Par Jacques Garello
Un article de l’Aleps
La Chine s’est réveillée, mais elle ne s’est pas libérée. La conjoncture boursière mondiale a été rudement secouée par l’effondrement des bourses chinoises, provoquant panique et repli dans les bourses du monde entier. La finance mondiale a progressivement repris son souffle et les cours ont à peu près retrouvé le niveau qu’ils avaient il y a trois semaines (NdlR : article écrit avant la décision de la Fed).
Mais l’événement a fait naître plusieurs interrogations. S’agit-il d’un simple accident lié à la « guerre des monnaies » ? La croissance chinoise est-elle épuisée ? Allons plus loin : le système hybride chinois est-il vacillant ?
Accident monétaire ?
Le 11 août, la Banque Centrale du Peuple de Chine (BPOC) a décrété unilatéralement une nouvelle méthode de cotation du yuan. Elle détermine désormais chaque jour un taux de change pivot par rapport au dollar, taux autour duquel la cote du yuan peut fluctuer dans une zone de 2%. De fait, le taux pivot a été diminué à plusieurs reprises dans les jours suivants, ce qui revient à une dévaluation de 4% aujourd’hui ; les Chinois pourraient aller jusqu’à une dévaluation de 10%. Les marchés ne savent donc rien de la vraie valeur du yuan, et ceux qui commercent avec la Chine non plus. Ils ont donc manifesté leur trouble, car l’incertitude porte sur les relations avec la deuxième puissance économique mondiale – ce n’est pas rien.
Cette opération s’inscrirait donc dans la logique de la « guerre des monnaies » ouverte par les gestionnaires de l’euro, aussi bien que par les Russes. Une guerre dont le dollar est provisoirement sorti vainqueur, alors même que le billet vert ressemble de plus en plus à de la fausse monnaie. Mais pourquoi dévaluer si vite ? Certains pensent que les autorités chinoises veulent rendre leur monnaie « crédible » pour qu’elle soit intégrée par le Fonds Monétaire International dans le « panier » de devises admises comme monnaies de référence (aux côtés du dollar, de l’euro, de la livre, du yen), donc s’imposant dans les paiements mondiaux et figurant dans ces contre-parties des DTS (droits de tirage spéciaux émis par le FMI). Il en irait de la gloire de la Chine et de son statut de super-puissance économique.
Une politique de relance ?
En réalité, les places boursières mondiales ne s’inquiètent pas autant des manipulations du yuan que du ralentissement de la croissance chinoise, devenu évident après les faillites en chaînes d’entreprises et de banques en Chine. Ces échecs ont provoqué en juin dernier un effondrement des cours des actions d’entreprises chinoises cotées aux bourses de Shanghai et de Shenzhen. Croyant bien faire, le gouvernement chinois a alors injecté l’équivalent de 144 milliards de dollars pour permettre aux actionnaires d’acheter ces actions et de faire remonter les cours. En Août, ils autorisent les fonds de pension à investir dans des portefeuilles d’action. Bref, le choc boursier est surtout provoqué par la perte de confiance des opérateurs du monde entier dans l’économie chinoise. Le ralentissement de la croissance se traduit dans la diminution des exportations et la hausse des importations. De dominante, la Chine ne deviendrait-elle pas dominée ?
Ce qui compte n’est pas la bourse
La Chine est la deuxième puissance économique mondiale, le deuxième exportateur du monde. C’est le principal partenaire de 75 nations et le premier importateur de produits manufacturés. Au cours des sept dernières années, sa croissance a représenté un tiers de la croissance mondiale. Mais le taux de croissance qui a été de 10% ou plus pendant dix ans est tombé à 5% et on prévoit encore un ralentissement. Comme la Russie, qui a profité de ses ventes de pétrole et de matières premières, la Chine a fait illusion. Maintenant nous voici en plein effondrement boursier dans toutes les places étroitement liées à l’économie chinoise.
La première conclusion est que la bourse et la finance ne sont pas toute l’économie. Ce n’est pas parce que la Chine a abandonné la planification pour le marché financier qu’elle est devenue capitaliste. Ce qui compte, c’est le stimulant profond de la croissance, à savoir les principes de l’économie libre et, en particulier, la propriété privée. Or, le modèle hybride chinois ne reconnaît l’entreprise que dans la mesure où elle est possédée ou contrôlée par l’État. La privatisation n’a jamais été réalisée, parce que les dirigeants communistes craignent les désordres sociaux et la perte de leur pouvoir.
Il y a eu de nombreux accidents boursiers dans les pays libres, souvent très violents. Mais ils se sont rapidement effacés en quelques semaines. Dans les crises les plus graves, la solidité des structures a permis de reprendre le chemin de la croissance, en dépit des maladresses des autorités politiques. Aujourd’hui, parce qu’elle n’a pas connu les vraies réformes structurelles, la Chine s’est discréditée aux yeux de nombreux opérateurs financiers. Le système hybride n’inspire plus confiance. La Chine attend sa libération. Comme la France…
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Sur le web.
Analyse pleine de lucidité économique. Merci.
Toutes les marées se caractérisent par flux et reflux.
Il en était ainsi de l’engouement de nos capitaux vers la Chine avec ses taux de croissance « de rattrapage », peu soutenables sur le long terme … Le pays-continent prend ainsi l’exacte mesure de ses SWOTs et l’importance des interdépendances économiques.
Espérons que des deux « bords » ILS et NOUS en ferons une utile courbe d’apprentissage ?
« Quand la Chine se libèrera » Malheureusement, je doute que cela arrive avant longtemps.
Curieux qu’un papier aussi mauvais , aussi peu renseigné , assénant des contrevérités stupéfiante ,puisse figurer en éditorial de contrepoints ! La c’est le nivellement par le bas …..
L’auteur a t’il jamais mis les pieds en Chine ? Sinon il saurait que c’est le pays qui compte le plus grand nombre de start up , la création d’entreprises privés étant l’une de plus vivaces .
L’erreur de lecture de la balance commerciale chinoise est criante . Celle ci reste positive et même largement en profitant à plein de la baisse des cours du pétrole et matière première . La part des produits manufacturés indiqués par l’auteur est en chute libre du fait d’un double effet de ciseau : localisation en Chine des usines étrangères travaillant pour le marché chinois cf l’automobile allemande , française ( en retard bien que précurseur a l’origine ) aéronautique …..et une montée en puissance de la technologie chinoise domestique cf China Mobile , BEIDOU dans la geolocalisation qui au passage à une grande longueur d’avance sur Galileo déjà 15 satellites en orbite et une commercialisation effective depuis 2012 ,technologie qui s’exporte cf le succès commercial sans précédent de Wechat basé sur une technologie propriétaire très en avance Exemple la nouvelle application Face Time qui fait un tabac …….etc etc
L’auteur doit revoir sa copie et la Chine n’a plus vocation à être l’usine du monde a bas coût d’ailleurs la plus part des entreprises chinoises du bas coût ont anticipés et délocaliser leurs productions dans de vrais pays à bas coûts ( certains pensent à la Pologne et l’Europe de l’est ! )
Il n’y a aura pas de privatisations des Poids lourds publiques de l’economie chinoise mais un mode de gouvernance ayant le mérite de mettre les dirigeants nommés en première ligne débarrassés de la tutelle des agences gouvernementales et l’auteur doit bien comprendre que le schéma n’est pas d’aller vers le libéralisme mais d’accompagner une mutation technologique sans précédent et de poursuivre le maillage des grandes infrastructures : route de la soie maritime , terrestre , passage Artique du NE etc
La bouse chinoise est un épiphénomène , un casino géant pour amuser le peuple d’ailleurs toutes les sociétés chinoises privés sérieuses vont se coter sur d’autres places financières !
Techniquement il n’y a pas eu de dévaluation du fait du termaillage ou les chinois sont champion du monde et les ajustements des cours des paiements des achats ou des ventes collent à la culotte du $
La très grande différence entre la Chine et la Russie est que son économie n’a jamais été basée sur une rente matière première comme le pétrole . La seule matière première est l’or dont elle est le premier producteur ( cf le dramatique accident de Tianjing dont les produits chimiques étaient destinés à la filière de production or )
La seule véritable interrogation concerne la pérennité d’un modèle paradoxal ou l’économie planifiée se renforce ( infrastructures , aéronautique , communications , spatial , constructions navales , armement ……et le libéralisme très ouvert se développe et pourtant coexistent …..
Tout à fait, les conséquences terribles d’un krach boursier de +25% en un an d’une bourse très déconnectée de l’économie du pays, c’est hors-sujet. Il y a des interrogations sur la manière dont les choses vont évoluer en Chine, mais d’une part c’est toujours aussi peu prévisible après les événements récents qu’avant, et d’autre part c’est toujours aussi incompréhensible pour un Occidental (à supposer que ça ne le soit pas pareillement pour un Oriental).
« Sinon il saurait que c’est le pays qui compte le plus grand nombre de start up  » un peu normal étant donné le nombre d’habitants (ils sont plus d’un milliards) mais la Chine reste derrière Israel et les USA en terme de strat up par nombre d’habitants. Ces deux pays ont bcp plus d’entreprenariat et d’innovation que la Chine.
« L’auteur doit revoir sa copie et la Chine n’a plus vocation à être l’usine du monde a bas coût  » Oui, tout le monde le sait la Chine est en train de passer vers un autre modèle qui est un modèle centré sur la consommation intérieure.
« une montée en puissance de la technologie chinoise domestique » qui n’aurait pas été possible sans le vol à grand échelle de la technologie des autres pays, la Chine est la grande spécialiste de l’espionnage indistruelle. S’il est normal que la technologie chinoise prenne de l’ampleur das l’avenir, je doute que la Chine devienne un phare de l’innovation (comme les USA) et ce pour des raisons culturelles.
« La bouse chinoise est un épiphénomène , un casino géant pour amuser le peuple » en effet, la bourse chinoise est un casino mais il n’est pas du tout là pour amuser le peuple. Bcp de chinois ont une protection sociale insuffisante alors pour s’assurer d’avoir une protection sociale complèmentaire, ils ont le choix entre investir dans l’immobilier ou investir en bourse mais ils ne font pas cela pour le fun mais pour avoir une protection sociale. Le pire s’est que bcp de gens se sont endettés pour investir en bourse.
« l’auteur doit bien comprendre que le schéma n’est pas d’aller vers le libéralisme  » Qu’il soit clair, je me doute bien que la Chine va pas devenir un paradis libérale, il n’y a aucune chance avec le PCC au pouvoir (et son règne risque fort de durer assez longtemps) mais j’ai l’impression en vous lisant que pour vous, cela n’est pas une question à se poser alors que moi, je pense que la Chine devrait se libéraliser (même si je sais qu’elle ne le fera pas), le modèle du capitalisme d’état chinois connait des ratés (c’est le cas de le dire). En fait, si ce modèle a réussi pour l’instant c’est qu’il se trouvait dans une phrase de « rattrage » (la Chine était un pays du tiers monde sous le maoisme), faire d’un pays l’usine du monde n’est pas très dur. Par contre, maintenant qu’il s’agit de faire passer la Chine à un nouveau modèle, c’est là que les choses se corsent. Un excellent article de Paul Krugman (parfois, cela lui arrive de dire des choses intelligentes): http://www.rtbf.be/info/article/detail_les-empereurs-nus-de-chine-paul-krugman?id=9045205
Merci Jacques de challenger les idées .
D’accord sur le nombre de start up par habitants .
Consomation ET équipement intérieur . Par ailleurs ne pas oublier l’autre branche du ciseau avec 1,5 trillion de $ cette année en investissement étrangers européens , américains Nord et sud et Caraïbes , Afrique ….
Vous me direz que c’est une autre façon de posséder la technologie par acquisitions ….
Pas d’accord avec vous sur votre remarque sur la technologie domestique : dans la construction navale la Chine développe par exemple une classe unique de navires polaires capables d’emprunter le passage NE Arctique sans brises glaces , BEIDU 2 a surpris la communauté scientifique avec ses nouveaux satellites géostationnaires , là où je vous rejoins c’est que les bons en avant technologiques concernent aujourd’hui certains secteurs comme la communication , les infrastructures ……maintenant la force des chinois est de travailler par objectifs : le goal est le leadership technologique mondial sur la période 2025/ 2049 , cela laisse du temps !
Il faut commencer à corriger les copies sur le social .
Les retraites ont été sérieusement augmentées ,la qualité de l’accès aux soins dépend de la typologie de la carrière certes mais avec une assez grande facilité a racheter des points et améliorer l’ordinaire des soins .
Un professeur retraité femme a 55 ans touche 3000yuans mensuels , c’est loin d’être ridicule .
Le vrai sujet et le coût des études en Chine car les meilleurs écoles ont un coût d’accès ( si vous êtes résident à Beijing et que votre fils est doué en maths se sera Shangai …) mais surtout l’ambition de beaucoup de familles de payer des études 3 em cycle à leurs chérubins en Australie , aux USA , à Londres et en france pour les moins brillants …la oui il faut économiser ce qui est dans la tradition chinoise depuis toujours . Pour l’immobilier relativisons , toute une génération à acheter à très bas coût ( 90/2000) les logements des parcs immobiliers municipaux ( 15000 € équivalent pour un trois pièces ) aujourd’hui beaucoup de pékinois ont deux appartements l’un loué avec un loyer couvrant le crédit et l’autre payé depuis belle lurette ,les occidentaux ont du mal à comprendre que la Chine est un pays de propriétaires ce qui est paradoxal .
Idem pour les paysans qui avaient des terres et qui peuvent aujourd’hui avec la réforme agraire mettre à bail ses terres et devenir rentiers en ville avec un double business ( taxi …..) a contrario le problème n’est pas réglé pour les paysans sans terres …
Je vais beaucoup en Chine , je discute beaucoup avec des chinois dans le business , les beaux arts ….je ne vois pas de signaux se dessiner d’un souhait de changement de système en dehors de quelques intellectuels assez inaudibles et totalement marginaux connus en Occident et ignorés localement .
Il y avait une sérieuse attente sur la prévarication du système et la sérieusement XI fait le ménage au delà des attentes . Il y a deux vrais chantiers qui peuvent avoir une influence populaire donc politique : l’ environnement et la qualité alimentaire , la on constate Une attente de vrais changements radicaux .
Le problème de la Chine c’est que les experts avaient trop tendance à l’idéaliser, à être admiratif devant ce pays, à prendre les chiffres donnés par le gouvernement comme vrai (alors que tout le monde sait qu’ils sont truqués).
Il ne faut pas tomber dans l’excès inverse qui consiste à dramatiser la situation chinoise, i faut trouver un juste milieu. La vérité c’est que la situation chinoise est loin d’être toute rose, ce pays est confronté à un certain nombre de difficultés mais elle n’est pas non plus catastrophique. Perso, je ne crois pas à un effondrement de la Chine
il n’y a pas de krach de la Chine, mais une correction qui ne déstabilisera pas les marchés internationaux vu la faible capitalisation relative de la Chine
Voici l’opinion d’Anatole Kaletsky, un consultant très écouté par les marchés:
http://www.project-syndicate.org/commentary/why-china-is-not-collapsing-by-anatole-kaletsky-2015-10