises.
La fraude sur documents financiers
Le troisième type de fraude, la fraude sur les documents financiers, est en revanche à la fois beaucoup moins fréquente, mais aussi beaucoup plus dommageable aux entreprises. À peu près 80 % des pertes dues aux fraudes dans le monde le sont par fraudes sur les documents financiers. Les entreprises étrangères, du fait d’une distance géographique et culturelle, sont très souvent victimes de ce type de fraude. Dans la plupart des cas, le General manager, ou le directeur financier au-dessus de tout soupçon, souvent en collusion avec l’auditeur, va vider les comptes de la société, quelquefois s’approprier les actifs corporels ou incorporels, et toujours, ou presque, sans sortir parfaitement indemne.
La priorité est donc de conserver un contrôle permanent sur vos activités.
D’une manière générale, en Chine ou ailleurs, une situation qui n’est pas contrôlée est une situation qui va dégénérer. En Chine, dans le cas des entreprises étrangères en particulier, une situation non contrôlée est une situation qui finit en désastre. Il y a un mélange de manque de compréhension de la situation locale, de manque certain de respect pour la culture chinoise, et un défaut d’appréciation de la vulnérabilité d’une entreprise étrangère face à une entreprise chinoise devant une Cour de justice, toutes ces défaillances conduisant les situations dégénératives vers des catastrophes.
Dans aucun cas, il ne faut laisser un investissement en Chine sans une surveillance totale et permanente. S’il est possible, effectivement, de prendre avantage du gigantisme du marché chinois, il n’en est pas moins de la plus extrême importance de ne jamais négliger le fait que la Chine est une économie en transition.
Si une situation semble indiquer la fraude, si un employé se comporte comme un fraudeur, si un manque de contrôle pourrait laisser la place à une fraude, cette dernière est présente. Le meilleur moyen de l’éviter dans son entreprise, moyen qui a aussi comme effet d’augmenter considérablement la productivité, est d’organiser des audits légers, n’empêchant pas les employés de travailler, mais permettant d’obtenir une vue très claire de la façon dont les procédures sont appliquées. Ces « revues limitées » sont d’une efficacité redoutable en Chine. Il est important, en particulier dans le cas d’une entreprise dont le General manager est un chinois, de les faire réaliser par un cabinet tiers de façon à ce que la responsabilité potentielle de la découverte de problème de gestion n’entraîne pas un blocage au niveau du management.
L’article aurait put etre interessant si plus d’exemples concrets et de chiffres avaient ete fournis. Ces fraudes ne sont pas une specificite chinoise. Les techniques de detection sont nombreuses et releve du travail, notamment, des auditeurs internes et externes.
petite coquille, je pense : « Dans la plupart des cas, le General manager, ou le directeur financier au-dessus de tout soupçon, souvent en collusion avec l’auditeur, va (…) sans sortir parfaitement indemne. »
Autre type de « fraude » qui perturbe pas ma la manageur : la protection absolue qui est faite pour l’employer. Cela conduit à des situations vraiment difficile, où on embauche quelqu’un pour ses compétences, et ce quelqu’un une fois embauché ne vient jamais ou presque dans l’entreprise. Il sait qu’il est protégé, qu’on ne peut le virer comme ça, et on va se retrouver avec un boulet, payé une blinde, qui sera d’ailleurs parfois employé dans plusieurs autres entreprises avec qui il aura fait le même coup. C’est à s’arracher les cheveux.