Par Éric Verhaeghe.
La création de « hotspots » devrait être confirmée par un sommet extraordinaire de l’Union mercredi prochain, le 23 septembre, dont le but est de finaliser la stratégie européenne vis-à -vis des réfugiés dans la crise des migrants. Le hotspot est la nouvelle marotte de l’Allemagne, soutenue par François Hollande. Il s’agit pourtant d’une aberration et même d’une folie que la France devrait combattre.
Qu’est-ce qu’un hotspot ?
La notion de hotspot constitue une superbe imposture sémantique, puisqu’un hotspot n’est rien d’autre qu’un camp de réfugiés. Mais il est évidemment difficile de dire aux opinions publiques : « êtes-vous d’accord pour que le pourtour méditerranéen se hérisse de camps de réfugiés ? » C’est pourtant bien ce projet ahurissant que l’Allemagne défend, et que la France promeut de son côté.
Les hotspots ne fermeront jamais
La folie du hotspot alias camp de réfugiés est évidemment qu’ils ne fermeront jamais, à moins que la guerre ne se termine en Syrie et que le pays soit de nouveau habitable. Ce qui est dit pour la Syrie vaut aussi pour les autres pays que fuient les migrants : l’Afghanistan, l’Érythrée, la Somalie. Une fois installés dans un camp où ils sont ravitaillés, soignés et protégés, mais enfermés, les migrants ont peu de chances de sortir. Autrement dit, hotspot un jour, hotspot toujours.
Le hotspot comme lieu de regroupement
Le hotspot a une première utilité fondamentale : il permet de regrouper tous les gens qui descendent d’un bateau ou tombent du camion une fois la frontière extérieure de l’Union passée. Aujourd’hui, lorsqu’une cargaison de 200 ou 300 migrants met pied à terre, seul un misérable poste de police permet de les prendre en charge. Les migrants sont alors livrés à eux-mêmes et peuvent reprendre la route.
Avec un hotspot, ils ont une destination connue : ils sont en état d’arrestation et placés dans un camp le temps que leur dossier soit traité. Voilà qui laisse beaucoup plus de temps aux autorités locales pour réagir. Quand on voit les images de la situation en Grèce, on comprend l’intérêt de cette formule :
Ajoutons qu’aujourd’hui les Grecs utilisent leurs îles comme « hotspots ». Ils prévoient d’établir un deuxième niveau de regroupement avec un camp à Lavrio, près d’Athènes, et un camp près de Salonique.
Cet « établissement » devrait permettre de fixer les flux dès leur entrée sur leur territoire de l’Union.
Le hotspot comme centre de tri
La deuxième utilité fondamentale du hotspot (une sorte de mitigeur à migrants en quelque sorte) est de permettre le tri des réfugiés qu’on veut, et de ceux qu’on ne veut pas. D’un côté, les migrants économiques, de l’autre les demandeurs d’asile en bonne et due forme. Dans tous les cas, les pays d’Europe pourront venir faire leur marché dans cette sorte de viviers d’esclaves : ce mois-ci je prendrais bien des ingénieurs informatiques syriens pour mes centres de recherche et quelques paysans pakistanais pour faire plaisir à l’industrie hôtelière. Mais non, ne me donnez pas de Somaliens, les clients n’étaient pas très contents de la dernière livraison.
Les hotspots coûteront 4 milliards d’euros
Le coût de cette politique est déjà connu. Il est de 4 milliards théoriques, correspondant aux sommes que l’Union s’était engagée à donner pour des camps de réfugiés à la frontière syrienne. Elle a financé jusqu’ici 50 millions d’euros. Plus que 3,95 milliards à trouver !
Si l’Union a pu, jusqu’ici, esquiver le juste prix de cette politique, c’est parce qu’elle n’était pas la principale organisatrice des hotspots, c’est-à -dire des camps. Dès lors que l’Union revendique la création de ces camps pour résoudre la crise migratoire, elle ne pourra évidemment se soustraire à ses obligations de nourrir, de soigner, d’éduquer tout ce petit monde parqué dans des villes artificielles et privé du droit de travailler.
On notera que notre Hollande national a plaidé la création de camps en Turquie :
« Il faut « faire en sorte que ceux qui sont en Turquie puissent y rester, puissent y travailler et puissent avoir tous les moyens pour pouvoir attendre que la situation en Syrie trouve une issue », a déclaré François Hollande devant la presse, après un bref entretien avec le chef du gouvernement italien Matteo Renzi. »
Bref, il faudrait que les Turcs fassent ce que nous ne faisons pas ! Et on va même leur donner de l’argent pour le faire !
Toujours le mot pour rire, notre président.
Les hotspots ou la division européenne des politiques migratoires
Ce qui n’est pas dit dans cette politique, c’est le calcul caché de l’Allemagne qui vieillit et a besoin d’immigrés pour alimenter ses lignes de production. Simplement, elle veut pouvoir les choisir à moindre frais et si possible en laissant le sale boulot aux autres. Cette logique s’appelle le hotspot. Elle consiste à parquer les nouveaux arrivants dans d’immenses camps organisés où le travail de tri sera facilité. Y seront choisis ceux qui sont bons pour aller travailler en Allemagne. Les autres seront abandonnés à leur sort, sachant qu’aucun camp de regroupement ne se trouvera sur le territoire allemand.
Avec les hotspots, la Méditerranée deviendra la poubelle de l’Allemagne
On comprend immédiatement les risques de cette politique qui consiste à ouvrir régulièrement les vannes d’entrée dans les camps et à filtrer soigneusement les vannes de sortie. Dans la mesure où les réservoirs humains se trouveront sur le pourtour méditerranéen (Turquie, mais aussi Grèce, Italie, et Espagne, et pourquoi pas la France…), une logique insidieuse va se mettre en place dans le nouvel ordre européen : au sud, les ennuis et la gestion des problèmes migratoires, au nord la prospérité et l’ordre.
La folie française
Une fois de plus, la France trahit les intérêts de la Méditerranée pour suivre une politique dictée par l’Allemagne. Le suivisme français nous condamne, à long terme, à nous appauvrir, à appauvrir notre hinterland naturel qu’est la Méditerranée, au profit d’un enrichissement des contrées septentrionales.
C’est tout simplement ahurissant.
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